II. LES ENJEUX DE LA POLITIQUE AGRICOLE : DÉVELOPPER LA PRODUCTION POUR AUGMENTER LES EXPORTATIONS ET SOUTENIR L'AGRICULTURE FAMILIALE

Sur la thématique agricole, deuxième axe de son déplacement au Brésil, la délégation a pu à Brasilia s'entretenir avec M. Daniel BALABAN, directeur du Programme alimentaire mondial et du Centre d'excellence contre la faim, avec le front parlementaire de l'agronégoce et le secrétariat à l'agriculture familiale du ministère du développement agraire et visiter un centre de recherche agronomique de l'Entreprise brésilienne de recherche agricole (Embrapa). Elle a également rencontré à Sao Paulo le mouvement des « sans-terre » et le mouvement des « affectés par les barrages » (MAB).

Ces différents entretiens lui ont donné un aperçu des principales problématiques liées à l'agriculture brésilienne, y compris vis-à-vis des grandes questions environnementales et des enjeux liés à la terre. Ils lui ont permis d'être concrètement confrontée à la dualité du modèle agricole et aux positions très antagonistes pouvant exister dans ce secteur, et de mieux comprendre le lien entre politiques de soutien à l'agriculture familiale et politiques sociales de lutte contre la pauvreté et la faim.

A. UNE PUISSANCE AGRICOLE MONDIALE

Les ressources naturelles du Brésil, sa superficie, ses conditions climatiques et ses efforts menés en matière de modernisation en font un des tout premiers producteurs agricoles du monde. Le Brésil est aujourd'hui le quatrième agro-exportateur mondial derrière les États-Unis, les Pays-Bas, l'Allemagne, et juste devant la France.

Le Brésil souhaite rester une puissance agricole mondiale. L'agriculture est un secteur clé de son économie : elle est responsable de l'excédent commercial brésilien (44 % des exportations) et le deuxième secteur pourvoyeur d'emplois.

L'objectif principal de la politique agricole est de créer les conditions financières permettant d'augmenter la production et d'améliorer la productivité, via des enveloppes de crédits bonifiés qui augmentent régulièrement.

Même s'il pratique des politiques de soutien à ses filières agricoles, le Brésil milite, en tant que gros exportateur agricole, en faveur d'une libéralisation accrue des échanges agricoles dans le cadre de l'OMC et d'une ouverture du marché agricole européen dans le cadre de la négociation UE-Mercosur.

La visite d'Embrapa Cerrados, située à proximité de Brasilia, a donné l'occasion à la délégation de mieux apprécier les efforts faits par le gouvernement brésilien pour améliorer la productivité agricole. Il s'agit d'une entreprise de recherche agronomique, placée sous la tutelle du ministère de l'agriculture, de l'élevage et de l'approvisionnement, dont les missions correspondent en France à celles de l'Institut national de recherche agronomique (INRA) et du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) réunis.

Cette unité spécialisée développe des recherches sur la production agricole dans l'écosystème brésilien de savanes (le cerrado ), dans lequel la production agricole s'est fortement développée depuis les années 1970. Situé dans la région centrale du Brésil, le cerrado recouvre 207 millions d'hectares. Comprenant 12 000 espèces de plantes, il est la deuxième source de biodiversité du Brésil.

Grâce à l'amélioration génétique des sols, la superficie agricole du cerrado a augmenté de 28 %, la productivité de 147 % et la production de céréales et d'oléagineux de 214 %, entre 1977 et 2013.

Le cerrado représente aujourd'hui 60 % de la production nationale de soja, 95 % pour le coton, 40 % pour les haricots, 50 % pour le maïs, 10 % pour le riz et 15 % pour le café. Pour le soja, la productivité était en 2013 de 3 600 kg/ha pour 27 millions d'hectares cultivés. 90 % du soja est issu de modifications génétiques (OGM). Embrapa cerrados développe un projet de soja sans OGM.

Le cerrado produit également 69 millions de bovins sur les 200 millions produits par le Brésil et comprend 54 millions d'hectares de prairies cultivées sur 101 millions d'hectares au niveau national.

Bien que le Brésil soit le plus grand exportateur de viande rouge, les dirigeants d'Embrapa cerrados, MM. Luis Carlos BALBINO et José Roberto RODRIGUES PERES, ont mis en avant la très faible production des pâturages : 0,5 tête de bétail par hectare contre 3 à 4 têtes/ha en France. L'objectif est de passer à 1,25 tête/ha.

L'Embrapa cerrados réalise aussi des recherches en faveur de l'agriculture familiale ou de l'agro-écologie dans le but de développer une agriculture durable d'un point de vue environnemental, notamment vis-à-vis des enjeux de lutte contre le déboisement et d'atténuation des émissions de gaz à effet de serre.

La délégation a ainsi pu visiter une expérimentation sur l'intégration agriculture-élevage-forêt, qui est une mesure phare pour le gouvernement en faveur de la durabilité de l'agriculture dans cette région. L'enjeu est de mettre en oeuvre des systèmes de production durables : trois récoltes par an avec trois cultures sur la même parcelle, sans labours, ce qui permet la couverture du sol sur toute l'année.

Les dirigeants d'Embrapa se sont félicités du partenariat très important que cette unité a développé avec les centres de recherche français et ont manifesté le regret que, pour des raisons budgétaires, elle reçoive moins de chercheurs français.

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