4. INDÉPENDANCE ET AVENIR

L'Union d'Etats Indépendants telle que présentée par le gouvernement monténégrin prend acte de la faiblesse actuelle de l'Etat Commun et de la nécessité d'une réforme de ses fondements. Rédigée dans une optique indépendantiste, elle trahit néanmoins la crainte monténégrine d'un retour à l'anonymat qu'occasionnerait la scission. Placé sur un plan d'égalité avec la Serbie, surreprésenté au regard de sa population au sein des institutions communes (la Serbie compte environ 7 millions d'habitants), le Monténégro bénéficie d'une exposition internationale inconnue jusqu'alors. Le maintien d'une diplomatie et d'une défense communes satisferaient à cet égard le désir monténégrin d'intégration de l'OTAN. Les principes de liberté de circulation et d'égalité des droits garantissent aux Monténégrins l'usage gracieux des infrastructures hospitalière et éducatives serbes ainsi qu'une représentation diplomatique théoriquement incompatible avec leur poids politique. Une indépendance stricte supposerait un statut totalement différent et la perte de ces avantages, alors que l'adhésion à la nationalité monténégrine, minoritaire, est principalement liée à des considérations pour l'essentiel pragmatiques. L'Union d'Etats Indépendants, ouverte à terme à la Macédoine, comme le forum des Parlements des Balkans (Albanie, Serbie, Macédoine, Croatie, Slovénie, Bosnie-Herzégovine, Monténégro, Roumanie, Bulgarie...), réuni à Cetinje à l'initiative de M. KRIVOKAPIC, apparaissent comme des tentatives de création d'une autre Union, de type européen, permettant de mutualiser les ressources, dans une optique véritablement yougonostalgique.

Le souhait de ne pas se heurter frontalement à l'Union Européenne apparaît très clair au sein d'un gouvernement majoritairement proeuropéen. Si les indicateurs semblent en net progrès (l'inflation a été ramenée de 8 % en 2003 à 3 % début 2005, le déficit budgétaire s'élève à 2,1 % du PIB 12 ( * ) ), la structure économique actuelle reste trop dépendante des marchés américain et russe et laisse encore une belle place aux commerces parallèles (le Monténégro est au carrefour des trafics du Sandjak et du Kosovo, le port de Bar assurant le transit maritime à destination de l'Europe Occidentale). 80 % des exportations monténégrines sont ainsi liées au combinat d'aluminium KAP, dont 98 % des ventes sont effectuées en direction du conglomérat américain GLENCOR basé en Suisse. Lourdement endetté, vieilli, le groupe, qui n'a pas bénéficié de l'augmentation récente du prix de l'aluminium, est en passe d'être racheté par une entité russe, au terme d'un appel d'offres international. M. Milo DJUKANOVIC a rappelé au groupe d'amitié qu'aucun candidat européen ne s'était manifesté. Le gouvernement monténégrin semble néanmoins peu enthousiaste à l'égard de l'entrée massive de capitaux russes dans son pays. Cependant, l'ultralibéralisation du pays permise par l'adaptation de son corpus législatif, vise tous les secteurs, notamment agricoles (vignobles et forêts), et attire ce type de financement. Le tourisme local (17 % du PIB) est également principalement tourné vers la Russie, tant au niveau des investisseurs que des visiteurs. La volonté affichée par le gouvernement de développer le secteur du tourisme sur le modèle croate (objectif 43 % du PIB en 2010) passe notamment par l'ouverture à l'Europe.

* 12 Le PIB s'élevait à 1,5 Milliard de dollars en 2003.

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