GROUPE INTERPARLEMENTAIRE

FRANCE - AFRIQUE DE L'OUEST

LE BÉNIN, UN ATOUT POUR LA SOUS-

RÉGION OUEST-AFRICAINE.

Compte rendu

du déplacement au Bénin

effectué par une délégation du groupe interparlementaire

du 17 au 23 avril 2005

Présenté par MM. Jacques LEGENDRE, président du groupe,

et Bernard PIRAS, président délégué pour le Bénin

Septembre 2005


LE GROUPE FRANCE -AFRIQUE DE L'OUEST DU SÉNAT

Ce groupe interparlementaire, présidé par M. Jacques Legendre (UMP-Nord), est, parmi les groupes interparlementaires du Sénat, l'un de ceux qui compte le plus grande nombre de pays (17) et de sénateurs membres (59).

Le groupe interparlementaire France-Afrique de l'Ouest poursuit traditionnellement un double objectif :

- regrouper au sein d'une structure stable, et sur la base d'une totale liberté d'adhésion, les sénateurs souhaitant établir et approfondir des liens d'amitié avec leurs collègues des dix-sept parlements d'Afrique de l'Ouest ;

- servir de relais et de vecteur privilégié des échanges d'informations et des contacts avec les pays correspondant, aussi bien sur le plan politique et institutionnel, que culturel, social ou économique.

Dans le droit fil de la révision du chapitre XXII de l'Instruction générale du Bureau du Sénat du 23 mars 1999, le groupe s'est vu confier des missions nouvelles :

- le renforcement du rôle culturel et économique de la France à l'étranger ;

- le soutien au développement de la coopération décentralisée et de la coopération interparlementaire ;

- la promotion du bicamérisme ;

- une écoute attentive des Français établis dans les pays correspondants.

A ce titre, une délégation du groupe se rend une fois par an dans l'un des pays amis et à l'inverse, il peut recevoir, deux fois par an, des collègues étrangers.

Pour son fonctionnement, le groupe interparlementaire se voit accorder des moyens lui permettant de faire face à ces missions, à la fois sur le plan juridique (l'institution de présidents délégués par pays au sein du groupe), sur le plan matériel et sur le plan humain (mise en place d'un secrétariat exécutif permanent assuré par un fonctionnaire du Sénat, désigné par les secrétaires généraux sur proposition du directeur du service des relations internationales).

Il rend compte, chaque année de son activité au Président et aux questeurs du Sénat, après la tenue d'une assemblée générale, au moins une fois par an.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Une délégation de six 1 ( * ) sénateurs membres du groupe interparlementaire France-Afrique de l'Ouest, conduite par son président, Jacques Legendre (UMP-Nord), a effectué du 17 au 23 avril 2005 un déplacement au Bénin.

Outre Jacques Legendre , la délégation, constituée sur la base du volontariat et de l'équilibre politique des groupes, était composée de :

Ø Bernard Piras (PS-Drôme), président délégué pour le Bénin,

Ø Gérard Roujas (PS-Haute-Garonne),

Ø Colette Melot (UMP-Seine et Marne),

Ø Michelle Demessine (CRC-Nord),

Ø Daniel Soulage (UC-UDF-Lot et Garonne).

Elle était accompagnée par un administrateur du Sénat, Mlle Rama Yade, secrétaire exécutif du groupe interparlementaire.

C'était la première fois que le groupe interparlementaire se déplaçait au Bénin sous la présidence de Jacques Legendre. Mais la majeure partie des membres de la délégation s'y étaient déjà rendus, soit à titre personnel comme Bernard Piras qui a passé sept années comme coopérant au « Dahomey », soit au titre de leurs activités professionnelles antérieures comme Jacques Legendre et Michelle Demessine. D'autres comme Colette Melot, qui en était à son troisième séjour au Bénin, ou Daniel Soulage entretenaient déjà, au titre de la coopération décentralisée entre leur département et certaines collectivités béninoises, des relations privilégiées avec le Bénin. Seul Gérard Roujas découvrait pour la première fois ce pays.

Ce déplacement était motivé par le souci des sénateurs de rencontrer leurs homologues, d'affirmer l'importance des relations d'amitié entre le Sénat français et l'Assemblée nationale du Bénin, et d'apprécier la manière dont le Bénin analysait son rôle dans la sous-région en crise du fait de l'instabilité politique de la Côte-d'Ivoire et du Togo.

Cette visite intervient à la suite de la visite officielle du président de la République français en décembre 1995, en marge du Sommet de la francophonie et de la ministre de la Défense, en décembre 2004, dans le cadre de « RECAMP IV ».

La délégation a (re)trouvé au Bénin une terre accueillante et chaleureuse, chargée d'histoire et de mémoire. Elle a également rencontré un peuple, tout entier tourné vers ses voisins de la sous-région dont les tourments ne le laissent pas insensible, comme en témoigne le dynamisme de la presse nationale et locale, dont la liberté de parole est l'une des plus importantes du continent noir. Elle a également pris la mesure des attentes très fortes qu'ont les Béninois vis-à-vis de la France, tant d'un point de vue économique que culturel. Dans une sous-région où la diplomatie britannique, américaine et chinoise est de plus en plus active, notre pays gagnerait à valoriser le partenariat privilégié qu'il entretient avec le Bénin.

La délégation adresse ses plus vifs remerciements aux éminentes personnalités et aux responsables béninois qui l'ont reçue, tant à Cotonou (qui était son lieu de résidence), à Porto-Novo, à Abomey et à Ouidah, ainsi qu'à tous ceux - trop nombreux pour être cités nommément - qui, à un titre ou à un autre, ont apporté leur concours à l'organisation et au déroulement de cette mission.

Sa gratitude va en particulier à notre ambassadeur, son épouse et à leurs collaborateurs ainsi qu'à l'ambassadeur du Bénin en France qui, tous, lui ont réservé un accueil très chaleureux et d'une grande efficacité.

*

PROGRAMME DÉTAILLÉ DE LA MISSION

(17-22 avril 2005)

JOURNEE

HEURE

ACTIVITE

Dimanche 17 avril

15H55

Vol pour Cotonou

21H15

Arrivée à Cotonou

Lundi 18 avril

8H00

Petit déjeuner de travail avec l'ambassadeur de France au Bénin

10H15

Accueil à Ouidah par le Maire, Pierre Badet et son conseil municipal - Présentation d'un projet de coopération décentralisée franco-allemand et d'un projet de coopération décentralisée entre Melun et Ouidah

11H30

Visite du centre de perfectionnement aux actions post-conflictuelles de déminage et de dépollution

13H00

Déjeuner à la Casa del Papa par la route des esclaves

16H00

Visite du fort de Ouidah

19H00

Réception à bord du TCD L'Orage, en compagnie de la communauté française de Cotonou et de l'Ambassadeur de France

Mardi 19 avril

7H30

Départ pour Abomey

9H30

Entretien avec le maire d'Abomey

12H00

Déjeuner au motel d'Abomey

14H00

Visite de l'usine d'égrenage de Bohicon avec le directeur de l'Agence française de développement

17H00

Retour à Cotonou

19H00

Réception à la résidence de France offerte par l'Ambassadeur en présence de la communauté française

Mercredi 20 avril

9H00

Départ pour Porto-novo

10H00

Audience avec le Président de l'Assemblée nationale et les membres du groupe interparlementaire Bénin-France

12H30

Déjeuner offert par l'Assemblée nationale

15H00

Visite de l'école du patrimoine africain (EPA)

16H00

Visite du centre de police judiciaire

18H30

Entretien à Cotonou avec le Ministre de l'enseignement technique et de la formation professionnelle assurant l'intérim du ministre des Affaires étrangères en déplacement

Jeudi 21 avril

9H30

Visite du Lycée Montaigne

10H30

Visite du Centre culturel français

13H00

Déjeuner offert avec les autorités béninoises

20H00

Dîner à la résidence offert par l'Ambassadeur

Vendredi 22 avril

8H30

Visite du Centre béninois des langues étrangères

11H00

Entretien avec les opérateurs économiques français

12H30

Audience avec le chef de l'État

15H00

Visite du laboratoire d'analyse virale Sida Esther

17H30

Conférence de presse au centre culturel français

22H30

Départ pour l'aéroport

I. LE BÉNIN ET LA FRANCE, LES RESSORTS D'UN PARTENARIAT PRIVILÉGIÉ

A. LE BÉNIN, UN PARTENAIRE TRADITIONNEL DE LA FRANCE

1. Une histoire commune...

a) Du royaume du Dahomey à la colonisation française

Le Bénin, autrefois Dahomey , est le siège de civilisations anciennes et brillantes qui furent bâties autour de royaumes centrés sur des cités-Etats. Son histoire correspond à celle de ses différents royaumes : royaumes d'Allada, d'Abomey, de Porto-Novo, de Kétou, de Tchabê, de Nikki, de Kouandé et de Djougou fondés pour le plus récent au siècle dernier.

Vers 1610, le royaume d'Abomey est créé .  En 1747, il s'empare de Ouidah, haut lieu de la Côte des esclaves, que se disputent les Anglais, les Portugais, les Français et les Hollandais depuis 1440, et où tous construisent des forts, c'est-à-dire des locaux défensifs destinés à protéger les privilèges et les marchandises débarquées des navires au profit des compagnies de fermage.

A Ouidah, à laquelle la délégation sénatoriale a tenu à consacrer la première journée de sa visite béninoise le 18 avril, les sénateurs membres ont eu l'occasion, en compagnie du Maire, Pierre Badet ainsi que l'ensemble de conseil municipal, de mesurer la charge historique qui pèse dans cette ville, encore très marquée par la mémoire de la l'esclavage. Ainsi, le fort portugais de Ouidah, érigé en 1721 après celui des Français et des Anglais, reste le seul vestige important de la traite au fronton duquel figure l'inscription de « Zoja gué » (le feu, la flamme débarque).

Au XVIII e siècle, les guerres entre le royaume du Dahomey et le royaume Yorouba d'Oyo se multiplient. Les Fon sont réduits à payer à celui-ci un tribut jusqu'au début du XIX e siècle, tout en obtenant le monopole du trafic des esclaves.

De 1818 à 1858, durant son règne de quarante années, le roi Ghezo arrache le Dahomey au joug d'Oyo mais sa volonté expansionniste se heurte à la résistance d'Abeokuta. Il réforme l'administration et fonde la richesse du pays, après l'abolition de l'esclavage, sur l'agriculture.

En 1863, le premier protectorat français est établi avec le roi Toffa de Porto-Novo qui recherche de l'aide face aux prétentions du roi d'Abomey et aux attaques des Anglais implantés à Lagos. La même année, Glélé (1858-1889), roi d'Abomey, autorise les Français à s'établir à Cotonou. En 1882 , le souverain du royaume de Porto-Novo signe un nouvel accord de protectorat avec la France qui charge un « résident français » d'assister le roi.

En 1884, le Dahomey est colonisé par la France . Glélé cédera ensuite Cotonou aux Français qui y installent des maisons de commerce. En 1892, le fils de Glélé, Behanzin, déterminé à ne pas laisser se développer l'influence française, ne peut tenir tête au corps expéditionnaire français. Un décret établit la dénomination des nouveaux territoires « colonie du Dahomey et ses dépendance s » avec l'octroi d'une autonomie que ce territoire gardera jusqu'au 18 octobre 1904, où il est incorporé à l'Afrique Occidentale Française (A.O.F.). L'héritage colonial de la France est encore inscrit sur les murs de Porto-Novo, l'actuelle capitale administrative, située en bordure de la lagune, en particulier dans les quartiers où sont actuellement installées l'Assemblée nationale (qui abritait auparavant le Palais des gouverneurs), la Haute cour de justice et la cathédrale de la ville. Jusqu'en 1947, ce pays comptera vingt-six gouverneurs, ce qui traduit le caractère turbulent du sud de la colonie, prompt à dénoncer l'administration coloniale.

La délégation sénatoriale s'est rendue à Abomey, accueillie par son Maire, Blaise Glélé : après une visite du Palais des rois, elle a eu l'honneur d'être reçue par les deux héritiers actuels de la royauté, au cours d'un entretien ponctuée de récits historiques qui témoignent, aujourd'hui encore, de la vivacité de la mémoire glorieuse d'Abomey dans l'histoire du Bénin.

b) De l'indépendance à nos jours

Le 4 décembre 1958, la République du Bénin est proclamée et le 11 août 1960, le pays devient indépendant . Bien que Cotonou soit le centre économique du pays, Porto-Novo devient la capitale.

La grande instabilité politique qui règne dans le pays entre 1960 et 1972 est due aux luttes de pouvoir et aux rivalités entre différents groupes ethniques organisés autour de leurs leaders régionaux (MM. Justin T. Ahomadegbe, Sourou Migan Apithy, Hubert Maga). Plusieurs coups d'état militaires ont été perpétrés durant cette période.

Entre 1972 et 1989 , dans le contexte de la rivalité Est-Ouest, s'instaure au Bénin un régime révolutionnaire fondé sur l'idéologie marxiste-léniniste .

En décembre 1989, après dix-sept ans de régime marxiste, le président Kérékou accepte une conférence d'autocritique qui sera convoquée du 19 au 28 février 1990 sous la présidence de Mgr de Souza, archevêque de Cotonou, l'objectif étant d'organiser une large concertation nationale et de rechercher les voies et moyens pour sortir de cette crise. L'année 1990 a donc constitué un tournant décisif dans l'histoire politique du Bénin.

Ce forum, appelé Conférence Nationale des Forces Vives , la toute première du genre en Afrique, a réuni les différents courants d'opinion, les associations de développement des différentes localités du pays, les groupements professionnels et corps de métiers et les communautés religieuses. A l'issue de dix jours de débats, la Conférence a abouti à d'importantes résolutions.

Elle a ainsi décidé d'instaurer une démocratie libérale fondée sur le respect des libertés fondamentales de l'homme, d'édifier un état de droit, d'adopter les principes d'une économie libérale. Elle a également désigné un Premier Ministre, Nicéphore Soglo, et un Parlement de transition, le Haut Conseil de la République. Un calendrier électoral a été élaboré et des textes législatifs et réglementaires adoptés.

La Constitution, adoptée en décembre 1990, instaure, par conséquent, une République démocratique .

Les premières élections présidentielles de cette ère du renouveau démocratique ont vu l'accession à la présidence de la République de Nicéphore Soglo en 1991. En 1996, Mathieu Kérékou revient au pouvoir avant d'être reconfirmé en 2001 puis en 2003 ( annexe 2 ).

Marquant la mise en oeuvre effective du processus de décentralisation, les premières élections locales se sont déroulées en décembre 2002. Elles ont montré la stabilité de l'électorat, Cotonou revenant, toutefois, à l'ancien Président Soglo.

La transition démocratique amorcée en 1990 est donc aujourd'hui achevée : les institutions fonctionnent de manière satisfaisante et la vie politique est marquée par la multiplication des partis (plus d'une centaine). Les libertés individuelles et collectives ne connaissent pas d'atteintes sérieuses et la presse jouit d'une liberté d'expression totale ( annexe 3 ).

2. ...au service d'un partenariat privilégié

a) Le resserrement des relations franco-béninoises depuis les années 1990

Les liens historiques entre la France et le Bénin se sont traduits par une coopération politique entre les deux pays que consacre une série d'accords, de traités, de conventions et protocoles conclus depuis la rupture des liens coloniaux.

Cette coopération trouve encore l'occasion d'être régulièrement réaffirmée, à l'occasion des visites officielles comme celle que le président de la République française Jacques Chirac a effectuée au Bénin en décembre 1995, en marge du Sommet de la francophonie. Plus récemment, en décembre 2004, Michèle Alliot-Marie, ministre de la Défense, s'est rendue au Bénin dans le cadre de « RECAMP IV », concept développé par la France au milieu des années 1990, dans le but d'aider les pays africains qui le souhaitent à mener eux-mêmes des opérations de maintien de la paix sur leur continent ( annexe 4 ).

La délégation sénatoriale a eu l'opportunité de vérifier sur place l'étendue de cette coopération politique et militaire, à travers trois visites : l'école nationale des sous-officiers de Ouidah, le centre de perfectionnement aux actions post-conflictuelles de déminage et de dépollution de Ouidah et le centre de perfectionnement de police judiciaire de Porto-Novo.

(1) L'école nationale des sous-officiers de Ouidah

Guidée par le commandant Ferrus et le lieutenant-colonel Patrice Ehou Madegnan, la délégation sénatoriale a consacré une partie importante de son déplacement à Ouidah à la visite de l'école nationale des sous-officiers.

L'école nationale des sous-officiers a pour objet de former, au minimum 1.500 personnes par an : sous-officiers, douaniers, gendarmes, forestiers et plus généralement, appelés recrutés sur concours ou par le biais du régime de conscription.

La présence d'une quinzaine d'officiers, sous-officiers et coopérants français démontre l'étroitesse de la coopération militaire entre nos deux pays.

(2) Le Centre de perfectionnement aux actions post-conflictuelles de déminage et de dépollution (CPADD) de Ouidah

L'école nationale des sous-officiers de Ouidah abrite également le Centre de perfectionnement aux actions post-conflictuelles de déminage et de pollution (CPADD).

En février 2001, le Mali organisait à Bamako un séminaire sur l'universalité et la mise en oeuvre de la Convention d'Ottawa en Afrique qui vise l'élimination complète des mines antipersonnel, auquel ont participé quarante-cinq Etats africains. Le Bénin, vierge de toute présence de mines sur son territoire, est aussi un exemple dans la lutte contre les mines par la mise en oeuvre d'un détachement spécialisé dans le déminage et la dépollution.

Avec le soutien de la France, le Bénin a souhaité la création d'un centre de formation au déminage selon le principe des écoles nationales à vocation régionale (ENVR). Ce projet débouchera à peine deux ans plus tard, le 25 avril 2003, sur la première école de déminage de l'Afrique subsaharienne : le CPADD.

Le CPADD a vocation à accueillir des stagiaires de tous les pays d'Afrique francophone, anglophone et lusophone . Il apparaît que les armées ont besoin de cadres qui sauront organiser des chantiers de déminage, relayant et démultipliant ainsi le savoir-faire qui leur aura été enseigné. Le CPADD a également pour objectif de développer une formule pédagogique souple qui répond à l'exigence du métier de « démineur » mais aussi de s'adapter aux réalités de la formation sur le continent africain. Ici, il s'agit d'exporter ce savoir-faire complexe à la délicatesse tactile et de l'instruire parfaitement aux cadres militaires africains.

La délégation sénatoriale a apprécié la qualité des installations couvrant une superficie de 1.200 m 2 et ayant une capacité d'accueil d'une vingtaine de stagiaires. Quant à la plate-forme pédagogique, elle est constituée d'une salle de cour de 113 m 2 , d'une salle d'exposition et de manipulation.  Le centre possède des collections en matériel d'instruction et d'entraînement d'excellentes qualités. En outre, les autorités béninoises ont mis à l'entière disposition du CPADD un terrain d'exercice disposant d'un polygone d'explosifs. De tels équipements sont nécessaires étant donné l'ampleur des risques encourus et le coût de chaque opération de déminage (2.500 dollars en moyenne). Les résultats obtenus sont probants, puisque, sur 140 stagiaires formés depuis l'installation du CPADD, 85 % ont obtenu le diplôme de formateur.

Le CPADD peut aujourd'hui s'enorgueillir d'un outil de formation de haute tenue au bénéfice du continent africain.

Toutefois, la délégation sénatoriale souhaiterait relayer les inquiétudes exprimées par les responsables français du CPADD :

- le budget de fonctionnement du centre de 1,5 million d'euros ne permet pas, à l'heure actuelle, de couvrir le coût important des outils pédagogiques, qui incluent le voyage, l'hébergement et la formation elle-même, soit 2.500 à 3.000 dollars par stagiaire pour une durée de dix semaines. En conséquence, le CPADD ne dispose pas de moyens budgétaires suffisants pour former un nombre de stagiaires à la hauteur des besoins répertoriés sur le continent africain ;

- l'utilité des formations délivrées n'est, paradoxalement, pas encore avérée sur le terrain puisque, de retour dans leur pays d'origine, les anciens stagiaires ne transmettent ni n'entretiennent leur savoir-faire, ce qui entraîne une déperdition rapide des connaissances acquises.

(3) Le centre de perfectionnement de police judiciaire (CPPJ) de Porto-Novo

Ouvert depuis le 12 novembre 1999 , le Centre de perfectionnement de Police judiciaire (CPPJ) à vocation régionale est implanté dans l'enceinte de l'Ecole de Gendarmerie à Port-Novo, à 30 kilomètres de Cotonou.

Ses moyens de fonctionnement sont attribués par la coopération militaire française, soit trois officiers et sous-officiers de la gendarmerie nationale française affectés pour deux ans au sein du CPPJ : le chef d'escadron Claude Murs, chef de projet formation et directeur des études du CPPJ, les adjudants et officiers de police judiciaire, Gilles Knaff et Daniel Dufour. Deux gradés de la gendarmerie béninoise participent également à l'encadrement et à la formation des stagiaires.

Le CPPJ a pour objectif d'approfondir les connaissances des officiers de police judiciaire béninois dans trois domaines : la direction des enquêtes judiciaires, les techniques modernes d'investigation criminelles et l'information sur les stupéfiants . Ainsi, six stages accueillant chacun dix-huit stagiaires sont organisés chaque année. Depuis son ouverture, il accueilli 33 promotions, formé 596 stagiaires dont 181 gendarmes, 11 policiers et un douanier béninois . Il a également formé 405 stagiaires ressortissants d'une vingtaine de pays différents, diversité qui témoigne de la vocation régionale du CPPJ.

En vertu de la convention de financement du 10 novembre 1998, le CPPJ rémunère chacun de ses stagiaires à hauteur de 240.000 FCFA (soit 366 euros) par mois pour un coût de formation entre 6.585 et 8.230 euros.

Si la délégation sénatoriale a remarqué, en compagnie de Claude Murs et de ses collaborateurs, la qualité convenable des installations, elle a été sensibilisée à la nécessité d'affecter des moyens supplémentaires à l'entretien des matériels disponibles .

Elle tient également à attirer l'attention sur :

- la durée jugée inadéquate du séjour des coopérants, actuellement limitée à deux années, alors que les programmes durent trois ans;

- l'absence d'informations sur le devenir des stagiaires issus du CPPJ, notamment lorsqu'ils sont originaires d'Etats étrangers ;

- l'insuffisance du contrôle des conditions d'accès aux stages, afin de les réserver, en priorité, aux jeunes.

La délégation sénatoriale estime qu'il conviendrait de répondre à ces besoins modestes mais indispensables aux projets d'amélioration et à la qualité des formations délivrées, si l'on veut que le CPPJ continue à participer au rayonnement de la coopération française au Bénin.

b) Les espoirs de la coopération décentralisée
(1) L'état de la coopération décentralisée entre la France et le Bénin

Le Bénin a organisé entre décembre 2002 et janvier 2003 ses premières élections communales et municipales , le pouvoir étant jusque là placé entre les mains des préfets ou des chefs de circonscription urbaine pour les grandes villes, nommés par l'exécutif. Les 77 nouvelles communes ainsi créées, sont dirigées par des maires, choisis parmi les conseillers municipaux, élus au suffrage universel direct et au scrutin de liste majoritaire.


État de la décentralisation au Bénin

La commune

Seul niveau de décentralisation, la commune est dotée d'une large autonomie, de la personnalité juridique et de l'autonomie financière. Elle est dirigée par un conseil élu au suffrage universel ayant à sa tête un maire élu en son sein, assisté d'adjoints.

La commune est subdivisée en arrondissements eux-mêmes comprenant des villages ou quartiers de villes. Ces deux subdivisions sont sans personnalité juridique ni autonomie financière. Elles ont à leur tête un conseil désigné démocratiquement et dirigé par un chef de village ou de quartier de ville. La commune est assujettie au contrôle de tutelle a priori et a posteriori exercé par le préfet. Certaines communes bénéficient d'un statut particulier du fait de leur importance. Elles possèdent ainsi des compétences élargies et des charges subséquentes. Le Bénin compte à l'heure actuelle trois communes à statut particulier : Cotonou, Parakou et Porto-Novo.

Trois grands domaines font l'objet d'une répartition de compétences entre l'Etat et les communes. Les domaines dans lesquels les communes reçoivent des compétences précises sont les suivants : le développement économique, l'aménagement, l'habitat et l'urbanisme ; les infrastructures, les équipements et les transports, l'environnement, l'hygiène et la salubrité ; l'enseignement maternel et primaire ; la santé, l'action sociale et culturelle

Les communes à statut particulier reçoivent des compétences supplémentaires en matière d'enseignement et de formation professionnelle, de transport et de circulation, de sécurité et de communication.

Le département

Seul niveau de déconcentration, le département est dirigé par le préfet, représentant du Gouvernement et de chacun de ses ministres. Le territoire national est divisé en 12 départements. L'autorité préfectorale assure des fonctions d'assistance et de conseil aux communes, de soutien et d'harmonisation de leurs actions avec celles de l'Etat, de contrôle de légalité des actes pris par le Conseil communal et le Maire. Autorité de tutelle, le préfet exerce un contrôle a priori sur les dix actes les plus importants de la vie communale, effectuant par ailleurs des contrôles a posteriori sur l'ensemble des actes de la commune.

Toutefois, plusieurs questions devront être résolues pour achever l'édifice institutionnel né de la Conférence des forces vives de la nation.

Il s'agit en premier lieu de régler la question des moyens financiers à allouer aux communes ainsi que celle relative au transfert de compétences.

Par ailleurs, l'aboutissement du processus de décentralisation ne pourra se faire qu'avec le développement des économies locales et la mise en place d'instruments permettant aux communes de se développer.

Source : Ambassade de France au Bénin

La coopération décentralisée désigne la mise en place d'un partenariat contractualisé entre une collectivité territoriale française et une autorité infra-étatique étrangère de droit public possédant une assise locale.

En appui à la coopération intergouvernementale, une vingtaine de partenariats de coopération décentralisée franco-béninois ont été conclus, dont :

• Evreux avec Djougou,

• Seremange-Erzange avec Natitingou,

• Créteil avec Cotonou,

• Orléans avec Parakou,

• La région de Champagne-Ardenne avec le Sud-Borgou,

• Mamers avec Sè (Mono),

• Lorient avec Porto-Novo,

• Cergy-Pontoise avec Porto-Novo,

• Epinal avec Porto-Novo,

• Lyon avec Porto-Novo,

• Echirolles avec Honhoué (S/P de Houéyogbé / Mono),

• Département des Hauts-de-Seine avec le Département du Mono,

• La Région de Picardie avec le Département des Collines (ancien Zou Nord (S/P de Ouessè, Dassa-Zoumè, Savé et Savalou)),

• Melun avec Ouidah,

• La Vendée avec Abomey, Savé et Kilibo.

La plupart sont réunis au sein du groupe pays Bénin de Cités Unies de France 2 ( * ) . Les cinq principales circonscriptions urbaines béninoises sont en relation de coopération avec des villes françaises. Elles bénéficient chacune d'une démarche d'appui à la municipalité grâce à la mise en place d'outils de planification et de fiscalité et à des programmes de formation des cadres municipaux.

L'intervention des collectivités locales françaises au Bénin est marquée par une assez grande homogénéité en ce qui concerne leur démarche de coopération. Tant en milieu rural qu'urbain, la coopération décentralisée se fonde sur une approche globale du milieu partenaire, par le biais de programmes pluriannuels de développement local. Il s'agit, en effet, de renforcer les capacités humaines et techniques des collectivités partenaires et de promouvoir des actions d'amélioration du cadre de vie des populations.

La délégation sénatoriale, dont les membres étaient tous des élus locaux motivés par la volonté d'entretenir ou de créer des relations entre leur département et les collectivités béninoises, a eu l'occasion de vérifier le dynamisme de la coopération décentralisée au Bénin, devenue incontournable depuis les élections locales municipales de 2003.

(2) Un cas de coopération décentralisée exemplaire : Melun et Ouidah

Le cas du partenariat entre Melun, où notre collègue Colette Melot est adjointe au Maire, et Ouidah est en ce sens exemplaire ( annexe 5 ).

Ville historique, Ouidah est située à une quarantaine de kilomètres de Cotonou, dans le département de l'Atlantique, et compte environ 85.000 habitants. Sa proximité avec l'Océan Atlantique a favorisé l'arrivée et le séjour, dès le XVIIème siècle, de nombreuses colonies étrangères d'origine portugaise, hollandaise, anglaise, danoise et française.

Aujourd'hui, Ouidah tente de développer son économie : l'agriculture connaît un nouvel essor grâce à la production de manioc, de tomates, d'ananas, et de bananes. Ces produits sont écoulés en partie sur les deux grands marchés de la ville : Kpassé et Zobé. L'élevage des boeufs s'intensifie dans les vastes plantations de palmiers à huile et dans les cocoteraies. La pêche se pratique sur le lac Ahémé et dans les eaux lagunaires. L'extraction du sel connaît un certain essor surtout avec la campagne de l'iode qui encourage de plus en plus les producteurs. L'industrie est réduite à deux usines : la Sobeta pour la production des allumettes et de tabac et l'usine textile d'Ahozon. Mais une zone industrielle vient d'être ouverte sur 300 hectares environ à quelques kilomètres de Ouidah.

C'est en février 2002 que le Conseil municipal de Melun a adopté le principe de coopération décentralisée avec Ouidah . Il a renouvelé ce partenariat le 3 février dernier à travers l'adoption d'un plan pluriannuel d'actions (2005 à 2007). Cette coopération se distingue, par la nature de son projet, des autres jumelages qu'elle a établis avec d'autres villes, notamment européennes.

Deux principes caractérisent cette coopération :

- le premier consacre la notion de réciprocité , afin d'exclure toute idée d'infériorité des populations d'un pays en voie de développement ;

- le second consiste à favoriser les transferts de savoir-faire, de compétences et de méthodes plutôt que des déblocages systématiques de moyens financiers par Melun.

Il ne s'agit donc pas de faire à la place des Ouidahniers mais de les aider à trouver les moyens de faire par eux-mêmes.

La délégation sénatoriale a vérifié l'application de ces principes lors de sa rencontre avec les élus de Ouidah. Le député-maire, Pierre Badet , n'a pas manqué de revendiquer, au nom de ses administrés « connus pour leur travail et leur curiosité », une « coopération à visage humain » et plus visible. Il a sensibilisé la délégation sur la nécessité d'encourager ce type de partenariat, qu'il soit bilatéral ou multilatéral. Des élus municipaux ont insisté sur la nécessité de concilier coopération décentralisée et intégration africaine , dans un effort commun.

Michelle Demessine a également fait valoir la présence d'une importante communauté béninoise à Lille , dont elle est élue. Elle a tenu à transmettre les amitiés de maire de Villeneuve Dascq , Jean-Michel Stievenard, qui entretient également des actions de coopération décentralisée avec Ouidah.

B. DE FORTES ATTENTES VIS-A-VIS DE LA FRANCE

1. Des échanges économiques à relancer

a) Les échanges commerciaux entre la France et le Bénin en 2004 : une régression confirmée

La France est l'un des tous premiers fournisseurs du Bénin. Elle y est aussi le premier investisseur étranger. En 2004, les échanges commerciaux de la France avec le Bénin, huitième client de la France en zone franc et onzième client en Afrique subsaharienne , ont dégagé un excédent de 187,8 millions d'euros en faveur de la France.

Toutefois, à l'image des exportations françaises vers l'ensemble de l'Afrique subsaharienne qui ne représentent plus que 2,2 % des ventes françaises à l'étranger, le Bénin, qui absorbe 0,1 % des exportations françaises en 2004, occupe une place modeste dans le commerce extérieur de la France, en n'étant placé qu'au 90 ème (sur 228) des clients de la France dans le monde . De plus, depuis quatre ans, les exportations françaises vers le Bénin régressent. Elles ont même baissé de 8,4% entre 2003 et 2004.

Parallèlement, alors que les exportations béninoises vers la France, n'ont jamais dépassé 6 millions d'euros depuis dix ans, elles ont chuté de près de 10 % entre 2003 et 2004, reléguant le Bénin au 171 e rang de nos fournisseurs .

b) La France, encore premier contributeur bilatéral du Bénin

Depuis 1989, le Bénin s'est engagé, avec succès, dans un programme d'ajustement structurel pour lequel il a reçu un soutien massif de la communauté des bailleurs de fonds. Ce programme lui a permis de rétablir les grands équilibres économiques et financiers et d'être considéré comme un « bon élève » des institutions de Bretton Woods. En revanche, la mise en oeuvre des réformes structurelles a connu des retards, le processus de désengagement de l'Etat du secteur productif étant lent et difficile, notamment dans les secteurs du coton, de l'énergie et de l'eau.

Devant la difficulté de concilier développement économique et allégement de la dette, le FMI et la Banque mondiale ont lancé, au milieu des années quatre-ving-dix, l'initiative «renforcée » en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE) afin d'accorder aux pays éligibles, comme le Bénin, une facilité pour la réduction de la pauvreté et la croissance pendant une période de trois ans. La croissance économique soutenue du Bénin (5,25 % en moyenne) pendant la période 1995-2003 lui a permis d'atteindre le point d'achèvement de l'initiative PPTE, avec l'adoption du Document stratégique de réduction de la pauvreté, le DSRP, au mois de mars 2003.

La France a adopté le DSRP comme point de référence de son appui . Sur les quatre axes stratégiques choisis par le Bénin, deux correspondent directement à l'intervention de la coopération française : d'une part, l'amélioration de l'accès à l'éducation de base, à l'alphabétisation, aux soins de santé primaire et à l'eau potable, la lutte contre le VIH/SIDA et le paludisme ; d'autre part, la lutte contre la corruption, la consolidation de la démocratie et la décentralisation.

Même réduits à ces deux axes stratégiques, ces objectifs restent ambitieux. Ils correspondent aux principaux « Objectifs de développement du Millénaire », définis par la Banque mondiale. A ces engagements communs s'ajoutent ceux en faveur de la régionalisation, au sein de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) avec le soutien de la France dans le cadre de la zone franc. Ainsi, quelques jours avant l'arrivée de la délégation sénatoriale sur le sol béninois, s'est tenue à Cotonou le 7 avril 2005, la réunion bi-annuelle des ministres des Finances de la zone franc , sous la coprésidence de Thierry Breton, ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, et de Xavier Darcos, alors ministre délégué à la Coopération, au Développement et à la Francophonie. Cette réunion, qui rassemblait les ministres des Finances des quinze pays membres de la zone franc, les gouverneurs des Banques centrales et les présidents des institutions régionales des Etats membres de la zone franc, avait porté sur la micro-finance et les transferts financiers des migrants, la convergence des politiques économiques des pays de la zone, le secteur bancaire et le financement de l'économie, l'agenda 2005 en matière de développement ainsi que la préparation des assemblées annuelles du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale.

Sur le plan financier, en 2004, le montant de l'encours des projets de coopération a été de 15,6 millions d'euros, portant sur quinze projets financés sur Fonds de Solidarité Prioritaire (FSP). Le nombre d'assistants techniques français dans ce pays est de trente-cinq. Si l'on inclut la contribution française au Fonds européen de développement (FED), l'effort français global annuel en faveur du Bénin s'est élevé à 32,7 millions d'euros , ce qui fait de la France le premier contributeur bilatéral au Bénin.

Il convient par ailleurs de noter que les interventions de l'Agence Française de Développement (AFD) au Bénin ont porté en 2003 sur un montant de 6,4 millions d'euros (en baisse constante depuis 1999), que ce soit à titre de prêts ou de subventions.


L'activité de l'Agence Française de Développement (AFD) au Bénin

Le Groupe de l'AFD est habilité à intervenir au Bénin depuis l'indépendance de ce pays. Le suivi des projets est assuré à partir de l'agence de Cotonou. Sur cinq ans (1999-2003), la moyenne des engagements annuels du groupe se situe à 6,2 millions d'euros et celle des versements a atteint 10,5 millions d'euros. Sur cette période, les principaux secteurs bénéficiaires des financements du groupe AFD ont été les secteurs du développement rural (38 %) et du développement urbain (également 38 %).

Engagements et versements financiers de l'AFD au Bénin (en millions d'euros)

1999

2000

2001

2002

2003

Volume d'engagements

21,6

1,1

1,3

1,9

5

Versements

10,4

12,4

13,7

9,5

6,4

Le Bénin a uniquement bénéficié, ces cinq dernières années, de financements sur projets. Ces financements ont représenté 81 % du total des engagements du Groupe au Bénin. Le guichet «secteur privé » en a représenté quant à lui 19 %.

A moyen terme, les interventions de l'AFD au Bénin concerneront :

- le secteur agricole : le désengagement de l'Etat des activités productives reste un enjeu majeur. Dans cette optique, l'AFD poursuivra son appui au secteur agricole, en particulier à la filière coton, en mettant l'accent sur l'organisation professionnelle des producteurs afin que ces derniers acquièrent une meilleure maîtrise de leur environnement technique et économique et par la promotion d'exploitations familiales performantes par le conseil en gestion, la recherche développement et la diversification dans des filières économiques rentables ;

- l'amélioration de l'accès à l'eau potable des populations rurales : dans le cadre du budget-programme de la Direction de l'hydraulique, le financement d'un nouveau projet d'hydraulique rurale, pourrait être engagé en cofinancement avec les coopérations danoise et allemande ;

- l'appui à la décentralisation : il pourrait concerner, au niveau rural, l'appui à la gestion des ressources naturelles et du foncier par les communes et, au niveau urbain la mise en place d'un fonds de développement municipal avec la Banque mondiale ;

- l'amélioration de l'enseignement de base : le mauvais classement IDH du Bénin est essentiellement dû aux mauvaises performances de son système éducatif. Une intervention dans le secteur de l'enseignement primaire paraît donc indispensable et prendrait la forme d'une contribution à un programme défini dans le cadre de l'initiative « fast-track » à laquelle le Bénin aura accédé ;

- les infrastructures de base : l'AFD pourrait de nouveau intervenir dans le secteur des infrastructures de base (eau, énergie, télécommunications), sous forme de prêts dans le cadre d'une éventuelle accélération des privatisations des entreprises publiques.

Source : AFD

Au titre des interventions de l'AFD, la filière coton occupe une place importante, dont la délégation a pu prendre la mesure, lors d'une visite à l'usine d'égrenage de Bohicon , en compagnie de Michel Missikpodé, député et président du groupe d'amitié Bénin-France et avec l'expertise de Didier Robert, directeur de l'AFD au Bénin et Ernest Djossou, directeur régional d'exploitation au Ministère de l'agriculture, de l'élevage et de la pêche.

Au Bénin, le secteur primaire (36 % du PIB) est dominé par la culture du coton qui constitue le coeur de l'économie béninoise. La filière cotonnière contribue à raison de 13 % du PIB du pays. Elle représente entre 50 % et 70 % de la valeur totale des exportations et 35 % des rentrées fiscales (hors douanes). Elle constitue un outil stratégique privilégié pour lutter contre la pauvreté, sachant que les achats annuels de graines de coton représentent environ 70 milliards de FCFA qui sont versés annuellement à plus de 300.000 exploitants agricoles, assurant ainsi indirectement des revenus monétaires à environ trois millions de personnes.

Toutefois, la désorganisation de la filière, ajoutée à la déprime des cours du coton et au recul du dollar ont entraîné une chute des revenus du monde rural, de l'activité des huileries, des recettes d'exportations et un déficit que devra supporter la filière et l'Etat.

En réponse, le Bénin a joué un rôle moteur dans la promotion de l'initiative « Compaoré » , présentée conjointement avec le Mali, le Burkina-Faso et le Tchad lors du sommet de Cancun, organisé par l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Si elles s'y sont résignées, les autorités béninoises doutent cependant que l'accord conclu le 31 juillet 2004 à Genève permette l'aboutissement rapide de leur cause.

Toutefois, la modernisation de l'économie béninoise dépendra également de la volonté politique du pays de réformer son économie, en particulier son administration et le secteur privé à travers un programme de privatisations. La lutte contre la corruption est également une condition de la création d'un climat favorable aux affaires et aux investissements, sans lequel il n'y aura pas de croissance économique et de création de richesses.

Enfin, il est important de continuer à accompagner la mutation du secteur informel vers l'économie moderne , tant il est vrai que, plus encore que la corruption, le non-respect des réglementations, du droit du travail et du droit fiscal constituent un frein majeur au développement par les entreprises.

c) L'affaiblissement des positions économiques de la France au Bénin

La délégation sénatoriale a rencontré les entrepreneurs français établis au Bénin, par l'intermédiaire de Son Excellence, M. l'Ambassadeur de France, Christian Daziano.

Une cinquantaine de sociétés à capitaux majoritairement français sont, en effet, implantées au Bénin, essentiellement dans les travaux publics et le secteur tertiaire.

(1) La présence économique française au Bénin

Le tableau que les entrepreneurs français dressent de leurs positions économiques au Bénin est pessimiste et contraste sensiblement avec la perception de la situation par la diplomatie française.

Vis-à-vis des investisseurs potentiels, le Bénin ne semble pas manquer d'atouts : avec une économie représentant 10 % du PIB de l'UEMOA , le Bénin dispose d'un poids économique secondaire dans l'économie de la sous-région mais joue un rôle de plaque tournante pour la desserte commerciale du Niger et surtout du Nigéria. On estime d'ailleurs qu'une grande partie des importations béninoises (entre 60 et 75 %) est réexportée, le plus souvent de façon informelle, vers ce grand voisin.

Entre 1995 et 2003, la croissance de son PIB a évolué autour de 5 %. En 2003, son taux de déficit budgétaire était encore de 3 % et l'inflation restait en deçà de 2,5 %. Les affaires bénéficient d'un environnement globalement favorable, depuis la mise en place d'un droit commercial moderne et d'un nouveau code des investissements qui offre des conditions fiscales incitatives.

Pourtant, le Bénin est classé parmi les pays les moins avancés : il ne figure qu'au 137 e rang mondial (sur 188) des pays récipiendaires d'investissements étrangers avec 673 millions de dollars , soit six fois moins que la Côte d'Ivoire, deux fois moins que le Cameroun et sensiblement autant que le Mali et le Togo et quatre fois plus que le Burkina-Faso. Depuis quelques années, l'investissement étranger au Bénin marque le pas, passant de 61 millions de dollars en 1999 à 41 millions de dollars en 2002.

En ce qui concerne les investissements français , notre pays détenait en 2001 46 millions d'euros d'investissements au Bénin, selon la Banque mondiale, soit 10 % de l'ivestissement direct étranger . La France est incontestablement le premier investisseur au Bénin, avant la Chine et l'Allemagne et contribuerait à hauteur de 15 % du PIB de ce pays.

Nos investissements se répartissent entre tous les secteurs, mais en priorité dans les industries manufacturières et la distribution, les travaux publics et les communications. Sont également bien représentés les équipements industriels, l'automobile, les produits pharmaceutiques et les études d'ingénierie.

(2) Aux sources de l'affaiblissement des positions économiques de la France au Bénin

Les investisseurs français installés au Bénin s'inquiètent de l'affaiblissement de leur position au Bénin, qu'ils attribuent à plusieurs sources.

Sur le plan conjoncturel, malgré les prévisions optimistes de la Banque mondiale et du FMI qui attendaient 6 %, le Bénin a enregistré un taux de croissance de 2,7 % seulement en 2004 , sous l'effet de trois facteurs défavorables.

D'abord, sa position de transit s'est détériorée en raison de la perte de compétitivité et l'inorganisation du port de Cotonou qui ont entraîné une réduction d'activité du port de 11,5 % entre 2003 et 2004.

Ensuite, l'économie béninoise, dominée par le secteur primaire et le secteur tertiaire (50 % du PIB), est très sensible aux chocs extérieurs : elle a ainsi été fragilisée par la baisse des cours du coton et le recul du dollar, provoquant une chute de revenus pour les agriculteurs et un déficit important à la charge de l'État.

Enfin, les restrictions commerciales imposées par les autorités du Nigéria, principal partenaire du Bénin dans la région , a eu pour faire de limiter les réexportations depuis le Bénin d'une quarantaine de produits (automobiles d'occasion et produits agroalimentaires par exemple).

L'ensemble de ces éléments ont eu pour effet un ralentissement de la demande intérieure : ainsi, en 2004 le seul fabriquant (français) de bières et de sodas annonce une chute de 25 % de ses ventes; les cimenteries font état d'un recul de leur production de 8 %.

Sur le plan structurel, la mission économique de Cotonou fait valoir des éléments de politique intérieure comme que le niveau anormalement élevé des exonérations fiscales qui ont eu pour effet de réduire les recettes douanières et la nette dégradation du climat des affaires . Parallèlement, les entrepreneurs français, entendus par la délégation sénatoriale, constatant que les positions chinoises sont, à l'inverse, plus avantageuses, réclament une diplomatie économique plus offensive et moins rétive à la prise de risque, à l'instar de celle pratiquée par la Chine, dont la présence en Afrique se renforce jour après jour.

2. Le message de nos collègues députés béninois

L'un des temps forts de la mission sénatoriale a été la rencontre avec nos collègues de l'Assemblée nationale, à Porto-Novo, dans un hémicycle installé au coeur de l'ancien Palais des gouverneurs. En pleine période d'ouverture de la session parlementaire, la délégation a été accueillie par Antoine Kolawolé Idji, Président de l'Assemblée nationale et par Michel Missikpodé, président du groupe d'amitié Bénin-France.

a) Le fonctionnement de l'Assemblée nationale de la République du Bénin

La visite de notre délégation intervient un an après la signature d'un projet d'appui du Sénat français à l'Assemblée nationale du Bénin, le 28 avril 2004 entre Antoine Kolawolé Idji et Christian Poncelet.

Le Parlement béninois est, en effet, monocaméral. L'Assemblée nationale se compose quatre-vingt-trois députés élus au suffrage universel direct dans vingt-quatre circonscriptions électorales . Ces députés, dont 65 soutiennent l'action du Gouvernement, se répartissent en sept groupes parlementaires, dont un seul de l'opposition. Sur environ 150 partis politiques que compte le pays, quarante sont en situation régulière vis-à-vis de la Charte des partis politiques et seuls six sont représentés à l'Assemblée nationale.


L'Assemblée nationale de la République du Bénin

Historique

L'expérience parlementaire béninoise a commencé avec l'accession du pays à l'indépendance. Elle a évolué au rythme des soubresauts politiques du nouvel Etat. Entre avril 1959 et mars 1991, plusieurs périodes se sont succédé, marquées par la présidence de Justin Tométin Ahoma Degbé (avril 1959-novembre 1960), de Valentin Djibodé Akplogan (novembre 1960-octobre 1963), de Tairou Congakou (janvier 1964-novembre 1965), d'Ignace Adjo Boco (février 1980-juillet 1984), de Romain Vilon Guezo (juillet 1984-février 1989) et de Mgr Isidore de Souza (février 1990-mars 1991).

L'expérience parlementaire en cours a connu quatre législatures : Adrien Houngbedji a présidé l'Assemblée béninoise au cours de la première et de la troisième législature entre avril 1991 et mars 1995 puis entre avril 1999 et mars 2003 ; Bruno Amoussou a assuré la fonction entre avril 1995 et avril 1999 au cours de la deuxième législature.

Le fonctionnement

Les principaux organes politiques de l'Assemblée nationale sont :

- la présidence ;

- le Bureau qui se compose de sept membres dont le Président de l'Assemblée nationale, deux vice-présidents, deux questeurs et deux secrétaires ;

- les sept groupes parlementaires, composés chacun d'au moins neuf députés ;

- les cinq commissions permanentes, composées d'au moins treize membres chacune : la commission des lois, de l'administration et des droits de l'homme, la commission des finances et des échanges, la commission du plan, de l'équipement et de la production, la commission de l'éducation, de la culture, de l'emploi et des affaires sociales et la commission des relations extérieures, de la coopération au développement, de la défense et de la sécurité ;

- la conférence des présidents, qui se compose du Président, des présidents de commissions, de groupes parlementaires et des autres membres du bureau.

L'Assemblée nationale est dotée d'un secrétariat général administratif (SGA) placé sous l'autorité du Président. Le SGA est doté de deux directions : la direction des services législatifs et la direction de la questure, qui comptent respectivement quatre et six services.

Source : Assemblée nationale de la République du Bénin

A l'occasion de la visite de la délégation sénatoriale accompagnée par l'Ambassadeur de France, les députés béninois ont fait état de leur souhait de moderniser le fonctionnement de leur assemblée , notamment par le relèvement du nombre de députés femmes (qui sont seulement six à l'Assemblée nationale du Bénin), une meilleure représentation de l'opposition au sein d'un Bureau « monocolore », selon l'expression d'un député béninois, ou encore l'amélioration du fonctionnement de leurs groupes d'amitié. En somme, la délégation a quelquefois retrouvé dans certaines interrogations, qui ne sont pas propres aux pays en développement, le reflet de ses propres préoccupations.

S'agissant du fonctionnement des groupes d'amitié , la délégation a rappelé que leur dynamisme est conditionné à la régularité des rencontres entre les membres et à la mise en place d'un programme d'activités ouvert tant aux sénateurs de la majorité qu'à ceux de l'opposition, comme le montre la composition de la délégation.

En ce qui concerne la place des femmes au Parlement , elle a indiqué qu'une assemblée doit refléter la diversité de la société pour être démocratique et que la loi relative à la parité a permis un progrès sensible de la représentation des femmes notamment au Sénat, qui compte désormais davantage de femmes (en proportion) que l'Assemblée nationale, où les scrutins uninominaux et les dissidences de ceux qui ne veulent pas céder leurs places aux femmes, ne favorisent pas de progrès spectaculaires.

Abordant la question du bicaméralisme , les sénateurs de gauche de la délégation, tout en défendant le principe, ont considéré que l'intérêt de deux chambres serait accru si l'alternance était possible au Sénat et si les deux chambres étaient complémentaires, plutôt que de fonctionner pareillement du fait de l'existence de deux larges majorités identiques.

b) Des préoccupations relatives à la politique des visas de la France3 ( * )

L'entrée et le séjour des étudiants béninois en France sont un sujet de préoccupation majeure des élus béninois. Ainsi, ils ont alerté la diplomatie française sur les conditions restrictives pour l'accès aux visas (même de courte durée) que la France impose aux étudiants, aux hommes d'affaires voire aux diplomates qui sont, de fait, de plus en plus nombreux à migrer vers les Etats-Unis aux conditions d'accueil plus favorables. A leur retour, ils mettent en application des méthodes américaines , avec pour conséquence le recul des valeurs francophones. De fait, des élus s'interrogent même sur l'utilité d'un espace francophone qui établit des frontières infranchissables entre pays membres .

Affirmant que les ressortissants africains ne se sentent plus à l'aise en France, même lorsqu'ils accèdent à la nationalité française, d'autres députés se sont émus du durcissement des lois votées par le Parlement français et qui ont pour effet d'imposer des traitements vexatoires aux Africains présents sur le sol français.

Enfin, certains ont souhaité connaître le sentiment de la délégation sénatoriale à propos des sentiments anti-français qui se sont exprimés chez les voisins, au Togo et en Côte d'Ivoire .

Justifiant l'utilité d'un espace francophone, en particulier de l'Assemblée parlementaire de la francophonie, dont il assure le secrétariat général, Jacques Legendre, président de la délégation sénatoriale, a plaidé pour une francophonie solidaire et active qui couvre autant la promotion de la langue française que des actions plus politiques, dans le respect des identités africaines. C'est la raison pour laquelle le Président de la République française a encouragé un plus grand accès des étudiants aux universités africaines qui doivent être suffisamment attractives pour empêcher la fuite des cerveaux.

Quant à la politique d'immigration française, la délégation a déploré les comportements indignes subis par certains Africains présents en France. Elle a demandé à l'ambassade de France de veiller à l'accueil des demandeurs de visas, même s'il est nécessaire de prendre garde aux « faux étudiants » qui sollicitent l'entrée sur le territoire français.

Enfin, elle a exprimé sa tristesse devant le sentiment anti-français qui s'est développé chez les voisins du Bénin, justifiant la présence des 4.000 soldats français par la nécessité d'éviter un bain de sang.

* 1 Alain Milon (UMP-Vaucluse), qui était prévu pour faire partie de la délégation, n'a pas pu participer au voyage.

* 2 Créée en 1975, Cités Unies France fédère, au niveau national, les collectivités territoriales françaises engagées dans la coopération internationale. Présidée par Charles Josselin, elle compte aujourd'hui près de 500 collectivités territoriales françaises adhérentes. A travers 21 groupes-pays et 4 groupes thématiques, Cités Unies France anime un réseau d'environ 2.000 collectivités locales. Grâce à ces structures de travail et de réflexion, ces collectivités échangent leurs expériences et élaborent des programmes d'action communs.

* 3 La politique des visas de la France est désormais encadrée par un certain nombre de normes européennes (conventions d'accords des accords de Schengen) et de prescriptions de l'Union européenne.

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