II. LUANG PRABANG, VILLE SYMBOLE DE LA COOPERATION AU LAOS

A. LA PROTECTION DE LA VILLE HISTORIQUE

1. L'inscription au patrimoine mondial

La Province de Luang Prabang, dans la région Nord du Laos, correspond à une entité géographique naturelle constituée autour du confluent du Mékong avec la Nam Ou, la Nam Xuang et la Nam Khan.

Située au centre nord du pays, dans une région montagneuse, la ville de Luang Prabang se situe au confluent du haut Mekong et d'un affluent de sa rive gauche, le Nam Khan, les deux cours d'eau délimitant une péninsule à une altitude moyenne de 300 mètres, dans un site cerné de montagnes et de hauts plateaux. Un mont sacré, le Phousi, domine le site.

Avec un peu plus de 40.000 habitants, Luang Prabang est la 4 ème ville du pays après Vientiane, Savannakhet et Pakse.

L'existence de la ville, ancienne capitale royale, est attestée depuis le XIIIème siècle.

Repères historiques 2 ( * )


• En 1353, Fa Ngum, prince lao exilé à Angkor, fonde le royaume de Lan Xang; Xieng Tong, la future Luang Prabang, en est la capitale. Une principauté antérieure, vassale d'Angkor, fondée par les Lao venus de la Chine méridionale, avait aussi eu Xieng Tong pour capitale. Le bouddhisme Theravada, qui prend de l'ampleur, s'ajoute aux cultes locaux.


• Devant la menace birmane, la capitale du royaume de Lan Xang est transférée à Vientiane à des fins stratégiques (1563); Xieng Tong prend le nom de Luang Prabang.


• L'ordre et la prospérité caractérisent le règne de Suriya Vongsa (1637-1694). Sa succession déclenche une crise politique et la division du royaume en deux États royaux (Vientiane et Luang Prabang) et un État princier (Champassac); elle entraîne aussi de nombreux conflits extérieurs. Luang Prabang sera pillée en 1753, 1774 et 1791.


• Sous une suzeraineté siamoise accrue (1836), la ville est par ailleurs dévastée par les "Pavillons noirs", restes de l'armée chinoise des Taiping, (1887-1893). Sa reconstruction et son rétablissement comme capitale religieuse et royale de l'État de Luang Prabang s'effectuent sous le roi Sisavang Vong (1906-1947). Elle sera capitale jusqu'en 1946.


• Après l'établissement du protectorat français (1893), la morphologie traditionnelle de la ville allie des principes d'urbanisme nouveaux (entre 1915 et 1925).

Le noyau urbain, au centre de la péninsule, rassemble les fonctions politiques et religieuses. Á sa périphérie, habitations et commerces sont alignés sur les berges des deux cours d'eau selon la disposition traditionnelle des anciens villages. Une avenue principale, la "Promenade de la Péninsule", traverse cette péninsule dans le sens de la longueur sur un kilomètre. Un second axe croise le premier à sa base, formant le carrefour administratif colonial. Un rempart marque la limite de la ville ancienne.

Avec les résidences royales et aristocratiques, les monastères bouddhiques constituent l'élément essentiel de la ville historique : sanctuaires, that (stûpas), chapelles, bibliothèques, bonzeries etc. Disposés dans de vastes jardins, ces ensembles se détachent par les immenses toits des sanctuaires recouverts de tuiles vernissées, par le blanc des parois, par le riche décor des boiseries. L'architecture domestique, en bois à l'origine, a su préserver, avec l'introduction de la brique à l'époque coloniale, l'apparence traditionnelle.

On compte ainsi une quarantaine de monastères bouddhiques remarquables, une centaine de maisons de bois anciennes sur pilotis, couvertes de tuiles, de bois ou de bambous et de nombreux bâtiments de style colonial.

Ainsi, dans la ville ancienne se superposent et se croisent une trame urbaine primaire, villageoise, ancestrale, verte, humide et naturelle et une deuxième trame urbaine coloniale, ordonnée, maçonnée, plus officielle et commerçante.

Pour ce patrimoine remarquable et unique, la ville de Luang Prabang a été inscrite sur le patrimoine mondial de l'UNESCO en 1995 3 ( * ) .

Les critères d'inscription sont les suivants : «Luang Prabang représente de manière exceptionnelle la réussite de la fusion de structures architecturales et urbaines traditionnelles avec celle des dirigeants coloniaux européens des XIXe et XXe siècles. Son paysage urbain remarquablement bien conservé illustre une étape clé dans la combinaison de deux traditions culturelles distinctes» .

L'inscription au patrimoine mondial entraîne une série d'obligations.

La Convention du patrimoine mondial a été adoptée en 1972 avec pour mission essentielle d'identifier le patrimoine culturel et naturel de valeur universelle exceptionnelle dans le monde et d'en assurer la protection grâce à la coopération internationale.

Seuls les Etats parties à la Convention peuvent voir leurs sites culturels et naturels inscrits sur la liste du patrimoine mondial, car seuls eux ont le droit de proposer pour inscription les biens situés sur leur territoire.

Si l'inscription d'un site sur la liste du patrimoine mondial ne génère aucune protection particulière, les conditions de sa gestion et de sa protection par les autorités nationales sont autant de conditions préalables à son classement. C'est ainsi que le premier règlement urbain de Luang Prabang a été rédigé en 1995 pour compléter la proposition de classement du site de Luang Prabang alors en cours d'établissement.

En décembre 1995, le Comité du patrimoine mondial décidait d'inscrire le site de Luang Prabang et dès 1996 la Maison du patrimoine, organisme en charge de la protection de la mise en valeur du site, était créée dans le cadre de la coopération décentralisée entre Chinon et la ville de Luang Prabang.

* 2 Source : organisation des villes du patrimoine mondial - OVPM.

* 3 Aujourd'hui, on notera que 242 villes dans le monde sont inscrites au patrimoine mondial, dont 28 seulement pour la région Asie et Pacifique.

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