Rapport de groupe interparlementaire d'amitié n° 86 - 1er octobre 2009

Disponible au format Acrobat (77 Moctets)

Groupe interparlementaire d'amitié

France - Balkans occidentaux

La Bosnie-Herzégovine quinze ans après Dayton : combler les retards d'avenir

Compte rendu

du déplacement effectué par une délégation du groupe

en Bosnie-Herzégovine

du 14 au 17 avril 2009

La délégation était composée de :

M. Jack RALITE (Seine-Saint-Denis), président délégué pour la Bosnie-Herzégovine

M. François PILLET (Cher), président délégué pour le Monténégro

M. François FORTASSIN (Hautes-Pyrénées)

_____________________________________________

N° GA 86 - Octobre 2009

LE GROUPE INTERPARLEMENTAIRE FRANCE-BALKANS OCCIDENTAUX

Répondant au souhait de leurs présidents de conférer une dimension régionale aux problématiques abordées isolément par les groupes interparlementaires France-Bosnie Herzégovine, France-République de Macédoine et France-Serbie et Monténégro, le Bureau du Sénat a autorisé le 19 décembre 2007 la fusion de ceux-ci au sein d'une nouvelle entité France - Balkans Occidentaux.

Sa composition est la suivante :

Président :

• M. Robert Badinter (Soc - Hauts-de-Seine)

Présidents délégués :

• Bosnie-Herzégovine : M. Jack Ralite (CRC-SPG - Seine-Saint-Denis)

• Kosovo : M. Didier Boulaud (Soc - Nièvre)

• République de Macédoine : M. François Rebsamen (Soc - Côte d'Or)

• Monténégro : M. François Pillet (app. UMP - Cher)

• Serbie : M. Jean-Pierre Michel (Soc - Haute-Saône)

Vice-Présidents :

• M. Bertrand Auban (Soc - Haute-Garonne)

• Mme Monique Papon (UMP - Loire Atlantique)

Secrétaire :

• M. François Fortassin (RDSE - Hautes-Pyrénées)

Trésorier :

• Jean-Claude Frécon (Soc - Loire)

Membres :

• Mme Michèle André (Soc - Puy-de-Dôme)

• M. Michel Billout (CRC-SPG - Seine-et-Marne)

• Mme Monique Cerisier-ben Guigua  (Soc - Français établis hors de France)

• M. Bernard Fournier (UMP - Loire)

• M. Patrice Gélard (UMP - Seine-Maritime)

• M. Hubert Haenel (UMP - Haut-Rhin)

• Mme Virgine Klès (App. Soc - Ille-et-Vilaine)

• M. Serge Lagauche (Soc - Val-de-Marne)

• Mme Colette Mélot (UMP - Seine-et-Marne)

• M. Jean-Pierre Michel (Soc - Haute-Saône)

• M. Jacques Müller (Ratt. Soc - Haut-Rhin)

• M. Ivan Renar (CRC-SPG - Nord)

Le déplacement d'une délégation du groupe en Bosnie-Herzégovine constitue sa première mission à l'extérieur.

INTRODUCTION

« Nous avons tous un héritage que nous devons défendre, mais dans un même mouvement nous devons nous en défendre. Autrement nous aurions des retards d'avenir, nous serions inaccomplis. »

Predrag Matvejevic

« L'inaccompli bourdonne d'essentiel »

René Char

La visite d'un groupe interparlementaire en Bosnie-Herzégovine constituait une première depuis l'accession de ce pays à l'indépendance. Près de quinze ans après la signature des accords de Dayton qui ont mis fin à un conflit sanglant de quatre ans et à l'heure où la présence militaire française tend à toucher à sa fin, ce déplacement avait valeur de soutien aux autorités politiques bosniennes engagées dans un long travail de réformes dans la perspective d'une adhésion à l'Union européenne. Cette mission souhaitait également saluer les efforts de nombreux acteurs tant politiques qu'issus de la société civile en faveur de l'émergence d'un véritable État bosnien, dépassant les logiques communautaristes qui divisent encore le pays.

La Bosnie-Herzégovine n'a, en effet, pas encore tourné la page de la guerre civile qui l'a tant meurtrie. Le conflit, expression de logiques nationales et religieuses, oppose désormais les mémoires. Celles-ci s'affrontent et semblent empêcher toute réflexion sur un avenir commun. Le système mis en place par les accords de Dayton tend à exacerber ces clivages en multipliant les instances décentralisées, censées garantir le respect de la diversité et une forme d'égalité entre les peuples constitutifs de la Bosnie-Herzégovine. L'égalité n'est pourtant en aucun cas la garantie de la nécessaire équité entre les populations.

Pis, le système mis en place tend à favoriser les regroupements de populations sur des critères ethniques, annihilant les possibilités de retour à la situation d'avant-guerre, quand ces communautés coexistaient de façon pacifique. Prime est dès lors donnée à ces majorités de fait, les minorités étant contraintes à la marginalité voire à l'exil. Le reflexe identitaire ne peut sortir que renforcer d'une telle situation

Le constat semble sévère. Il l'est surtout à l'endroit des promoteurs des accords de Dayton, indispensables pour mettre fin à la guerre mais terriblement inadaptés à la paix. Ceux-ci ont débouché sur une situation quasi absurde au regard du nombre d'instances gouvernementales (14 gouvernements, 180 ministres pour moins de 4 millions d'habitants). Ils n'ont pas permis l'émergence d'un véritable État bosnien, apte à s'affranchir d'une tutelle internationale de plus en plus pesante pour la population au fur et à mesure des années. Ils ont cristallisé les positions de l'immédiat après-guerre et par delà, figé les mentalités.

Les autorités politiques bosniennes rencontrées au cours de cette mission partagent toutes l'ambition de réformer au plus vite la constitution actuelle en vue d'intégrer à moyen terme l'Union européenne. La nuance est néanmoins de taille quand il s'agit pour elles de détailler les mesures qu'elles entendent adopter : à la poursuite accrue de la décentralisation préconisée par les bosno-serbes en Republika Sprska répond la volonté de fusionner les entités poursuivie par les bosniaques et les bosno-croates.

Les contacts noués avec la société civile lors de ce déplacement ne sont pas non plus sans susciter quelque inquiétude. Celle-ci semble traversée par deux mouvements, l'un confinant au repli identitaire et l'autre empreint d'une certaine résignation. La défiance à l'égard du politique est, à cet égard, manifeste au sein des jeunes générations qui ne conçoivent leur propre avenir qu'à l'extérieur du pays.

La mission première d'un groupe interparlementaire d'amitié est de nouer des liens durables avec un pays. La crainte que ce pays n'ait in fine aucun avenir et soit maintenu sous assistance respiratoire internationale a présidé à la rédaction de ce rapport. Le groupe interparlementaire a en effet constaté un certain nombre de « retards d'avenir » à l'occasion de son déplacement auxquels il est nécessaire de répondre rapidement.

Face à la paralysie politique et à la résignation d'une partie de la société bosnienne, il convient cependant de noter quelques signes d'espoir, notamment au sein du monde culturel enclin à conférer à la Bosnie-Herzégovine une nouvelle image, moderne et européenne, dépassant les crispations identitaires. Le groupe interparlementaire tient à apporter tout son soutien à de telles avant-gardes, tant elles semblent aller dans le bon sens.

La délégation du groupe interparlementaire conduite par M. Jack Ralite (Seine-Saint-Denis - CRC-SPG), président délégué Bosnie-Herzégovine et composée de MM. François Fortassin (Hautes-Pyrénées - RDSE), secrétaire du groupe et François Pillet (Cher - app. UMP), président délégué Monténégro, tiennent à exprimer leur sincère reconnaissance à Son Excellence Mme Maryse Berniau, Ambassadeur de France en Bosnie-Herzégovine, ainsi qu'à MM. Thomas Wauquier, chef du bureau de Banja Luka, Jean-Christophe Thiabaud, premier conseiller, Lazare Paupert, conseiller de coopération culturelle et d'action culturelle et leurs collaborateurs pour la qualité de leur accueil et l'organisation du déplacement, dont l'architecture a répondu aux motivations du groupe.

I. A LA RECHERCHE DE L'ETAT INTROUVABLE

« L'avenir à chaque instant presse le présent d'être un souvenir »

Louis Aragon

A. LE CASSE TÊTE INSTITUTIONNEL

Les accords de Dayton signés en décembre 1995 figent au plan constitutionnel les positions acquises par les belligérants, serbe, bosniaque et croate, lors de la guerre civile. La Loi fondamentale qui en découle est assez singulière : rédigée en anglais, elle n'a fait l'objet d'aucune consultation des populations concernées et se présente sous la forme d'une annexe à un traité de paix.

La Constitution légitime l'existence des deux entités serbe et bosno-croate. Depuis 1992, les bosno-serbes, réunis au sein de la Republika Sprska, se sont déclarés indépendants et ont promulgué à cet effet une Constitution fondée sur le concept d'État unitaire. La Fédération de Bosnie-Herzégovine rassemble, quant à elle, bosniaques et croates depuis mars 1994. Cette fédération, largement décentralisée, se compose de dix cantons - cinq bosniaques, trois croates et deux mixtes - dotés chacun d'un gouvernement. Le pouvoir législatif est exercé par deux chambres dont l'une, la Chambre des peuples est élue au suffrage universel indirect et composée d'un nombre égal de représentants bosniaques et croates. Les décisions touchant aux « intérêts vitaux » de l'un des deux peuples constituants y sont adoptées à la majorité des deux composantes.

Les accords de Dayton placent au dessus de ces deux entités un État central. Le pouvoir exécutif est confié à une présidence collégiale tournante, composée de trois membres issus de chacun des peuples constitutifs. Un conseil des ministres lui est adjoint. Le régime est, par ailleurs, bicaméral. Il reprend la structure observée au sein de la fédération de Bosnie-Herzégovine. Les 42 membres de la Chambre des représentants sont élus au suffrage universel par chacune des deux entités, 28 représentants par la Fédération croato-musulmane et 14 représentants par la Republika Sprska. La seconde chambre, la Chambre des peuples, comprend 15 membres nommés par les Assemblées de chaque entité : deux tiers par la Fédération (cinq Bosniaques, cinq Croates) et un tiers par la Republika Sprska (cinq Serbes). Les représentants des « peuples constitutifs » peuvent y exercer leur droit de veto si leurs « intérêts vitaux » sont menacés.

L'État central est doté de pouvoirs circonscrits à des domaines bien définis : politique étrangère, commerce extérieur, politique douanière, politique monétaire, financement des institutions, politique de l'immigration (réfugiés et droit d'asile), droit international et pénal entre les entités, transports. Les compétences de l'État central ont, cependant, dépassé le cadre initial. D'une part, l'interprétation d'une disposition constitutionnelle lui reconnaissant le droit d'intervenir afin de préserver la souveraineté, l'intégrité territoriale, l'indépendance politique et la personnalité internationale de la Bosnie-Herzégovine a permis à l'État central de créer de nouveaux départements ministériels dans les domaines de la justice et de la défense notamment. D'autre part, le transfert de la gestion des impôts indirects des entités vers l'État central lui ont permis de se doter de compétences financières.

Ce mouvement vertueux doit cependant être relativisé : l'intérieur, la santé, l'agriculture, la politique sociale, l'urbanisme, les sciences et l'éducation, l'énergie, le sport et la culture relèvent de la compétence exclusive des entités. Dans d'autres domaines, à l'instar de la justice, le partage de compétence peut déboucher sur une situation ubuesque où l'État central, les entités et les dix cantons disposent chacun d'un ministère en la matière. Un tel système favorise tant la dispersion des pouvoirs que l'impossibilité d'aboutir à un consensus sur les réformes à mettre en oeuvre.

La ville de Brèko au nord du pays, dont le territoire est divisé entre la Republika Sprska et la Fédération de Bosnie-Herzégovine, bénéficie, quant à elle, d'un statut particulier depuis 1999. Érigée en district, elle est directement placée sous l'autorité de l'État central. Cette ville revêt une importance stratégique pour les bosno-serbes qui y étaient avant-guerre minoritaires : elle permet en effet de relier la partie orientale de la Republika Sprska à sa partie occidentale.

B. UNE CITOYENNETÉ BOSNIENNE QUI RESTE À DÉFINIR

Le modèle institutionnel bosnien repose sur l'égalité entre les trois peuples constitutifs. Ce principe a été sensiblement réévalué par la Cour constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine le 1 er juillet 2000 qui insiste avant tout sur l'égalité de droits. Les constitutions de la Fédération de Bosnie-Herzégovine et de la Republika Sprska ont été amendées en 2002 en vue de faire garantir ce principe.

Le principe d'égalité de droits est une première étape en vue de faire émerger une citoyenneté bosnienne. Le système actuel confère une prime à l'appartenance ethnique, le droit de veto accordé aux représentants de chacun des peuples constitutifs en étant un des exemples les plus criants. La notion d'intérêt vital qui lui est corrélée mérite, à ce titre, d'être soigneusement précisée, tant la pratique souligne le pouvoir de nuisance que représente un tel droit. Les intérêts des individus sont uniquement envisagés à partir de l'appartenance ethnique et empêche la mise en oeuvre d'un réel projet national, au sens classique du terme.

S'il est nécessaire de garantir le droit des minorités, l'égalité ainsi mise en oeuvre doit néanmoins respecter les principes classiques de la démocratie. Il convient de rappeler que la structure démographique de la Bosnie-Herzégovine ne reflète pas une égalité pure entre les trois peuples. Aucun recensement viable n'a réellement été établi depuis la fin du conflit. On estime néanmoins que plus de la moitié de la population bosnienne est d'origine bosniaque, plus du tiers d'origine serbe, les chiffres concernant les croates variant entre 10 et 14 % de la population.

La difficulté à faire émerger une identité nationale est d'autant plus réelle que les deux entités s'opposent sur l'avenir du système institutionnel. S'il existe un consensus sur la nécessité de le réformer, les solutions divergent. Là où la Fédération milite pour une suppression des entités et l'émergence d'un nouvel État unitaire et respectueux du droit des minorités, la Republika Sprska souhaite que lui soit conférée une plus grande autonomie agitant de temps à autres la menace d'un référendum d'autodétermination. La Serbie voisine a néanmoins maintes fois réitérée son souhait de voir maintenues les frontières actuelles de la Bosnie-Herzégovine.

La délégation en compagnie de M. Igor Radojicic,
Président de l'Assemblée nationale de Republika Sprska

En l'absence d'accord, il convient de souligner l'interprétation de la Constitution effectuée par la Cour constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine. Celle-ci a ainsi estimé en mai 1998 que la Loi Fondamentale ne visait pas à préserver la souveraineté des entités, ni n'accordait de droit à l'autodétermination. Le même arrêt insistait sur le fait que les compétences que les entités exercent ne sont en aucun l'expression d'une éventuelle qualité d'État. Poursuivant dans le même sens, la Cour a indiqué en janvier 2007 qu'aucun signe, drapeau ou hymne, autre que celui de l'État de Bosnie-Herzégovine ne saurait être admis publiquement sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine. Cette décision venait répondre aux demandes formulées par les deux entités en vue de porter des signes particuliers les distinguant de l'État central.

En refusant d'accorder trop de pouvoirs aux entités, la Cour constitutionnelle poursuit l'objectif de favoriser l'émergence d'une véritable citoyenneté bosnienne. Cette ambition, qu'il convient de saluer, est pourtant à rebours d'un discours politique par trop ancré dans une rhétorique nationaliste.

C. UNE VIE POLITIQUE MARQUÉE PAR L'APPARTENANCE ETHNIQUE

L'échiquier politique bosnien ne répond pas au clivage politique traditionnel droite - gauche, observable dans la plupart des démocraties. Les principaux partis, à une ou deux exceptions près, se définissent avant tout par le lien qu'ils ont noué avec une communauté. Le SDA représente ainsi la communauté bosniaque, le HD et le HDZ 90 les croates, le SNSD et SDS les bosno-serbes. Le SBiH et le SDP répondent, quant à eux, à une logique multiethnique, militant ardemment pour la suppression des entités.

Le recul des partis nationalistes, observé lors des élections législatives de 2006, ne signifie pas pour autant une réelle perte d'influence. Le cas des bosno-serbes est à cet égard révélateur : le SDS s'est, en fait, vu concurrencer par le SNSD de Milorad Dodik, Premier ministre de Republika Sprska, toujours prompt à annoncer la sécession et l'accession à l'indépendance de son entité. Les élections municipales du 5 octobre 2008 sont venues confirmer la prégnance d'un vote identitaire, comme en témoigne le faible score du parti SBiH.

Configurée de la sorte, la scène politique bosnienne se caractérise par une forme de surenchère verbale constante, chaque parti, et donc chaque entité, renvoyant sur l'autre l'échec d'une réforme ou la paralysie des institutions. La recherche d'un consensus est, dans cette optique, quasi impossible à trouver. C'est sur la base du compromis que les rapprochements les plus significatifs ont pu être opérés ces dernières années, à l'image de la déclaration de Mostar d'octobre 2007. Celle-ci constitue un accord a minima sur la réforme de la police adopté en vue de permettre à la Bosnie-Herzégovine de signer un accord de stabilisation et d'association avec l'Union européenne. L'urgence dicte de facto les alliances.

Le processus de Prud en est le dernier exemple en date. Ce compromis signé entre représentants du SDA, du SNSD et du HDZ le 5 novembre 2008 doit permettre d'avancer sur un certain nombre de dossiers considérés comme prioritaires et actuellement bloqués au nombre desquels la réforme du statut de la ville de Brèko, la question de la répartition des biens de l'État et l'organisation d'un recensement en 2011. Si cet accord demeure flou sur la question de la réforme constitutionnelle, il constitue néanmoins une réelle avancée dans un certain nombre de domaines et devrait ainsi favoriser l'allègement de la tutelle internationale.

Cet accord n'a pourtant pas été salué à sa juste valeur. Là encore, la surenchère nationaliste a pu jouer à plein, surtout du côté bosniaque. Le leader du SDA, Suleijman Tihic, martyr de la guerre, s'est vu reprocher à la fois par ses concurrents politiques (en premier lieu le SBiH de l'actuel membre bosniaque de la présidence collégiale Haris Silajdzic, ancien Premier ministre d'Aliocha Izetbégovic), par les médias mais aussi par sa propre base de céder aux demandes serbes et de renier ainsi son engagement. Sa réélection à la tête du SDA a même paru compromise. Un tel extrémisme avait pu être déjà observé lorsque le SBiH s'était opposé en avril 2006 à l'adoption d'amendements destinés à renforcer les institutions centrales, considérant qu'ils n'allaient pas assez loin.

M. Jack Ralite en compagnie de M  Suleijman Tihic,
président du SDA - Parti d'action (bosniaque)

Le succès de M. Tihic à l'occasion du congrès du SDA le 28 mai dernier souligne que l'option modérée peut être une solution et que le jusqu'au-boutisme trouve, enfin, ses limites. Elle incite à penser que la mémoire ne peut servir d'argument politique viable et durable et que le quotidien des bosniens et bien sûr, leur avenir peuvent revenir au centre des préoccupations des partis.

D. UNE SOCIÉTÉ EN QUÊTE DE REPÈRES

Un sondage publié récemment dans la presse bosnienne révèle que les deux tiers de la jeunesse locale entendait quitter rapidement le pays tant celui-ci n'offrait pas de perspectives d'avenir et pire, se crispait sur son passé. Les contacts noués par la délégation avec la société civile tant à Sarajevo qu'en Republika Sprska corroborent malheureusement ces chiffres. Face à une situation politique quasiment figée depuis la fin de la guerre, s'est développée une défiance à l'égard des pouvoirs, qu'ils soient central ou « régionaux », accentuée de surcroît par les affaires de corruption qui ont touché certaines formations politiques.

Cette indifférence est renforcée par l'absence de réponse efficace aux difficultés économiques que rencontre la Bosnie-Herzégovine. Le produit intérieur brut (10,1 milliards de dollars en 2007) n'a pas retrouvé son niveau d'avant guerre, l'inflation a explosé en 2006 pour atteindre 7,5 %. 41 % de la population se trouve au chômage, 20 % vivant en dessous du seuil national de pauvreté.

Près de quinze ans après la guerre, il est difficile de définir une réelle identité bosnienne et le projet social et culturel que celle-ci pourrait incarner. La politique ne constituant pas en la matière une avant-garde, il y aurait lieu de se tourner logiquement vers la jeunesse de ce pays. Le système éducatif constitue cependant un obstacle de taille tant il perpétue les réflexes identitaires et contribue à renforcer le rejet de l'autre. La majorité des élèves se regroupent en effet dans les classes fréquentées par des jeunes issus du même groupe ethnique. Une cinquantaine de bâtiments abritent ainsi deux écoles sous un même toit, les élèves des différentes communautés n'étant pas présentes aux mêmes heures. Ailleurs, l'école n'est le lieu que d'un enseignement réservé implicitement à une seule communauté, les minorités s'éloignant pour accéder à une formation dans un autre établissement réservé à leur groupe ethnique ou dans le pire des cas, s'abstenant d'aller en cours.

Un tel système éducatif ne peut que contribuer à perpétuer la défiance à l'égard de l'autre, sa méconnaissance et cristallise les rancoeurs du passé. L'école ne participe pas en Bosnie-Herzégovine de l'éveil des consciences, mission qui lui est traditionnellement dévolue. Chaque groupe ethnique estime, au nom de l'égalité reconnue par les accords de Dayton, avoir droit à son propre programme d'enseignement, arguant également des différences pourtant subtiles entre les langues bosniaque, serbe et croate. Comme l'a souligné le rapport de la commission de suivi de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe en septembre 2008, ce système « codifie la ségrégation ethnique ».

Détail du Mémorial de Srebrenica

La crispation identitaire d'une large partie de la société bosnienne se mesure également au poids pris par les clergés dans la vie sociale. Résignés face à l'inaction politique, la population se retourne vers ses églises, en raison notamment d'un effet de proximité. La coexistence pacifique entre les religions en Bosnie-Herzégovine faisait partie de la mythologie associée à ce pays avant la guerre civile. Au terme de celle-ci, le fait religieux n'a plus le même sens et incarne plus une valeur de refuge que d'ouverture à l'autre. Le cas de la reconstruction de la plus vieille mosquée de Banja Luka, la Ferahdjia, détruite pendant la guerre est assez symptomatique. Près de quinze ans après la fin du conflit, seules les fondations et quelques murs ont pu être relevés. Le chantier a, en effet, été ralenti par un certain nombre de mesures administratives adoptées par la municipalité orthodoxe voire par certaines exactions.

Le cas de l'islam est assez révélateur d'une mutation des identités religieuses en Bosnie-Herzégovine. Très peu pratiquants avant le conflit, les bosniaques ont utilisé la religion afin de reconstruire une identité et une appartenance ethnique. On assiste ainsi à une véritable re-islamisation du pays, incarnée par la multiplication des constructions de mosquées, dont la taille semble démesurée au regard de la population musulmane locale. L'acception tolérante qui lui était traditionnellement associée s'est parallèlement trouvée mise à mal par l'influence de réseaux issus de la péninsule arabique, du Moyen-Orient ou d'Asie. Si le mouvement wahhabite demeure encore marginal, il tend cependant à se structurer autour de l'organisation de la jeunesse islamique active (AIO), créée en 1995 par de jeunes bosniaques ayant combattu contre les bosno-serbes.

La lassitude de la population bosnienne à l'égard de ses élites politiques, sa résignation comme sa tendance au repli identitaire ne supposent pas pour autant une foi absolue en la communauté internationale, dont l'engagement en faveur de la Bosnie-Herzégovine tend à diminuer.

II. UNE PRÉSENCE INTERNATIONALE EN PLEINE EVOLUTION

« Les Balkans produisent plus d'histoire qu'ils n'en peuvent consommer »

Attribué successivement à Otto von Bismarck et Winston Churchill

A. QUEL RÔLE POUR LE HAUT REPRÉSENTANT ?

Les accords de Dayton ont créé le bureau du Haut représentant dont la tâche principale est de faciliter l'application du traité de paix. Les contours de la mission comme les pouvoirs de ce dernier ont été précisé par la suite lors de la conférence de Bonn des 9 et 10 décembre 1997. Qualifié d'autorité décisionnaire, il dispose d'un réel pouvoir de décision et de sanction. Il est nommé par le Conseil pour la réalisation de la paix (PIC), dont le comité directeur comprend une dizaine de pays dont les États-Unis, la France et la Russie mais également la présidence de l'Union européenne. Il est responsable devant ce comité. Depuis 2003, le Haut représentant est également Représentant spécial de l'Union européenne (RSUE).

La délégation en compagnie de M. Valentin Inzko, Haut représentant

Conformément aux pouvoirs accordés lors de la conférence de Bonn, le Haut Représentant peut donc imposer de nouvelles lois, modifier les textes existants, créer de nouvelles institutions ou en amender la composition, suspendre ou destituer des responsables politiques locaux et sanctionner leurs formations politiques. A l'inaction et à la paralysie induite par le régime institutionnel et les formations politiques peut donc répondre une institution étrangère, non-élue et jugée apte à cerner l'intérêt de la Bosnie-Herzégovine. Du code pénal au drapeau même de la Bosnie-Herzégovine, un certain nombre de décisions fondamentales portent ainsi la marque du Haut représentant.

Cette solution n'est bien évidemment pas satisfaisante. La Bosnie-Herzégovine peut, à plus d'un titre, être assimilée par sa population, comme un véritable protectorat international. Le Haut représentant ne dispose d'aucune légitimité démocratique et peut aller à l'encontre du choix des électeurs bosniens, jusqu'à révoquer certains de ses élus. Ses décisions sont, de surcroît faiblement contrôlées. La Cour constitutionnelle juge bien de la conformité de la législation adoptée avec la loi fondamentale, mais elle n'est en aucune manière invitée à apprécier la légitimité de l'intervention du Haut représentant en lieu et place du législateur habituel. Son action maintien de surcroît la classe politique bosnienne en situation de ne pas prendre de décision et légitime presque ses atermoiements.

Cependant, au regard de l'absence chronique de prise de responsabilité des dirigeants bosniens, son action a permis au pays d'avancer dans un certain nombre de domaines et pallier ainsi sa paralysie Il n'a donc pas été illogique de prolonger son mandat qui devait initialement se terminer à la fin du mois de juin 2007. La fonction a néanmoins évolué vers un rôle d'arbitre, son action se limitant depuis 2005 à des mesures techniques. L'abrogation d'une résolution du parlement de Republika Sprska annulant des transferts de compétence vers l'État central en juin 2009 souligne néanmoins que des mesures fortes peuvent encore être prises, indépendamment du prochain retrait du Haut représentant.

La disparition du Haut représentant est, en effet, de nouveau d'actualité. Elle ne traduirait pas la disparition de la communauté internationale puisque les fonctions de Représentant spécial de l'Union européenne seraient maintenues. A l'occasion de sa rencontre avec les membres de la délégation, M. Valentin Inzko, actuel Haut représentant, a indiqué que la suppression de son poste signifierait une réelle avancée pour la Bosnie-Herzégovine, puisqu'elle suppose une réelle prise de responsabilité de la part des autorités politiques bosniennes.

Le PIC a assigné cinq objectifs à atteindre et deux conditions à remplir en vue de fermer le bureau du Haut représentant, le mandat du Représentant spécial de l'Union européenne étant, quant à lui, maintenu. Les cinq objectifs ont trait au statut de Brèko, à la résolution des questions liées à la propriété des biens de l'État et des armées, au renforcement de l'État de droit, notamment en matière de crimes de guerre et à un accord sur le budget. Des progrès significatifs ont été enregistrés au sujet de quatre d'entre eux, notamment depuis l'accord intervenu entre les trois formations politiques à Prud en novembre dernier. Les deux conditions tiennent à la signature d'un accord de stabilisation et d'association, acquise depuis le 16 juin 2008 et à une certaine stabilité politique.

Une telle évolution incite à penser que le Bureau du Haut représentant devrait fermer d'ici un an. Toutefois, au regard de son intervention énergique à l'endroit de la Republika Sprska en juin dernier mais également des réformes restant à accomplir, la délégation espère que le représentant spécial de l'Union européenne disposera d'une capacité arbitrale intacte, fut-elle assortie de meilleures garanties en matière de contrôle mais aussi de recours. La délégation souhaite que, dans ce nouveau cadre, l'une des premières missions du Représentant spécial ait trait à l'école, par trop absente des conditions et objectifs fixés par le PIC.

B. UNE PERSPECTIVE EUROPÉENNE INCERTAINE

Les accords de stabilisation et d'association ont été créés en 2001 dans le cadre de l'établissement d'un partenariat entre l'Union Européenne et les Balkans Occidentaux. Ils poursuivent deux objectifs prioritaires : la promotion d'une coopération régionale et la stabilisation doublée d'une transition rapide vers l'économie de marché. Ils constituent l'étape préalable à la reconnaissance du statut de candidat à l'adhésion. L'ancienne république yougoslave de Macédoine, la Croatie, l'Albanie et le Monténégro ont déjà signé ce type de convention.

Les négociations en vue de la signature d'un accord de stabilisation et d'association (ASA) avec la Bosnie-Herzégovine ont été entamées par la Commission européenne le 21 novembre 2005. Au terme de celles-ci, une version définitive de l'accord a été présentée au Conseil en mai 2007. La volonté de celui-ci d'obtenir une coopération plus étroite des autorités bosniennes avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) mais également de voir aboutir la réforme, maintes fois ajournée, de la police locale, ont conduit la Commission à repousser sa décision de parapher l'accord.

Si, dans son rapport annuel de suivi des pays candidats à l'élargissement publié en novembre 2007, la Commission fait état de réels progrès concernant la collaboration avec le TPIY, elle pointe également l'absence de réformes viables dans les domaines institutionnel et judiciaire. Soulignant la complexité des arrangements constitutionnels qui régissent le pays et la forte prégnance des rhétoriques nationalistes au sein de l'État central, la Commission appelle de ses voeux une modernisation des institutions doublée d'une plus grande coordination entre l'État central et les deux entités, Republika Srpska bosno-serbe et Fédération croato-musulmane. De tels dysfonctionnements ne sont pas sans incidence sur l'application des lois, notamment en matière de lutte contre la corruption. La mise en place d'un véritable État de droit est actuellement impossible au regard de la fragmentation du système judiciaire. La Commission remarque en outre la persistance d'importantes manifestations d'intolérance religieuse et de discriminations ethniques, peu en accord avec l'objectif assigné par l'Union européenne de renforcer la protection des minorités et assurer un plus grand respect des droits de l'Homme. L'absence de consensus politique en matière économique est également relevée par la Commission, qui s'inquiète, par ailleurs, d'un taux de chômage très élevé.

La décision de la Commission de parapher l'accord de stabilisation et d'association le 4 décembre 2007 a pu, en conséquence, apparaître troublante, tant elle semble à rebours des réserves exprimées par cette même institution un mois plus tôt. L'accord est de surcroît paraphé par un Premier ministre bosnien démissionnaire à la suite d'une crise politique induite par l'échec d'une nouvelle tentative de réforme de la police. La Commission justifie néanmoins cette décision par les avancées observées en vue de faire aboutir la réforme de la police et les progrès déjà notés en matière de coopération avec le TPIY.

Le paraphe de la Commission anticipe, pourtant, de plusieurs mois les avancées effectives en matière de réforme de la police, les deux lois dans ce domaine ayant été adoptées par les deux chambres du parlement bosnien le 16 avril 2008. Il convient de souligner la relative modestie de la réforme envisagée, qui semble assez loin de l'appel à une plus grande intégration formulé par la Commission dans son rapport de novembre 2007. Si l'État central devrait se doter d'une direction de coordination, les forces de police restent placées sous la responsabilité des deux entités. La mise en oeuvre effective de cette réforme est par ailleurs liée à l'adoption d'une nouvelle constitution, au sujet de laquelle il n'existe pas, à l'heure actuelle, de consensus « national ».

Une telle démarche semble, de fait, mue par une certaine précipitation, induite notamment par la volonté, à l'époque, de la présidence slovène de l'Union européenne de confirmer significativement la vocation européenne des Balkans occidentaux. L'accession à l'indépendance du Kosovo et la tentation irrédentiste qu'elle suscite en Republika Sprska justifient également la volonté d'ancrer la Bosnie-Herzégovine dans ses frontières actuelles dans une perspective d'adhésion à moyen terme. Cet empressement demeure néanmoins une source d'inquiétude au regard des expériences passées : les cas de l'Albanie et de l'ancienne république yougoslave de Macédoine sont, à cet égard, significatifs. Comme l'a souligné la Commission elle-même dans son rapport de suivi de novembre 2007, les accords de stabilisation et d'association signés avec ces pays n'ont pas permis de créer de réelle dynamique réformiste, seule à même d'ouvrir la voie vers l'adhésion à l'Union européenne.

Cinq mois après la signature de l'accord, le rapport de suivi de la Commission de novembre 2008 pointe à nouveau les mêmes défauts que ceux observés un an plus tôt : absence de prise de responsabilité politique, influence des critères ethniques, persistance des phénomènes de corruption. Si le rapport souligne un certain nombre de progrès dans le domaine des douanes, de la fiscalité ou des transports, des avancées notables doivent néanmoins être effectuées en ce qui concerne la lutte contre la criminalité organisée, la libre circulation des marchandises, des personnes et des services, l'emploi ou les politiques sociales.

Cette vision européenne de la Bosnie-Herzégovine, alternant entre optimisme et réserve, n'est pas sans susciter d'interrogation sur ses perspectives d'adhésion à moyen terme. La signature de l'accord de stabilisation et d'association ne semble en l'occurrence n'avoir de valeur que symbolique, la phase suivante - l'octroi au pays du statut de candidat - n'étant pas, à l'heure actuelle, prévue.

Une telle démarche n'est pas sans susciter une certaine perplexité au sein de l'opinion publique bosnienne. A ses yeux, les États-Unis apparaissent plus dignes de confiance qu'une Union européenne avançant à un rythme syncopé. Là encore le souvenir de la guerre joue à plein, l'irrésolution des européens entre 1992 et 1995 ayant été notamment soulignée à l'occasion des entretiens de la délégation avec des personnalités politiques bosniennes. L'espoir d'un réengagement des américains lié à l'arrivée au pouvoir de Barack Obama se fait même désormais jour et constitue, selon ses promoteurs, une réelle alternative face aux atermoiements européens.

Le groupe interparlementaire demeure convaincu de la perspective européenne de la Bosnie-Herzégovine, qui sera à même d'ancrer définitivement ce pays dans la modernité. Elle souhaite la mise en oeuvre par la Commission d'un calendrier commun pour l'ensemble des États candidats des Balkans occidentaux (à l'exception de la Croatie) précisant les critères à remplir en vue d'une adhésion en juin 2014. Cette région vit de symboles et de mémoires, l'idée d'une intégration de l'ensemble des pays des Balkans cent ans après le déclenchement de la première guerre mondiale sur un pont de Sarajevo permettrait de clore des années de déchirement et permettre aux anciens belligérants d'entrer définitivement dans le XXIe siècle.

C. LES VISAS : UNE ESPÉRANCE À NE PAS CONDAMNER

La Bosnie-Herzégovine et l'Union européenne ont signé un accord de facilitation de délivrance des visas, entré en vigueur le 1 er janvier 2008. la Bosnie-Herzégovine a depuis, entrepris des démarches en vue d'obtenir un régime d'exemption totale et s'est engagé à respecter un certain nombre de critères techniques et politiques.

Ces critères peuvent être regroupés au sein de quatre ensembles ou blocs : Sécurité des documents officiels (bloc 1), migration illégale y compris les questions de réadmission (bloc 2), ordre public et sécurité (bloc 3) et relations extérieures et droits fondamentaux (bloc 4). A l'heure actuelle, 72 recommandations de l'Union européenne sur 120 ont été adoptées. De simples mesures techniques permettraient de respecter 38 autres dispositions.

La dizaine de critères restant à respecter nécessite par contre un consensus politique qu'il apparaît délicat de trouver dans le contexte actuel. Si la gestion des frontières ou les lacunes de la législation locale concernant la lutte contre les discriminations posent problème, la majeure partie des difficultés est liée au bloc 3. Les insuffisances en matière de lutte contre le blanchiment d'argent, la corruption ou le trafic de stupéfiants comme l'absence d'harmonisation totale de la législation pénale bosnienne avec le droit international sont en effet des obstacles a priori insurmontables. La Commission a, à cet égard, décidé le 15 juillet de repousser de six mois voire un an la libéralisation totale des visas à destination de la Bosnie-Herzégovine. Il appartiendra au Conseil de se prononcer définitivement en octobre prochain.

Le groupe interparlementaire est assez partagé sur cette question. Dans un premier temps, il ne semble pas logique d'accéder à la demande de la Bosnie-Herzégovine si elle ne respecte pas des critères importants. Ce refus doit permettre une prise de conscience au sein de l'appareil d'État bosnien et l'obliger à faire aboutir, à court terme, une véritable réforme de sa législation pénale. Le fait que la Bosnie-Herzégovine soit le seul pays de l'ancienne Yougoslavie à ne pas bénéficier d'un régime d'exemption à compter du 1 er janvier 2010 incite néanmoins à réviser un tel jugement. L'absence de libéralisation porte, en effet, un sérieux coup à la citoyenneté bosnienne. Rappelons que les bosno-croates ont pour la plupart la double nationalité croate et bosnienne et bénéficient à ce titre d'un régime d'exemption accordé à Zagreb. Belgrade devrait bénéficier de telles mesures à compter du 1 er janvier prochain. Les bosno-serbes de la Republika Sprska qui disposent souvent de la double nationalité pourraient également bénéficier par ce biais du régime d'exemption. Seuls les déplacements de la majorité bosniaque vers l'Union européenne seraient donc soumis à l'obtention d'un visa.

Les bosniaques, enclins à une réforme de l'État central en vue de faire émerger une véritable citoyenneté bosnienne, se retrouveraient donc les premiers pénalisés par ce refus. Perçu comme une mesure vexatoire, il renforcerait une défiance latente à l'égard de l'Union européenne. Il convient donc de s'interroger sur l'opportunité politique d'un report, fut-il réduit à six mois. L'Union européenne a prouvé sa souplesse lors de la signature de l'accord de stabilisation et d'association. Elle devrait en faire à nouveau preuve sur cette question délicate. Il ne s'agit plus de raisonner en termes techniques mais bien de réfléchir au sens qu'il convient d'accorder au concept de citoyenneté bosnienne. L'absence de libéralisation totale du régime des visas reviendrait à conclure que les déplacements ne sont aisés que pour les personnes bénéficiant de la double nationalité et que la citoyenneté bosnienne est synonyme d'enfermement.

D. UN NOUVEAU CADRE POUR LA PRÉSENCE MILITAIRE INTERNATIONALE

La présence militaire internationale s'est considérablement allégée depuis la fin du conflit. L'opération EUFOR-Althéa a succédé en novembre 2004 à la SFOR mise en place par l'OTAN en 1996 (32 000 hommes), qui avait elle-même pris le relais de l'IFOR (60 000 soldats en 1995). Cette opération est menée conjointement par l'Union européenne et l'OTAN. Initialement dotée de 7 000 hommes, elle en comprend désormais 2 166 hommes, l'Espagne (310 soldats), l'Italie (283) et la Turquie (236) étant les principaux contributeurs. Un peu plus de 700 hommes sont aujourd'hui basés à Sarajevo.

La réduction progressive du nombre d'hommes sur place est pleinement justifié au regard de l'amélioration de la sécurité dans le pays. Le maillage du territoire permis par l'installation de 43 postes d'observations facilite, à cet égard, une évaluation efficace de la situation. Des menaces pèsent néanmoins sur la permanence de ces structures au regard de la diminution régulière du nombre de soldats.

A l'instar du Royaume-Uni en 2007, la France, neuvième contributeur jusque-là avec 97 soldats, a décidé en début d'année de se retirer de Bosnie-Herzégovine. Ce retrait s'est terminé le 30 juin 2009. Il n'appartient pas à un groupe interparlementaire d'évaluer le bien-fondé d'une telle décision et de contester par là même les objectifs stratégiques du Gouvernement. Ce n'est pas néanmoins sans une certaine émotion que le groupe a rencontré les derniers soldats français basés à Sarajevo et pu évaluer avec eux leur degré d'implication dans la consolidation quotidienne de la paix, à la veille de leur départ. La France a payé un lourd tribut dans le conflit, avec 84 soldats tués. Elle a oeuvré au plan diplomatique pour une sortie du conflit. Le maintien d'une présence française, fut-elle réduite à la portion congrue, pouvait apparaître pertinente, notamment sur le plan symbolique.

Au regard du travail effectué jusqu'ici et de son importance dans le contexte actuel de lutte contre la criminalité transfrontalière, la mission de la cellule d'acquisition et d'analyse du renseignement (CIAR), animée par trois gendarmes, aurait ainsi pu être prolongée. Cette cellule collecte notamment un certain nombre d'informations relatives aux demandeurs de visas et fait barrage à leur octroi, en cas de lien avéré avec la criminalité organisée. Une cellule semblable travaille actuellement au Kosovo.

Le groupe interparlementaire regrette, dans le même ordre d'idées, la fermeture de la mission militaire de Sarajevo, l'attaché de défense auprès de l'Ambassade travaillant désormais depuis Budapest. Là encore, le passé militaire de la France en Bosnie-Herzégovine méritait sans doute une plus grande attention.

Le groupe interparlementaire souhaite vivement que les quatorze actions de coopération en matière de défense entreprises avec la Bosnie-Herzégovine puissent aboutir, en dépit de ce désengagement. L'aide à la formation au déminage constitue, notamment, une priorité dans un pays où près de 4 % du territoire recèle encore mines anti-personnel et autres objets non explosés.

La présence de la France est plus visible au sein de la mission de police de l'Union européenne. Placée sous l'autorité du Représentant spécial pour l'Union européenne, elle a pour objectif la mise en place d'un appareil de police conforme aux standards européens et internationaux. Aux côtés des 27 États membres de l'Union européenne, le Canada, l'Islande, la Suisse, la Turquie, l'Ukraine et la Norvège fournissent officiers de police et experts civils. Les effectifs de la mission s'établissent actuellement à 169 officiers de police et 199 experts civils, auxquels s'ajoutent 219 agents locaux. La France, l'Allemagne et l'Italie sont les trois pays les plus représentés dans ce contingent.

Le mandat actuel de la mission de police se termine à la fin de l'année 2009. Sa prolongation fait actuellement l'objet de débats au sein du Conseil. En l'absence d'avancée tangible des autorités bosniennes en vue d'une réforme de la police, le maintien d'une telle opération apparaît indispensable. La lutte contre la criminalité organisée suppose également un soutien international que la mission semble la plus à même d'offrir. Il convient, à cet égard, de saluer la coopération technique entreprise entre la France et la Bosnie-Herzégovine en matière de lutte contre la fausse monnaie et les trafics en tout genre. Plus que jamais, la Bosnie-Herzégovine, si elle entend s'ancrer dans la modernité, doit s'affranchir de certains clichés qui lui sont traditionnellement attachés, au nombre desquels la délinquance occupe une place de choix.

E. UN PAYS ÉCONOMIQUEMENT OUVERT MAIS DE MOINS EN MOINS AIDÉ

Selon les estimations de l'OCDE, l'aide publique au développement s'est élevée à 443 millions de dollars en 2007 contre 736 sept années plutôt ; la baisse des subventions accordées est opérée par l'ensemble des contributeurs. Le premier d'entre eux, l'Union européenne a ainsi divisé son aide par trois en sept ans pour atteindre 63 millions de dollars, les États-Unis réduisant son apport dans des proportions identiques sur la même période (31 millions de dollars versés en 2007). Les financements accordés par la Banque mondiale demeurent stables autour de 47 millions de dollars.

Avec 5,6 millions de dollars, la France ne figure pas dans la liste des principaux contributeurs et se place derrière l'Espagne, l'Allemagne, la Turquie ou les Pays-Bas. L'absence d'attaché économique au sein de l'Ambassade de France est, à cet égard, assez révélatrice.

La Bosnie-Herzégovine bénéficie, en outre, depuis 2007 du nouvel instrument de pré-adhésion IPA de l'Union européenne : 332 millions d'euros prévus pour la période de 2007-2010.

Au plan commercial, la Bosnie-Herzégovine s'est doté d'un régime assez libéral dans la région et réalise la moitié de ses échanges avec l'Union européenne. Les pays voisins (Serbie, Croatie, Slovénie, Autriche, Allemagne, Italie et Hongrie) constituent ses principaux partenaires commerciaux. Avec 71,5 millions d'euros d'exportations vers la Bosnie-Herzégovine (produits chimiques, matières plastiques de base, métaux, produits automobiles) et 54,7 millions d'euros d'importations en France (biens de consommation, papier, bois, carton), les échanges avec la France ne représentent que 3,9 % du commerce de la Bosnie-Herzégovine avec l'Union européenne. La France est le onzième client et le treizième fournisseur de la Bosnie-Herzégovine.

L'absence de partenariat privilégié entre la France et la Bosnie-Herzégovine en matière commerciale se retrouve également dans le domaine des investissements. La situation est peut être encore plus dramatique : sur un total - déjà faible - de 3,5 millliards d'euros d'investissements directs étrangers depuis 1994, seul 5 millions d'euros proviennent de France. Le principal investisseur français est, à l'heure actuelle, le groupe Intermarché qui dispose d'une vingtaine de magasins dans le pays. L'obtention début 2008 par le groupe Lafarge d'une licence d'exploitation de gisements de gypse dans le canton de Bihac au nord du pays devrait cependant changer la donne. La création d'ici 2012 d'une usine de fabrication de plaques de plâtres induit en effet un investissement d'environ 35 millions d'euros.

L'ambition du groupe Lafarge devrait inspirer d'autres investisseurs français alors même que les financements extérieurs tendent à croître (1,1 milliard d'euros pour la seule année 2007). L'absence de ligne aérienne directe entre Paris et Sarajevo constitue à cet égard un sérieux frein, alors même que les capitales slovène, croate, ou serbe bénéficient d'ores et déjà d'une liaison semblable. Il n'est pas étonnant d'observer que les cinq pays représentant les deux tiers des investissements directs étrangers (IDE) en Bosnie-Herzégovine (Serbie : 23 % des IDE, Autriche et Croatie : 13 %, Slovénie : 11 %, Suisse 7,5 %) disposent de vols directs entre leurs capitales et Sarajevo.

Au-delà du continent européen, il convient d'observer un net rapprochement avec les pays musulmans dans le domaine économique. La Malaisie ou l'Arabie Saoudite ont ainsi renforcé leur présence dans le secteur bancaire, des relations commerciales ont par ailleurs été nouées avec la Lybie et l'Algérie. La Turquie fait, à cet égard, figure de partenaire privilégié comme en témoigne la récente recapitalisation de la compagnie aérienne Bosnia Airlines par la Turkish Airlines.

III. « L'ESPRIT DE SARAJEVO » COMME RÉPONSE À LA PARALYSIE ?

« Nos vies ne valent la peine d'être vécues qu'à la condition d'accepter nos rêves et de plonger une fois pour toutes dans l'exubérance et les contradictions de notre époque »

Pierre Courtin

La crispation d'une partie du pays sur son passé ne saurait occulter quelques motifs d'espoir décelés ça et là lors des rencontres de la délégation avec des personnalités du monde culturel. La culture semble être un véritable laboratoire d'idées en vue de faire émerger une réelle identité bosnienne, pour partie introuvable dans le discours politique.

Le groupe interparlementaire se félicite, à cet égard, de l'action de Français dans ce domaine. La coopération culturelle doit être envisagée, une fois que les armes se sont tues, comme un relais indispensable à notre action militaire et diplomatique.

A. SARAJEVO, MYTHES ET RÉALITÉ

Sarajevo a longtemps été considérée comme le symbole d'une Yougoslavie apaisée, où coexistent pacifiquement toutes les communautés, sa diversité harmonieuse étant largement mise en avant à l'occasion des Jeux olympiques de 1984 organisés dans la ville. La structure même du centre-ville où l'on retrouve dans un périmètre restreint, la cathédrale catholique, une église orthodoxe et une mosquée venait illustrer un « esprit de Sarajevo », issu des XVIe et XVIIe siècles ottomans.

Cette époque a, en effet, vu la multiplication des bibliothèques et des écoles dans la vieille ville, Sarajevo accueillant par ailleurs une importante communauté orthodoxe ainsi que des juifs séfarades expulsés d'Andalousie. Une synagogue est construite en 1580, la ville comporte alors 91 quartiers musulmans, deux chrétiens et un juif. Le mythe d'une « Jérusalem balkanique » naît à cette époque. Le passage sous tutelle austro-hongroise à compter de 1878 contribuera à modifier cet équilibre en favorisant l'installation dans la ville de nombreux catholiques. La ville sera dès lors le terreau d'une culture diverse et ouverte, préfiguration de cette identité bosnienne qu'il conviendrait de faire émerger.

Vouloir faire de Sarajevo une ville d'ores et déjà ouverte, avant-garde d'une Bosnie-Herzégovine qui prend progressivement conscience d'elle-même et s'affranchit dans un même temps de ses démons communautaires n'a pourtant pas vraiment de sens au regard de l'actualité récente. Si la capitale possède en son sein un certain nombre d'intellectuels et de forces vives aptes à imaginer les contours d'une Bosnie post-Dayton, elle n'est pas totalement en décalage avec les crispations observées ailleurs. Elle est en tous les cas à rebours de l'image cosmopolite qui lui est traditionnellement attachée.

La ville est désormais à une large majorité bosniaque. Là où le recensement de 1991 comptabilisait 49 % de musulmans, contre 30 % de bosno-serbes et 7 % de croates, le reste se déclarant « Yougoslaves », les dernières estimations indiquent que 77 % des 300 000 habitants de la ville se considèrent désormais comme musulmans, la qualification de « yougoslave » ayant disparue. Une telle modification de la sociologie locale est à relier à la guerre et à l'afflux de réfugiés du Sandjak serbe voisin. L'échec des mesures prises par la communauté internationale en faveur du retour des minorités dans Sarajevo (déclaration de Sarajevo signée le 3 février 1998) est révélateur du tournant pris par la ville à la sortie du conflit.

A ce bouleversement ethnique s'ajoute une profonde révision de sa composition sociale. La guerre a poussé vers la ville nombre de ruraux, peu en phase avec la tradition tolérante de Sarajevo. Les rites urbains réunissant toutes les communautés ont été progressivement abandonnés ou ont perdu de leur intensité, à l'image des rassemblements du 1 er mai organisés aux sources de la Bosna.

Au-delà de la progression du nombre de femmes voilées dans les rues de Sarajevo, les foulards utilisés demeurant encore loin de la burqa voire du tchador traditionnel, il convient de s'attarder sur les violences observées le 26 septembre 2008 à l'occasion de la tenue du premier festival homosexuel dans la capitale. Celles-ci traduisent en effet la montée en puissance du wahhabisme au sein de l'ancienne Jérusalem balkanique et l'effacement concomitant d'un islam urbain et traditionnellement tolérant.

La crispation identitaire n'est donc pas un vain mot au sein même de la capitale bosnienne. Pourtant, là plus qu'ailleurs peut-être, la culture tend à générer de nouvelles formes d'espoir et combler de la sorte l'atonie d'une partie des élites politiques locales. S'il apparaît indispensable de ne pas céder à la tentation du mythe de la Sarajevo cosmopolite, il convient néanmoins de s'attarder sur ses ambitions culturelles qu'illustrent le Festival du film ou le Jazz Fest Sarajevo. La reconnaissance internationale accordée à ces événements confère à la ville une forme de légitimité culturelle et renforce indirectement sa position de capitale d'État, quand bien même cet État n'existerait pas encore totalement.

Ces festivals et la pratique des arts auxquels ils sont dédiés soulignent assez bien la réalité d'une culture bosnienne, principalement issue de Sarajevo, seule cité du pays aux traditions esthétiques mêlées. C'est à partir de cette culture que la Bosnie-Herzégovine peut véritablement devenir une nation. L'enjeu est de taille. Le succès d'une telle entreprise demeure de surcroît fragile comme le souligne les nombreux débats autour de la réouverture sans cesse ajournée de la Bibliothèque de Sarajevo, la Vijecnica, symbole de la diversité culturelle de la ville d'avant-guerre.

B. DANIS TANOVIC : FAIRE DE LA SOCIÉTÉ CIVILE L'ACTRICE DU CHANGEMENT

Récompensé par l'Oscar du meilleur film étranger pour No man's land en 2002, le réalisateur Danis Tanovic d'origine bosniaque a fondé le 5 avril 2008 le mouvement politique Nasa Stranka (Notre parti), qui entend rassembler les différentes communautés bosniennes. La composition des instances dirigeantes du parti avec un bosno-serbe à sa tête, M. Bojan Bajic, trente ans, et un bosno-croate à la vice-présidence, M. Boris Divkovic, reflète cette ambition. Les cadres du parti sont issus des mondes universitaire et culturel.

Si ses résultats demeurent encore modestes, la nouvelle formation n'ayant obtenu que 12 % dans le très symbolique centre de Sarajevo lors des dernières élections municipales, elle traduit néanmoins l'émergence au sein de la société civile, et en particulier dans le monde de la culture, d'une véritable volonté d'incarner la nation bosnienne. L'absence de résultat immédiat n'est pas sans décourager les fondateurs du parti tant celui-ci entend travailler sur la durée. La principale ambition est d'attirer une partie des abstentionnistes.

La démarche de Nasa Stranka n'est pas sans intérêt tant elle prend à rebours les logiques mises en avant en Republika Sprska et au sein de la Bosnie-Herzégovine. Loin de céder à la tentation de condamner totalement les accords de Dayton, le jeune mouvement politique insiste plutôt sur leur application raisonnée. M. Bajic dénonce ainsi la permanence d'objectifs datant de la guerre au sein des programmes des principales formations politiques et l'inapplication implicite des accords en raison de cette logique maximaliste. Aucune avancée ne sera possible si les dirigeants bosniaques, serbes et croates campent sur leurs positions.

Le refus de centrer le débat sur les questions institutionnelles traduit une volonté de répondre aux défis quotidiens que rencontre la population bosnienne, qu'il s'agisse d'économie, d'éducation, de justice ou d'écologie. Certains des membres de Nasa Stranka dénoncent ainsi une économie mercantiliste, quasi moyenâgeuse, peu apte à attirer les investissements européens. La modernisation de la Bosnie-Herzégovine passe avant tout par un travail sur les structures économiques et sociales, seules aptes à transcender les logiques identitaires, fondées notamment sur l'exacerbation des peurs.

Dans cette optique, Nasa Stranka confère au Haut Représentant une seule fonction d'arbitre apte à trancher en cas de violation des accords de Dayton. Il ne saurait assumer d'autre responsabilité tant l'exercice réel du pouvoir doit revenir aux forces politiques en présence. Nasa Stranka milite pour une responsabilisation des acteurs politiques qui cesseraient dès lors de se défausser sur l'entité voisine ou la communauté internationale. Cette prise de conscience est le seul préalable à toute réforme ambitieuse du pays.

C. L'ART AU SERVICE DE LA RÉSISTANCE PUIS D'UN PROJET DE SOCIÉTÉ : ARS AEVI ET L'ASSOCIATION DADADA

Le projet Ars Aevi (Art de l'époque en latin) est né de l'imagination d'Enver Hadziomerspahic, ancien directeur des Jeux olympiques d'hiver de Sarajevo en 1984 et des biennales d'art contemporain organisées dans la même ville en 1987 et 1989. Le projet est conçu comme une réponse à la destruction du musée olympique de Sarajevo en avril 1992. La création d'une centre mondial d'art contemporain doit répondre à la tradition cosmopolite de la capitale bosnienne, mise à mal par la guerre civile. Ce musée doit être l'expression d'une volonté collective internationale et s'avère dans un premier temps un lieu sans murs.

Enver Hadziomerspahic noue, dans ce contexte, des contacts avec des directeurs européens de centres d'art contemporain. Chacun doit sélectionner dix artistes qui produiront une oeuvre destinée au musée. Christian Boltanski, Sophie Calle, Joseph Beuys ou Mimmo Paladino ont ainsi été choisis. Bénéficiant du soutien de l'Union européenne, des ministères français de la culture et des affaires étrangères et de l'État italien, la collection croît d'année en année pour atteindre 161 oeuvres en 2009, dont une vingtaine d'artistes bosniens. Celles-ci sont exposées à de fréquentes reprises à Sarajevo à depuis 1999 sur le site de l'ancien musée olympique, mais également à Milan, Prato, Venise, Ljubljana, Bologne, Vienne ou Istanbul. Au-delà de la démarche artistique, il convient de retenir la volonté des promoteurs du projet Ars Aevi d'inscrire cette entreprise dans un contexte régional, Zagreb (Croatie), Cetinje (Monténégro) ou Belgrade (Serbie) devant bientôt accueillir des centres partenaires du projet. L'ambition est claire : modifier la perception de la ville de Sarajevo et de la région, les détacher des souvenirs de guerre et les faire définitivement rentrer dans le nouveau millénaire.

Les locaux de Sarajevo sont encore aujourd'hui provisoires. La construction d'un nouveau musée lancée en 1999 sous l'impulsion de Renzo Piano devrait aboutir dans les prochaines années. Comme un symbole, le premier élément d'ores et déjà construit de ce musée est un pont qui permet de relier le musée au centre-ville.

Musée Ars aevi

Une initiative franco-bosnienne a également retenu l'attention du groupe interparlementaire tant elle permet à la Bosnie-Herzégovine de s'affranchir de l'image d'un pays en guerre perpétuelle. L'association Dadada a ainsi ouvert deux galeries d'art contemporain au coeur du centre-ville de Sarajevo : la Galerija 10m2 en 2004 et le Duplex en 2008, sous l'impulsion des français Pierre Courtin et Jean-François Daoulas.

Selon ses promoteurs, Dadada a vocation à créer une plateforme de production, de présentation et de diffusion d'oeuvres modernes d'artistes locaux, utilisant tous les supports : sculpture, peinture, vidéo, dessin, etc. Dadada entend nouer des partenariats en vue de faciliter l'exposition de ces oeuvres à l'étranger. La Galerija 10m2 dispose déjà d'antennes à Zagreb et Belgrade, le symbole n'étant pas dédaignable. Le Centre d'Art Oui à Grenoble, la Générale en Manufacture à Sèvres, la KUK Galerie de Cologne (Allemagne) ou la Halo Galeria d'Olstzyn (Pologne) ont déjà noué une collaboration avec Dadada.

Le Duplex présente ainsi deux fois par an la première exposition personnelle d'un jeune artiste bosnien. Au delà de la présentation des oeuvres, la galerie souhaite accompagner ces jeunes artistes dans leurs démarches professionnelles, les mettre en relation avec les acteurs du monde de l'art contemporain. Conçue également comme un centre de documentation, la galerie entend également conduire une politique d'édition, d'accueil des publics (sensibilisation et pédagogie). L'animation sociale et culturelle fait également partie de ses missions.

L'exposition actuellement en cours au Duplex est assez révélatrice. La galerie expose en effet les résultats d'un concours d'affiches sur Sarajevo. Véritable travail d'expiation pour certaines, en grande majorité teintées d'ironie, elles témoignent tout à la fois d'une certaine nostalgie à l'égard de la Sarajevo d'avant-guerre, encore auréolée de l'éclat des Jeux olympiques, d'un dégoût face à la barbarie dont la ville a été le cadre puis un symbole. Elles matérialisent aussi d'un espoir en un avenir forcément européen, dont les bases seraient celles de la réconciliation entre les communautés.

La délégation au Duplex en compagnie de MM. Jean-François Daoulas, Lazare Paupert (conseiller culturel auprès de l'Ambassade de France) et Pierre Courtin
(de gauche à droite)

Le choix de l'art contemporain est assez symbolique. Ancrer le pays dans une modernité artistique apparaît comme une évidence en vue de lui faire tourner la page des horreurs passées. Favoriser la création locale ou accueillir les artistes du monde entier au sein d'une enceinte innovante sont apparus aux membres de la délégation comme des formidables signes d'espoir et une véritable réponse à la paralysie politique qu'elle a pu malheureusement observer lors de ses entretiens. Au travers d'un tel mouvement, Sarajevo peut redevenir cette ville ouverte sur le monde, éprise de culture, qu'elle était avant-guerre.

Un soutien manifeste de la Réunion des musées nationaux ou des musées régionaux à l'égard de ces deux entreprises apparaît comme prioritaire en vue de démontrer l'attachement de notre pays à l'égard de ce type d'initiative. Exposer les oeuvres de jeunes artistes bosniens ou la collection Ars Aevi n'est pas un acte anodin. Il a valeur d'appui à ceux qui entendent ancrer la Bosnie-Herzégovine dans la modernité et légitime un peu plus leurs ambitions.

D. L'AMBITION CIVIQUE DU CENTRE CULTUREL ANDRÉ MALRAUX

Le centre culturel André Malraux a été crée en juillet 1995. Il est situé en face du marché Markale dont le nom évoque l'un des plus sinistres épisodes de la guerre civile. Il s'inscrit dans le prolongement de la librairie-galerie française « Paris-Sarajevo » ouverte entre septembre et octobre 1994, rue du Maréchal Tito, au coeur de la vieille ville de Sarajevo, alors assiégée. Le local avait alors accueilli, malgré le danger, près de deux mille visiteurs, attirés par la mise à disposition de livres neufs, la diffusion d'oeuvres vidéo de Chris Marker et Alain Cavalier ou encore l'exposition de photographies de Gérard Rondeau.

En dépit de sa brièveté, l'expérience de la librairie a révélé les attentes d'une partie de la population bosnienne à l'égard de manifestations culturelles leur permettant de dépasser les traumatismes quotidiens et maintenir, ainsi, un lien avec le monde. Appuyé par l'association Paris-Sarajevo-Europe, fondée par Francis Bueb et soutenue par des personnalités aussi diverses que Bernard-Henri Lévy, Jane Birkin, Edgar Morin, Agnès b., Jorge Semprun, Alain Souchon ou Olivier Todd, le Centre André Malraux avait pour objectif principal, dans un pays encore en guerre au moment de son ouverture, de promouvoir la reconstruction de la vie culturelle tant à Sarajevo que sur l'ensemble du territoire.

Depuis les accords de Dayton, le Centre André Malraux entend faire émerger une réelle identité bosnienne dépassant les réflexes communautaires et tente par là même de recréer « l'esprit de Sarajevo », manifestement évanoui après des années de conflits. Porte ouverte sur l'Europe en général et la France en particulier, le Centre souhaite développer au maximum les interactions culturelles avec l'extérieur tout en favorisant les échanges au sein de la société civile locale. Le Centre participe d'un rapprochement indispensable entre les entités, sans lequel une perspective d'adhésion à terme à l'Union européenne n'aurait aucune consistance. Il remplace, à cet égard, formations politiques voire d'organes de presse manifestement crispés sur les conflits passés.

Son action est protéiforme : manifestations littéraires et cinématographiques, cours de langue, traductions littéraires, soutien à de jeunes artistes mais aussi aide à la coopération médicale en partenariat avec l'association Médecine France Bosnie-Herzégovine.

La délégation avec l'équipe du Centre culturel André Malraux

Les manifestations littéraires sont les plus emblématiques. A cet égard, le Centre poursuit la mission initiale de la librairie « Paris-Sarajevo » : diffusion d'ouvrages et organisation de lecture-débats. Avec l'arrêt de la guerre, il a, par ailleurs, multiplié les projets d'envergure autour du livre. Les Rencontres européennes du livre, organisées chaque automne à Sarajevo depuis 2000, apparaissent à cet égard comme le symbole de l'action du Centre. Elles répondent à plusieurs objectifs : multiplier les échanges entre des auteurs venus du monde entier et le public avec comme thèmes récurrents : la place des Balkans en Europe, la notion de culture européenne et, bien évidemment, l'indispensable émergence d'un vouloir-vivre ensemble. Les Rencontres prennent la forme de tables-rondes, de conférences-débats, d'ateliers mais aussi d'expositions et de séances de projection de film.

Le Centre entend parallèlement favoriser l'émergence d'une nouvelle génération d'écrivains bosniens, aptes à succéder aux Ivo Andriæ et autres Mea Selimoviæ, au travers de son projet d'école d'écriture littéraire sise à Sarajevo. Il n'entend pas pour autant tourner le dos au patrimoine culturel local, comme en témoigne le soutien qu'il apporte à la traduction en français d'auteurs de la région tels qu'Abdulah Sidran, Ozren Kebo ou Miljenko Jergovic. C'est dans cette optique que le Centre a ouvert, en collaboration avec le Centre européen de Traduction Littéraire (CETL) de Dilbeek (Belgique), une école de traduction français-bosnien. Celui-ci dispense une formation diplomante de deux ans, au travers d'ateliers bimestriels de trois jours.

L'ambition littéraire du Centre se concrétise également dans l'édition. Les Rencontres européennes du livre ont ainsi débouché sur la publication en 2002 chez Gallimard des Carnets de Sarajevo , recueil de textes rédigés par les participants à cette manifestation. Le Centre a également noué un partenariat avec les éditions locales Publika en vue de publier en bosnien les albums de bandes dessinées d'Enki Bilal, bosniaque d'origine.

La question de l'école demeure centrale en Bosnie-Herzégovine. Elle est le lieu où doit émerger un véritable projet de société, fondé sur le respect de l'autre et la volonté de vivre-ensemble. Dès 1994, la librairie-galerie puis le Centre ont pris acte de cette réalité et tenté par le biais de cours de langues de favoriser le rapprochement des jeunes générations. La démarche du Centre est à cet égard simple, les cours de français, d'espagnol ou d'italien sont donnés à tous les élèves intéressés, indépendamment de leurs origines ethniques. L'enseignement est dispensé à Sarajevo et, depuis 2003, à Stolac, ville à dominante croate d'Herzégovine. Le Centre entend désormais développer son offre en Republika Sprska. Des cours de langue et de civilisation française sont également donnés aux fonctionnaires des ministères locaux. Au total, 750 personnes bénéficient chaque année de ces cours, une douzaine de professeurs intervenant à cet effet.

Avec Sarajevo, la ville de Stolac est un symbole de l'activité du Centre André Malraux. Considérée comme un joyau du patrimoine culturel et naturel de la région, elle a été sévèrement touchée par la guerre. Au-delà des cours de langue dispensés en commun aux enfants d'origine croate et bosniaque, le Centre y organise depuis 2008 un festival d'été, prenant la forme d'un circuit à travers patios et jardins fleuris. Les « Journées de Stolac », conçues autour de concerts, de projections de films et d'ateliers éducatifs, ont pour objectif principal la préservation, la mise en valeur et le développement du patrimoine culturel et naturel local. Ce travail de préservation de l'environnement naturel et architectural doit permettre d'impliquer la population et faire émerger, là encore, un véritable projet citoyen, dépassant les clivages communautaires. L'ambition ultime est, selon ses promoteurs, d'élever la ville au rang d'acteur social et régional tant au niveau régional qu'européen. La promotion du vivre-ensemble local demeure toujours, aux yeux du centre, liée à la perspective d'adhésion, à terme, à l'Union européenne.

Le cinéma fait également partie du champ d'activité du Centre. Les Ateliers du cinéma tenus de 2000 à 2003 à Sarajevo, l'organisation d'un concours d'écriture de scenario en 2005 ou l'aide constante apportée à la traduction de dialogues ou au sous-titrage de films en sont les réalisations les plus concrètes. Il existe un lien consubstantiel entre la Bosnie-Herzégovine et le cinéma, reconnu notamment par le grand public au travers de la figure controversée d'Emir Kusturica. Le Festival du film de Sarajevo créé en 1995 quelques mois avant la fin de la guerre et parrainé par Agnès b., soutien de la première heure du Centre André Malraux, en est un des symboles.

Par-delà sa vocation culturelle et ses ambitions citoyennes, le Centre André Malraux est aussi un lieu de mémoires. Le pluriel s'impose tant les conséquences du conflit sont différentes d'une communauté à l'autre, tant il appartient, en la matière, de dépasser tout manichéisme. De ce point de vue, la coopération qu'il a entreprise avec le Centre de la mémoire d'Ouradour-sur-Glane, le Jugendgästehaus Dachau ou l'Office franco-allemand pour la jeunesse est assez significative. Les créateurs du Centre ont vu la guerre et ses horreurs. Ils tiennent donc à témoigner et à dénoncer toutes les formes de barbarie. Ce travail de mémoire au travers de l'art sous toutes ses formes, et en particulier de la photographie, vise un double objectif : empêcher un retour de la violence alors que de nouvelles formes d'extrémismes tendent à apparaître en plein coeur de Sarajevo et participer à l'indispensable réconciliation en favorisant une vision plus juste et équilibrée de l'histoire des uns et des autres.

Le budget du Centre André Malraux (450 000 € en 2008) permet à peine de couvrir les coûts inhérents à l'organisation des nombreuses manifestations qu'il parraine ainsi que les frais de fonctionnement et notamment les salaires des vingt-deux personnes qui y travaillent. Institut privé, il bénéficie du soutien financier des ministères français des affaires étrangères et de la culture. Ces subventions représentent 46 % du budget annuel (dont 40 % pour le seul ministère des affaires étrangères). Les autorités bosniennes participent à hauteur de 5 % au financement du centre, l'Union européenne au travers de sa délégation locale à hauteur de 2 %. Agnès b., les Dernières Nouvelles d'Alsace, le Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD) ou Handicap International financent 10 % du budget. Les 37 % restant proviennent de ressources propres liées aux cours et aux traductions.

La diminution, dans le contexte actuel de la crise, des subventions publiques accordées au Centre n'est pas sans susciter un certain nombre d'inquiétudes. Un appel au public a ainsi été lancé en octobre 2008. Au regard de son ambition citoyenne, de son appui à des projets d'avenir, il apparaît urgent de maintenir les financements à cette institution, véritable relais culturel et civique de notre diplomatie dans le pays. Chaque projet ne requiert pas un important investissement, les sommes engagées apparaissent modiques au regard de la portée des manifestations organisées. Le groupe interparlementaire souhaite attirer l'attention de l'ensemble des parlementaires français sur ces micro-financements. La coopération décentralisée apparaît, à cet égard, comme une opportunité indéniable.

CONCLUSION

La Bosnie-Herzégovine est à la croisée des chemins. Prisonnière de logiques empruntées au passé, elle se doit de s'en affranchir si elle entend devenir un État moderne et adhérer, à terme, à l'Union européenne. Le défi est de taille tant il doit mettre fin à une guerre larvée entre les mémoires des communautés. Il implique une réconciliation pleine et entière entre les peuples constitutifs de la Bosnie-Herzégovine et l'abandon concomitant des reflexes identitaires.

Un tel travail ne peut se faire sans l'appui de la communauté internationale en général et de l'Union européenne en particulier. Ce soutien ne peut prendre la forme de celui actuellement mis en place, qui répond encore trop à une logique d'immédiat après-guerre. L'assistance respiratoire doit être modulée en vue de mieux responsabiliser les élites politiques et obliger celles-ci à entreprendre les réformes indispensables. La communauté internationale doit également appuyer les initiatives venant de la société civile en vue de faire émerger une véritable citoyenneté bosnienne.

Des priorités doivent, à cet égard, être dressées. L'éducation en est une. La mise en oeuvre d'une véritable politique d'éducation nationale à destination de tous les enfants, mélangés au sein d'écoles publiques, relève de l'urgence, tant le système actuel contribue à diffuser l'idée d'une réconciliation impossible et renvoie les élèves à leur communauté d'origine, sans sens de l'ouverture vers l'autre. La signature de l'accord de stabilisation et d'association entre la Bosnie-Herzégovine et l'Union était conditionnée à un consensus entre les forces politiques bosniennes sur la réforme de la police. La question de l'enseignement doit désormais être considérée comme le préalable à toute nouvelle avancée en matière de coopération.

La France a un rôle important à jouer en la matière, au travers notamment des initiatives du Centre André Malraux. Le soutien financier à cette association apparaît indispensable au regard de son action en faveur de l'émergence d'une véritable citoyenneté bosnienne, ouverte sur le monde. De nouvelles formes de partenariat doivent être trouvées, notamment avec les collectivités territoriales en vue de garantir la pérennité de cette organisation. Par delà le Centre, toutes les initiatives culturelles méritent un soutien concret de notre part. La transformation des habitudes mentales qu'induit la modernisation de la Bosnie-Herzégovine passe par de telles actions, aptes à réveiller les consciences.

Dans son essai Qu'est ce qu'une Nation ? , Ernest Renan écrivait qu'une nation était un plébiscite de tous les jours. Le groupe interparlementaire entend accompagner la mise en oeuvre d'une telle consultation et permettre à la Bosnie-Herzégovine de combler ses retards d'avenir. 200 000 personnes sont mortes au cours du conflit. Les collines entourant Sarajevo sont blanchies par les stèles funéraires qui leurs sont dédiées. Le maintien d'un statu quo contribuerait à renforcer l'absurdité de leur décès. Ces disparus nous obligent.

PROGRAMME DE LA MISSION

Mardi 14 avril 2009

12h25 : Arrivée à Sarajevo

13h15 : Déjeuner avec S.E Mme Maryse Berniau, Ambassadeur de France

15h30 : Départ pour Banja Luka , capitale de la Republika Sprska

19h30 : Arrivée à Banja Luka et dîner avec M. Thomas Wauquier, chef du bureau de l'Ambassade de France à Banja Luka

Mercredi 15 avril 2009

9h30 : Entretien avec M. Rajko Kuzmanovic, Président de Republika Srpska

11h00 : Entretien avec M. Igor Radojicic, Président de l'Assemblée nationale de Republika Srpska

12h30 : Déjeuner avec M. Mladen Sukalo, directeur de la chaire de français à l'université de Banja Luka et des représentants de la société civile

14h30 : Entretien avec le mufti de Banja Luka et visite de la Ferhadjia

16h30 : Départ pour Sarajevo

20h00 : Dîner de travail avec des membres de l'Ambassade de France

Jeudi 16 avril 2009

9h00 : Entretien avec M. Haris Silajdzic, membre bosniaque de la présidence collégiale de Bosnie-Herzégovine

10h45: Dépôt d'une gerbe sur la tombe de M. Nikola Kovac, premier ambassadeur de Bosnie-Herzégovine en France, au cimetière de Baré.

12h00 : Entretien avec M. Valentin Inzko, Haut-Représentant des Nations unies et de l'Union européenne

13h00 : Déjeuner avec M. Louis Sarrazin, membre de l'Assemblée des français de l'étranger

14h30 : Entretien avec M. Sulejman Tihic, Président du parti d'action démocratique (SDA - bosniaque)

16h00 : Entretiens au Centre André Malraux et visite de la galerie d'art contemporain Le Duplex

18h00 : Visite de la collection Ars Aevi

20h00 : Dîner à la Résidence de France avec M. Danis Tanovic et des représentants du monde culturel et de la société civile.

Vendredi 17 avril 2009

7h00 : Départ pour Srebrenica-Potocari

9h30 : Entretien avec M. Mersed Smajlovic, directeur du Mémorial de Potocari et visite du site

10h45 : Départ pour Sarajevo

13h15 : Déjeuner avec le général Stefano Castagnotto, Commandant de la mission EUFOR-ALTHEA

14h00 : Dépôt d'une gerbe sur le monument dédié aux soldats français morts en Bosnie-Herzégovine et rencontre avec le contingent français EUFOR-Althea

16h25 : Départ pour Paris

CARTES DE LA BOSNIE-HERZÉGOVINE

(Ministère des Affaires étrangères)

(Ministère des Affaires étrangères)

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page