Actes du colloque Afrique du Sud



VI - Echanges avec la salle

Marie-Claire BIZOT-GREGGORY, Directeur des Partenariats & Projets stratégiques, Accor

Bonjour, nous estimons au sein du groupe Accor, que l'Afrique du sud constitue un projet stratégique. Je m'intéresse également au Saxon Group puisque j'en suis fondateur en France. Ma question concerne la bourse, en Afrique du Sud. Est-elle active ? Connaît-elle du mouvement ? Les sociétés étrangères y figurent-elles ? S'agit-il de grandes ou petites entreprises ? L'objectif de ma question est de savoir si, en cas de partenariat ou de joint-venture avec d'autres, la bourse peut s'avérer un moyen de liquidités, au terme de 3 à 5 ans, pour nos entreprises qui auraient investi là-bas ou nos partenaires minoritaires.

Serge de BEAUFORT

Il existe vraiment une bourse liquide. Des centaines de sociétés sont cotées et représentent une possibilité pour lever des fonds. Je ne pense pas qu'il y ait de différence entre la réglementation de la bourse africaine du sud et celle d'Europe. Les principes de cotation sont aussi stricts et similaires. A mon avis, vous pouvez lever des liquidités de cette façon.

François de PEYRON, relationship Manager - central Banks, SWFs & International Organisations, Dexia Asset Management

Il serait intéressant d'avoir l'avis de la Coface sur le pays. Pourraient-ils nous dire en quelques mots leur sentiment ?

Marie-France RAYNAUD, Expert Risque pays, Etudes économiques et Risques Pays, Coface

Le risque Sud africain est le meilleur risque d'Afrique. Il vient juste après le Botswana. Il est classé en A3 sur une échelle qui va de A1 à D. C'est un bon risque mais nous observons une dégradation à court terme. Plusieurs points ont été mentionnés. Sur le plan de l'activité à court terme, nous attendons une décélération de la croissance à - 3%. Les raisons en sont :

1) la crise énergétique qui a un impact sur les grandes décisions d'investissement. Cette crise est appelée à devenir chronique au cours des 5 prochaines années, jusqu'à la mise en marche des centrales Medupi et Bravo.

2) L'activité est affectée par le contexte plus général de l'envolée des cours des matières premières. C'est pourquoi la Banque centrale, la SARB, conduit une politique monétaire restrictive impactant d'une part la consommation des ménages, et d'autre part l'investissement privé. Nous avons eu une augmentation de 450 points de base du taux directeur depuis juin 2006 jusqu'à juin 2008. Mais l'inflation a dépassé 10%.

3) Par ailleurs, l'activité reste contrainte par une pénurie de main d'oeuvre qualifiée.

Un autre élément concerne l'augmentation du risque de change, avec une volatilité accrue dans un contexte de déficit de la balance courante assez importante, autour de -7%. Il est couvert par des flux volatiles, ce qui est assez préoccupant, surtout dans le contexte d'assèchement des liquidités mondiales et de remontées des SPREAD. Le SPREAD moyen sud-africain équivaut à celui des émergents. Cet aspect affecte le risque.

Un autre élément à court terme et à moyen terme est la dégradation du risque social et politique. Du point de vue politique, c'est l'incertitude avec la nomination de Jacob Zuma à l'ANC. Il peut capter pour l'instant l'insatisfaction sociale d'une frange de la population. Nous ne savons pas dans quelles mesures il sera capable d'y répondre et de mettre en oeuvre des politiques de distribution adéquates.

A moyen terme, notre appréciation reste positive. Les fondamentaux sont bons. Le gouvernement est engagé dans des dépenses d'infrastructures importantes donc cela devrait accroître la croissance. Il est également engagé dans des politiques budgétaires prudentes. Parallèlement tous les ratios financiers sont bien orientés avec une dette publique faible, une dette extérieure légère, avec un bon profil. Le système bancaire est très solide en dépit du développement de la titrisation. A moyen terme, nous estimons que le classement demeurera en 3, note OCDE. Merci.

Yves de RICAUD

Peut-être que mes amis sud-africains souhaiteraient répondre aux politiques incertaines. Sur ce point particulier, mon sentiment personnel est que nous sommes dans un procédé tout à fait normal. Quand vous avez un nouveau Président, vous avez toujours une période incertaine. Il s'avère très difficile d'avoir toujours le même Président pour être certain de ne connaître aucune incertitude. Nous en sommes là. Le nouveau Président de l'ANC va faire en sorte de mettre en avant une politique volontaire, selon ses déclarations. Cela signifie que d'une façon ou d'une autre, nous allons avoir la continuation de la politique existante, peut-être avec les mêmes membres, peut-être pas. Nous savons que les investisseurs sont très attentifs à la composition du gouvernement, en particulier celui du Ministère des Finances. Lorsque nous regardons où nous en sommes, cet aspect de continuité est bel et bien là. Certains autres éléments sont pris en compte dans la notation des agences et par ICS. Il est intéressant de connaître celle de la Coface. Avez-vous d'autres questions ou d'autres remarques ? La parole est à Moses et ensuite à Maria.

Maria BOTA

Je suis originaire d'Afrique du Sud. Je suis retournée dans ce pays voici un an, au bout de 23 ans d'absence. Les éléments évoqués en dernier peuvent peser lorsque nous les observons depuis la France. Ces aspects qui, à première vue, semblent négatifs, créent pourtant un dynamisme local impressionnant. Je suis revenue seule avec mes fils, adolescents. J'ai créé trois petites entreprises. J'ai reçu un accueil très chaleureux. Je suis intégrée dans les structures sud-africaines existantes et je suis ravie aujourd'hui de donner cette chance à mes fils. Ils peuvent ainsi prendre exemple sur un peuple et un pays qui avance. En tant que femme seule, c'est faisable, aussi pour une entreprise, il existe de nombreuses opportunités.

Mme l'Ambassadeur

Je n'avais pas l'intention de m'exprimer, mais je pense que j'aurais failli à ma mission si je n'avais pas pris la parole, particulièrement après les dernières interventions. Nous avons entendu des opinions très positives sur l'Afrique du Sud et l'Afrique tout au long de cette conférence. Des entrepreneurs français intéressés par notre pays ont mentionné leur envie de nouer des liens avec notre pays, qui représente un centre névralgique. Nous sommes très bien situés sur un plan géographique et sommes une démocratie stable. La France, l'un des pays les plus respectés au monde pour ses croyances en la liberté, l'égalité, la fraternité, et les droits de l'homme, s'intéresse à nous, ce qui est très positif. Je souhaite rappeler que le Président Sarkozy s'est rendu en Afrique du Sud en février dernier et que sa visite a suscité une grande liesse. Il a été très bien accueilli par la population et les entreprises sud africaines. Il a évoqué la politique de la France envers notre pays et notre continent. Nous savons que la France constitue un partenaire solide, qui souhaite évoluer dans ses relations. M. Sarkozy a rencontré notre Président, symbole de leur volonté commune de fonder un partenariat. Ainsi, M. Zuma s'est rendu en France et a rencontré des chefs d'entreprise et le MEDEF. J'espère que toutes les personnes présentes perçoivent les opportunités qui se dégagent de ce séminaire et du contexte actuel. Nous n'avons rien à cacher et espérons développer des partenariats ouverts et honnêtes avec la France. Peu de pays négocient dans ce genre de situation, mais la France et l'Afrique du Sud sont prêtes à le faire. Toute critique constructive est la bienvenue de même que toute forme de conseil, notamment dans le domaine de l'entreprise. Nous regardons tous vers une nouvelle image de stabilité et croyons à notre démocratie. Tout comme en France, nous avons réussi à instaurer une démocratie solide qui ne cesse d'évoluer, et avons beaucoup appris de ce pays.

M. de RICAUD, modérateur

Merci beaucoup Mme l'Ambassadeur. Je n'ai plus rien à ajouter. Merci à tous et aux intervenants.