Colloque sur Chypre


Table des matières


Actes du colloque

« Les relations franco-chypriotes

Enjeux et perspectives »

Jeudi 2 décembre 2004

En présence de :

M . Christian PONCELET, Président du Sénat

Sous l'égide de :

M. André ROUVIÈRE, Président du groupe interparlementaire du Sénat France-Chypre ;
S. Exc. M. Minas HADJIMICHAEL,
Ambassadeur de Chypre en France.

Avec la participation de :

M. François LOOS , Ministre délégué au Commerce extérieur ;
M. Yorgos LILLIKAS
, Ministre du Commerce, de l'Industrie et du Tourisme de la République de Chypre ;
S. Exc. M. Hadelin DE LA TOUR DU PIN,
Ambassadeur de France à Chypre.

Ouverture

Christian PONCELET
Président du Sénat

Monsieur le Ministre,
Messieurs les Présidents,
Messieurs les Ambassadeurs,
Chers collègues,
Mesdames et Messieurs,

Le Sénat est très heureux de vous accueillir aujourd'hui dans le cadre d'un colloque économique sur Chypre qui, événement plutôt exceptionnel, sera aussi marqué, en fin de matinée, par la réactivation de la Chambre de commerce franco-chypriote. Je tiens à saluer la présence parmi nous du Ministre du Commerce, de l'industrie et du Tourisme de la République de Chypre, Monsieur Yiorgos Lillikas, venu exprès de son pays pour participer à cet événement. Nous comptions aussi sur la participation, à ses côtés, de son homologue français, Monsieur François Loos, mais je viens d'apprendre qu'il a été retenu au dernier moment pour participer à un séminaire gouvernemental auquel sa présence était indispensable. Je remercie cependant ses collaborateurs, dont plusieurs sont ici présents, pour l'appui actif qu'ils nous ont apporté dans la préparation de ce colloque.

Avant d'aborder le thème de notre matinée, je voudrais décerner une mention particulière à notre ami André Rouvière, Sénateur du Gard et Président actif du groupe d'amitié France-Chypre du Sénat. Je sais combien il s'est impliqué depuis deux ans dans la préparation de cette rencontre. André Rouvière a d'ailleurs profité de sa présence à Chypre à la tête d'une délégation de son groupe en juin 2004 pour convaincre ses interlocuteurs et les associer à son projet. Voici, une fois de plus, la démonstration du potentiel d'action des groupes interparlementaires du Sénat, y compris sur des terrains comme l'économie, où ils peuvent être des intermédiaires précieux. En fait, ces groupes ne se limitent pas à faire de la « diplomatie parlementaire » au sens désormais classique du terme : plus généralement, ils sont des acteurs efficaces de la présence et de l'influence françaises dans le monde, auxquelles le Sénat en général - et son Président en particulier - attachent la plus grande importance. Il faut que les hommes se rencontrent, échangent, dialoguent, et tissent entre eux des liens de sympathie et d'amitié.

Mes remerciements vont enfin à tous ceux qui ont apporté leur concours à cette manifestation, en particulier la Chambre de Commerce et d'Industrie de Chypre, l'Assemblée des Chambres françaises de Commerce et d'industrie, sans oublier nos amis d'UBIFRANCE : cette fois, ils n'intervenaient pas comme « maître d'oeuvre », mais ils nous ont accompagné avec leur efficacité habituelle. Il s'agit d'une raison supplémentaire pour que je leur adresse mes remerciements.

A lui seul, l'intitulé de la rencontre « Chypre, enjeux et perspectives », souligne bien les potentialités des échanges économiques avec un pays auquel, visiblement, les entreprises françaises n'ont pas encore accordé l'attention qu'il mérite. Je considère que notre présence est encore trop frileuse dans votre région. En effet, alors que nos relations politiques et diplomatiques bilatérales sont excellentes, nos relations commerciales et financières restent très, voire trop modestes et cantonnées à quelques secteurs qui gagneraient à être diversifiés, tant à l'importation qu'à l'export ou dans le domaine des investissements.

Selon les statistiques publiées par le Quai d'Orsay, Chypre se situerait aujourd'hui comme notre 69 ème client dans le monde, avec un volume d'importations très limité : cela est, pour nous, nettement insuffisant. La part de la France dans les importations chypriotes n'est pas tellement meilleure, même si, en pourcentage, nous occupons à Chypre une position économique un peu plus favorable. Si ce colloque permet de renforcer davantage nos relations, cela sera, pour nous, un grand succès.

Quoi qu'il en soit, la situation actuelle n'est pas satisfaisante, surtout depuis que nos amis chypriotes ont rejoint l'Union européenne et sont devenus, de ce fait, non plus de simples clients, mais des partenaires à part entière. En conséquence, un champ d'intervention nouveau s'ouvre à nous. L'enjeu est de taille : dois-je rappeler qu'avec un PIB annuel supérieur à 15 000 euros par habitant et un taux de croissance nettement supérieur à la moyenne européenne, la République de Chypre est aussi le nouvel Etat membre le plus prospère parmi les dix pays qui ont adhéré à l'Union en mai 2004.

Quant aux perspectives, elles sont favorables, car l'entrée de Chypre dans l'Union européenne permet de tirer parti de tous les avantages de la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux. J'ajoute que le Gouvernement chypriote a institué en priorité la diversification de son économie, avec la libéralisation de son marché, l'émergence d'un pôle de services à haute valeur ajoutée et un développement régional équilibré passant, notamment, par un programme d'équipements d'infrastructures. Dans tous ces domaines, les entreprises françaises ont une carte à jouer.

Pour les y inciter, vous avez voulu jeter un éclairage plus précis sur certaines activités où notre coopération trouverait un terrain propice : l'eau et l'assainissement, la santé, la gestion des risques majeurs ou encore la communication et la culture. Ces choix sont judicieux, car dans ces secteurs, la demande chypriote de savoir-faire est forte, et beaucoup d'entreprises françaises sont en mesure d'y répondre, y compris les PMI-PME. Encore faudrait-il qu'elles prennent mieux conscience des potentialités réelles que Chypre leur offre...

Or il faut bien admettre que des progrès restent à accomplir dans cette voie, si j'en juge par le faible nombre des patrons et des cadres français au courant des opportunités d'affaires sur le marché chypriote. Le problème ne tient pas à l'insuffisance de l'information économique, car dans ce domaine, beaucoup a déjà fait. On constate, par exemple, que l'ambassade de France à Chypre et l'ambassade de Chypre en France ont déjà déployé des efforts significatifs, avec d'ailleurs quelques belles réussites à la clé. En réalité, la méconnaissance du marché chypriote tient moins à des résistances de principe qu'à la relative rareté des occasions concrètes de dialogue et de rencontre entre les chefs d'entreprise et les décideurs économiques des deux pays. C'est pourquoi la réactivation de la Chambre de commerce franco-chypriote va dans le bon sens, car cette instance contribuera à renforcer les contacts déjà pris et à favoriser le lancement de nouveaux projets, dont nos deux économies sauront tirer profit. Je souhaite pleine réussite aux futurs responsables de cette Chambre qui, d'ores et déjà, est assurée du soutien du Sénat, notamment par le canal de son groupe d'amitié France-Chypre.

Avant de céder la parole au Ministre chypriote puis aux spécialistes qui vont se succéder à cette tribune toute la matinée, je voudrais enfin rassurer tous ceux que la partition de Chypre continue d'inquiéter. La France, vous le savez, a officiellement regretté que les référendums d'avril 2004 sur la réunification de l'Ile n'aient permis l'entrée dans l'Union européenne d'une Chypre unifiée, à laquelle nous avons toujours été favorables. Cela étant, le maintien pour le moment des deux communautés ne doit pas servir d'alibi économique pour rester à l'écart d'un pays où la présence des entreprises françaises peut se révéler non seulement rentable financièrement, mais aussi constructive politiquement.

En effet, le développement harmonieux de Chypre - au Nord comme au Sud - sera aussi, à terme, un élément de nature à favoriser le rapprochement de tous ses habitants et à faciliter la réunification que nous appelons de nos voeux. Sur cette note d'optimisme, permettez-moi de souhaiter à tous de bons et fructueux travaux, en espérant que vous garderez un excellent souvenir de votre passage au Sénat et que vous y reviendrez.

Yiorgos LILLIKAS
Ministre du Commerce, de l'Industrie et du Tourisme de la République de Chypre

Monsieur le Président,
Monsieur le Président du groupe sénatorial France - Chypre
Mesdames, Messieurs les Parlementaires,
Mesdames, Messieurs,

Avant de souligner l'importance et la valeur politique, économique et culturelle que nous attachons à ce colloque, permettez-moi d'exprimer ma joie pour une raison purement personnelle.

Je me réjouis en effet que la République de Chypre ait entrepris d'élargir et d'approfondir ses relations avec la France, un pays auquel je dois un enrichissement de mon univers culturel et intellectuel. Dix-sept ans sont passés depuis que j'ai quitté l'Institut d'Etudes Politiques de Lyon : je vois en ce retour l'occasion non pas, cette fois-ci, de développer seulement des liens personnels, mais également de renforcer la relation qui lie ces deux pays, France et Chypre, auxquels je porte un attachement tout aussi fort, bien que différent. Après cette brève introduction, que j'ai volontairement choisi de faire en français, en souvenir de mes années universitaires et en hommage à un pays et une langue que j'apprécie énormément, permettez-moi de poursuivre ce discours dans ma langue maternelle qui le grec.

Les liens entre France et Chypre sont très anciens ; rappelons en effet que les Lusignan, qui ont conquis Chypre, étaient originaires de la ville de Poitiers. Nos deux peuples ont en outre été interdépendants pendant la période des Francs ; la relation entre nos deux cultures pendant cette période est encore visible actuellement, plusieurs mots du dialecte chypriote étant directement issus du français. Au XIIIe siècle en outre, les Francs ont introduit l'architecture gothique dans notre île. Les Francs ont également amené en France certaines variétés de raisin cultivées à Chypre, ils ont d'ailleurs laissé leur nom à notre vin traditionnel. Rappelons que les vins chypriotes, à l'époque, étaient très réputés, et servis à la cour des Rois de France.

Notre histoire commune se poursuit encore. Il y a quelques jours, un livre intitulé Regards croisés sur Chypre est paru en France. Au même moment, les spécialistes de l'oeuvre d'Arthur Rimbaud ont présenté un documentaire sur le passage du poète dans notre île. Aujourd'hui, nous sommes conduits à développer les relations entre Chypre et la France, nous sommes appelés à donner une nouvelle dimension, plus actuelle, à cela. Chypre est maintenant entrée dans l'UE : cette intégration jette les bases de ces nouvelles relations. Le Gouvernement chypriote souhaite nouer des relations stratégiques avec la France, ceci dans une optique européenne mais aussi « moyen-orientale ». Chypre, pendant toute l'histoire de nos relations, a été un point de rencontre entre trois continents. Cette grande richesse est maintenant mise à disposition de l'Europe, mais aussi de la France. Notamment, notre présence dans le monde arabe, d'un point de vue économique, peut être utilisée par le monde des affaires français. En outre, la mondialisation de l'économie ne peut être affrontée qu'au travers d'un effort collectif ; nous pouvons apporter notre contribution dans ce cadre.

Chypre est un pays actuel, moderne, un pays stable aux plans économique, politique et social. Nous disposons d'excellentes infrastructures routières et de télécommunications. Ce constat vaut pour les services bancaires et les communications, grâce auxquels nous offrons un très bon cadre de fonctionnement aux entreprises. Chypre est donc devenu un centre d'affaires important.

Notre structure sociale et économique est très contemporaine : notre économie se développe à un niveau très satisfaisant, et notre PIB a atteint en 2003 les 112 milliards d'euros. Nous attendons une croissance de notre économie de l'ordre de 3,2 %. Le revenu par habitant est l'un des plus hauts de la région (16 000 euros en 2003) ; le chômage affiche un niveau très faible, à 3,5 %. Le même constat peut être fait pour l'inflation en 2003 (1,5 %). Comme vous pouvez donc le constater, les conditions pour le développement du commerce y sont très favorables.

Notre île étant petite, le marché intérieur y est donc réduit. Cela pousse les milieux d'affaires à rechercher d'autres marchés à l'extérieur : de ce fait, notre balance commerciale est excédentaire. L'UE représente le premier partenaire commercial de notre île. Nous constituons en outre un centre commercial très important dans le domaine du commerce de transit. Signalons que ce domaine contribue à hauteur de 75 % au PIB. Ce niveau très élevé, et la qualité des services rendus, a consacré Chypre comme un centre d'affaires majeur. Par ailleurs, la jeunesse de Chypre est très alerte, dans la mesure où 70 % des jeunes possèdent le baccalauréat, et vont largement étudier à l'étranger : ils parlent donc des langues étrangères, et connaissent les cultures des autres pays. Cela représente un avantage important pour les entreprises souhaitant s'installer à Chypre.

Les rapports commerciaux entre la France et Chypre demeurent inégaux, la balance commerciale est à votre avantage. D'un point de vue touristique, 44 502 Français sont venus visiter notre île en 2003. Plus généralement, je dois vous dire que nous voulons collaborer avec vous en vue du développement d'un nouveau modèle économique, basé sur la coopération. Nous voulons développer un modèle fondé sur les hautes technologies et la connaissance. Dans cette optique, nous avons obtenu la collaboration de la Chambre de Commerce et d'Industrie de la Côte d'Azur, et celle de la technopole de Sophia-Antipolis. Signalons également que l'Université de Harvard a décidé de nous apporter son concours, pour le développement de la branche environnementale dans notre île. Nous avons en outre décidé de financer un groupe de scientifiques, composé pour une large part de Français. Nous escomptons nous développer dans les domaines des biotechnologies et des nanotechnologies : des progrès ont d'ores et déjà été réalisés à ce titre.

Je pense que ce colloque représente pour nous un moment important, dans la mesure où les défis qui se posent à nous sont nombreux ; nous espérons nouer de nouvelles relations avec des interlocuteurs français, et la réactivation de la Chambre de Commerce franco-chypriote est essentielle dans ce cadre. Rappelons que la France dispose d'excellentes compétences dans de nombreux domaines de pointe, votre concours sera très profitable. En outre, de telles coopérations présentent de nombreux avantages pour la France, Chypre pouvant jouer un véritable rôle de passerelle vers le Moyen-Orient et l'Asie.

Je dois signaler que nos compatriotes chypriotes turcs n'ont pu être présents ce jour, ce que je regrette. Je puis vous assurer, ici, que nous allons encore multiplier nos efforts pour que le rapprochement entre nos deux communautés soit rapidement de mise. Je vous remercie.

Les relations économiques

Les échanges commerciaux
Vassilis ROLOGIS
Président de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Chypre

C'est un grand honneur pour moi, en tant que Président de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Chypre, d'être présent parmi vous aujourd'hui. Je souhaite tout d'abord vous parler de la Fédération de nos Chambres de Commerce, qui regroupe 10 000 membres et 125 Chambres différentes. Nous voulons maintenant promouvoir notre Chambre de Commerce, qui fête cette année ses 77 ans d'existence : nous voulons renforcer nos relations avec les pays amis, dont la France fait partie évidemment.

La Chambre de Commerce développe une activité internationale au sein de l'Eurochambre, à Bruxelles, au sein également de la Chambre de Commerce internationale. Nous sommes également présents dans les Chambres de Commerce des Balkans, du monde méditerranéen, ou encore dans le cadre de l'Association internationale des PME. Notre activité internationale est donc importante. De fait, elle participe à l'internationalisation de l'économie chypriote. Je tiens à ce titre à remercier la France, qui a largement facilité notre adhésion. Sans cette aide, nous estimons que notre entrée dans l'UE aurait été plus difficile. Nos relations avec la France, d'ores et déjà excellentes, ne peuvent que se renforcer.

La Chambre de Commerce a toujours essayé de renforcer ses relations économiques avec la France. En conséquence, chaque entreprise française souhaitant s'implanter ou se renforcer à Chypre est systématiquement aidée. Nous considérons ces entreprises comme des membres à part entière de la Chambre de Commerce de Chypre : vous pouvez donc utiliser notre pays comme une base de développement pour vos activités au Moyen-Orient, ceci gratuitement !

La Chambre de Commerce de Chypre, en coopération avec le Ministère du Commerce, de l'Industrie et du Tourisme, tente de promouvoir notre pays aux salons internationaux qui ont lieu en France. En 2005, nous allons organiser des séminaires à Paris et à Marseille afin de promouvoir l'organisation, à Chypre, d'activités commerciales d'entreprises françaises. Cette coopération ne peut être durable que si elle a deux sens : elle doit aller de pair avec des accords signés entre nos deux pays. Ces accords existent d'ores et déjà, ceci depuis 1981.

L'une des initiatives les plus importantes de notre Chambre de Commerce, afin de favoriser nos relations commerciales, a été la création d'une Association des entreprises françaises à Chypre, en 2000 : cette association organise des séminaires, des colloques et des missions, elle aide également les délégations et les membres à renforcer nos liens économiques et commerciaux. Signalons en outre que la Chambre de Commerce France-Chypre est en voie de réactivation, elle sera bientôt transférée à Paris.

En conclusion, je souhaite exprimer nos sincères remerciements au Sénat français : ce colloque constitue une occasion de nous adresser à un nouveau public français. Nous sommes à votre disposition, nous apporterons notre aide à toutes les entreprises françaises souhaitant s'implanter à Chypre. Mes remerciements vont également au Sénateur Rouvière, qui a, depuis de nombreuses années, porté un intérêt sincère à notre peuple, tout en jouant un rôle crucial dans le renforcement des relations entre nos deux pays. Je vous remercie de votre attention et forme le voeu que les relations entre nos deux pays se renforcent dans le cadre de l'Union européenne.

Le tourisme
Dimitri DEMETRIOU
Directeur du Bureau du tourisme de Chypre en France

Au cours de son histoire tumultueuse et longue de 10 000 ans, Chypre a connu une période franque qui a duré presque trois siècles. Dix-sept rois francs, issus de la famille des Lusignan, ont marqué notre histoire et nous ont légué un héritage français. Châteaux moyenâgeux, fortifications et cathédrales gothiques témoignent de la présence française et des liens séculaires entre nos deux peuples. Chypre, berceau d'Aphrodite, séduit chaque année des centaines de milliers de visiteurs. Les Français, bien qu'en augmentation sensible en 2004, sont largement minoritaires et représentent environ 2 % des arrivées totales.

Parmi les nouveaux pays membres de l'Union européenne, Chypre est certainement la destination qui a le plus d'expérience en matière touristique. A ce titre, rappelons que la France fait partie des marchés hautement prioritaires. En 2003, nous avons procédé à un réexamen de nos faiblesses et de nos points forts et élaboré une stratégie pour atteindre le plus rapidement possible le seuil de 100 000 touristes français par an.

I. Les points faibles à dépasser

Chypre souffre d'un déficit de notoriété et son image est souvent confuse. En 2003, il y avait une absence quasi-totale des enseignes hôtelières et des clubs de vacances français à Chypre. En outre, notre produit est principalement conçu, pour des raisons historiques, pour une clientèle plutôt anglo-saxonne. La domination de la langue anglaise constitue dans une certaine mesure un frein. Par ailleurs, pendant deux décennies, le tourisme a été le fer de lance de notre économie. Pour réactiver rapidement et efficacement notre industrie touristique après le choc terrible de l'invasion turque, les efforts et les moyens des secteurs publics et privés ont été concentrés sur les marchés les plus rentables au détriment de la diversification.

L'absence de vols directs depuis la province, qui représente plus de la moitié de la demande potentielle, un transporteur unique au départ de Paris, un manque de sièges aux périodes des vacances scolaires et la difficulté de gérer une multitude de demandes qui se télescopent constituent d'autres difficultés. A cela s'ajoute l'hésitation des voyagistes à prendre des risques pour le transport. Enfin, les prix des forfaits relativement élevés par rapport aux destinations préférées des Français en Méditerranée, en partie à cause de la distance, posent problème.

II. Des atouts solides et indéniables

Notre destination possède fort heureusement des atouts solides et indéniables. Nous disposons tout d'abord d'un avantage climatique par rapport au reste de la Méditerranée, notre saison estivale est la plus longue, et les hivers sont particulièrement doux. Notre patrimoine archéologique et culturel, qui est riche et très varié, s'étend sur une période de 10 000 ans et les monuments de la période franque ajoutent une dimension sentimentale pour les Français. Signalons également que les paysages sont variés et contrastés.

L'hôtellerie chypriote est réputée pour sa qualité. Nous sommes excellents dans le haut de gamme avec un parc de 100 000 lits hôteliers allant du palace jusqu'aux gîtes ruraux. Nous pouvons satisfaire un large éventail de clientèle. Des dizaines d'hôtels dans les catégories supérieures sont parfaitement équipés pour accueillir des congrès et des séminaires, et une bonne douzaine d'hôtels possèdent leur propre spa. Il existe par ailleurs de centres de spa indépendants sur l'île.

Chypre offre une palette d'activités très large : sports nautiques, randonnées, VTT, golf, infrastructures pour l'entraînement des sportifs de haut niveau... Dans les deux derniers domaines, des investissements publics et privés sont programmés pour les trois années à venir, afin de faire de Chypre une véritable destination golfique et un lieu privilégié pour l'entraînement des sportifs. En outre, le professionnalisme des Chypriotes est reconnu. Le service et l'accueil sont partout chaleureux et de qualité, et notre hospitalité est légendaire. La cuisine locale, succulente et variée, ainsi que les vins du pays sont appréciés des Français. Enfin, la volonté de tous les acteurs chypriotes et le regain d'intérêt des voyagistes français sont des éléments déterminants.

2004 est une année charnière dans notre plan stratégique. Grâce aux engagements de plusieurs voyagistes, des vols charters sont mis en place de Paris, de Lyon et de Mulhouse pendant toute la saison d'été, et des vols ponctuels ont été effectués de plusieurs villes de province. Les investissements accrus dans la communication et les relations publiques ont été payants ; l'ouverture d'un club français sous une enseigne de grande notoriété a eu les effets escomptés sur les agents de voyage, les familles et les comités d'entreprise. Par ailleurs, l'adhésion de Chypre à l'Union européenne a eu un certain impact sur la notoriété mais surtout des retombées positives sur l'image de la destination. Enfin, les arrivées de touristes français des dix premiers mois marquent une croissance de 57 % et notre objectif de 48 000 visiteurs français sera dépassé.

En 2005, la capacité et la densité des vols aériens seront renforcées. Quatre compagnies aériennes, dont une française, proposeront des vols Paris-Larnaka et Paris-Pafos. En province, en plus de Lyon et Mulhouse, il y aura des vols charters hebdomadaires de Strasbourg, et le nombre de vols ponctuels augmentera de manière significative. Dans les brochures des voyagistes, les séjours de bien-être ou à la carte, les circuits et les séjours linguistiques prendront plus de place. Un deuxième club francophone sera proposé par un spécialiste de la destination. Il va de soi que nous continuerons de notre côté les efforts de promotion sur tous les plans. Notre objectif est de dépasser le cap de 100 000 touristes français avant 2010, et d'accroître notre part de marché sur des segments précis.

Chypre a vocation à devenir un centre d'affaires régional et attirera, je l'espère, l'attention des enseignes hôtelières françaises et d'Air France. La présence d'Air France est en effet un facteur déterminant pour pouvoir exploiter efficacement des segments à haute contribution comme les congrès, les incentives et le tourisme d'affaires en général.

Notre ambition n'est pas de faire de Chypre une destination à la mode. Nous travaillerons main dans la main avec nos partenaires présents et futurs dans le marché français afin de construire des bases solides et créer une image forte et juste de notre destination. Le soleil éclatant de Chypre ne doit pas nous aveugler et nous empêcher de voir et mettre en valeur les multiples visages du pays et les produits à haute valeur ajoutée. Nous résisterons à l'argument du prix le plus bas recherché par le consommateur, tout en nous efforçant d'offrir le meilleur rapport qualité/prix.

Chypre ne promet pas à ses visiteurs du spectaculaire ou du sensationnel. C'est le berceau d'Aphrodite, en lui-même fabuleux et étonnant, car il réunit un monde magique aux innombrables facettes sur une petite île méditerranéenne chaleureuse et accueillante.

Dans l'introduction de mon exposé, j'ai rappelé le passé franc de Chypre. Nous invitons les Français à découvrir une partie de leur patrimoine et à renouer avec trois siècles d'histoire commune.

François LOOS
Ministre délégué au Commerce extérieur

Comme vous l'avait annoncé le Président Christian Poncelet, je ne devais pas pouvoir vous rejoindre ce matin en raison des impératifs de ma fonction gouvernementale mais j'ai finalement réussi à me libérer quelques instants et je tiens à vous dire combien je suis heureux d'être parmi vous pour ce premier colloque consacré à l'île de Chypre. Cet événement a été préparé de longue date ; il marque l'intérêt que la France porte à l'approfondissement de ses relations avec Chypre. Je tiens à saluer Monsieur Lillikas, que j'ai longuement rencontré hier : je le retrouve dans toutes les réunions européennes ou euro-méditerranéennes, et je tiens à vous assurer que notre connivence est très forte. Je souhaite également remercier le Sénateur Rouvière pour tous les efforts accomplis en vue du renforcement des relations franco-chypriotes. Mes remerciements vont enfin à l'Ambassadeur de Chypre en France, Son Excellence Hadjimichael, et à l'Ambassadeur de la France en République de Chypre, Son Excellence De La Tour du Pin. Il y a trois mois, j'ai eu l'honneur d'être invité à Chypre : j'ai été convaincu, à ce moment, que la relation franco-chypriote était exemplaire.

Nous nous réjouissons que Chypre porte aux confins de l'Union européenne le message d'une diplomatie équilibrée, soucieuse du respect des traités. La France, convaincue que la force est incapable de résoudre les différends, se veut la garante du respect de la paix au sein de l'Union européenne. Rappelons que la France, lors du récent Conseil européen, a rappelé que tout devait être fait pour que la partition de l'île s'efface, pour le bien commun des deux communautés. De par mes origines, je peux vous assurer que je suis totalement conscient de l'importance des relations européennes dans le domaine du rapprochement des communautés.

Je ne peux que me réjouir de l'invitation faite au monde des affaires chypriote par les organisateurs de ce colloque ; les milieux d'affaires de la communauté turque doivent prendre un rôle entier dans le développement économique de l'île. Signalons que l'UE devrait bientôt investir dans le nord de l'île, et nous suivrons de près la mise en oeuvre de cette aide économique, ainsi que les réformes économiques nécessaires. Cette aide ne constitue pas une reconnaissance de la partition. Au contraire, nous demeurons engagés par les résolutions que nous avons votées. Nous croyons donc, bien évidemment, à la réunification de l'île.

Le PNB par habitant de Chypre est supérieur, notamment, à celui du Portugal et de la Grèce, sa croissance économique est très élevée. Demain, Chypre devrait rejoindre la zone euro. Dans ce contexte, les entreprises françaises sont-elles suffisamment présentes à Chypre ? Rappelons que la France n'est que le sixième fournisseur de ce pays ; il n'existe aujourd'hui que cinq investissements directs dans votre île. En outre, le monde actuel se caractérise par la compétition entre les pôles de savoirs et de création : dans ce cadre, Chypre peut contribuer au rayonnement de l'Europe comme centre technologique dans l'espace méditerranéen. C'est d'ailleurs l'ambition des pouvoirs publics chypriotes, qui ont décidé de créer une technopôle, en collaboration avec Sophia-Antipolis et la Chambre de Commerce de Côte d'Azur : je m'en réjouis pleinement.

Je souhaite attirer votre attention sur une préoccupation particulièrement forte en France : la sécurité du transport maritime. Nous estimons que la mer doit être protégée des infractions au droit de l'environnement. Les Etats faisant obstacle au droit européen de la mer, en cours de négociation, risquent d'être pointés du doigt par les opinions publiques. Chypre doit bien prendre en compte cette question, cruciale pour la France, mais aussi pour la majorité des Etats de l'UE. Nous espérons que vous allez mettre votre flotte au service de l'Europe, dans le respect de l'environnement maritime et côtier.

Plus généralement, j'espère que ce colloque permettra de renforcer les échanges commerciaux et économiques entre nos deux pays. Je vous souhaite de fructueux travaux.

Les procédures d'implantation des entreprises françaises à Chypre
Stalo PAPAIOANNOU
Directeur du Département du Registre des Sociétés de la République de Chypre

Il existe à Chypre un registre d'inscription des entreprises, au sein d'un service composé de 200 personnes. La législation des entreprises a subi plusieurs modifications au cours des dernières années : après l'adhésion à l'UE, et à la suite d'une décision prise par le Conseil des Ministres, de nouvelles libéralisations des investissements à Chypre ont été décidées. Ainsi, il n'est plus nécessaire, pour les investisseurs souhaitant s'implanter à Chypre, d'obtenir des autorisations.

La procédure d'inscription d'une coopérative ou d'une petite entreprise (une SARL par exemple) commence par une formalité préalable, qui peut être accomplie par voie électronique : il s'agit de l'approbation des noms des sociétés, régie par quelques règles simples. Je répète que cette procédure peut être faite par Internet, un simple code d'accès étant nécessaire. Signalons que les demandes d'inscription ont été en croissance sensible au cours des dernières années. Pour l'inscription proprement dite, plusieurs documents doivent être fournis : une déclaration sur l'honneur et les statuts de la société, ceux-ci devant notamment préciser les détenteurs des capitaux. Il est tout à fait possible de créer une société avec un seul actionnaire. Les documents peuvent être rédigés en grec, ou dans une langue étrangère. Le capital minium requis est de 15 000 livres chypriotes. Par ailleurs, toute entreprise présente à Chypre doit procéder annuellement à l'approbation de ses comptes. J'indique dès à présent que tous les renseignements relatifs à la création d'une société à Chypre sont disponibles sur notre site Internet. Vous y trouverez également quelques communications relatives à des sujets d'actualité.

Chypre présente une position stratégique, et dispose de liens commerciaux avec le Moyen-Orient. Certains secteurs, le secteur bancaire ou la marine marchande par exemple, sont très représentés. Dans cette optique, de nombreux acteurs économiques ont décidé de s'installer dans notre île au cours des dernières années, afin de développer de nouvelles relations économiques avec Chypre, naturellement, mais aussi avec le Moyen-Orient.

La coopération maritime
Anthony A. MADELLA (( * )1)
Département de la Marine marchande,
Ministère des communications et des travaux publics de la République de Chypre

Je suis particulièrement honoré et heureux d'être ici parmi vous aujourd'hui en tant qu'intervenant et représentant de l'Administration maritime chypriote. Je voudrais tout d'abord, au nom de notre ministère et de notre département, remercier et féliciter les organisateurs de ce colloque et tout particulièrement le Sénat français pour son initiative d'organiser cette manifestation qui a pour but d'effectuer en commun un passage en revue des relations bilatérales de nos pays dans divers secteurs. Il m'incombe de vous présenter le thème de la coopération maritime, un thème qui présente un intérêt particulier pour nos pays respectifs.

Sur le plan historique, les premières relations maritimes franco-chypriotes se situent au Moyen Age entre les XIIe et XVe siècles lorsque Chypre, en tant que Royaume franc des Lusignan (1192-1489), représentait une place importante au carrefour des trois continents, disposant d'un centre commercial important, celui du port de Famagouste, dans lequel travaillaient un consultant marseillais ainsi qu'un tribunal spécialisé dans le contentieux maritime, la Cour de la Chaîne.

Pendant la période de la domination turque (1571-1878), notamment les XVIIIe XIXe siècles, Chypre a été maintenue comme l'un des centres commerciaux les plus importants de la région et de l'Espace européen au sens large, avec l'installation au port de Larnaka d'une importante colonie française de commerçants et armateurs, et les escales régulières, à partir de 1847 et jusqu'au milieu des années 30, des navires de la fameuse Compagnie maritime française des Messageries Maritimes.

Dans son histoire contemporaine, Chypre a reconnu dès 1963 l'importance politique, économique et sociale du secteur maritime. Les gouvernements successifs de la République de Chypre, appliquant une politique adéquate, et en dépit des sérieux problèmes politiques de l'époque, ont réussi à créer un centre maritime précurseur d'intérêts communautaires (substantiellement chypriotes, grecs et allemands), en combinant le Registre maritime d'un pavillon souverain et compétitif, une industrie maritime développée et un savoir-faire particulier dans le domaine de la gérance (gestion) des navires.

Objectivement, le passage en revue de la coopération maritime franco-chypriote comprend deux aspects :

· la coopération dans le secteur de l'industrie portuaire ;

· la coopération dans le domaine de la marine marchande, sur des thèmes liés principalement à l'existence du Registre maritime chypriote et à un nombre important de navires sous pavillon chypriote.

Dans le secteur portuaire, la coopération bilatérale correspondante a été consolidée depuis quelques années déjà (partir de la fin des années 70), puisque l'Autorité portuaire chypriote (la Cyprus Port Authority), en tant qu'organisme semi-étatique agissant sous la tutelle de notre ministère, a développé des liens importants avec l'espace français. Six lignes de navigation liaient les ports français aux ports chypriotes. Depuis de nombreuses années, des cadres de la Cyprus Ports Authority participent régulièrement au programme éducatif pour l'administration, l'organisation et le fonctionnement des ports, organisé par le Port Autonome du Havre.

Le Gouvernement français a dans tous les cas pris en charge les dépenses pour ces participations. Notons également que notre ministère et la Cyprus Port Authority ont une très bonne coopération avec les autorités maritimes françaises sur le thème des réseaux transeuropéens de transport, actuellement débattus et promus par l'Union européenne, comme ceux des corridors prioritaires de transport et des autoroutes de la mer en Méditerranée.

En revanche, la coopération bilatérale dans le domaine de la marine marchande est récente, inaugurée et institutionnalisée dès l'an 2000, en raison du processus de l'entrée de Chypre dans l'Union européenne.

Quels sont donc les enjeux et perspectives ?

I. Les enjeux

Ces enjeux se fondent sur une réalité concrète, qui s'exprime de la manière suivante :

· La flotte de commerce chypriote occupe le 7 ème rang mondial avec 1 200 navires d'un tonnage brut de 22 millions de tonnes. La flotte chypriote représente 4 % de la flotte mondiale et 16 % de la flotte de l'Union européenne. Les propriétaires français de navires ont parfois fait usage du Registre des navires chypriotes, mais de manière limitée. Le pavillon chypriote est souvent utilisé par les armateurs français, qui affrètent nos navires.

· Selon les statistiques officielles françaises, les navires chypriotes font près de 1 700 escales par an dans les ports métropolitains français (sur un total annuel de 78 000 visites de navires de toutes nationalités). La flotte chypriote semble occuper le 7 ème rang des différentes flottes, pour la desserte du commerce des importations et exportations françaises par mer, transportant ainsi environ 13 millions de tonnes de marchandises par an. Les autorités françaises inspectent en moyenne 80 navires chypriotes par an, ce dans tous les ports de l'Hexagone.

· Le secteur chypriote de gérance de navires ( ship management ) offre des services de gérance technique et de gérance des équipages à 1 800 navires d'un tonnage brut de 29 millions de tonnes (plus de 50 % de ces navires battent pavillon communautaire). L'utilisation de ce secteur par les armateurs français semble être très limitée.

Aux stades initiaux, durant la décennie 1970, l'image que présentait la marine marchande chypriote dans l'espace français était négative. Des incidents fréquents de navires chypriotes dans des ports français dont les standards de sécurité, les conditions de travail et de vie des gens de mer étaient sous normes, ont contribué à cristalliser cette image. L'image négative du pavillon chypriote dans l'espace français, perçu comme « pavillon de complaisance », a subsisté durant des années, bien que notre Gouvernement ait commencé à prendre des mesures vers la fin des années 70. Jusqu'à récemment, la France avait une image erronée des données réelles de la marine marchande chypriote, une attitude méfiante vis-à-vis de Chypre pour le secteur en question.

La méfiance française a continué également pendant les négociations pour l'adhésion de Chypre à l'UE, lesquelles ont coïncidé avec l'accident tragique du pétrolier Erika. La critique du Gouvernement français et de la presse française contre les registres de libre immatriculation, en en particulier contre Chypre, a rendu les choses plus difficiles pour notre pays. L'effort de réchauffement des relations franco-chypriotes dans le domaine de la marine marchande a été consenti par une initiative chypriote en février 2000, lorsque notre pays a soumis au Gouvernement français une proposition pour la constitution d'un Comité mixte franco-chypriote en matière de marine marchande, axé sur la discussion de thèmes de sécurité maritime. Notre initiative a été saluée par le Gouvernement français. Notre proposition a eu pour résultat la tenue à Paris, en 2000, de la première rencontre bilatérale de nos administrations, posant ainsi les bases solides d'une coopération fructueuse et institutionnalisée. Le réchauffement de nos relations bilatérales dans ce domaine fut aussi obtenu grâce à une série d'initiatives lancées par la France.

Deux nouveaux défis formés pendant la période 2000-2001 constituent, substantiellement, le noyau de notre coopération franco-maritime. La nouvelle politique du Gouvernement chypriote en matière de sécurité maritime a pour axe principal la revalorisation qualitative de la flotte chypriote. Cette nouvelle politique a porté ses fruits, comme l'ont constaté les parlementaires français qui nous ont rendu visite au cours des dernières années. Il faut rappeler que les accidents sont moins nombreux, de même que les navires immobilisés dans les ports européens et américains. En outre, la coopération de nos pays dans le domaine de la marine marchande est désormais institutionnalisée, ceci depuis 2000, au travers de rencontres : les résultats de ces rencontres sont très positifs, dans la mesure où plusieurs actions ont été décidées. Citons par exemple l'institutionnalisation du traitement des marins abandonnés, l'échange de savoir-faire et de prestations techniques.

II. Les perspectives

S'agissant des perspectives, il va de soi que notre avenir est inhérent à l'entrée de Chypre dans l'UE. En outre, au vu de notre position géographique, Chypre peut jouer le rôle de pont pour les Etats européens vers le monde moyen-oriental. Soyez certains que nous serons d'accord pour jouer un rôle de gendarme dans la partie Sud de la Méditerranée, notamment, en matière de respect de l'environnement marin. L'entrée de Chypre dans l'UE crée également des perspectives pour les levées des restrictions maritimes imposées par la Turquie, depuis 1987, à notre encontre. Cette question est très préjudiciable aux intérêts chypriotes et communautaires, elle est en outre directement liée à l'entrée de la Turquie en Europe et à la reconnaissance, par ce dernier pays, de notre République. Nous espérons donc fortement que l'embargo turc sera bientôt levé.

C'est dans ce cadre que surgissent de nouvelles perspectives pour notre coopération maritime bilatérale. Chypre comprend les inquiétudes françaises en matière de sécurité maritime et de protection de l'environnement marin, elle est favorable à l'adoption de solutions globales à un niveau international. Je pense en outre qu'il est important que nous ayons, dans toute l'Europe, des flottes compétitives au plan international, tout en appliquant des normes de sécurité appropriées. Des perspectives se présentent aussi dans le cadre du processus laborieux actuellement effectué par l'Organisation internationale du travail pour la révision et l'unification de toutes les normes internationales du travail dans la marine marchande.

En conclusion, je voudrais souligner que le secteur maritime chypriote est prêt à faire face aux enjeux et aux perspectives qui prédominent sur la scène maritime ; ils sont reflétés dans la coopération maritime franco-chypriote qui est désormais institutionnalisée. Notre Gouvernement poursuivra ses efforts afin de consolider, dans la perception de la communauté maritime internationale, le fait que Chypre constitue aujourd'hui un centre maritime de qualité, avec une infrastructure intégrée.

Quelques domaines de la coopération franco-chypriote


Les problèmes de l'eau
Philippe GUETTIER
Adjoint responsable à la mission des Affaires internationales et communautaires au Ministre de l'Ecologie et du Développement durable

Je souhaite aborder un domaine évidemment crucial pour nos deux pays, le domaine de l'eau. Celui-ci me semble faire l'objet de peu d'actions de coopération : il y a donc là un sujet sur lequel nous pourrions réellement travailler ensemble.

Je souhaite me pencher sur la politique européenne de l'eau et sur son application en France, afin de pouvoir ensuite développer des collaborations avec Chypre. Vous savez que de nombreuses directives européennes abordent ce sujet sous différents angles. En 2000, en particulier, une directive cadre a été publiée, qui donne un cadre général aux législations européennes existantes. La législation européenne vise plusieurs objectifs :

· éviter la dégradation de la qualité des eaux ;

· promouvoir une gestion durable de la ressource en eau ;

· limiter les incidences d'événements dramatiques (inondations, sécheresses) ;

· protéger la qualité des eaux marines, en particulier dans une optique sanitaire de protection des populations.

La directive cadre pose un certain nombre de principes structurants.

· La gestion de l'eau doit se faire par bassins hydrographiques.

· Il importe de prévenir la dégradation de la qualité des eaux.

· Il faut parvenir, en 2015, à ce que toutes les eaux et tous les milieux aquatiques présentent un bon état écologique.

S'agissant des outils, il convient de rappeler que ce sont les usagers qui doivent payer pour le maintien de la qualité de l'eau. En outre, il faut procéder à une surveillance et à un état des lieux de la qualité des eaux, quelles qu'elles soient.

En ce qui concerne la participation du public, toute politique de l'eau doit être définie après consultation du public, ceci à tous les niveaux. La directive fixe un calendrier relativement serré pour l'atteinte d'un bon état écologique en 2015. En outre, des travaux sont en cours au niveau communautaire, auxquels Chypre a commencé à prendre part. Cela est nécessaire, dans la mesure où il y a là, pour vous, des enjeux essentiels.

La France applique plusieurs grands principes en matière de gestion de l'eau, ceci depuis 1964.

· Les eaux et les milieux aquatiques sont traités dans une approche intégrée.

· La gestion est conduite par bassins versants, au nombre de 13 en France. En outre, un système de financement a été mis en place, au sein des bassins mêmes, par le truchement d'agences de bassin.

· La gestion est décentralisée, dans la mesure où les responsabilités sont assurées par les communes, les industriels et les agriculteurs.

· La concertation avec les usagers est la règle.

· Les politiques de l'eau sont intégrées dans d'autres politiques.

La législation européenne est très complète dans le secteur de l'eau, elle oblige les Etats à mettre en place des politiques ambitieuses. La France dispose d'une très grande expérience dans ce domaine, au niveau des communes, des collectivités locales, des petites et des grandes entreprises. Je souhaite que nous puissions coopérer, à l'avenir, sur ce thème de l'eau.

Le domaine de la santé
Marie-Madeleine DAUTEL
Chef de mission Europe et International
Ministère de la Santé et de la Protection sociale

La santé est un enjeu important pour la France et pour l'Europe. En France, les citoyens font preuve d'une attitude consumériste, et présentent de fortes exigences en termes de sécurité, d'accessibilité et de technologies. Nous avons en outre une exigence de reconnaissance internationale pour nos sites, la réputation de notre technologie et notre savoir-faire étant établis. Ces exigences portent également sur des problèmes épidémiologiques importants, le cancer en premier lieu. Enfin, nos exigences s'expriment dans le domaine de la gestion des risques, ainsi qu'en matière financière. Nous travaillons sur la question de la nouvelle gouvernance, à la fois au niveau de l'Etat et à l'échelle régionale. Cette nécessaire gouvernance concerne également la gestion des hôpitaux. Trois lois sont parues récemment sur ces sujets. Je signale également que nous sommes en train de mettre en place un système d'information, et un dossier médical personnel et partagé.

S'agissant de l'Europe, il convient de faire face à la question de la mobilité des patients, un groupe de travail a été mis en place sur la question des sites de référence : nous en assurons la présidence. Tous les enjeux que je viens de rappeler concernent également l'Europe, c'est bien pour cela que nous travaillons sur des critères et des cartographies au niveau européen. S'agissant des sites de référence, je pense qu'une coopération peut prendre place entre la France et Chypre. Si de premières actions ont été mises en oeuvre au niveau français, le dossier évolue aussi au niveau européen : le projet doit être présenté en décembre au Conseil des Ministres européen.

En France, nous avons créé un « canceropole », à Toulouse. Il associera la recherche privée, la recherche publique et des services de très haut niveau. Sept ou huit structures de ce type seront créées en France, et qui auront vocation à travailler en réseau. L'Europe fera de même, ce qui permettra d'établir une cartographie des sites de référence. Chaque site demandera l'obtention d'un label. Avec la République de Chypre, l'approche par réseau est propice à une démarche de coopération. D'ores et déjà, nous sommes en train de mettre en place un réseau sur les pathologies présentes dans les pays méditerranéens. En outre, la question de la qualité doit être soulevée. Ce sujet est essentiel, dans la mesure où aucune norme européenne n'existe encore. Nous travaillons, avec le Royaume-Uni, pour définir des critères, et nous oeuvrons pour que l'Europe s'empare de ce dossier. Chypre peut s'associer à cette réflexion.

En ce qui concerne les systèmes d'information, nous sommes en train de travailler sur le dossier de la télé-médecine. Cette réflexion se matérialisera en France dès 2007, mais cela représente une préoccupation européenne également : un groupe de travail se réunit actuellement sur ce sujet, dont l'Allemagne assure la présidence.

D'autres objectifs peuvent donner lieu à une collaboration entre la France et Chypre. Par exemple, la question des urgences demeure problématique en France, et les défis sont nombreux. Nous travaillons ainsi avec d'autres pays pour réfléchir à la meilleure organisation dans ce cadre ; signalons que ce travail est conduit avec certains pays extra-communautaires, la Chine et le Brésil notamment. Avec ces deux pays, nous réfléchissons à une meilleure prise en charge des urgences lors de grandes catastrophes.

Les risques majeurs
Colonel Philippe NARDIN
Chef de mission Relations internationales
Direction de la Défense et de la Sécurité civiles

Dans ce domaine des risques majeurs, la Direction de la Défense et de la Sécurité civiles n'a abordé la question de la collaboration avec Chypre que lors de son entrée dans l'UE. Pour autant, nous étions néanmoins en relation depuis plusieurs années à propos des risques sismiques.

Au plan opérationnel, nous intervenons actuellement dans le cadre du mécanisme européen, comme cela est d'ailleurs le cas avec les autres Etats membres. Cela concerne certes les risques sismiques, les inondations, mais aussi les feux de forêt. A ce propos, un rapprochement entre deux bataillons de pompiers de nos deux pays est à l'étude.

La Direction de la Défense et de la Sécurité civiles, plus généralement, est ouverte aux partenariats bilatéraux. Nous pouvons donc envisager de collaborer avec la République de Chypre dans nombre de domaines, la formation ou la planification des secours par exemple. Dès cette année, d'ailleurs, des échanges ont eu lieu : un général chypriote nous a rendu visite et à cette occasion, nous lui avons présenté nos dispositifs en matière de lutte contre les risques majeurs. Encore une fois, la Direction de la Défense et de la Sécurité civiles est résolument ouverte à un ensemble d'actions de coopération bi ou multilatérales avec Chypre.

La culture et la communication
Frédéric BOUILLEUX
Chef du Département des Affaires européennes et internationales
Ministère de la Culture et de la Communication

Dans les deux secteurs de mon ressort, nous ne pouvons que constater l'excellence de la collaboration entre nos pays. Ces relations existaient bien avant l'entrée dans l'UE de Chypre : j'en veux pour preuve les nombreuses expositions organisées à Chypre (les expositions Picasso et Debré, par exemple), les concerts de musique classiques, les représentations théâtrales... Signalons à ce titre que de nombreuses nouvelles manifestations, présentant des artistes français, prendront encore place en 2005.

En France, de nombreuses manifestations culturelles chypriotes sont organisées. Nous pouvons ainsi citer l'exposition Chypre, berceau d'Aphrodite , qui sera présentée chez nous l'année prochaine. Le programme culturel franco-chypriote est extrêmement riche. Notre coopération porte également sur la recherche, dans le domaine des sciences sociales et en archéologie par exemple. Chypre est en fin de compte le pays dans lequel notre investissement est le plus important en Europe.

Par ailleurs, par le biais du tourisme et des industries culturelles (architecture, livre, cinéma et musique), notre coopération est forte. Dans le domaine architectural, Chypre exerce une action importante : certaines des expositions organisées en France sont ensuite présentées à Chypre. Dans le domaine de l'édition, si les exportations françaises ont marqué une légère baisse en 2003, nous constatons néanmoins une progression de 30 % au cours des quatre dernières années. S'agissant de la promotion de la littérature chypriote en France, nous devons rappeler que la mairie de Lodève a été aidée à ce titre. Pour le cinéma, Chypre participe à certains programmes communautaires dédiés. Malheureusement, il n'existe pas encore d'accords de coproduction entre nos deux pays. S'agissant de la télévision, Arte est tout à fait prêt à accueillir des programmes chypriotes.

Le Ministère de la Culture et de la Communication oeuvre plus généralement pour l'accueil d'artistes en France : les demandes émanant de ressortissants chypriotes seraient favorablement accueillies. Nous pouvons en outre répondre à des demandes spécifiques dans le domaine culturel, où nous pouvons apporter notre coopération.

En ce qui concerne le rayonnement de la langue française à Chypre, je vous rappelle qu'il s'agit de la deuxième langue apprise, derrière l'anglais. Les effectifs d'apprenants français sont en croissance régulière. Nous avons en outre, depuis l'adhésion de Chypre à l'UE, pu mener à bien des mastères de traduction. En revanche, peu d'étudiants chypriotes viennent faire leurs études en France. Nous pourrions travailler à redresser cette tendance.

En ce qui concerne la défense et la promotion de la diversité culturelle, une convention est en cours de négociation devant l'Unesco. Monsieur Loos avait pris à ce titre l'initiative d'inviter l'ensemble des Ministres du Commerce extérieur de l'UE sur cette question. Nous nous étions d'ailleurs félicités de constater la convergence de vue entre la France et Chypre. J'espère que votre pays soutiendra avec nous, nos points de vue lors de la prochaine Conférence générale de l'Unesco, en octobre prochain.

Réactivation de la Chambre de Commerce franco-chypriote
Monsieur VOISIN
Président de la Chambre de Commerce franco-chypriote
Courriel : lvoisin@stereau.fr

Chers amis, c'est pour moi un honneur de m'adresser à vous en qualité de nouveau président de cette chambre de commerce franco-chypriote, que nous allons réactiver grâce aux efforts concordants du Sénat, de M. le Sénateur André Rouvière et de notre ami, M. Boyadjis, Consul honoraire de Chypre à Marseille : que tous soient salués et remerciés pour l'importante contribution qu'ils viennent ainsi d'apporter à la cause du rapprochement entre nos deux pays.

Chypre présente une situation envieuse, et peut être considérée comme le trait d'union entre trois continents. Chypre est depuis cette année membre à part entière de l'UE, et est dotée d'institutions démocratiques stables ; les citoyens présentent un niveau de vie élevé, sans équivalent dans cette zone. En outre, Chypre offre un environnement propice aux affaires.

En 2003, la France était le troisième fournisseur de Chypre, cette dernière exportant, en France, un volume plus modeste. Il existe donc un fort potentiel d'accroissement des échanges entre nos deux pays. La Chambre de Commerce franco-chypriote s'inscrit résolument dans un tel cadre, en relation avec les Chambres de commerce françaises et chypriotes. La Chambre de Commerce franco-chypriote a été créée en 1971 ; aujourd'hui, à Chypre, les projets se multiplient, en ce qui concerne les grands travaux, le domaine de la santé, les nouvelles technologies, le tourisme et le volet culturel. C'est pour accompagner ces projets que la Chambre de Commerce franco-chypriote est réactivée, bénéficiant ainsi d'une nouvelle vitalité. Cette Chambre de Commerce permettra de regrouper, et de fédérer les énergies des entrepreneurs. Nous avons pour ambition d'être un pivot pour favoriser et dynamiser les échanges entre nos deux pays.

Clôture du colloque

Son Excellence Minas HADJIMICHAEL
Ambassadeur de Chypre en France

Si j'avais à dresser un bilan des relations franco-chypriotes, j'insisterais sur leur caractère affectif et sur leur grande diversité et leur richesse, qui nous autorisent à envisager leur avenir avec sérénité. Les amis de Chypre sont nombreux, et c'est avec beaucoup d'émotion que je voudrais exprimer nos remerciements et notre gratitude pour leur soutien précieux mais aussi leur faire part de notre souhait de les voir continuer dans l'avenir, dorénavant en tant que partenaires au sein de l'UE, à oeuvrer et à coopérer entre nous, avec le même dévouement. C'est également pour moi aujourd'hui l'occasion de remercier la France pour son aide et la compréhension dont elle a fait preuve à notre égard, en particulier dans les circonstances difficiles que vit Chypre depuis trente ans. On ne peut jamais oublier que la France, en 1974, a été le seul pays d'Europe occidentale à autoriser son industrie d'armement à fournir des armes à la République de Chypre pour défendre sa liberté, son indépendance et son intégrité territoriale. La France, en tant que membre permanent du Conseil de Sécurité, a toujours adopté sur la question chypriote des positions conformes à des principes de droit international et a contribué à la recherche d'une solution qui respecterait les résolutions du Conseil de Sécurité sur Chypre.

En ce qui concerne notre marche vers l'adhésion européenne, la France a, là encore, joué un rôle très important. La décision pour le lancement des négociations d'adhésion a été prise, en 1995, sous la présidence française de l'UE. En 1999, la contribution française au bon déroulement des négociations a été déterminante et, sous la dernière présidence française en 2000, l'élan définitif a été donné pour que les négociations soient achevées rapidement.

Le 1 er mai 2004, Chypre, l'île tout entière, en tant que personne internationalement reconnue comme une seule nation souveraine, devient membre à part entière de l'UE. A travers son adhésion, Chypre officialise et concrétise son appartenance de toujours à l'espace européen, que ce soit par sa situation géographique, son histoire, sa civilisation et sa culture. Cet aboutissement heureux de la marche européenne de l'île constitue le point d'orgue d'un long parcours marqué par cette volonté inflexible de tous les Chypriotes d'affirmer leur appartenance à la grande famille européenne et de faire partie de l'espace européen, qui est un espace de paix, de sécurité et de prospérité. De très grands efforts d'harmonisation ont dû être déployés dans tous les domaines de la vie chypriote. Pour cela, il y a eu un certain prix à payer, mais tous les Chypriotes étaient partisans de l'adhésion de l'île de l'UE et du besoin de moderniser le corpus de la loi existant.

L'adhésion de Chypre à l'UE est l'occasion à saisir pour procéder à un renforcement des relations franco-chypriotes sur tous les plans, politique, économique et culturel. Nous sommes aujourd'hui partenaires. La présence française à Chypre doit être soutenue. Les investissements dans notre pays, qui offre un très fort potentiel et qu'il est prêt à les accueillir, méritent une attention particulière et doivent être encouragés.

Chypre est un pays indépendant, qui se veut proche de la France et qui s'est détaché de la sphère d'influence de son passé colonial. Si vous venez à Chypre, vous allez constater que, dans la société chypriote, et notamment dans le monde politique, nombreuses sont les personnalités francophones et francophiles, qui sont profondément touchées par le soutien de la France en faveur de l'adhésion de leur pays à l'UE. Chypre est un pays d'avenir, un pays qui a déjà tous les atouts pour devenir le pont qui unirait l'Europe au Proche et au Moyen-Orient. Après l'élargissement de l'UE, Chypre peut contribuer au renforcement du partenariat euro-méditerranéen, un projet auquel la France tient énormément.

Pour nous, l'adhésion de notre pays à l'UE a aussi une autre dimension très importante. Elle apportera une amélioration dans les relations entre les deux communautés de l'île, grecque et turque, suivant l'exemple de l'Europe des peuples unis qui vivent en paix et en harmonie dans un espace commun à tous. Personne ne peut oublier que la Communauté économique européenne, qui a précédé l'Union européenne, est née de l'expérience amère de la Seconde Guerre Mondiale ; un rapprochement des Etats européens et des nationalités était indispensable.

La conception de base de Jean Monnet pour résoudre la question allemande fut de changer le contexte : c'est ainsi que le concept de l'UE est né. A Chypre, le problème chypriote a bloqué le pays pendant trente ans. L'adhésion à l'UE représente pour nous le nouveau contexte qui nous permettra de sortir de l'impasse. Au sein de l'UE, nous sommes convaincus que nous pourrons réussir à réunifier notre pays, et à faire en sorte que les Chypriotes grecs et turcs puissent vivre ensemble, sans avoir peur les uns des autres, dans la sécurité et dans la confiance qu'un avenir prometteur s'ouvre devant eux. Pendant les réunions préparatoires de ce colloque, Monsieur le Sénateur Rouvière et moi-même, nous nous sommes penchés à plusieurs reprises sur la question de ce nouveau contexte, et comment l'on pourrait inviter à notre colloque des hommes d'affaires chyprio-turcs, des industriels et des entrepreneurs. Je suis sincèrement désolé de ne pouvoir aujourd'hui les accueillir parmi nous, bien que des invitations leur aient été adressées. Cela dit, je souhaite leur adresser un message de bonne foi, d'optimisme de détermination à poursuivre nos efforts en vue de la réunification des deux parties du pays.

Personnellement, je me sens inspiré par l'exemple impressionnant donné par Jacques Chirac, qui a représenté le Chancelier allemand et l'Allemagne au Conseil européen ; je pense que cette coopération, ce signe d'apaisement et de dépassement des conflits historiques pourrait démontrer à tous les Chypriotes qu'il existe un intérêt commun à travailler ensemble dans une Europe unifiée. Je vous remercie.

Son Excellence Hadelin DE LA TOUR DU PIN
Ambassadeur de France à Chypre

Merci d'avoir organisé cette matinée de travail, qui rencontre un grand succès. Je voudrais limiter mon propos à quelques constats simples ; je suis arrivé à Chypre il y a un an, et j'ai constaté que la situation a évolué depuis ; cette évolution n'est pas spectaculaire, certes, mais elle est néanmoins sensible. Ainsi, les référendums du 24 avril ne marquent pas la fin de l'Histoire ; la réunification est en train de se faire, de manière très discrète. Si une réunification n'a pu être faite par le haut, elle s'opérera par le bas.

Chypre est entrée dans l'UE le 1 er mai : ce fait, nouveau, représente un point de départ, et non un point d'aboutissement. En effet, les administrations, les tribunaux, les citoyens doivent maintenant « intégrer » cette nouvelle appartenance. Si le processus n'en est qu'à ses débuts, force est de constater que Chypre veut résolument faire partie de l'Europe, avec, comme perspective, d'entrer rapidement dans la zone euro. En outre, il convient de rappeler que l'entrée dans l'UE introduit un nouveau cadre de vie pour les Chypriotes, mais aussi pour les investisseurs. Il est possible de circuler librement dans les deux parties de l'île, ce qui représente un fait entièrement nouveau par rapport aux trente dernières années.

Dernière observation, qui peut intéresser les uns et les autres : même si la question politique n'a pas été réglée (celle de la division de l'Ile), l'Union européenne a décidé de prendre un certain nombre d'initiatives (et soulignons à cet égard que les conclusions du Conseil européen, à ce sujet, sont partagées) visant à « réunifier l'île en favorisant son intégration économique ». Pour ma part, je suis optimiste quant à l'atteinte de cet objectif à terme.

En conclusion, il me paraît nécessaire de reprendre, dans un horizon assez proche (2005 peut-être), des conversations sous l'égide des Nations Unies, pour reprendre cette « tapisserie » de la réunification que nous voulons réaliser, sur le modèle d'une fédération qui s'inspirerait du système belge ou suisse.

André ROUVIERE
Président du groupe sénatorial France-Chypre

Je souhaite tout d'abord dire à nouveau à Monsieur Lillikas et à Monsieur Loos combien nous sommes honorés de leur présence. Mes remerciements vont également au Président Poncelet pour l'aide qu'il nous a apportée dans l'organisation de cette rencontre. Ces remerciements vont également aux Ambassadeurs français et chypriote qui viennent de s'exprimer.

Rappelons que la tenue de ce colloque, comme la réactivation de la Chambre de Commerce franco-chypriote, a été évoquée dès 2002. Peu à peu, cette idée a fait son chemin, et, comme dans d'autres domaines, notre persévérance a été récompensée. L'officialisation de la Chambre de Commerce franco-chypriote est le fruit d'un travail collectif : je souhaite donc remercier chaudement tous ceux qui y ont participé. Mes remerciements, et mes félicitations, vont également à Monsieur Voisin, nouveau Président de cette Chambre de Commerce. Son discours a montré quel était l'avenir des relations commerciales entre nos deux pays. Plus généralement, je salue la détermination et l'acharnement de tous les acteurs qui contribuent au rapprochement entre la France et la République de Chypre.

Ce colloque n'est pas un point final ; il ne constitue qu'une première étape. D'autres rencontres doivent prendre place, que cela soit en France, ou à Chypre. Toutes les opportunités de nous rencontrer doivent être saisies. Enfin, j'adresse mes plus sincères remerciements à tous les orateurs ; leurs interventions ont été de grande qualité.

Nous avons le désir ardent de travailler avec vous. Si ce désir reste de mise, je suis persuadé que nous pourrons mieux nous connaître, mieux échanger. Je suis convaincu que ces relations vont se renforcer.

En conclusion, je dois dire que nous devons tous apporter notre contribution à la question cruciale de la réunification de l'île. Si, souvent, le politique prédomine l'économique, je pense, en ce qui concerne Chypre, que l'économie peut largement aider à la réunification de l'île. Au fond, l'unité vous permettra de vous renforcer. L'UE vous apportera, dans ce cadre, une aide importante. J'espère que nous pourrons bientôt nous rencontrer, à Nicosie, pour fêter la réunification de l'île de Chypre. J'espère plus généralement que nous nous rencontrerons bientôt à nouveau pour des réunions de travail similaires. Je vous remercie de votre participation.

Synthèse réalisée en temps réel par Ubiqus Reporting

Tél. 01 44 14 15 16, www.ubiqus.fr

Colloque organisé sous l'égide du groupe interparlementaire
France-Chypre par la Direction des Relations internationales du Sénat.
Pour toute information sur les colloques, vous pouvez contacter
le service des Relations internationales du Sénat :
M. Michel LAFLANDRE, Conseiller
Téléphone : 33 (0)1 42 34 20 47 - Télécopie : 33 (0)1 42 34 27 99
courriel : m.laflandre@senat.fr
ou consulter le site internet du Sénat : www.senat.fr/international

(1) Le texte intégral de l 'intervention de M.Anthony A. MADELLA peut être téléchargé depuis le site du Sénat

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