Colloque sur le Kazakhstan



Table des matières


Actes du Colloque
Sénat-Ubifrance sur le
Kazakhstan :

"Partenaire aujourd'hui, géant demain"

Jeudi 4 mai 2006

Avant le début de la séance, M. Christian Poncelet , Président du Sénat, salue la délégation kazakhstanaise. A sa gauche, M. Nurtay ABYKAYEV, Président du Sénat du Kazakhstan et Mme Gouljana  KARAGOUSSOVA, Ministre du Travail et de la Protection sociale du Kazakhstan

Vue de la Salle Clemenceau.
Discours du Président Poncelet

M. Nurtay ABYKAYEV, Président du Sénat du Kazakhstan et M. Aymeri de MONTESQUIOU , Sénateur, Président délégué pour le Kazakhstan du groupe interparlementaire d'amitié France-Asie centrale.

M. Nurtay ABYKAYEV, M. Aymeri de MONTESQUIOU et
M. Daniel PATAT,
Chef de la Mission économique à Almaty

M. Christian PONCELET, M. Nurtay ABYKAYEV,
M. Aymeri de MONTESQUIOU et M. Daniel PATAT

Ouverture


Christian PONCELET
Président du Sénat

Monsieur le Président du Sénat, Madame et Monsieur les Ministres, Monsieur l'Ambassadeur, Monsieur le Président d'UBIFRANCE, chers collègues, Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est heureux et fier d'accueillir aujourd'hui cette importante rencontre sur le Kazakhstan, en présence d'une délégation de hautes autorités d'un pays ami avec lequel le Sénat français entretient des liens anciens et réguliers dans de nombreux domaines (politique, scientifique, social, culturel...). Je tiens en premier lieu à adresser mes voeux de bienvenue à mon homologue du Sénat kazakhstanais, mon ami le Président Abykayev, que j'ai déjà reçu au Sénat il y a deux ans, presque jour pour jour. A ses côtés, je remercie également Madame Karagussova, membre du gouvernement du Kazakhstan, qui a pris sur son temps pour être parmi nous ce matin, ainsi que tous les membres de cette éminente délégation.

Permettez-moi aussi de me tourner vers mon collègue de l'Assemblée nationale, le député René André, pour lui redire combien nous apprécions l'excellente coopération qui nous unit à UBIFRANCE depuis maintenant plus de huit ans. Nous avions déjà traité du Kazakhstan avec son équipe en juin 2001 et je mesure combien, depuis lors, ce pays a progressé.

A ce rythme, le Kazakhstan a toutes les chances de devenir un géant dans les prochaines années, comme le rappelle l'intitulé de notre colloque. Ce pays dispose, il est vrai, d'atouts exceptionnels : des richesses naturelles abondantes, un environnement protégé et une population dynamique qui n'hésite pas à entreprendre tout en respectant les valeurs traditionnelles d'une culture ancienne et attachante. Les perspectives sont multiples pour nos relations économiques : dans le secteur des hydrocarbures, bien entendu, mais aussi des transports, de la gestion de l'eau, de l'agriculture ou même le développement de technopoles. La France et ses entreprises se doivent d'être au rendez-vous !

Je préfère laisser aux spécialistes, qui vont se succéder à la tribune toute la journée, le soin d'évoquer plus en détail ce volet économique et mettre l'accent sur les efforts considérables accomplis par le Kazakhstan et par toutes ses forces vives pour se doter d'un système politique et administratif qui, chaque jour un peu plus, tend à se rapprocher des standards reconnus par la communauté internationale.

Car dès son accession à l'indépendance en 1991, cette jeune république d'Asie centrale a fait le pari du pluralisme et de l'économie de marché ; elle commence aujourd'hui à en récolter les dividendes, dans une région où certains de ses voisins semblent au contraire marquer le pas, et même reculer dans certains cas. Dans un important discours le 1 er mars devant le Parlement, le Président Nazarbayev a fixé une première étape : faire entrer le Kazakhstan dans les cinquante pays les plus influents du monde d'ici 2015. Gageons que cet objectif sera certainement atteint et, qui sait, peut-être dépassé.

Cette remarquable progression économique se double d'une ouverture démocratique. Plusieurs sénateurs français - de la majorité comme de l'opposition - se sont rendus au Kazakhstan pour y observer les élections législatives de 2004 puis les présidentielles de 2005 et, dans les deux cas, leur sentiment général sur le processus en cours a été encourageant. Sur le plan parlementaire, je constate aussi, avec intérêt comme vous vous en doutez, que le Kazakhstan a créé une seconde chambre qui, comme le Sénat français, est plus particulièrement chargée de représenter les collectivités locales du pays : ses 14 régions et ses deux grandes municipalités, Almaty et Astana. Comme leurs homologues français, les sénateurs du Kazakhstan deviennent peu à peu les interlocuteurs naturels des assemblées locales et permettent de mieux associer aux décisions du pouvoir central les habitants établis dans des zones parfois reculées d'un pays enclavé et grand comme cinq fois la France.

Sur le plan diplomatique, nos relations avec le Kazakhstan sont excellentes, d'autant que cet Etat s'est clairement rangé dans le camp des pays refusant le terrorisme. Il pratique un Islam de tolérance, condamne fermement les extrémismes de tous bords et contribue de manière reconnue à la stabilité de l'Asie centrale.

Nos entretiens et nos échanges réciproques sont nombreux et réguliers. Le Sénat n'est d'ailleurs pas en reste dans ce mouvement ; ainsi, depuis mars 2000, nous avons organisé pas moins de vingt manifestations ou rencontres avec les représentants de ce pays, y compris plusieurs missions sur place. J'ai moi-même été reçu au Kazakhstan en février 2003 à l'invitation du Président Nazarbayev, auprès duquel vous voudrez bien vous faire, Monsieur le Président du Sénat, cher collègue, l'interprète de mes sentiments fidèles et amicaux.

Enfin, n'oublions pas le tropisme de ce pays pour l'Europe. Sans rien renier de son héritage centre-asiatique et de ses relations particulières avec la Russie, le Kazakhstan, comme à l'époque de la Route de la Soie, a aussi le regard tourné à l'ouest. A ce titre, il a conclu un accord de coopération avec l'Union Européenne, dès 1999, et s'est même porté candidat à la présidence de l'OSCE pour 2009, ce qui - par voie de conséquence - lui impose d'ardentes obligations en matière de respect des droits de l'homme et de pluralisme politique.

Avant de donner la parole au Président Abykayev, permettez-moi de rendre hommage à l'activité constante et enthousiaste du groupe d'amitié France-Asie centrale du Sénat, sans l'appui duquel cette rencontre n'aurait pas eu lieu. Je tiens, à ce propos, à saluer l'engagement de son Président, mon ami André Dulait, ancien Président de notre Commission des Affaires étrangères et de la Défense, ainsi que celui d'Aymeri de Montesquiou, Président délégué pour le Kazakhstan, qui mieux que quiconque saura vous faire partager sa passion pour ce pays. Je souhaite à tous d'excellents travaux, en espérant que vous garderez de votre passage au Sénat un excellent souvenir et que vous y reviendrez.


Nurtay ABYKAYEV
Président du Sénat du Kazakhstan

Monsieur le Président du Sénat, permettez-moi d'exprimer, au Sénat français et à Monsieur Poncelet en particulier, des paroles de reconnaissance pour avoir invité notre délégation en France. Mon ami Monsieur Poncelet a souligné la volonté de rapprochement qui existe entre nos deux pays. Les distances qui nous séparent sont grandes mais elles ne peuvent constituer un obstacle pour la coopération et l'amitié. Ainsi, la Constitution de la France a été prise pour base d'élaboration de celle de notre pays. Nous connaissons bien la France : n'importe quel écolier kazakh pourrait parler de la France comme un pays des arts, de la haute couture et dont les auteurs lui sont familiers. Nous sommes donc très fiers que nos amis français souhaitent connaître le pays de montagnes et de steppes que constitue le Kazakhstan. Souhaitons que ce colloque ouvre non seulement des perspectives économiques mais vous permette aussi de sentir la fraîcheur de nos vents et la chaleur qui est dans notre coeur.

Depuis quinze ans, nous sommes parvenus à renforcer l'entente interreligieuse et la stabilité politique dans notre pays. Aymeri de Montesquiou est venu dans notre pays de très nombreuses fois et il est devenu un frère pour nous. Monsieur Poncelet, je sais que vous avez également découvert le Kazakhstan et nous sommes toujours heureux et honorés de vous recevoir. Le Kazakhstan a achevé la réforme législative et celle de ses structures institutionnelles sur la voie de l'économie de marché. Le taux d'augmentation du PIB fut en moyenne de 5 à 9% au cours des cinq dernières années. Les succès socio-économiques du pays ont d'ailleurs été reconnus par les agences de notation et les marchés financiers. Le Président de notre pays, Monsieur Nazarbayev, a fixé au Kazakhstan l'objectif de faire partie des 50 premiers pays du monde à l'horizon 2015 et nous pouvons réaliser cette ambition, notamment grâce à de solides positions dans le domaine énergétique. Nous souhaitons faire preuve de transparence dans l'exploitation des ressources énergétiques afin d'assurer une stabilité de ces vecteurs sur les marchés internationaux.

Le Kazakhstan cherche également à diversifier son économie. Nous réalisons, dans cette perspective, un important travail de réforme des structures éducatives. Nous envoyons une part croissante de nos étudiants (3 000 étudiants aujourd'hui) à l'étranger pour qu'ils s'y forment. Nous avons achevé la mise en oeuvre de la première étape de cette stratégie de changement, qui a été marquée par l'adoption d'une vingtaine de lois. La deuxième étape aura pour objectif de prendre une série de mesures visant à réaliser des projets internationaux et nationaux en vue de produire des produits et services concurrentiels et d'adhérer à l'OMC. Le Parlement devrait, avant la fin de la session prévue à la fin du mois de juillet 2006, adopter une trentaine de nouvelles lois allant dans le sens des réformes démocratiques. Une base législative a d'ores et déjà été créée, de même qu'une commission publique nationale visant à construire la société civile. Notre objectif est de construire un pays démocratique où règne la loi, sans pour autant renier les traditions de notre société multiconfessionnelle.

Notre pays est au carrefour de très riches civilisations. Voilà pourquoi notre peuple est si tolérant et pourquoi nous sommes si hospitaliers. Pendant de nombreux siècles, de multiples peuples ont vécu sur le sol kazakh. Nous avons toujours cherché à maintenir les liens d'amitié et de coopération avec ceux qui nous entourent. Le modèle kazakh, basé sur un pouvoir fort et une stratégie de développement clairement définie, a permis de surmonter la crise des années 90 et d'obtenir de bons résultats.

Je me permets de vous remercier une nouvelle fois pour votre invitation à participer à ce colloque.

René ANDRE
Député, Président d'Ubifrance

Monsieur le Président du Sénat de la République française, monsieur le Président du Sénat du Kazakhstan, Madame la Ministre, Messieurs les sénateurs, chers amis,

Je voudrais joindre mes propos à ceux du Président Poncelet pour redire combien nous sommes heureux et honorés de recevoir les hautes personnalités présentes ici au Sénat. Je voudrais saluer tout particulièrement avec un grand respect Monsieur le Président du Sénat du Kazakhstan, Nurtay Abykayev. Je salue aussi Madame Gouljana Karagoussova, ministre du travail et de la protection sociale du Kazakhstan, sans oublier Aymeri de Montesquiou, sénateur, Président délégué pour le Kazakhstan du groupe interparlementaire d'amitié France-Asie centrale et auteur d'un rapport remarqué au Premier ministre, « Vers un nouveau partenariat entre la France et l'Asie centrale ». Vous comprendrez également que je salue les forces vives du Kazakhstan, qui se trouvent parmi nous aujourd'hui.

Ce séminaire s'inscrit dans la déjà longue coopération initiée en 1997 entre le Sénat et ce qui s'appelait à l'époque le Centre français du Commerce extérieur, devenu Ubifrance, Agence française pour le développement international des entreprises. Je voudrais à nouveau souligner combien l'action du Président du Sénat est importante pour le développement de nos entreprises à l'étranger. Le Kazakhstan dispose de ressources naturelles exceptionnelles et bénéficie aujourd'hui d'une conjoncture particulièrement favorable. Ses réserves d'hydrocarbures sont parmi les plus importantes connues au monde : avec 10 milliards de tonnes, les réserves prouvées représentent 50% des réserves russes, selon les statistiques dont nous disposons. Ces ressources ont commencé à être exploitées en 1991. En 2005, la production a atteint 61 millions de tonnes de pétroles et 14 millions de mètres cubes de gaz. Avec le site de Kashagan, la production pourrait atteindre 100 millions de tonnes en 2010 et 150 millions en 2015. Le pays dispose également d'importantes ressources minières (aluminium, or...), tous les éléments de la table de Mendeleïev étant réputés présents dans le sous-sol kazakh.

Le pays bénéficie, depuis 1999, du maintien du pétrole et des autres matières premières à un niveau de prix élevé. Le Kazakhstan a opté pour l'ouverture vers l'extérieur et les réformes et est candidat à l'OMC. Cette politique volontariste a incontestablement contribué à sa stabilisation macroéconomique. Dès 1999, le Kazakhstan a renoué avec la croissance. Son PIB a enregistré la plus forte croissance de la CEI en 2001 et poursuit sa progression continue : il a connu en 2003 et 2004 une croissance de plus de 9%. Cette tendance s'est confirmée en 2005, avec une nouvelle hausse de 9,4%. En outre, l'embellie économique a permis au Kazakhstan de s'affranchir de toute dépendance vis-à-vis des organismes internationaux. Son commerce extérieur a progressé rapidement depuis la fin des années 90, même si la Russie demeure son principal partenaire.

Le Kazakhstan représente des investissements directs étrangers d'environ 28 milliards de dollars. Il s'agit du 2 ème stock d'investissements directs étrangers de la CEI, mais concentré à près de 90% dans le domaine des hydrocarbures. La France se situe au 8 ème rang, avec 2,6% du stock des investissements directs étrangers. Cette part est trop faible et nous travaillons pour que cette position s'améliore. Le volume des exportations françaises a très fortement progressé en 2005 (+47%), avec une part prédominante du secteur parapétrolier français : dans le sillage de Total, de nombreuses entreprises françaises ont investi au Kazakhstan.

Ubifrance prend toute sa part dans le développement des relations entre la France et le Kazakhstan, par son rôle d'information mais aussi à travers le dispositif essentiel du volontariat international en entreprise. Ubifrance, en liaison avec la Mission économique à Almaty, propose plusieurs actions de promotion au Kazakhstan dans les prochains mois, dont une semaine consacrée à la présentation des entreprises françaises, qui sera ponctuée de rendez-vous individuels. Nous allons également organiser une journée de présentation du marché de la construction, du 9 au 14 septembre prochain, afin d'accompagner le très fort développement de ce marché au Kazakhstan. Puis dix décideurs publics et privés du Kazakhstan seront invités dans notre pays afin de promouvoir l'offre française dans le domaine de l'eau et du traitement des déchets. Du 3 au 6 octobre, nous participerons au salon Køge: Ubifrance animera pour la 2 ème année consécutive un pavillon français dans ce salon international du pétrole et du gaz. Enfin, le 2 octobre prochain auront lieu les « Rencontres Electricité », à la veille de l'ouverture du salon Køge.

Les opportunités pour notre pays sont importantes vers le Kazakhstan. Soyez assuré qu'Ubifrance a parfaitement conscience du très grand potentiel de ce pays et que nous avons la volonté de tout mettre en oeuvre pour que la France et ses entrepreneurs puissent continuer à développer nos relations économiques, en même temps que nos relations d'amitié, avec ce grand pays qu'est le Kazakhstan.

Kazakhstan, la stratégie de l'énergie

Aymeri de MONTESQUIOU
Sénateur, Président délégué pour le Kazakhstan du groupe interparlementaire d'amitié France-Asie centrale, auteur du rapport au Premier ministre « Vers un nouveau partenariat entre la France et l'Asie centrale »

Monsieur le Président Abykayev, monsieur le Président Poncelet, Madame la Ministre, Monsieur l'Ambassadeur, chers amis,

Trente ans d'expérience politique auraient dû m'apprendre à ne pas faire preuve de redondance dans les propos amicaux que je souhaitais tenir à propos du Kazakhstan. Celui-ci est, à mes yeux, comme une belle femme à qui je fais la cour depuis treize ans. Je lui suis fidèle car, ayant constaté ses qualités intellectuelles, outre ses qualités physiques, je décèle régulièrement de nouvelles qualités à y découvrir. En Occident et en France en particulier, l'on a parfois tendance à donner des leçons. Personne n'a réalisé dans quel désarroi pouvait se trouver le Kazakhstan en 1991, sans administration, sans Etat, avec une économie totalement désorganisée (car précédemment totalement orientée vers Moscou), avec de grandes spécialités plutôt qu'une économie homogène et globale. Ce pays a réalisé, en treize ans, des progrès extraordinaires. Il est à noter notamment que dans le dépeçage de l'Union soviétique, le Kazakhstan s'est retrouvé la 5 ème puissance nucléaire mondiale ; le pays a pris la décision extrêmement sage de renoncer au nucléaire militaire.

Le budget du Kazakhstan est positif. La dette de l'Etat représente 12% du PIB (contre 67% en France et 116% pour l'Italie). Le pays anticipe sur ses remboursements et est classé par l'agence Moody's BAA3. Enfin, 80% des investissements de la zone se dirigent vers le Kazakhstan. Ces chiffres témoignent du potentiel formidable de ce pays, grâce au champ géant de Kashagan bien sûr, mais aussi grâce à d'immenses ressources minières, par exemple en uranium. Dans le domaine de l'agriculture, le Kazakhstan profite du meilleur blé dur du monde, avec des exploitations atteignant parfois 1 million d'hectares (100 km sur 100 km).

S'agissant du futur, je crois que le discours du Président Nazarbayev, en février dernier, a tracé les grands axes. L'axe prioritaire, les technopoles, me paraît essentiel car il témoigne d'une vision du futur déterminante. Le Kazakhstan détient en effet un autre trésor dans son intelligentsia et les capacités intellectuelles de ses élites. Les technopoles constitueront, pour les investisseurs français, des relais avant d'envisager une implantation sur place. Le futur du Kazakhstan sera également stable : l'on parle beaucoup, aujourd'hui, de conflits de civilisations. Le Kazakhstan est le pays de rencontre des civilisations. Un équilibre existe dans cette société : l'on ne reproche pas à l'autre d'être différent. Cent religions ont été répertoriées au Kazakhstan et cinquante ethnies y cohabitent en bonne intelligence. Le score électoral obtenu par le Président Nazarbayev a conduit certains à caricaturer la situation de ce pays. Il s'explique pourtant de façon simple : une croissance annuelle de 9%, pendant de nombreuses années successives, si elle profite à la population, ne peut que rendre celle-ci encline à l'indulgence vis-à-vis de ses dirigeants.

Le Kazakhstan deviendra, dans les dix ans à venir, l'un des 5 à 10 principaux exportateurs de pétrole du monde. Mais la France doit aussi s'intéresser à ce pays pour des raisons stratégiques liées à sa situation : le Kazakhstan constitue le coeur de l'Asie centrale. Je vois le contraste qui existe entre la stabilité de ce pays et les turbulences qui agitent la zone du Sud, par exemple en Afghanistan ou en Irak. La Chine pousse ses pions, en investissant notamment dans les champs pétroliers. La France doit être présente pour constituer une alternative - dans le cadre de l'Union européenne sans doute, mais aussi en tant que telle. Si elle n'investit pas de façon importante dans cette zone, les Etats-Unis, qui y occupent déjà une position importante, verront leur influence, déjà forte, grandir encore.

Il m'a été demandé de rédiger un rapport sur l'avenir du Kazakhstan, dans lequel figurent de nombreuses informations que je n'ai pas le temps de détailler ici. Je plaide en tout cas pour une coopération plus étroite entre nos deux pays, avec l'appui, par exemple, de la Datar afin de partager nos méthodes d'aménagement du territoire dont le Kazakhstan pourrait grandement bénéficier. Bref, je vous encourage tous à vous rendre au Kazakhstan car vous y trouverez une vie dynamique et passionnante.

Echanges avec la salle

Michel BAYLE, Directeur Exploration-Production de Gaz de France

Nous sommes présents au Kazakhstan indirectement, à travers une société allemande qui appartient à Gaz de France et qui produit du pétrole au Kazakhstan depuis 1993. Nous opérons aujourd'hui un champ de pétrole qui produit 3 millions de tonnes par an. Nous avons investi 100 millions de dollars au Kazakhstan. Nous y produisons du pétrole dans d'excellentes conditions : le pays est ouvert et offre la possibilité de travailler et de gagner de l'argent. Il nous semble, à Gaz de France, que le Kazakhstan est destiné à devenir l'équivalent du Venezuela ou du Nigeria dans le domaine du pétrole mais aussi un acteur majeur dans le domaine du gaz. Nous travaillons avec la société nationale kazakhe, KazMunaïGaz, et je souhaiterais connaître la position du Président Abykayev sur les perspectives du pays en termes d'exportation de gaz.

Nurtay ABYKAYEV

Le Kazakhstan est prêt à assurer cette diversification et à fournir les pays de l'Union Européenne en gaz. Monsieur Koulikeev, premier vice-Président de la société KazMunaïGaz, pourra vous en dire davantage.

Jaksybek KOULIKEEV

Il est vrai qu'une filiale de Gaz de France est présente au Kazakhstan depuis 1993. En ce qui concerne les perspectives de l'extraction de gaz au Kazakhstan, nous assurons aujourd'hui la production de 25 milliards de mètres cubes de gaz et nous pouvons atteindre le niveau de 45 milliards de mètres cubes. La principale limite réside en fait dans les infrastructures : le gaz transite aujourd'hui par la Fédération de Russie et le Kazakhstan travaille à l'identification de nouvelles possibilités de transport de gaz vers divers pays, dont l'Europe occidentale. J'invite nos amis français à participer aux discussions autour de nos projets.

Natalia DAVIDAS, gérante, L'Union sans Frontière

Je suis installée en France depuis quinze ans et je souhaiterais savoir quand les entreprises françaises viendront enfin investir au Kazakhstan : le pays s'est ouvert depuis quinze ans ! Allez-y, vous n'avez rien à perdre et vous avez tout à y gagner !

Damira RIPERT, chargée de mission, Medef International

En charge de la Russie et des pays de l'ex-Union soviétique au Medef International, j'ai une suggestion à faire aux différents acteurs économiques et politiques des deux pays. J'ai lu attentivement le rapport du sénateur Aymeri de Montesquiou et j'y ai constaté que 141 étudiants kazakhs ont été accueillis en France en 2004. Dans une dizaine de jours, une délégation de chefs d'entreprise français se rendra au Kazakhstan. Nous recherchons sur place des interprètes de qualité franco-kazakhs et franco-russes et cela constitue une difficulté importante, aujourd'hui, dans le rapprochement des deux pays.

Aymeri de MONTESQUIOU

Il s'agit d'un point extrêmement important. La coopération, au niveau universitaire, est beaucoup trop faible entre nos deux pays. J'ai perçu, au cours des mes voyages au Kazakhstan, ce désir de venir en France, dont l'histoire et la culture continuent de la rendre attractive hors de l'Hexagone. Les autorités kazakhes vont offrir 3 000 bourses à des étudiants pour qu'ils puissent se rendre en France. HEC est présent à Almaty, à travers un programme de MBA. Il s'agit d'une présence importante mais la coopération universitaire doit encore beaucoup se développer entre nos deux pays.

Christian PONCELET

Il est vrai que le Kazakhstan est trop peu connu en France. Cela est regrettable. Aujourd'hui, nombre d'étudiants français sont attirés par la Chine. L'on peut comprendre cette attraction mais il faut aussi que nous renforcions l'apprentissage des langues d'autres pays.

Patrice MAYNIAL, Avocat général, Cour de Cassation

Nous avons été envoyés au Kazakhstan pour le compte de l'Europe afin de formuler des suggestions en matière juridique et judiciaire. Deux points nous ont paru particulièrement importants si l'on veut attirer les capitaux européens au Kazakhstan, et notamment une meilleure sécurité juridique. Je souhaite que le Kazakhstan encourage la création d'un barreau d'avocats, au sens européen du terme, et qu'il réfléchisse, de façon plus approfondie, au droit de l'arbitrage. Si ces éléments sont réunis, cela constitue un argument supplémentaire pour les entrepreneurs européens.

Christian PONCELET

Il est vrai qu'il existe une instabilité juridique, situation parfois pénalisante pour certains acteurs qui ont pris le risque d'investir. Cependant, en matière politique, le Kazakhstan a réalisé des progrès considérables. De plus, nous ne pouvons plus attendre pour investir, faute de quoi nos amis américains, par exemple, auront déjà pris toutes les positions à prendre.

Zaglou LOUALIB, Représentant des hôpitaux de Paris et de l'Institut Necker au Liban

La santé n'a pas été abordée. Il s'agit pourtant d'un problème considérable. Un véhicule a été mis au point, à travers l'Institut Necker (qui dépend de l'hôpital Necker-Enfants malades) afin d'assurer des échanges entre la médecine française et la médecine du Kazakhstan. J'invite les autorités kazakhes à se joindre à cette collaboration.

Gouljana KARAGOUSSOVA

Pour bien travailler dans un pays, l'environnement social doit en effet y être sain. C'est pourquoi notre Président a toujours porté une grande attention au secteur de la santé. A compter de cette année, le Kazakhstan s'est engagé dans une réforme de son système de santé, qui supposera de profondes réformes dans la formation professionnelle des médecins et dans les infrastructures de notre pays, en prenant pour référence le modèle occidental. Le ministère kazakh de la Santé est à la recherche de partenaires occidentaux pour accompagner ces réformes et partager nos expériences. Vous pouvez donc également vous adresser au ministère kazakh de la Santé.

Jean-Luc FROMENT-HURTEVENT, Directeur du Développement, IASDSE/CEEDRUS

J'ai créé une agence de développement dirigée vers les pays en développement, soutenue par Kofi Annan. La culture des langues constitue un problème ancien en France et nos grandes Ecoles n'ont qu'une ambition : apprendre à parler le Chinois en moins de deux ans, en vertu d'un principe qui donne la seule priorité au business. L'ethno-culture constitue une autre démarche, tout aussi importante, et des entreprises comme Framatome ont su en tirer parti en Chine. C'est pourquoi je pense que les pouvoirs publics devraient développer le soutien à ce type d'initiative.

Yves JEANCLOS, Professeur, Université Robert Schuman, Strasbourg

Incontestablement, la France n'a pas porté l'accent sur le développement de ses échanges universitaires avec le Kazakhstan : si l'on souhaite aller plus loin, il faut faire appel aux programmes de l'Union Européenne (notamment le programme Campus), dont la complexité constitue cependant un obstacle important au développement des échanges. Je suis convaincu qu'il n'existe pas de sécurité économique en l'absence de sécurités juridique et militaire, au sens global du terme. La France souhaite vraisemblablement qu'il existe une sécurité militaire en Asie centrale. Mais que le Kazakhstan attend-il de la France, dans la mesure où ce pays se trouve au carrefour des mondes ? Où se situent les relations stratégiques entre la France, le Kazakhstan et l'Asie centrale dans la nouvelle multipolarité qui se dessine ?

Christian PONCELET

Je signale que des négociations très avancées sont en cours entre nos deux pays en matière de sécurité et de défense.

Nurtay ABYKAYEV

La réforme publique du Kazakhstan est en cours d'achèvement. Je puis d'ores et déjà citer les paroles du Président du Conseil constitutionnel français qui, au cours d'une visite au Kazakhstan, a salué les choix que nous avions faits, en indiquant que le modèle présidentiel pouvait être conservé par le Kazakhstan avec profit jusqu'à ce qu'il existe une sécurité politique parfaite dans le pays.

S'agissant des langues, il me paraît important de préciser que les kazakhs ont subi l'interdiction, à l'époque de l'Union soviétique, de parler leur langue. Nous promouvons aujourd'hui une renaissance de la culture kazakhe : c'est pourquoi l'on apprend, dans les écoles du pays, le Russe et le Kazakh. Concernant les langues étrangères, ce sont l'Anglais et le Français qui sont les plus enseignées. Il est vrai néanmoins qu'il existe trop peu d'interprètes franco-kazakhs.

Pour en venir aux questions de sécurité, le Président de la République, au mois de février dernier, a tracé des perspectives claires et a fixé l'ambition au Kazakhstan de faire partie des 50 principaux pays du monde à l'horizon 2015. Cela n'est pas une mince affaire.

Marc BLAISE, Président, MB Plus International, conseiller du Commerce extérieur de la France

Je me suis rendu au Kazakhstan et j'envisage d'y investir pour créer une école d'interprétariat.

Christian PONCELET

C'est une proposition très intéressante. Vous pourrez prendre contact avec les représentants des autorités kazakhstanaises pour en préciser les contours.

Le Kazakhstan, la performance économique au rendez-vous

Catherine POUJOL
Professeur à l'INALCO
(Institut national des Langues et civilisations orientales)

Pour revenir sur un problème évoqué ce matin, je signale, en préambule à cette intervention, que l'INALCO propose un diplôme pratique de kazakh depuis plus de dix ans. Par ailleurs, un certain nombre d'étudiants qui apprennent le kazakh à l'INALCO sont présents ce matin et seraient certainement intéressés par une proposition d'accompagnement de chefs d'entreprises au Kazakhstan afin de leur servir d'interprète.

Le Kazakhstan connaît une performance économique avérée qui repose sur des facteurs objectifs : le pays dispose de ressources énergétiques et naturelles enviables, ainsi que d'une localisation privilégiée en Asie centrale, et de ressources humaines de très haute qualité. Si le pays porte à sa contemplation, du fait de la puissance de la nature et des paysages, sa survie vient, depuis des millénaires, du mouvement : le pastoralisme et la transhumance ont, pendant longtemps, été vitaux. Aujourd'hui, ce sont les hommes et les capitaux qui se déplacent, par exemple entre la capitale du Sud et la nouvelle capitale. Les visiteurs en tous genres, les entrepreneurs et les migrants contribuent ainsi au dynamisme du pays et au renforcement de son attractivité, en particulier si l'on compare le Kazakhstan à ses voisins, qui ne jouissent pas de la même attractivité.

Les réserves (prouvées et probables) du pays en hydrocarbures sont connues. Mais il faut aussi souligner la volonté démontrée par les dirigeants kazakhs de transformer la réalité qui s'impose à eux pour ne pas la subir. Les difficiles conditions de la steppe expliquent sans doute cette formidable capacité à rebondir et à trouver des solutions, de façon pragmatique et efficace, là où d'autres pays ont eu beaucoup plus de mal à gérer la transition à la suite de l'effondrement de l'Union soviétique. Le Président du Kazakhstan s'est rendu populaire, dès le début de cette transition, par sa décision de mettre fin aux essais nucléaires. Cette décision fut emblématique, tranchant d'emblée avec la tradition de silence et de tabous qui avait dominé la période soviétique. La population s'est sentie rapidement en confiance du fait de cette libération de la parole, traduite dès le départ en actes. Cela a donné au pouvoir une assise importante qui ne s'est pas démentie depuis : l'attachement de la population au Président est réel, même s'il existe une opposition politique qui se manifeste fortement, notamment depuis l'étranger. Nous avons là un facteur de stabilité extrêmement important pour le pays.

Le Kazakhstan peut aussi s'appuyer sur des ressources humaines de grande qualité, grâce à un effort de formation constant : des étudiants kazakhs sont répartis dans le monde entier et il en existe en France, notamment à l'ENA et dans les Instituts de Science politique. Il s'agit maintenant de passer à la vitesse supérieure. La population kazakhe démontre une extraordinaire capacité à accepter l'innovation, sans doute davantage qu'en France. Il prévaut également une concorde sociale qui fait le ciment de la société kazakhe, alors même que celle-ci a été perçue pendant longtemps comme une République fragilisée, notamment du fait de la part importante des slaves, qui représentaient 41% de la population au moment de l'effondrement de l'Union soviétique, le reste de la population étant de souche kazakhe. L'on peut également se souvenir de la grande émotion ressentie par la population kazakhe lors de la visite du Pape, au cours des années 90, alors même qu'une petite minorité de la population est catholique. Sans doute le pays est-il, en partie, soudé par une sorte de « communauté de la souffrance » liée aux conséquences dramatiques qu'a connues le pays tout au long du XX ème siècle.

Du point de vue extérieur, le Kazakhstan bénéficie de relations très importantes avec la Russie (avec laquelle elle partage 7 000 kilomètres de frontières) ainsi qu'avec le voisin chinois. Le partenaire américain souhaite être présent dans le pays tout en cherchant à limiter le coût de cet investissement. Le pouvoir kazakh est conscient du risque lié au « tout pétrole » (aussi appelé syndrome hollandais), et le partage des fruits des ressources en hydrocarbures constituera un enjeu crucial pour le développement du pays dans les prochaines années : si ce partage ne profitait pas à la population, sa stabilité pourrait se trouver remise en cause. Le pays doit par ailleurs gérer des voisinages complexes, notamment du fait de liens supposés de certains pays avec le terrorisme international. Si l'administration kazakhe présente certaines lourdeurs, il est à noter que des efforts sont produits actuellement pour simplifier les procédures.

Sur le plan macroéconomique, tous les indicateurs sont au vert pour les deux ou trois ans à venir et ce seul fait a de quoi rassurer dans l'environnement international qui prévaut de nos jours. Le risque législatif a été évoqué. Il existe mais l'on peut préciser qu'il s'agit là d'un point de vue occidental : du point de vue du Kazakhstan, il s'agit aussi de défendre ses propres intérêts et sa souveraineté économique. Le Président Nazarbayev a en tout cas affirmé que les contrats existants ne seraient pas renégociés et que des assouplissements seraient recherchés pour les entreprises souhaitant désormais investir dans le pays. Le Kazakhstan dispose donc d'un formidable potentiel de réussite, s'il parvient à consolider ses acquis et ses réformes, tout en diversifiant les sources de sa richesse. Le Kazakhstan souhaite occuper la Présidence de l'OSCE en 2009 et devrait entrer dans l'OMC en 2007. La France doit, quant à elle, intensifier sa stratégie d'implantation dans la région et la visite du Président de la République au Kazakhstan pourrait certainement constituer un catalyseur des échanges entre les deux pays, compte tenu de la culture kazakhe qui confère une très grande importance aux échanges directs entre dirigeants pour faire avancer la coopération entre deux nations.

Kazakhstan, partenaire aujourd'hui, géant demain

Daniel PATAT
Chef de la Mission économique à Almaty

Lorsque nous avons cherché un titre pour ce colloque, nous avons voulu marquer l'importance de ce pays aujourd'hui trop mal connu dans l'Hexagone. Le Kazakhstan mérite toute notre attention et les investissements français y sont encore très faibles, même s'il faudrait tenir compte des investissements directs pour apprécier réellement leur poids global.

Un des principaux défis que le Kazakhstan s'efforce de relever tient à la recherche d'un développement équilibré, raisonné, par les autorités du pays, qui souhaitent également désenclaver le pays. S'il existe des hétérogénéités, la population kazakhe présente en tout cas la caractéristique d'être développée et apte au partenariat. 3 000 bourses sont ouvertes aujourd'hui et nous espérons en capter 400 à 500, à la faveur de mesures volontaristes prises par les autorités françaises. L'Alliance française, qui s'est récemment implantée à Astana, fait preuve d'un grand dynamisme et les étudiants kazakhs souhaitant devenir francophones sont très nombreux, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir.

Les entreprises s'intéressent de plus en plus au Kazakhstan, au point que nous nous interrogeons parfois sur notre capacité de répondre à la demande. Elles représentent les secteurs des services, des hautes technologies ou encore de l'agriculture, même si ce dernier secteur semble parfois injustement ignoré et fera, en conséquence, l'objet d'efforts particuliers de la Mission économique au cours des prochains mois. Le Président Abykayev a souligné la volonté de développer son pays, en misant notamment sur les technopoles (ou clusters en anglais). Cette approche me semble excellente en ceci qu'elle traduit la volonté de l'Etat de favoriser le développement d'une économie marchande, plutôt que d'agir partout de son propre chef. Il existe aujourd'hui des groupes kazakhs qui investissent, y compris en France ou en Russie, dans tous les secteurs de développement. Les partenaires potentiels d'entreprises françaises existent donc et la politique de filières mise en oeuvre par les autorités du pays peut être mise à profit pour nouer des coopérations.

La politique de l'Etat kazakh témoigne d'une volonté d'insertion active dans la communauté internationale. La volonté d'entrer dans l'OMC m'en paraît un heureux témoignage et nous espérons que le Kazakhstan pourra entrer dans ce « club » afin de devenir un partenaire à part entière dans l'univers mondialisé. Le pays doit relever un autre défi : permettre son développement interne. Si l'on peut comprendre que la politique de visas soit très sélective, elle sera inévitablement perçue comme un handicap. Nous avons besoin de certitudes : le test de stabilité est aujourd'hui valable. Il aurait une valeur plus grande encore si des possibilités d'arbitrage s'y ajoutaient.

Evolution de l'implication et des attentes des autorités du Kazakhstan envers un grand groupe pétrolier

Philippe ROCHOUX
Directeur général, Total Exploration-Production Kazakhstan

Total est présent au Kazakhstan depuis 1995. Nous y avons obtenu divers permis d'exploration et eu la chance de faire partie d'un consortium qui a exploré les abords de la mer Caspienne, lesquels ont débouché sur plusieurs découvertes majeures, dont Kashagan. Celui-ci contient 10 milliards de barils de réserves et devrait ainsi produire, à son plateau de production, environ 1,2 million de barils par jour (pour un coût de 60 ou 80 milliards de dollars). Le champ est déjà en développement et la première production devrait démarrer en 2008 ou 2009. A son plateau, Kashagan représentera 10% de la production du groupe Total ; le Kazakhstan constitue donc un enjeu majeur pour le Groupe. Les autres permis d'exploration n'ayant pas débouché sur des découvertes significatives, ils ont été rendus. Nous sommes cependant en négociation avec la société nationale (KazMunaïGaz) pour développer d'autres activités dans le pays.

Total est également très actif dans le transport d'hydrocarbures : il devient indispensable de multiplier les sources d'exportation possibles. Nous pensons que la solution la plus efficace, du point de vue technique et économique, consisterait à exporter la production du Kazakhstan vers le Sud en vue de rejoindre le Golfe persique (ce qui n'est pas sans poser des problèmes politiques). Le projet de KCTS, qui concerne un pipeline qui pourrait rejoindre l'Azerbaïdjan, a été élaboré dans cette logique. Le Groupe compte une dizaine de personnes présentes de façon permanente au Kazakhstan et cet effectif devrait doubler au cours des prochains mois.

L'industrie pétrolière du Kazakhstan recèle certainement de nombreuses ressources encore, car pendant longtemps peu d'efforts ont été déployés pour exploiter le pétrole de la Mer Caspienne (difficile d'accès). La production du pays s'établit aujourd'hui à 1,2 million de barils par jour et l'on peut estimer qu'elle pourrait atteindre 3 voire 4 millions de barils par jour dans les prochaines années - à un coût certes différent : environ 15 dollars par baril, sans compter les coûts de transport, qui peuvent représenter 5 à 10 dollars par baril. La complexité de l'exploration dans ce pays justifie aussi une demande importante de travaux et services pendant une durée très longue. Les revenus que le pays tirera de ces richesses devraient profiter à la population et, par voie de conséquence, faire exploser la demande kazakhe.

L'investissement étranger est bienvenu au Kazakhstan, à tel point qu'il est possible sans difficulté de s'entretenir avec les plus hautes autorités de l'Etat pour discuter de tel ou tel projet. Nous ressentons au plus haut niveau une très forte volonté d'intégrer le Kazakhstan dans l'économie mondiale, même si des difficultés demeurent au quotidien. Le Kazakhstan est en effet un pays neuf, dont les lois ne sont pas toujours adaptées ou cohérentes, ce qui peut poser quelques problèmes au quotidien. Les contrôles de l'administration sont encore très tatillons, et constituent toujours une épreuve pour une entreprise telle que la nôtre, même s'ils ne nous empêchent pas d'y travailler de façon globalement très satisfaisante.

Les dimensions et caractéristiques physiques du pays posent des problèmes logistiques importants, aggravés par la distance qui sépare la capitale économique de la capitale administrative. Le Kazakhstan peut difficilement être utilisé comme une plate-forme régionale, eu égard à l'importance limitée de sa population (15 millions de personnes). L'on peut en revanche envisager de s'implanter dans le pays pour en faire un relai vers d'autres marchés asiatiques. Il me paraît en tout cas indispensable de nouer des liens avec des partenaires locaux, afin de prendre le temps nécessaire à la compréhension du fonctionnement du pays, dont le cadre culturel est très différent de celui de la France. A l'orée des années 90, le pays avait besoin d'investisseurs, ce qui s'est reflété dans les contrats tels que Kashagan, exempts de participation locale et nous laissant une grande liberté. Les contrats qui nous sont proposés aujourd'hui ont un contenu sensiblement différent : la société nationale y est systématiquement présente, pour des pourcentages importants. Les autorités souhaitent désormais participer aux opérations et aux décisions. Enfin, nous avons noté une demande croissante en vue d'augmenter la part du « contenu local », c'est-à-dire la part des opérations confiées à l'industrie locale.

Le Kazakhstan constitue bien aujourd'hui une terre d'opportunités, en particulier dans le secteur pétrolier, dont le boom va provoquer une forte demande de biens et services à forte valeur ajoutée. Au-delà du secteur pétrolier, l'enrichissement qui va en résulter fera certainement apparaître de nombreuses opportunités dans tous les secteurs de l'économie.

Quelle stratégie d'implantation pour les entreprises ?

Gilles REMY
Président-directeur général, Cifal groupe

Nous assistons à un développement extraordinaire du Kazakhstan, grâce à un boom pétrolier, dont les retombées dépassent de loin le secteur pétrolier stricto sensu : l'hôtellerie, la restauration et de nombreux services tirent ainsi profit aujourd'hui des investissements réalisés dans le secteur pétrolier. L'enjeu est donc considérable, et contrairement à ce qui prévalait il y a dix ans, il s'avère de moins en moins concevable de travailler au Kazakhstan seul. Une volonté politique affirmée plaide pour le recours à des partenaires et s'impose de plus en plus aux fournisseurs de services. Mais le partenariat est également rendu nécessaire par la domination qu'exerce aujourd'hui le secteur privé sur l'économie du pays : il n'a guère l'intention de laisser des acteurs étrangers bénéficier du développement que connaît le pays.

En outre, dans un certain nombre d'appels d'offres, le contenu local apparaît comme un élément déterminant du choix des autorités : ce n'est pas nécessairement le moins-disant qui sera retenu. L'investissement consenti dans les procédures de sélection d'un partenaire peut donc s'avérer tout à fait profitable. La question demeure de savoir comment identifier et choisir son partenaire local. S'il semble évidemment nécessaire de bien connaître le partenaire pressenti avant de se lier, l'on peut conseiller aux entreprises françaises d'être pragmatiques et d'attendre d'avoir développé un projet concret pour définir une stratégie.

On peut citer trois cas de partenariats mis en oeuvre par Cifal (qui est présent depuis quinze ans au Kazakhstan et qui y développe des activités très diversifiées) : les services commerciaux, le commerce (développé par Cifal pour le compte de PME françaises, allemandes ou italiennes) et les services industriels. Ces derniers peuvent être de natures diverses : il s'agit par exemple de la certification dans le domaine pétrolier, de la maintenance de turbines (pour le compte de General Electric) ou encore des « technoparcs ». Nous avons également, il y a quelques semaines, porté notre participation à 50% dans une société kazakhe de maintenance.

Iogan MERKEL, Sénateur du Kazakhstan

Je voudrais répondre à quelques questions qui m'ont été posées pendant la pause. Plusieurs personnes m'ont fait part de leurs inquiétudes concernant la sécurité des investissements au Kazakhstan. Il y a quinze ans, nous étions conscients de la nécessité d'assurer cette sécurité. Nous avons ainsi élaboré un bloc de mesures législatives afin de protéger les investissements au Kazakhstan. D'ailleurs, en quinze ans d'indépendance, aucun contrat d'investissement n'a été modifié ou rompu.

Une question m'a été posée concernant la protection des droits juridiques des personnes et la possibilité d'arbitrage. Il est vrai que le Kazakhstan a subi un certain nombre de critiques sur ce terrain : nous n'avions pas de législation ad hoc . En 2003 et 2004, le gouvernement a travaillé sur le sujet et une loi a été adoptée en matière d'arbitrage, complétée rapidement par une autre en matière d'arbitrage international, qui place le Kazakhstan au niveau des standards internationaux.

Le troisième aspect que je souhaite éclairer touche au rôle des avocats au Kazakhstan. Il est vrai que, dans le système judiciaire kazakh, ce rôle n'est pas le même que celui que leur confèrent les standards internationaux. Aujourd'hui, l'association des avocats représente un certain nombre de conseils indépendants et cette union a la possibilité de défendre les droits de ses clients. Un projet de loi en préparation, qui s'inspire notamment des systèmes français et allemand, prévoit aussi le renforcement du rôle des avocats.

Intervention de Gouljana KARAGOUSSOVA
Ministre du Travail et de la Protection sociale du Kazakhstan

Je voudrais exprimer ma profonde reconnaissance aux organisateurs de ce colloque, pour nous avoir invités, ainsi qu'aux participants qui ont accepté d'être présents aujourd'hui. La question de la stabilité sociale a été évoquée ce matin et il est vrai qu'il s'agit d'une condition essentielle de la construction d'un cadre attractif pour les investissements. C'est pourquoi le gouvernement du Kazakhstan porte une grande attention à cette question. Nous avons notamment l'intention d'alléger, voire de supprimer, certains types d'impôts. Nous entendons également faire évoluer nos relations avec les investisseurs étrangers, afin de leur simplifier la vie et d'alléger les procédures administratives. Il existe un Conseil des investisseurs étrangers au Kazakhstan et tout investisseur peut s'adresser à ses commissions et formuler des propositions en vue d'améliorer le climat des investissements dans le pays.

Monsieur Merkel a évoqué plusieurs mesures législatives adoptées en vue d'améliorer le cadre des investissements au Kazakhstan. La formation et l'enseignement ont également été évoqués ce matin. Mais nul n'a mentionné la question des équivalences entre diplômes et dispositifs de qualification, alors même que le Kazakhstan souffre d'un manque de main-d'oeuvre qualifiée. Des entreprises étrangères en sont conscientes, au point d'avoir décidé, comme Cifal, de créer au Kazakhstan leur propre centre de formation, en tirant profit de la qualité des ressources humaines disponibles sur place. Souhaitons que d'autres investisseurs étrangers nous aident à résoudre le problème du manque de main-d'oeuvre qualifiée.

Par ailleurs, le Kazakhstan va adopter cette année son premier « Code du travail », qui constituera une innovation importante, avec l'autorisation du Bureau international du Travail. Cette nouvelle référence réglementaire, qui s'inspire fortement du Code du Travail français, devrait faciliter les relations du travail au Kazakhstan. Celui-ci est également caractérisé par une grande ouverture au monde. Si la France connaît une immigration illégale, le Kazakhstan se prépare à entrer dans l'OMC, ce qui suppose un encadrement légal du marché du travail. Nous allons aussi légiférer sur l'entrée sur notre territoire via le système des visas.

Intervention de Jaksybek KOULIKEEV
Premier vice-Président de la SA KazMunaïGaz

Mesdames et messieurs, le PIB du Kazakhstan s'est accru d'environ 6% par an depuis l'an 2000, notamment grâce à sa 9 ème position mondiale du point de vue de l'exportation d'hydrocarbures (en particulier vers la Russie et le Mexique). En termes de volumes de production, le Kazakhstan occupe le 20 ème rang mondial, avec une production moyenne d'1,250 million de barils par jour en 2005.

KazMunaïGaz contrôle plus de la moitié du pétrole et du gaz produits dans le pays - pour une production totale de 61 millions de tonnes en 2005. Le Kazakhstan devrait voir sa production augmenter de façon importante pour être portée à 90 millions de tonnes en 2010 et 180 millions de tonnes en 2015. La part des investisseurs étrangers dans le secteur des hydrocarbures ne cesse de croître, et représente environ 9 milliards de dollars en 2005.

Du point de vue mondial, la demande d'hydrocarbures devrait continuer à progresser jusqu'en 2020, notamment du fait d'une demande toujours soutenue aux Etats-Unis et en Europe, tandis que celle de Chine progressera à un rythme significatif. Le Kazakhstan devrait voir la part de ses exportations progresser également, pour atteindre 168 millions de tonnes en 2015. La Mer Caspienne devrait fournir une partie importante des ressources en hydrocarbures qui seront ainsi rendues disponibles, notamment grâce à des accords signés avec l'Azerbaïdjan et la Russie, au cours des dernières années, afin de délimiter précisément la partie kazakhe de la Mer Caspienne.

KazMunaïGaz a également vocation à participer aux projets internationaux d'exploration-production, au premier rang desquels Kashagan. Nous sommes également en négociation actuellement en vue d'acquérir 30% de la société PetroKazakhstan. La législation kazakhe prévoit aussi que la société nationale soit un partenaire incontournable de tous les projets maritimes mis en oeuvre dans le pays. Différents projets de développement des infrastructures du pays existent afin de diversifier les axes d'exportation du pétrole hors du Kazakhstan. Celui-ci souhaite enfin développer son secteur pétrochimique, et trois projets-phares sont en cours dans cette perspective, en particulier la construction d'un complexe pétrochimique à Atyrau, pour 4 milliards de dollars.

Intervention de Nurbek RAYEV
Président du Conseil d'Administration, Fonds national d'innovation

L'économie du Kazakhstan connaît une croissance importante depuis plusieurs années, soutenue par les prix des produits pétroliers. La cote de la Banque mondiale classe le Kazakhstan dans le 5 ème groupe de pays, celui qui comprend notamment l'Allemagne et la Suisse. Ce classement s'explique sans doute par l'absence de politique de nationalisation au Kazakhstan, de même que par l'accueil toujours favorable qu'y ont toujours trouvé les investisseurs. Nous avons d'ailleurs rencontré, il y a deux semaines, une délégation de représentants des autorités allemandes, pour qui le Kazakhstan fait partie des cinq pays les plus attractifs pour les investisseurs internationaux.

Une analyse du rapport entre l'évolution du PIB et les prix des produits pétroliers montre que le Kazakhstan n'a pas rattrapé les pays baltes. Cependant la croissance actuelle nous permet d'espérer que nous allons rattraper prochainement les pays d'Europe de l'Est. Le Kazakhstan doit aujourd'hui s'assurer une croissance économique stable à long terme. La politique du gouvernement est aujourd'hui centrée sur le développement des secteurs qui ne sont pas liés à l'extraction du pétrole. Ainsi, en 2003, une stratégie a été définie afin de favoriser notamment les secteurs des hautes technologies et des services. Une analyse des 150 secteurs de l'économie a été menée ; 23 d'entres eux ont été identifiés à haut potentiel. Ils ont été regroupés au sein de clusters autour de plusieurs thèmes :

• le tourisme ;

• les matériaux de construction, dont la demande est soutenue par le développement économique soutenu que connaît le pays ;

• le matériel pétrolier et parapétrolier ;

• les transports de fret, le Kazakhstan ayant vocation à constituer une plate-forme logistique entre l'Asie et l'Europe ;

• l'industrie agroalimentaire, toujours attractive pour les investisseurs ;

• le textile, avec une priorité accordée au coton ;

• la métallurgie, domaine dans lequel nous sommes à la recherche de nouveaux gisements.

Le Kazakhstan se fixe pour l'objectif de figurer parmi les 50 pays les plus concurrentiels à l'horizon 2015. Le Kazakhstan figure déjà en bonne position selon le classement établi par GCR. Le Président a signé récemment un décret de constitution d'une société nationale holding, Kazyna, qui a vocation à rassembler l'ensemble des activités publiques dans les industries non liées au pétrole. Son capital dépasse déjà 1 milliard de dollars et a plus de 120 projets en portefeuille, pour un total de plus de 2 milliards de dollars. Kazyna regroupe aussi différentes institutions publiques de développement, telles que la Banque de Développement du Kazakhstan, qui fournit des crédits à long terme, le Fonds national d'innovation ou encore le fonds national d'investissement, qui a pour objet d'investir dans de multiples projets d'investissement.

Pour l'ensemble de ces organismes, des principes de sélection rigoureuse des collaborateurs ont été choisis, loin des usages en vigueur sous la période de l'Union soviétique, et nous pouvons nous assurer les services de collaborateurs jeunes et motivés. L'Etat s'est également associé à la société Nexant afin de concevoir le plan directeur de l'industrie pétrochimique. Les pays du Proche-Orient ont réalisé des progrès importants dans ce domaine et le Kazakhstan souhaite en faire de même, par une approche de classement rigoureux des matériaux et substances pour lesquels le pays peut disposer d'un avantage concurrentiel.

Rappelons, en guise de conclusion, que le Kazakhstan dispose d'un environnement très favorable aux investisseurs, et jouit d'une stabilité politique ainsi que d'une main-d'oeuvre de qualité et évolutive. Le Kazakhstan peut également constituer une plate-forme d'accès au marché chinois.

Intervention de Taguir SISINBAYEV
Membre du Conseil d'Administration, Fonds d'investissement du Kazakhstan

Le Kazakhstan a décidé de miser, pour son développement, sur des Fonds de développement susceptibles d'attirer les investisseurs étrangers. La Banque de Développement du Kazakhstan a ainsi pour objectif de développer les secteurs non liés aux matières premières, dans une perspective de moyen et de long terme. Elle vise à soutenir et favoriser l'émergence d'une production compétitive, grâce à des outils d'investissement, à une politique de taux d'intérêt bas ou encore à une politique de leasing. La Banque assure également les besoins en investissement rendus nécessaires par la volonté de diversification du pays.

La Banque permet le développement de l'économie nationale grâce aux ressources domestiques et étrangères. Les crédits qu'elle a accordés représentent 1,7 milliard de dollars en 2005, pour des projets concernant des secteurs très divers et toutes les régions du pays. La Banque de Développement du Kazakhstan participe aussi aux projets de clusters territoriaux, pour six des sept domaines définis. Elle assure une fonction d'agent du gouvernement en garantissant les crédits alloués sur le budget de l'Etat (pour un portefeuille de 720 millions de dollars). La Banque dispose de capitaux propres de 750 millions de dollars et sa capitalisation doit progresser de façon à accompagner le dynamisme du marché kazakh.

Intervention de Arman EVNIEV
Directeur du département des grandes cultures, Ministère de l'Agriculture

Le Kazakhstan a mené une réforme agraire et la propriété publique foncière y a quasiment disparu. Un travail important de constitution d'une base législative, dans le domaine agroalimentaire, a été mené afin de se rapprocher des standards internationaux. Le Code de la Terre et de l'Eau définit ainsi les droits des agriculteurs vis-à-vis des ressources naturelles. Des fonds d'assurance ont été mis en place dans le domaine de l'horticulture. Dans le domaine vétérinaire, la production des semences et l'élevage des races ont également fait l'objet de mesures spécifiques.

L'Etat a également accru le budget dévolu à l'agriculture et a mis en place des instruments financiers répondant à la demande des agriculteurs. Les sociétés de crédit agraire ont obtenu 13 milliards de tenges de crédits et les banques font preuve d'une confiance sensiblement accrue vis-à-vis des agriculteurs. Ce climat de confiance constitue le meilleur gage de développement du secteur agricole kazakh, qui accueillera avec plaisir les investisseurs français qui s'intéresseraient à ce secteur.

Le secteur agroalimentaire croît de 10 à 15% par an, avec une qualité qui se rapproche chaque année des standards internationaux. Le développement du secteur rural fait également l'objet d'efforts importants d'infrastructures, par exemple à travers la construction des routes ou à travers des travaux d'apport du gaz, sachant que plus de 43% des Kazakhs vivent à la campagne. L'Etat a défini une politique de soutien qui s'articule autour de quatre axes :

• l'industrialisation du complexe agro-industriel ;

• le développement des infrastructures du complexe agricole ;

• le développement d'avantages concurrentiels nationaux dans le domaine agricole, par exemple dans le domaine des biocarburants, pour lesquels le pays dispose de ressources importantes ;

• la régulation du marché agricole et la veille en matière de sécurité alimentaire.

S'agissant de la coopération entre la France et le Kazakhstan, on peut rappeler que la loi prévoit des avantages fiscaux ainsi que des aides et subventions pour les investisseurs dans les secteurs prioritaires. Les entreprises françaises peuvent également participer à l'échange d'expériences entre nos deux pays, particulièrement dans le domaine du retraitement des produits agricoles. Je me souviens qu'Henri IV rêvait, au XVI ème siècle, que chaque Français puisse avoir à sa table une poule-au-pot ! La France en produit tant aujourd'hui qu'elle pourrait nourrir la moitié du monde de ses poulets. Le Kazakhstan a donc beaucoup à apprendre de l'expérience française.

Le secteur pétrolier comme moteur de diversification technologique et économique

Thierry POUPEAU
Président, K2BPetroleum

Les entreprises françaises disposent d'atouts importants et d'un savoir-faire reconnu dans le domaine pétrolier, avec un leadership de premier plan (Total). Ce secteur peut, à mes yeux, constituer une locomotive de la diversification économique souhaitée par le Kazakhstan. Du point de vue technologique, la qualité offshore des produits, la présence de gaz acides et de soufre, l'environnement ou encore la chimie du pétrole et du gaz constitueront sans doute les principaux enjeux des années à venir.

Le gouvernement a défini un plan d'action qui vise notamment à accroître la part du contenu local dans les projets d'exploitation des champs pétroliers. La mise en oeuvre de ce contenu reste assez difficile dans les faits, même si les enjeux en sont bien connus par les différentes parties prenantes.

Le pays souhaite aussi accroître la valeur ajoutée de ses produits, en ligne avec les perspectives offertes par le développement de l'industrie pétrochimique. Ces objectifs peuvent être poursuivis à travers une approche en « tâche d'huile », qui consiste à élargir progressivement le champ d'intervention des entreprises locales et leur savoir-faire industriel. La démarche mise aussi sur des « pôles », comparables aux pôles de compétitivité qui ont été définis en France. Il existe enfin un Bureau central de l'industrie pétrolière dont le rôle est de structurer l'approche du pays quant au « contenu local ».

Dans le cadre de cette stratégie clairement affichée, plusieurs pistes sont privilégiées, notamment :

• l'environnement et l'énergie ;

• le raffinage, la pétrochimie et les carburants ;

• la génération électrique ;

• la tuyauterie et la mécanique ;

• le shipping et les services.

Cette ambition se heurte cependant à la difficulté de voir émerger une catégorie de cadres intermédiaires dans ces activités, malgré des efforts importants de formation, dont les effets devraient cependant commencer à se faire jour. Le projet de création d'un centre franco-kazakh du pétrole a été, un temps, mis à l'étude, avec le soutien d'entreprises françaises comme Total, mais le trop faible nombre de supports industriels français diversifiés et de centres de formation dans le pays ont contraint ses promoteurs à l'abandonner. J'invite les entrepreneurs français à étudier, avec des partenaires tels que Total, dans quelle mesure cette initiative pourrait être revitalisée.

A titre d'exemple, un vaste chantier d'environnement est en cours à Uzen, suite à des pollutions considérables de lacs à proximité d'un champ opéré par KazMunaïGaz. Un savoir-faire éprouvé notamment à la suite de la catastrophe de l'Erika a conduit à constituer un groupe de coopération autour de Burgéap, Foster Wheeler et de Brézillon afin d'assurer ces travaux de dépollution. Dans le domaine des biocarburants, le Kazakhstan dispose d'une opportunité réelle d'acquisition de savoir-faire technologiques et de sécurisation de ses débouchés agricoles.

Environnement des services pétroliers au Kazakhstan

Robert PEJAC
Chef d'entreprise, Synergy Resources

Synergy Resources est une entreprise d'ingénierie et de management de projet qui intervient auprès d'entreprises kazakhes (souvent des start-up) et de joint-ventures intervenant dans le domaine pétrolier et parapétrolier. Ce secteur, lorsqu'on parle du Kazakhstan, conduit systématiquement à évoquer Kashagan, qui ne concerne que trois sociétés majeures, alors qu'il existe plus de 80 sociétés actives au Kazakhstan : la diversité kazakhe est souvent mal appréhendée. Il existe pourtant 850 licences pétrolières au Kazakhstan.

Dans le domaine des sociétés de services, quatre sociétés (Halliburton, Schlumberger, etc.) dominent le marché et masquent une foule de petites sociétés qui disposent souvent d'une expertise régionale ancienne et précisément localisée. Les PME étrangères ou mixtes sont peu présentes et les sociétés françaises sont encore plus rares.

Une centaine d'appareils de forage travaille aujourd'hui au Kazakhstan, ainsi que 150 appareils de work over , ce qui est considérable. Il existe une très forte expérience locale en matière de géologie et de géophysique mais la majorité des données sont anciennes et nécessitent d'être mises à jour, en tenant compte par exemple des nouvelles techniques de sismique 3D. Les domaines des infrastructures et les projets de pipeline sont appelés à connaître un essor très important, du fait des projets de développement du pays et de son ouverture croissante vers l'extérieure, alors que de nombreuses découvertes seront mises en production dans les années qui viennent.

Le marché kazakh est animé par une demande qui explose, alors que l'offre de services est quasiment en stagnation. Parmi les nouvelles sociétés, on peut détecter un manque d'expertise globale, du fait d'un renouvellement important de la main-d'oeuvre, aujourd'hui jeune et peu expérimentée - ce qui valorise d'autant plus l'expérience étrangère de qualité. On note par ailleurs l'évolution des marchés vers une économie de services. S'agissant des acteurs en présence, il existe de nombreuses sociétés locales, qui sont souvent équipées en matériel russe et qui travaillent dans le cadre des standards GOST (définis sous l'ère socialiste). En outre, les temps d'exécution sont « longs », ce qui peut pénaliser les délais de réalisation de certains projets. Les sociétés de services étrangères affichent des standards différents (API, ISO) qui font parfois apparaître des incompatibilités. Surtout, leurs services s'avèrent de plus en plus chers et elles font parfois preuve d'un relatif désintérêt pour de petites sociétés.

L'esprit d'entreprise kazakh est animé par une culture d'entreprise « ex-soviétique » avec laquelle un apprentissage peut s'avérer nécessaire. Il existe cependant un savoir-faire et des connaissances locales qu'il convient de reconnaitre. Le Russe constitue la langue de travail : l'Anglais est encore peu utilisé dans le pays et il convient de s'y préparer. L'on note par ailleurs un manque de personnel qualifié - situation qui ne va pas en s'améliorant - ainsi que le manque d'équipements performants. Il existe aussi un problème de permis de travail qui empêche parfois les sociétés occidentales d'envoyer dans le pays autant d'ingénieurs qu'elles le souhaiteraient. S'y ajoutent certes des lourdeurs administratives, mais nous connaissons aussi ce problème en France. Signalons enfin qu'il existe un accord de taxation entre la France et le Kazakhstan.

Les filières lait au Kazakhstan entre tradition et modernité : le choix de la qualité

Bernard FAYE
Chargé de mission auprès du Directeur, Centre de Coopération internationale en Recherche agronomique pour le Développement (Cirad)

Le Kazakhstan connaît une tradition pastorale ancienne, qui a toujours donné une place particulière au lait, au point que celui-ci fait partie de l'identité kazakhe. La production de lait au Kazakhstan représente 200 kg par an et par habitant, alors que ce secteur a fait les frais, au lendemain de l'indépendance, de mesures drastiques de restructuration qui ont d'abord entraîné une chute des effectifs, avant que ceux-ci ne commencent à augmenter de nouveau. Les raisons de cette chute sont complexes. L'une d'entre elles me paraît importante : l'on est passé d'une structure tayloriste, fortement spécialisée, à des structures familiales qui supposaient de réapprendre le métier de paysan.

La consommation a évolué de façon différente suivant que l'on parle de lait liquide ou « d'équivalent lait », c'est-à-dire de produits réalisés à partir de lait comme le fromage. La consommation de lait liquide s'est toujours accrue, tandis que celle d'équivalent lait a connu une progression plus contrastée. L'évolution comparée de la consommation de la France et du Kazakhstan montre que les Français ne boivent pas le lait : ils le mangent. Il en résulte une consommation d'équivalent lait considérable (500 kg par habitant et par an, contre environ 200 kg au Kazakhstan). La proportion est inverse pour le lait liquide, dont les Kazakhs sont de gros consommateurs.

Du point de vue des structures de production, le pays est passé de structures collectives à de petites unités familiales. Puis sont apparues de petites entreprises capitalistiques, souvent à l'initiative d'acteurs extérieurs à l'agriculture, qui s'appuient sur les ex-structures collectives pour mener à bien des projets de modernisation des installations et des infrastructures. La filière lait comporte trois secteurs distincts :

• le secteur traditionnel, qui fait la part belle aux produits de terroir, dont les circuits de commercialisation passent souvent par le bazar, et qui conserve toute sa place ;

• un secteur traditionnel « modernisé », avec des traites en partie automatisées et des produits plus ou moins standardisés et vendus en boutiques ;

• un secteur « moderne », illustré par la laiterie « clé en main » (exemple de Food Master) ou par les laiteries rénovées (Talgar), qui traitent essentiellement du lait importé.

Lactalis investit aujourd'hui de façon importante dans le pays, en particulier dans le domaine des ressources humaines. De jeunes kazakhs suivent ainsi des cours, en ce moment, à l'Ecole supérieure d'Angers en vue d'occuper ensuite des postes à responsabilité dans l'industrie laitière au Kazakhstan.

Le secteur laitier du Kazakhstan doit répondre au défi visant à concilier tradition et modernité. Il pourra certainement y être aidé par une coopération en amont, notamment dans les domaines de la maîtrise technologique et sanitaire. Une autre problématique importante consistera à préciser la façon dont la recherche et le secteur privé peuvent nouer des liens de coopération.

Actualité et perspectives de la présence française dans le secteur agricole au Kazakhstan

Benoît RAUZY
Consultant

Le territoire du Kazakhstan est immense et cette caractéristique se reflète dans l'activité des entreprises du pays : les zones de production d'orge d'une malterie s'étendent par exemple sur 400 km. Le territoire est également caractérisé par sa diversité : il est dominé par des productions extensives au Nord et des productions fruitières au Sud. Ce territoire a connu des mutations importantes, apportées par la loi foncière, par des mouvements de population suscités par le développement économique ou encore par l'évolution de ses relations avec les voisins.

Du point de vue des hommes, le pays reste marqué par sa ruralité, qui a pour corollaire une part significative de la population se trouvant sous le seuil de la pauvreté. Le nomadisme et l'empreinte laissée par la culture soviétique ont également façonné de manière particulière les modes d'apprentissage du métier d'agriculteur. La population rurale est en mutation rapide, notamment du point de vue de son pouvoir d'achat et de ses habitudes de consommation, ce qui fait du Kazakhstan un « laboratoire » intéressant pour les entreprises étrangères, par comparaison, par exemple, avec le Tadjikistan.

Le marché kazakh de l'équipement agricole est estimé à environ 300 millions de dollars par an pour les prochaines années, ce qui constitue un marché considérable. Le taux de pénétration des entreprises françaises y est assez faible, sans doute en raison de la domination des cultures très extensives. Il existe cependant des pans de marché pour lesquels les entreprises françaises peuvent apporter un savoir-faire. On peut rappeler que l'Etat kazakh consacre environ 600 millions de dollars par an au secteur agricole.

Sébastien BLANCHER
Chargé de Mission CEI - Balkans, Ministère de l'Agriculture et de la Pêche

Le Ministère de l'Agriculture soutient la coopération entre la France et le Kazakhstan dans le secteur agricole. Il a mené récemment une mission au Kazakhstan afin d'identifier des projets de coopération. Trois secteurs clés ont ainsi été mis en évidence : le secteur des fruits et légumes, les céréales (en particulier l'orge de brasserie) et la production laitière. Des rencontres ont eu lieu avec les représentants des institutions kazakhes des trois secteurs et un programme de travail a été défini dans ces trois directions. Le Ministère de l'Agriculture restera attentif à la poursuite et au développement de la coopération dans ces trois secteurs.

Table ronde

Participent au débat :

Yerzhan TADZHIYAKOV, vice-Président, Banque de Développement
Arman EVNIEV, Directeur du Département des grandes cultures, Ministère de l'Agriculture
Cécile BESSE-ADVANI, Export Finance Europe, Head of Turkey, Central Asia and Caucasus, BNP Paribas, Conseiller du Commerce extérieur de la France
Bernard FAYE, Chargé de mission auprès du Directeur, Cirad
James HOGAN, Avocat associé, Cabinet Salans
Robert PEJAC, Chef d'entreprise, Synergy Resources
Thierry POUPEAU, Président-directeur général, K2B
Petroleum
Benoît RAUZY, Consultant
Gilles REMY, Président-directeur général, Cifal Groupe, Conseiller du Commerce Extérieur de la France
Philippe ROCHOUX, Directeur général Total Exploration & Production Kazakhstan

I. L'expérience de BNP-Paribas

Cécile BESSE-ADVANI

BNP-Paribas est présent au Kazakhstan et souhaite s'y développer, ce qui témoigne de notre intérêt pour ce pays. Notre banque y finance le secteur pétrolier mais nous intervenons également dans le cadre de projets d'infrastructures ou pour des activités de conseil. Un des critères de bon développement au Kazakhstan, à nos yeux, réside dans la diversification de l'économie, comme cela a été souligné à plusieurs reprises au cours de la journée : la manne des hydrocarbures et des ressources minérales doit « percoler » au bénéfice de la population, en trouvant leur prolongement dans le développement des infrastructures et de divers services à la population. Il s'agit d'un facteur de stabilité et d'un facteur de pérennité du développement du pays.

Dans ce contexte, nous percevons comme une très bonne nouvelle la création des fonds de développement publics, qui visent à développer les projets dans les secteurs non extractifs.

Nous nous félicitons de traiter, au Kazakhstan, avec des interlocuteurs fortement réactifs, et nous ne rencontrons pas de problème pour y recruter du personnel de qualité. D'autres difficultés ont été évoquées à propos de ce pays, notamment le risque juridique. Il s'agit là en fait d'une caractéristique propre aux marchés émergents, dont le cadre juridique doit évoluer aussi rapidement que leur développement économique. La nécessité du « local content » a également été présentée comme une contrainte pouvant freiner certains projets. Il me paraît normal, pour ma part, que le pays tire bénéfice, pour son propre développement, des compétences étrangères qui y sont présentes.

II. Le point de vue d'un juriste

James HOGAN

Salans est un cabinet d'avocats international fondé à Paris, qui compte aujourd'hui 480 juristes dans 16 bureaux, notamment à Saint-Pétersbourg et Moscou et, pour le Kazakhstan, à Almaty et Atyrau. Notre bureau d'Almaty compte aujourd'hui 25 juristes et j'ai effectué l'an dernier mon 70 ème voyage au Kazakhstan. Il est impossible de ne pas remarquer les changements extraordinaires qu'a connus le pays depuis treize ans. A l'époque, le Kazakhstan disposait d'un cadre juridique directement dicté par le régime soviétique. Aujourd'hui, il est possible d'effectuer n'importe quelle opération commerciale sur la base du droit kazakh, et la législation y est aujourd'hui beaucoup plus accueillante, pour les investisseurs étrangers, qu'il y a quelques années. Ils disposent en effet de garanties très importantes de stabilité des contrats, de l'arbitrage international ou de la possibilité de rapatriement des bénéfices, et la loi sur les investissements prévoit la négociation des avantages spéciaux (fiscaux ou douaniers). Un frein à l'investissement étranger réside, en revanche, dans le système judiciaire du pays, qui manque de temps à autre d'honnêteté et de compétence, ainsi que dans la lourdeur du système administratif, dont les pénalités sont parfois sévères sans toujours échapper à l'arbitraire.

III. Questions/réponses

Gilbert NATTA, Société Vical

Le Kazakhstan est un pays très vaste et nous n'avons pas beaucoup abordé la question des transports dans le pays. La route peut-elle se développer, à côté du train et de l'avion ?

Daniel PATAT

Le transport ferroviaire constitue une voie royale, en particulier pour le pondéreux, et je crois que c'est ainsi que les dirigeants kazakhs l'entendent. Un programme de revitalisation du secteur des transports du Kazakhstan a été lancé, adossé à une émission obligataire, en vue de refinancer les grandes infrastructures de la voie et de la traction. Le fret et le passager devraient ensuite, progressivement, faire l'objet de mesures volontaristes de développement, à la faveur du développement des concessions et des partenariats public-privé : un corpus législatif doit voir le jour prochainement afin de permettre ce nouveau type de coopération pour le pays, qui connaît aussi un essor important dans l'Hexagone.

Quant au transport aérien, il progresse de façon importante et une compagnie régionale devrait être créée prochainement pour compléter l'offre nationale.

Gilbert NATTA, Société Vical

Le transport ferroviaire constitue en effet la voie royale. Mais peut-on compter sur le maintien à un niveau très bas des coûts de transport, ou faut-il s'attendre à ce qu'ils rejoignent la réalité économique (alors que ce secteur est aujourd'hui fortement subventionné) ?

Daniel PATAT

Je crois que l'ouverture du marché devrait conduire les coûts à se rapprocher de ceux du marché. Cela dit, le gouvernement veille à ne pas « tout casser » du jour au lendemain : l'augmentation brutale des coûts du fret poserait de graves difficultés à un grand nombre d'entreprises.

Aymeri de MONTESQUIOU

J'ajouterai trois points. Les distances constituent un des handicaps du Kazakhstan. Il est évident qu'il ne va pas accentuer cette faiblesse. Par ailleurs, la tendance est à la privatisation de l'économie mais cela prend du temps. Enfin, voyez comme la Chine et son vis-à-vis, les Etats-Unis, ont leurs ports saturés. Il existe aujourd'hui un projet consistant à envoyer les marchandises de Chine vers l'Union Européenne par le transport ferroviaire, qui semble aujourd'hui moins onéreux que d'aller vers l'Est. Sans doute de tels travaux ne peuvent-ils être entrepris qu'avec une très large participation de l'Etat, sachant que leur coût, pour la seule partie kazakhe, est, à ma connaissance, de 5 milliards de dollars.

Alexis TRIGNAC, Citroën

Je me suis rendu à Almaty il y a un mois et nous y avons été accueillis par l'équipe de la Mission économique. La question se pose maintenant de savoir comment trouver le partenaire idéal.

Daniel PATAT

Le partenaire idéal est celui qui vous plaira. Vous avez rencontré un certain nombre d'opérateurs, d'envergure et de dimensions très différentes. Vous en êtes le seul juge mais je pense que vous devriez pouvoir trouver, parmi les interlocuteurs que vous avez rencontrés, le « bon » partenaire. Si la gamme de vos véhicules les intéresse, ils n'hésiteront certainement pas à faire le premier pas vers vous.

Yves JEANCLOS, Professeur, université Robert Schuman, Strasbourg

Existe-t-il un problème de formation du personnel judiciaire ?

James HOGAN

Je crois que ce problème existe. Mais les défauts du système judiciaire du Kazakhstan s'expliquent aussi, à mes yeux, par un problème de culture ou d'éthique. Du point de vue des investisseurs étrangers, on ne peut que préconiser le recours à l'arbitrage international. Pour le reste, je reste optimiste car le pays est très jeune et devrait parvenir à trouver des solutions à toutes ces questions.

Jean-Luc FROMENT-HURTEVENT, Directeur du Développement, IASDSE/CEEDRUS

Le Kazakhstan nous intéresse pour une implantation. Quelles sont les contraintes et les problèmes les plus fréquemment rencontrés dans le domaine du transport aérien ? Je représente ici des actionnaires qui envisagent de fonder une entreprise de transport aérien au Kazakhstan, tant pour le fret que pour le trafic de passagers.

Daniel PATAT

Sur le plan juridique, rien ne s'oppose à votre implantation. Pour autant, un tel projet ne paraît guère évident : le pays poursuit une politique d'accords bilatéraux. Il existe un certain nombre de compagnies d'affaires, dont certaines connaissent d'ailleurs des difficultés. Le secteur aérien est en pleine effervescence et en pleine restructuration, avec une grande compagnie nationale et plusieurs compagnies régionales dont pourrait émerger une compagnie régionale de première importance. En tout état de cause, les compagnies travaillant dans le fret en lien avec la mer Caspienne sont en contact avec KazMunaïGaz. Je ne peux donc que vous préconiser de nouer des contacts avec cette entreprise.

Aymeri de MONTESQUIOU

Je vous remercie tous pour votre participation.