La privatisation de l'électricité

Marie-Hélène BERARD
Conseiller à la Direction générale, CCF

Le contexte

Je m'apprête donc à vous parler de la privatisation de l'électricité en Moldavie, privatisation réussie, voire exemplaire. Pourtant, le sujet était sensible, tant au plan politique que social, puisque les consommateurs avaient l'habitude de payer leur énergie à moindre coût. En outre, traditionnellement, les pays de l'Est sont des pays où les pertes en ligne sont lourdes. Engager cette privatisation était donc courageux. La Moldavie, sur cette voie, est donc en avance. J'ajoute que la privatisation était difficile car le pays importe de l'énergie. Au plan national, la Moldavie produit grosso modo 25 % de sa consommation d'énergie, 35 % sont importés de l'Ukraine, 30 % de la Transnistrie -ce qui pose nombre de problèmes- et 10 % de Roumanie.

La privatisation s'est faite dans le contexte d'un marché déjà bien organisé par les autorités. Une première loi a été promulguée en 1998, pour définir les rôles respectifs du Gouvernement, du régulateur (l'ANRAE alors que le régulateur français vient juste de voir le jour...) et les compagnies d'électricité. L'ANRAE, né en 1997, est un organe indépendant, dont les membres ne peuvent normalement être remplacés durant leur mandat, lequel est d'une durée de 5 ans. Je signale que les pouvoirs de cet organisme sont réels.

Les modalités de mise en oeuvre du processus de privatisation

La privatisation a commencé avec les entités de distribution. Le Ministère de l'Economie a lancé un appel d'offres pour l'aider dans ce processus. En juin et juillet 1999, le CCF a donc commencé à travailler sur ce dossier. Un appel d'offres à investisseurs a été lancé en août 1999, pour la privatisation de compagnies de distribution. Nous avons reçu huit réponses. Après examen, deux entreprises ont maintenu leurs offres, la compagnie espagnole et son équivalente ukrainienne. Finalement, l'acteur espagnol a été retenu. Cette société, qui dispose d'une importante quantité de cash, souhaite se développer dans cette zone. Les conditions de l'opération sont très favorables pour les pouvoirs publics. En effet, elle représente un montant en cash de 25 millions de dollars et des investissements de 60 millions de dollars sur cinq ans. Le montant total des investissements, sur la durée globale du projet, devrait s'élever à 100 millions de dollars, pour trois sociétés de distribution sur cinq. Cela correspond à une modernisation très importante du réseau.

Au cours des discussions, les tarifs et la méthode de fixation des tarifs furent les points les plus conflictuels. L'investisseur espagnol a dû s'entendre avec les autorités de privatisation et les Ministères pour trouver une règle acceptable d'évolution des tarifs. En définitive, un compromis a été trouvé. Il débouche sur un relèvement des tarifs, acceptable à mes yeux pour les clients, qu'il s'agisse de particuliers ou d'entreprises. Le contrat a été signé le 7 février 2000. Nous avons lancé un nouvel appel d'offres concernant les deux autres sociétés de distribution. A ce jour, nous avons reçu trois réponses. Le processus est donc en cours. L'ensemble du processus devrait être achevé d'ici à la fin de l'année.

Par ailleurs, la Moldavie a également initié la privatisation de son appareil de production, avec la mise en vente de 70 % des actions de trois centrales électriques. Le processus a été amorcé en mars 2000. La date de remise des offres pour ces trois centrales thermiques est fixée en septembre, et le closing est prévu pour décembre.

Globalement, je dois reconnaître que le processus fut plutôt simple à mettre en oeuvre, en dépit d'intérêts parfois divergents entre vendeur et acheteur. Cela dit, ces intérêts divergents sont habituels. La procédure fut claire, très bien organisée, transparente.