EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La lutte contre le dérèglement climatique est incontestablement le défi de notre siècle. Nous devons léguer une planète vivable aux futures générations. Dans son sixième rapport d'évaluation, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) des Nations unies nous alerte sur l'impératif d'actions rapides et à grande échelle pour limiter le réchauffement à 2 °C. Les scénarios qui prévoient de limiter le réchauffement à 1,5°C impliquent que les émissions mondiales de gaz à effet de serre atteignent un pic au plus tard en 2025. Nous constatons déjà les effets de ce dérèglement climatique au travers des canicules successives, des incendies à répétition, de l'asséchement de nos nappes phréatiques, de la fonte de nos glaciers ou encore de la disparition d'une partie de notre biodiversité. Les mesures incrémentales ne peuvent suffire à y répondre, nous devons engager les grandes transformations nécessaires, immédiates et radicales. L'engagement du président de la République est de les mettre en oeuvre tout en poursuivant notre développement économique et notre voie de progrès social, promouvant conformément à la Constitution un développement durable. C'est une aspiration profonde des citoyens, en premier lieu de notre jeunesse. Lutte contre le réchauffement climatique et protection de la biodiversité et de nos cadres de vies sont ainsi des enjeux jumeaux.

La guerre en Ukraine et ses conséquences géopolitiques ont bouleversé les circuits d'approvisionnement des produits énergétiques fossiles, produits pétroliers et gaz naturel, rappelant la dépendance de notre économie et de nos modes de vie aux énergies fossiles importées. Cette situation constitue un nouveau paradigme dont il nous faut prendre acte.

Ainsi, de même qu'il y a cinquante ans notre pays avait, à la suite des chocs pétroliers, fait le choix d'un mix électrique décarboné dans un souci d'indépendance et de souveraineté nationale, la crise énergétique et climatique conforte ces choix tout autant qu'elle nous appelle à les approfondir et à accélérer à un rythme sans précédent nos efforts pour sortir de la dépendance aux énergies fossiles. Car il n'y aura pas d'indépendance politique sans indépendance énergétique. Nous devons reprendre en main notre destin énergétique.

Le discours de Belfort du président de la République en février dernier a fixé un cap clair et ambitieux pour la politique énergétique des prochaines décennies : faire de la France le premier grand pays du monde à sortir de la dépendance aux énergies fossiles. Nous devons libérer les Français des énergies fossiles, dont la situation inflationniste actuelle menace leur pouvoir d'achat. La stratégie énergétique reposera sur deux grands chantiers : la réduction de notre consommation d'énergie et la production massive d'énergie décarbonée. Elle doit viser à garantir la sécurité d'approvisionnement des Français, à contribuer à la compétitivité économique du territoire, à préserver l'environnement, et à assurer à chacun un accès à l'énergie.

La sobriété et l'efficacité énergétiques doivent nous permettre de baisser d'ici 2040 de 40 % notre consommation d'énergie. La sobriété énergétique se fera ni par la privation, ni par la décroissance. Les économies d'énergie reposeront sur l'évolution profonde et durable de nos comportements et sur la poursuite massive des rénovations des bâtiments, la décarbonation de nos transports et la transformation de notre tissu industriel pour le rendre moins émetteur, plus circulaire et plus compétitif. Sous l'égide de la Première ministre, un premier chantier de réduction de 10 % d'ici 2024 a été lancé dès cet été. Il repose sur les actions des acteurs économiques les plus importants qui doivent faire les plus grands efforts. L'État se doit aussi d'être exemplaire et engagera des actions dans ses administrations et ses bâtiments publics. Ce travail a conduit au plan de sobriété, mobilisant l'ensemble du tissu économique public comme privé pour concrétiser notre ambition d'un modèle moins intense en énergie dès cet hiver. Le succès de ce plan repose sur la mobilisation des plus grands acteurs, sur la dynamique de dialogue social ainsi engagée, et la construction de bonnes pratiques largement diffusées. Il s'appuie aussi sur les textes législatifs et réglementaires dont il est essentiel qu'ils soient désormais appliqués.

Du côté de la production, le déploiement massif d'énergie décarbonée est déterminant pour notre souveraineté énergétique et nos objectifs climatiques, car nous devons remplacer la part de consommation d'énergies fossiles par de l'énergie décarbonée, aussi bien électricité bas-carbone que chaleur renouvelable. Nous devrons donc être en mesure de produire 60 % d'électricité en plus qu'aujourd'hui pour atteindre la neutralité carbone en 2050. Comment y parvenir ? Les travaux et le rapport « Futurs énergétiques 2050 » de RTE montrent que nous pouvons y arriver en nous appuyant sur un mix décarboné associant énergie nucléaire et développement massif d'énergies renouvelables. C'est le choix écologique le plus pertinent, le choix économique le plus opportun et le choix financier le moins coûteux. Rappelons d'ailleurs qu'en raison des prix actuellement très élevés de l'électricité sur les marchés, les énergies renouvelables contribuent à l'équilibre budgétaire général de l'État.

La France a fait le choix historique et audacieux de développer un parc nucléaire qui concourt à notre indépendance énergétique, à la limitation des émissions de gaz à effet de serre et à l'attractivité de notre territoire par la compétitivité et la stabilité des prix de l'électricité. La France fait aujourd'hui le choix de réaffirmer la place centrale et stratégique de la technologie nucléaire pour réussir notre grande transformation énergétique. Le président de la République a annoncé des investissements massifs avec le lancement d'un programme de six EPR2 et le lancement d'études pour la construction de huit EPR2 supplémentaires. Un milliard d'euros du plan France 2030 sera également consacré au développement de SMR. De plus, tous les réacteurs pouvant être prolongés le seront aux meilleurs standards internationaux de sûreté en vigueur.

En parallèle, il est indispensable d'accélérer dès aujourd'hui le développement des énergies renouvelables, qu'il s'agisse de l'éolien, du photovoltaïque ou de la méthanisation et c'est l'un des objets du projet de loi. Le président de la République a fixé des objectifs ambitieux pour 2050 : multiplier par dix notre capacité de production d'énergie solaire pour dépasser les 100 GW, déployer 50 parcs éoliens en mer pour atteindre 40 GW.

Dans les prochains mois, la France sera amenée à ajuster sa stratégie pour tenir compte de l'objectif européen de rehaussement de l'ambition en matière de lutte contre le changement climatique. C'est l'objet de la prochaine loi de programmation sur l'énergie et le climat qui sera adoptée au second semestre 2023, après une concertation nationale approfondie visant à éclairer le public sur l'ensemble des enjeux de la Stratégie Française Energie Climat, en matière de transformation des usages comme de renouvellement du mix. Dans tous les scénarios, les travaux du rapport « Futurs énergétiques 2050 » de RTE montrent que le développement massif des énergies renouvelables est une absolue nécessité pour atteindre la neutralité carbone, pour sauvegarder notre sécurité d'approvisionnement et pour assurer notre indépendance énergétique. C'est également la conclusion du GIEC, selon lequel le développement accéléré du renouvelable est la condition sine qua non pour réussir la transition énergétique, sortir de notre dépendance aux énergies fossiles et atteindre la neutralité carbone.

Dans ce contexte, un plan d'accélération des énergies renouvelables a été engagé, en mobilisant tous les leviers disponibles. Tout d'abord, le Gouvernement proposera de renforcer les moyens de l'État en déconcentré assurant concrètement l'instruction et le contrôle de la pertinence environnementale de ces projets dans le projet de loi de finances pour l'exercice 2023. Par ailleurs, l'ensemble des services déconcentrés ont été mobilisés par une instruction conjointe des Ministres afin d'accélérer les projets d'électricité renouvelable comme de biométhane dans tous les territoires et d'en assurer l'accompagnement diligent. La mise en place de concertations avec les parties prenantes locales, et d'une cartographie aidant à la bonne planification des projets est également demandée. Les leviers réglementaires disponibles ont enfin été engagés afin de rétablir dès cet été l'équilibre économique des projets renouvelables engagés mais bloqués par l'inflation des coûts de construction, permettant de débloquer plusieurs gigawatts d'énergies renouvelables, dans deux ensembles de textes réglementaires dévolus au photovoltaïque et au biométhane. Cet effort réglementaire se poursuivra dans les prochaines semaines en complément de ce projet de loi.

Ce projet de loi doit ainsi permettre, grâce à des mesures fortes et ambitieuses qui viennent compléter des actions déjà engagés par le Gouvernement, de changer d'échelle dans le déploiement des énergies renouvelables. Il tient compte des contributions de l'ensemble des parties prenantes et des acteurs de terrain, qu'elles proviennent des filières renouvelables, des collectivités locales ou des acteurs de la protection de l'environnement.

Il doit permettre à court terme d'atteindre nos objectifs au titre de la Programmation Pluriannuelle de l'Energie (PPE) en vigueur, qui impliquent en 2028 un doublement de la capacité de production d'électricité renouvelable, une multiplication par 4 à 6 de notre production de gaz renouvelable, et une augmentation de moitié de la consommation de chaleur renouvelable. Il s'agit également, de respecter nos engagements européens matérialisés par le paquet Fit For 55 qui fixe, à l'horizon 2030, une part de 40% d'énergies renouvelables dans la consommation finale d'énergie de l'UE en 2030.

La mise en oeuvre d'une véritable politique industrielle de transition énergétique est l'autre élément déterminant de notre stratégie. La production massive d'énergie décarbonée et plus largement notre transition énergétique nécessitent de pouvoir compter sur des filières industrielles clés, dont il faut accélérer la structuration : celles associées à la production d'énergie comme l'éolien en mer, le photovoltaïque et les biocarburants et celles qui permettent la transition énergétique d'autres secteurs, avec les batteries, l'hydrogène décarboné, ou encore le recyclage des matériaux, et enfin celles qui accélèrent notre transition énergétique grâce à des productions plus respectueuses de l'environnement de biens aujourd'hui produits à l'étranger. Cette ambition industrielle s'articule par ailleurs avec le plan France 2030. Ce texte vise ainsi à accélérer le déploiement des grands écosystèmes industriels nécessaires à notre transition énergétique et à notre souveraineté industrielle.

Malgré ce volontarisme, la France accuse un retard dans le déploiement des moyens de production d'énergie renouvelable et dans la structuration des filières industrielles décarbonées par rapport aux autres pays européens. Il faut en moyenne 5 ans de procédures pour construire un parc solaire nécessitant quelques mois de travaux, 7 ans pour un parc éolien et 10 ans pour un parc éolien en mer. Nos partenaires européens vont souvent deux fois plus vite que nous. Les raisons de ce constat sont plurielles : complexité de nos procédures administratives et contentieuses en comparaison avec nos partenaires européens, insuffisance de foncier facilement mobilisable et conciliable avec les enjeux environnementaux, manque de visibilité sur la démarche de planification de l'éolien en mer, problème d'acceptabilité et d'attractivité des projets d'énergie renouvelable, manque d'appropriation au niveau local. Nous devons donc aller beaucoup plus vite, sans rien renier de nos exigences environnementales. Etant donné l'urgence de la situation en termes de climat et de sécurité d'approvisionnement, des adaptations temporaires pour accélérer la réalisation des projets nécessaires à la transition énergétiques .

Nous devons aller plus vite tout en créant les conditions de l'acceptabilité et de l'attractivité de ces projets, qui sont d'ailleurs des éléments déterminants dans leur réussite et dans le développement des projets futurs dans d'autres territoires. Réussir ce double défi suppose de lever toutes les barrières réglementaires à partir du moment où les projets sont acceptés localement, en menant un travail de simplification et de pragmatisme local dans l'accompagnement des projets.

Ce projet de loi entend ainsi répondre au double défi d'acceptabilité locale et territoriale d'une part et d'accélération et de simplification d'autre part. Il est la première pierre de la grande transformation énergétique de notre pays qui doit permettre à la France de devenir le premier grand pays du monde à sortir de la dépendance aux énergies fossiles, tout en renforçant notre indépendance énergétique et notre exemplarité climatique.

Cette ambition française s'inscrit en pleine cohérence avec l'ambition européenne inscrite dans le cadre de la révision des directives relatives à l'efficacité énergétique et aux énergies renouvelables au sein du Paquet Fit for 55 , au coeur de la Présidence française de l'Union européenne, et à présent réaffirmée dans le plan « REPowerEU » proposé par la Commission européenne le 18 mai 2022 afin de rendre l'Europe indépendante des combustibles fossiles russes au plus vite, en accélérant encore la transition vers les énergies bas carbone. A cet égard, les recommandations de la Commission européenne réaffirment que les activités économiques, et notamment les énergies renouvelables, peuvent être rendues compatibles avec la protection de la nature, et que les États membres doivent mettre en oeuvre des processus d'autorisation rapide pour autoriser les projets dès lors qu'ils ne sont pas susceptibles d'avoir des impacts significatifs, dans le strict respect du cycle « éviter-réduire-compenser ».

Ce projet de loi entend enfin réaffirmer la possibilité pour tout consommateur d'énergie de devenir, grâce aux énergies renouvelables, acteur de la lutte contre le réchauffement climatique et pour l'indépendance de la Nation. De même que le parc nucléaire a permis aux Français de prix de l'électricité représentatifs de sa compétitivité, nous pouvons, avec les technologies renouvelables, faire bénéficier nos territoires et leurs habitants de leur compétitivité. Le projet de loi propose ainsi de développer de nouveaux modèles de soutien et de partage de la valeur des énergies décarbonées pour assurer leur insertion dans les territoires et leur contribution à notre compétitivité.

Il sera complété dans les prochains mois par un projet relatif à l'énergie nucléaire, et en 2023 par un projet de loi de programmation énergie climat, à la suite des consultations publiques lancées sur le mix énergétique et la stratégie française énergie climat en octobre 2022 et sur les projets d'EPR2.

Titre I er - Mesures d'urgence temporaires pour accélérer les projets d'énergie renouvelable et les projets industriels nécessaires à la transition énergétique.

Le titre I er vise à réduire le temps de déploiement des projets d'énergie renouvelable, ainsi que des projets industriels qui sont nécessaires à la transition car ils contribuent directement ou indirectement à réduire notre empreinte carbone, en ayant une approche globale de leur déploiement, des phases initiales d'instruction jusqu'au raccordement. Etant donné l'urgence de la situation, il prévoit des mesures systémiques temporaires visant à rattraper, au plus vite, notre retard sur nos partenaires européens. Pour cela, il entend proportionner le cadre d'instruction, d'autorisation, de régulation, de raccordement et de contentieux en cohérence avec l'intérêt majeur que les énergies renouvelables et les projets industriels nécessaires à la transition représentent pour notre pays, à la fois sur le plan climatique et sur le plan de la sécurité d'approvisionnement et de l'indépendance énergétique.

L'article 1 er prévoit des adaptations de procédure permettant par exemple la mise en ligne de l'avis de l'autorité environnementale et la réponse du maître d'ouvrage sur le site de l'autorité compétente. Par ailleurs, dans les cas où une enquête publique n'est pas requise et que s'impose une simple participation du public par voie électronique, le projet de loi supprime la faculté laissée au préfet d'obliger, le cas échéant, à organiser une enquête publique.

Les adaptations procédurales prévues s'appliquent pour une durée de 48 mois aux activités et opérations nécessaires à la transition énergétique, qu'il s'agisse du déploiement des énergies renouvelables ou de projets industriels concourant à la décarbonation de l'économie. L'objectif est d'assurer une participation effective à un stade précoce des procédures, favorisant une bonne prise en main par les parties prenantes des enjeux du projet et leur possibilité pleine de contribuer à ses adaptations à la lumière de ses enjeux éclairés par l'échange avec le public. L'article vise ainsi à améliorer la qualité des dossiers par une concertation amont et à raccourcir les délais d'autorisation en parallélisant les tâches plutôt qu'en les réalisant de manière séquentielle, en préservant pleinement le principe de participation du public inscrit dans la Charte de l'Environnement.

L'article 2 vise à étendre aux projets soumis à déclaration préalable de travaux le régime de la participation du public par voie électronique (PPVE), aujourd'hui applicable aux projets relevant d'un permis de construire. Ce régime a pour objet de permettre en pratique aux projets photovoltaïques au sol de petite taille de pouvoir bénéficier d'une participation du public plus efficace et d'une procédure plus légère tout en préservant le principe de participation du public aux décisions en matière d'environnement, de manière strictement proportionnée aux enjeux.

L'article 3 vise à faciliter la mise en compatibilité des documents d'urbanisme locaux. Dans l'optique d'une accélération des procédures de déploiement des énergies renouvelables et de raccordement des ouvrages au réseau électrique, plusieurs axes d'évolution significative sont proposés, permettant de gagner plusieurs mois de procédures, voire dans des cas très particuliers plusieurs années :

- passage dans certain cas d'une procédure de révision à une procédure de modification simplifiée, beaucoup plus rapide ;

- élargissement le champ de la mise en compatibilité par déclaration de projets, qui permet d'assurer la conduite simultanée des procédures au titre du plan et du projet ;

- unification des concertations publiques que les codes de l'environnement et de l'urbanisme imposent. L'article 4 vise, d'une part, à reconnaître une raison impérative d'intérêt public majeur (RIIPM) pour les projets d'énergies renouvelables répondant à des conditions techniques fixées par décret en Conseil d'État et, d'autre part, prévoit, pour tous les projets, que la déclaration d'utilité publique (DUP) puisse valoir reconnaissance du caractère d'opérations répondant à des RIIPM. Cela permettra de sécuriser juridiquement les projets en cas de contentieux, qui sont sources de retards et difficultés, liés à une demande de dérogation à l'obligation de protection stricte des espèces protégées. Par ailleurs, étant donné la très grande proximité de la notion d'utilité publique avec celle de RIIPM et alors que la dérogation « espèces protégées » n'est en général pas sollicitée en parallèle de la DUP, l'apprécier simultanément à la délivrance de la DUP concourt à accélérer les procédures et leur lisibilité pour les parties prenantes, tout en préservant le principe de participation du public à valeur constitutionnelle.

L'article 5 vise à faire obligation au juge de permettre, avant de procéder à une éventuelle annulation, la régularisation d'une illégalité d'une autorisation environnementale, comme c'est déjà le cas pour les autorisations d'urbanisme.

L'article 6 donne habilitation au Gouvernement pour simplifier les procédures de raccordement. Le raccordement des installations d'énergie renouvelable, mais aussi les renforcements de réseau nécessaires pour l'électrification des gros consommateurs industriels, peuvent prendre un temps important et se retrouver ainsi sur le chemin critique du calendrier de projets qui sont pourtant indispensables à la transition énergétique. Plusieurs dispositions législatives peuvent être mises en place pour réduire ces délais, mais aussi pour permettre la mise en place de zones prioritaires dans lesquelles les gestionnaires de réseau pourraient, ou devraient, anticiper certains travaux de raccordement avant d'avoir reçu des demandes des producteurs ou consommateurs. Cette anticipation permettra de faire gagner jusqu'à plusieurs années aux projets d'énergie renouvelable ou industriels, en pré-équipant certaines zones.

Titre II. - Mesures tendant à l'accélération du développement de l'énergie solaire thermique et photovoltaïque.

Le titre II vise à accélérer le déploiement du photovoltaïque en démultipliant les possibilités d'implantation, afin d'atteindre l'objectif de multiplier par huit notre capacité de production d'énergie solaire pour dépasser les 100 GW à l'horizon 2050.

L'article 7 vise l'installation facilitée de panneaux photovoltaïques aux abords des autoroutes et routes à grande circulation. L'installation de panneaux solaires à moins de 75 ou 100 m de la route n'est aujourd'hui possible que sur les délaissés routiers ou autoroutiers et sous certaines conditions. Or, les surfaces en jeu peuvent être importantes. Il est donc proposé d'étendre la dérogation prévue par l'article L. 111-7 du code de l'urbanisme à toutes les installations de panneaux solaires, quel que soit le terrain d'implantation.

L'article 8 adapte les procédures de mise en concurrence en étendant les possibilités de dispense offertes à l'État par l'article L. 2122-1-3-1 du code général de la propriété des personnes publiques aux gestionnaires qui détiennent, d'un texte ou d'un titre, la compétence pour délivrer un titre d'occupation du domaine public.

L'article 9 autorise dans les zones intéressant la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral (dite « loi Littoral ») l'implantation de panneaux photovoltaïques au sol ou d'hydrogène renouvelable sur des friches ou sur des stocks de saumures. L'article permet de déroger à l'article L. 121-8 de la loi Littoral dans un cadre très contraint : les friches concernées sont listées par un décret ; le projet doit être autorisé par l'autorité administrative compétente de l'État , sur la base d'une étude démontrant que le projet satisfait mieux l'intérêt public qu'un projet de renaturation du site et qu'il n'est pas de nature à porter atteinte à l'environnement, notamment à la biodiversité ou aux paysages et à la salubrité ou à la sécurité publiques, en situation normale comme en cas d'incident.

L'article 10 vise à autoriser l'implantation de panneaux photovoltaïques au sol en discontinuité dans les communes de montagne dotées d'une carte communale. En effet, les dispositions de la loi montagne ne permettent d'autoriser l'implantation de centrales photovoltaïques au sol en discontinuité de l'urbanisation que sous réserve de la réalisation d'une étude de discontinuité (article L. 122-7 du code de l'urbanisme). Cette étude peut être contenue dans un SCOT ou un PLU. Cela conduit à ne pouvoir autoriser les centrales photovoltaïques dans les communes couvertes par une carte communale que lorsque la commune est également couverte par un SCOT comportant une telle étude. L'article permet d'ouvrir cette possiblité aux communes dotées uniquement d'une carte communale comportant une telle étude de discontinuité.

L'article 11 impose l'équipement des parkings extérieurs de plus de 2500 m² en ombrières photovoltaïques sur au moins la moitié de leur surface. Cette obligation ne s'applique pas aux parcs de stationnement qui, en raison de contraintes techniques, de sécurité (défense nationale, sécurité civile notamment), architecturales ou patrimoniales, ne permettent pas ce type d'installations, ni aux parcs entrant dans le champ d'application de l'article L. 171-4 du code de la construction ou de l'habitation ou de l'article L. 111-19-1 du code de l'urbanisme tels qu'issus de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, ni aux parcs déjà ombragés par des arbres sur au moins la moitié de leur superficie. La surface des parkings de plus de 2500 m 2 est estimée entre 90 à 150 millions de m 2 en France : l'équipement de la moitié de cette surface en ombrières photovoltaïques permettrait de réaliser une puissance installée comprise entre 7 et 11 GW. L'article impose également à ces parcs de stationnement d'être équipés, sur au moins la moitié de leur superficie, de revêtements de surface, d'aménagements hydrauliques ou de dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l'infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation.

Titre III - Mesures tendant à l'accélération du développement de l'éolien en mer.

Le titre III vise à accélérer le déploiement de l'éolien en mer, en phase avec notre objectif d'une puissance installée de 40 GW et de 50 parcs en exploitation à l'horizon 2050, en mettant les documents stratégiques de façade maritime (DSF) au coeur de notre dispositif de planification, et en clarifiant le cadre juridique applicable. Il facilite également le raccordement des parcs éoliens en mer.

L'article 12 donne la possibilité de mutualiser les débats publics pour l'éolien en mer et le document stratégique de façade (DSF) pour améliorer la planification spatiale de la transition. Les DSF, qui font également l'objet d'une procédure de participation du public, identifient, pour les quatre façades maritimes françaises, des zones ayant une vocation de développement des énergies renouvelables en mer. Il s'agit donc du document de planification des usages en mer. Les emplacements des parcs éoliens en mer pourront donc être choisis à l'intérieur des zones identifiées comme ayant une vocation « éolien en mer » dans le DSF. Cette possibilité de mutualiser les procédures de participation du public relatives à la révision du DSF et au lancement des appels d'offres pour les futurs parcs éoliens en mer permettra de donner une meilleure visibilité au public sur l'ensemble de la démarche de planification et d'accélérer le développement des projets, qui n'auront pas à faire l'objet de procédures supplémentaires de participation du public.

L'article 13 clarifie le régime juridique applicable aux parcs à cheval entre Domaine public maritime (DPM) et Zone économique exclusive (ZEE). Certains parcs éoliens en mer pourraient se situer pour partie en DPM et pour partie en ZEE ce qui multiplie le nombre d'autorisations requises et les risques juridiques pour les projets. Il est proposé de créer un régime juridique unique applicable aux parcs éoliens à cheval entre DPM et ZEE qui serait celui de la mer territoriale.

L'article 14 adapte et clarifie le statut juridique des éoliennes flottantes afin d'encourager et d'accompagner leur développement. Alors qu'actuellement, les installations flottantes implantées dans la zone économique exclusive sont assimilées à des navires et sont de ce fait soumises à des obligations inapplicables et inadaptées compte-tenu de leur caractère statique, l'aricle 14 propose d'instituer un régime propre aux installations flottantes, applicable dans l'ensemble des eaux sous souveraineté et juridiction française.

L'article 15 clarifie le régime juridique applicable aux navires, aux installations en mer territoriale et aux personnels non gens de mer pour faciliter la construction et l'exploitation des champs d'éoliennes en mer :

- il assouplit la répartition de la durée du travail des personnels non gens de mer travaillant à l'installation des parcs éoliens en mer ;

- il permet l'application d'un régime unique pour la durée du travail des personnels non gens de mer travaillant alternativement en mer et à terre pour la construction et l'exploitation des champs d'éoliennes en mer ;

- il étend les règles de cabotage entre ports français aux trajets, effectués pour des opérations de maintenance courante, entre un port et une île artificielle située en mer territoriale (y compris un parc éolien) ou entre deux îles artificielles ;

- il prévoit que les bases portuaires utilisées au départ de ces trajets à destination d'installations en mer territoriale et en ZEE françaises soient situées dans le territoire d'un État membre de l'Union Européenne ou de l'Espace Economique Européen.

L'article 16 permet l'installation, dans les zones soumise à la loi Littoral, des ouvrages du réseau de transport d'électricité. Deux axes majeurs de la stratégie énergétique nationale requièrent un développement important du réseau de transport d'électricité dans des zones soumises à la loi Littoral : le développement massif de l'éolien en mer, dans le cadre de l'objectif de déploiement de cinquante parcs en 2050, et la décarbonation des industries fortement émettrices de gaz à effet de serre, concentrées dans des zones en partie littorales (Dunkerque, Fos-sur-Mer, zone portuaire du Havre et vallée de la Seine). Or l'application des dispositions du code de l'urbanisme relatives au littoral, conjuguée à la rareté du foncier disponible, rend complexe, voire parfois impossible, une implantation du réseau (postes et lignes) juridiquement sécurisé. L'article permet une autorisation au cas par cas, justifiée par un bilan technique, financier et environnemental.

Titre IV. - Mesures transversales de financement des énergies renouvelables et de partage de la valeur.

Le titre IV a pour objectif d'améliorer le financement et l'attractivité des projets d'énergie renouvelable. Il entend pour cela débrider le potentiel décentralisé des énergies renouvelables via des mesures d'appropriation et des modèles de financement locaux, permettant de susciter les initiatives et la naissance de projets entre consommateurs, industriels, et producteurs d'énergie, ce qui graduellement pourra faire émerger des installations sans soutien public, au service de la compétitivité des territoires. Une des clés de l'adhésion et de l'appropriation repose sur la démonstration d'une utilité concrète et directe pour les riverains, c'est pourquoi ce titre vise également à mettre en oeuvre un partage territorial de la valeur des énergies renouvelables. De telles mesures concourent par ailleurs à améliorer l'acceptabilité locale des projets, alors que ce problème constitue l'une des causes majeures du retard et de la lenteur du déploiement des énergies renouvelables en France, comme en témoigne le nombre de contentieux très élevé.

L'article 17 vise la création d'un cadre juridique et la coordination des contrats de vente directe entre des producteurs et des consommateurs finals (« Power Purchase Agreement » ou « PPA ») avec les dispositions du code de l'énergie, en précisant notamment le cadre applicable à la fourniture d'électricité dans ce type de modèles contractuels et ouvre la possibilité pour les prochains appels d'offres de soumettre des offres mixtes (avec complément de rémunération / avec PPA) comme c'est le cas dans d'autres pays (Danemark, Pays-Bas), ce qui permet de mobiliser la mise en place des contrats de long terme. Il permet par ailleurs de redévelopper, pour les énergies renouvelables, des contrats comparables au contrat « Exeltium » conclu il y a dix ans afin de partager la compétitivité du parc électronucléaire existant avec des acteurs industriels, et de développer un marché de contrats de long terme décarbonés, comme y invite le droit sectoriel (directive 2019/944). Il prévoit par ailleurs des modalités d'intervention de la Commission de régulation de l'énergie pour proposer, dans le contexte des évolutions exceptionnelles des marchés de l'électricité, des adaptations du contrat « Exeltium » afin d'en sécuriser l'équilibre économique, dans l'objectif d'intérêt général de préservation de la compétitivité industrielle de notre pays et de l'approvisionnement décarboné d'industries critiques.

L'article 18 institue un régime de « partage territorial de la valeur des énergies renouvelables » avec les riverains des installations. Le développement des énergies renouvelables est indispensable à notre sécurité d'approvisionnement en électricité et à l'atteinte de nos objectifs climatiques. Il bénéficie donc à l'ensemble de la communauté nationale. Pourtant, la problématique d'attractivité des énergies renouvelables constitue la cause racine de la lenteur de leur déploiement en France. Une des clés de l'adhésion repose sur la démonstration d'une utilité concrète et directe pour les riverains. Cet article vient ainsi créer une modalité de partage territorial de la valeur des énergies renouvelables avec les clients résidentiels ainsi qu'avec les communes concernées, qui se traduira par un rabais sur leur facture d'électricité. Ce dispositif permettra d'améliorer considérablement l'attractivité locale des projets.

L'article 19 étend aux gaz bas-carbone les contrats d'expérimentation biogaz. En effet, les technologies de production de gaz méthane bas-carbone évoluent rapidement. Des projets sont en cours de développement sur des technologies permettant de valoriser de nouveaux intrants (gazéification de déchets, pyrolyse de boues issues su traitement des eaux usées...), et de décarboner le réseau de gaz naturel. Ces technologies doivent être testées afin d'analyser leur potentiel et la contribution qu'elles pourraient apporter au mix énergétique. Les dispositions législatives proposées visent à prévoir un soutien dans le cadre de contrats d'expérimentation, comme ce qui est prévu pour les technologies innovantes de production de biogaz, et à assurer la traçabilité de ces gaz bas carbone.

L'article 20 procède à la ratification de deux ordonnances.

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