EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La loi du 9 juillet 2010 a fixé le cadre juridique afin de faciliter les saisies et confiscations dans le cadre d'une procédure pénale. Elle a en particulier créé l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC), véritable « bras armé » du ministère de la justice dont la compétence technique spécialisée est mise au service des juridictions, afin de saisir le patrimoine des personnes mises en cause dans des procédures pénales, de gérer efficacement les biens ainsi saisis et, enfin, le cas échéant, d'assurer leur confiscation effective.

Comme relevé dans un contrôle budgétaire mené en 2017 par l'auteur de la présente proposition de loi au nom de la commission des finances du Sénat 1 ( * ) , l'AGRASC contribue activement à la crédibilité de la réponse pénale, les confiscations étant, dans bien des cas, plus efficaces que des peines d'emprisonnement.

Dans son rapport public annuel 2017, l'AGRASC suggère des modifications législatives, afin de faciliter les saisies et confiscations : la présente proposition de loi vise à lever certains des freins ainsi identifiés par l'AGRASC. Elle n'est toutefois pas exhaustive : en particulier, elle ne traite pas spécifiquement des confiscations immobilières, alors même que l'agence souligne de nombreuses difficultés juridiques et pratiques en la matière, qui nécessiteraient une réflexion plus approfondie avec tous les acteurs impliqués afin de déterminer les modifications législatives nécessaires, non seulement s'agissant du code de procédure pénale mais aussi du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P).

Plus modeste, l'objectif de la présente proposition de loi est d'améliorer et de simplifier certaines dispositions de la procédure pénale afin de faciliter les missions de l'AGRASC et, donc, l'effectivité de la réponse pénale.

L' article 1 er vise à autoriser la confiscation des biens ayant servi à commettre l'infraction, même s'ils n'appartiennent pas au condamné. En effet, devoir démontrer que le condamné est propriétaire ou a la libre disposition de l'instrument de l'infraction constitue une entrave à la « juste répression des crimes et des délits » selon l'AGRASC, car il ne s'agit pas d'une confiscation patrimoniale, mais d'une confiscation dite « réelle » spécifique et réservée au seul instrument de l'infraction. En outre, afin de les systématiser, cet article rend obligatoire la confiscation de l'instrument et/ou du produit de l'infraction, sauf motivation spéciale.

L' article 2 précise que, dans le cas où la juridiction aurait omis de statuer sur le devenir d'un bien immobilier saisi, il n'y a pas lieu à restitution si celui-ci est l'instrument ou le produit direct ou indirect de l'infraction.

L' article 3 harmonise les modalités de remise à l'AGRASC des biens avant jugement au cours de l'enquête, que la remise à l'AGRASC soit ordonnée par le juge d'instruction ou autorisée par le procureur de la République, en introduisant une ordonnance du juge des libertés et de la détention dans le cas où c'est le procureur de la République qui demande une telle remise. Il prévoit également que, dans ce dernier cas, le délai d'appel est fixé à dix jours (comme c'est le cas pour l'ordonnance du juge d'instruction) au lieu de cinq jours prévus actuellement.

L' article 4 prévoit la possibilité pour le tribunal, le jour de l'audience, de prononcer, en plus de la confiscation d'un bien, de le remettre à l'AGRASC, même s'il est déjà placé sous main de justice. En effet, même si les biens ont été préalablement saisis (sans être confiés à l'AGRASC), compte tenu des délais d'appel et de cassation et du fait que cette décision du tribunal est exécutoire immédiatement, il peut y avoir un intérêt à remettre ces biens à l'AGRASC qui pourra, pendant la durée de l'appel ou de la cassation, les gérer efficacement.

L' article 5 prévoit que la juridiction de jugement informe la partie civile à qui une indemnisation ou une réparation a été reconnue de sa possibilité de demander à l'AGRASC qu'elle soit financée grâce aux confiscations prononcées. Il prolonge également (de deux à six mois) le délai pour adresser cette demande à l'AGRASC et précise que ce délai débute lorsque la décision civile est définitive.

L' article 6 prévoit la remise d'un rapport au Parlement concernant la possibilité de créer un registre unique de l'ensemble des biens patrimoniaux sous main de justice, qui pourrait être géré par l'AGRASC. Il s'agirait ainsi de créer une base de données unifiée et fiable de l'ensemble des biens patrimoniaux sous main de justice à une date donnée, afin d'assurer, dans ces cas, une pleine opposabilité aux tiers.

L' article 7 prévoit également la remise d'un rapport au Parlement étudiant les modalités selon lesquels les biens saisis non valorisables pourraient être plus facilement détruits ou, le cas échéant, remis à des associations ou des acteurs de l'économie sociale et solidaire.


* 1 Pour que le « crime ne paie pas » : consolider l'action de l'AGRASC, rapport d'information de M. Antoine Lefèvre, fait au nom de la commission des finances n° 421 (2016-2017)

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