EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La France possède parmi les meilleures technologies, industries et savoir-faire au monde, qui sont autant d'actifs stratégiques plaçant notre pays au premier rang des nations. C'est pourquoi le rôle de l'État est tout autant de protéger que de promouvoir ces actifs stratégiques, particulièrement dans une économie mondialisée. La crise sanitaire du printemps 2020 a accentué cette nécessité, en créant le risque de prédations, économiques comme technologiques, en raison de la baisse des valorisations et des besoins en capitaux.

En sorte qu'il importe plus que jamais de prendre le plus grand soin de nos entreprises et technologies stratégiques, tant du point de vue de leur protection que de leur développement.

Notre pays dispose déjà de deux outils assurant une protection des actifs stratégiques :

- Un dispositif juridique de contrôle des investissements étrangers en France (IEF) permettant à l'État de bloquer ou de modifier une opération d'investissement étranger dans un secteur stratégique lorsqu'elle est de nature à porter aux intérêts essentiels de la Nation. Ce dispositif figure à l'article L. 151-3 du code monétaire et financier.

- Un dispositif capitalistique d'investissement public permettant à l'État, via la BPI, l'APE ou la CDC, d'intervenir, soit pour déployer une politique publique de soutien à l'innovation, au développement des territoires et aux entreprises fragiles ou menacées, soit, dans un aspect patrimonial, en qualité de propriétaire, parfois assorti de prérogatives exorbitantes, d'entreprises liées au souverain profond.

La légitimité de ces dispositifs au regard des impératifs de sécurité nationale et de défense de nos intérêts économiques stratégiques n'est pas discutable.

Mais il demeure que le contrôle des investissements étrangers s'inscrit dans le principe de la liberté d'investissement, auquel il forme une dérogation, et qu'il ne saurait constituer un obstacle à la compétitivité et à la performance économique des entreprises concernées, sachant qu'il est par ailleurs nécessaire de préserver l'attractivité de la France auprès des investisseurs étrangers.

Il est à cet égard de la responsabilité de l'État, dans l'hypothèse où une entreprise stratégique se verrait privée de l'accès à des capitaux étrangers du fait de l'exercice des dispositifs protégeant les intérêts essentiels de la Nation et en l'absence d'alternative équivalente sur le marché qui répondrait aux impératifs de sécurité économique, de proposer à cette entreprise une voie qui lui permette de réorganiser son opération sans affecter ses équilibres ni sa performance. En d'autres termes, les impératifs de sécurité nationale de la France ne peuvent se traduire en insécurité financière pour les entreprises concernées et leurs propriétaires.

D'un autre côté, au-delà des intérêts patrimoniaux et de la maîtrise par l'État des secteurs relevant du souverain profond, nos entreprises et technologies stratégiques, dont le champ s'est largement étendu ces derniers temps, doivent pouvoir bénéficier, non pas seulement de protection, mais aussi d'un soutien fort et durable dans leur développement et leur conquête de nouveaux marchés, intérieurs comme extérieurs, en cohérence avec la politique de sécurité économique de la France.

C'est pourquoi, aux côtés des instruments veillant sur le patrimoine de l'État et chargés du déploiement d'une politique publique de soutien à l'innovation, au développement des territoires et aux entreprises menacées, il est crucial pour la France de disposer, dans une vision stratégique à long terme, d'un véhicule d'accompagnement et de développement des entreprises stratégiques à la mesure des enjeux et des ambitions de la France.

La présente proposition de loi a ainsi pour objet la constitution de deux véhicules d'investissements publics à vocation stratégique : l'un pour permettre à une entreprise française qui se serait vue refuser par l'État un investissement étranger de trouver une solution le temps de réorganiser sans dommage son opération, l'autre destiné à accompagner dans leur croissance et leur développement les entreprises que l'État juge stratégiques pour la souveraineté et la sécurité économique de la Nation.

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