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N° 678

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2012-2013

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 juin 2013

PROJET DE LOI

autorisant la ratification de l'accord-cadre entre l' Union européenne et ses États membres , d'une part, et la République de Corée , d'autre part,

PRÉSENTÉ

au nom de M. Jean-Marc AYRAULT,

Premier ministre

Par M. Laurent FABIUS,

ministre des affaires étrangères

(Envoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le Conseil de l'Union européenne a autorisé la Commission européenne à négocier un nouvel accord-cadre (ci-après, « l'accord ») avec la République de Corée en mai 2008. Cet accord doit succéder à l'accord-cadre de commerce et de coopération entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et la République de Corée, d'autre part, signé à Luxembourg le 28 octobre 1996, et entré en vigueur depuis le 1 er avril 2001. La Commission européenne et la République de Corée ont paraphé le nouvel accord le 14 octobre 2009. L'accord-cadre a été signé le 10 mai 2010. Il renouvelle la relation entre l'Union européenne et la République de Corée en étendant de façon significative le nombre des secteurs de coopération. L'accord-cadre et l'accord de libre-échange signés en 2010 doivent faire évoluer les relations entre l'Union européenne et la République de Corée vers un véritable partenariat stratégique 1 ( * ) .

L'accord-cadre est divisé en dix titres portant respectivement sur son fondement et son champ d'application (titre I er ), le dialogue politique et la coopération (titre II), la coopération dans les organisations régionales et internationales (titre III), la coopération en matière de développement économique (titre IV), la coopération en matière de développement durable (titre V), la coopération dans le domaine de la culture et de l'éducation (titre VI), la coopération dans le domaine de la justice, de la liberté et de la sécurité (titre VII), la coopération dans d'autres domaines (titre VIII), à savoir le tourisme, la société civile, l'administration publique et les statistiques, le cadre institutionnel (titre IX) et les dispositions finales (titre X).

L'accord-cadre porte à la fois sur des matières relevant de la compétence de l'Union européenne et sur des matières relevant, au moins pour partie, de celle des États membres. Il est donc de nature mixte et doit, pour entrer en vigueur, être ratifié par les États membres.

TITRE I ER : FONDEMENT ET CHAMP D'APPLICATION (ARTICLES 1 ER ET 2)

Le titre I er mentionne les principes généraux de l'accord-cadre (article1 er ), et notamment :

- le respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux de l'Homme inscrits dans les instruments internationaux applicables aux deux parties - il est précisé que cette disposition constitue un aspect essentiel de l'accord-cadre ;

- la Charte des Nations unies ;

- la promotion du développement durable sous toutes ses formes (encourager la croissance économique mais aussi relever les défis environnementaux mondiaux) ;

- l'attachement à la bonne gouvernance et à la lutte contre la corruption ;

- un attachement au caractère complet des relations bilatérales et à la préservation d'une cohérence d'ensemble ;

- la volonté d'élever la relation entre l'Union européenne et la République de Corée au niveau d'un partenariat renforcé et de développer la coopération aux niveaux bilatéral, régional et mondial ;

- le dialogue, le respect mutuel, un partenariat équitable, le multilatéralisme, le consensus et le respect du droit international.

Il présente les objectifs de l'accord (article 2) :

- l'intensification du dialogue politique et des relations économiques : dialogue politique régulier, coopération dans toutes les enceintes et organisations régionales et internationales, encouragement de la coopération économique, facilitation des investissements, renforcement du rôle et du profil de chacune des parties dans l'autre région (échanges culturels, utilisation des technologies de l'information, éducation), promotion des contacts interpersonnels et entre les peuples ;

- le renforcement de la coopération sur toutes les questions d'intérêt commun : droits de l'Homme, non-prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs, lutte contre le commerce illégal des armes légères et de petit calibre, lutte contre les crimes les plus graves, lutte contre le terrorisme ; échanges commerciaux et investissements ; politique économique, fiscalité, douanes, concurrence, société de l'information ; science et technologie, énergie, transport ; développement durable ; culture, audiovisuel, médias, éducation ; justice, liberté, sécurité ; tourisme, société civile, administration publique.

TITRE II : DIALOGUE POLITIQUE ET COOPÉRATION (ARTICLE 3 À 7)

Le titre II prévoit un dialogue politique régulier (article 3) : des réunions au sommet au niveau des dirigeants (chef d'État et de gouvernement), quand les parties le jugeront nécessaire ; des consultations annuelles au niveau ministériel ; des réunions d'information au niveau des hauts fonctionnaires ; des dialogues sectoriels ; des échanges entre le Parlement européen et l'Assemblée nationale de la République de Corée.

Il met en avant la coopération dans le domaine de la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs (article 4) et contre le commerce illégal des armes légères et de petit calibre (article 5), ainsi que la lutte contre les crimes les plus graves qui préoccupent la communauté internationale (article 6), où est évoqué le soutien des parties à la Cour pénale internationale (également à l'article 31 sur la coopération judiciaire), et contre le terrorisme (article 7).

TITRE III : COOPÉRATION DANS LES ORGANISATIONS RÉGIONALES ET INTERNATIONALES (ARTICLE 8)

Les deux parties conviennent de coopérer dans les instances et organisations régionales et internationales (Nations unies, Organisation internationale du travail, Organisation de coopération et de développement économiques, Organisation mondiale du commerce, Forum Asie-Europe, Association des nations de l'Asie du Sud-Est, notamment).

TITRE IV : COOPÉRATION EN MATIÈRE DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE (ARTICLES 9 À 20)

Les parties coopèrent en vue d'instaurer les conditions nécessaires au renforcement des échanges commerciaux et des investissements. Plusieurs domaines sont expressément visés : le dialogue sur la politique économique (article 10), la coopération entre entreprises (article 11), la fiscalité (article 12), les douanes (article 13), la politique de la concurrence (article 14), la société de l'information (article 15), la science et la technologie (article 16), l'énergie (article 17), les transports (article 18), la politique relative aux transports maritimes (article 19) et la politique des consommateurs (article 20).

L'article 9, paragraphe 2, renvoie expressément à l'accord de libre-échange, en précisant que « les parties mettent en oeuvre leur coopération dans le domaine des échanges et des investissements au moyen de l'accord instituant une zone de libre-échange. » et que « Ledit accord (de libre-échange) constitue un accord spécifique rendant effectives les dispositions commerciales du présent accord (de l'accord-cadre) ». Sur ce point, l'accord renvoie également à son article 43, dont le paragraphe 3 dispose que « Les parties peuvent compléter le présent accord par la conclusion d'accords spécifiques dans tout domaine de coopération relevant de son champ d'application. » et que « De tels accords spécifiques font partie intégrante des relations bilatérales générales régies par le présent accord et font partie d'un cadre institutionnel commun. » Ainsi, l'objectif est d'intégrer l'accord de libre-échange, support de la relation commerciale entre l'Union européenne et la République de Corée, dans le cadre juridique global et cohérent, couvrant tout le spectre de cette relation, qu'est l'accord-cadre.

TITRE V : COOPÉRATION EN MATIÈRE DE DÉVELOPPEMENT DURABLE (ARTICLES 21 À 27)

Le titre V développe les axes de coopération suivants : la santé (article 21), l'emploi et les affaires sociales (article 22), l'environnement et les ressources naturelles (article 23), le changement climatique (article 24), l'agriculture, le développement rural et la sylviculture (article 25), le milieu marin et la pêche (article 26) et l'aide au développement (article 27).

TITRE VI : COOPÉRATION DANS LE DOMAINE DE LA CULTURE ET DE L'ÉDUCATION (ARTICLES 28 ET 29)

Les parties s'engagent à coopérer dans les enceintes internationales afin, notamment, de promouvoir la diversité culturelle (article 28). À cet effet, l'Union européenne et la République de Corée s'engagent à respecter les dispositions de la convention de l'UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles. Elles mettent également un accent particulier sur la coopération dans le domaine de l'enseignement supérieur (article 29).

TITRE VII : COOPÉRATION DANS LE DOMAINE DE LA JUSTICE, DE LA LIBERTÉ ET DE LA SÉCURITÉ (ARTICLES 30 À 38)

Les parties accordent une importance particulière à la promotion de l'État de droit (article 30). Elles conviennent de développer une coopération judiciaire en matière civile et commerciale (article 31, paragraphe 1) et d'encourager le recours à l'arbitrage pour résoudre les différends civils et commerciaux quand les instruments internationaux applicables le permettent (article 31, paragraphe 2). En matière pénale (article 31, paragraphe 3), les parties s'efforcent de renforcer les mécanismes d'entraide judiciaire et d'extradition (mise en oeuvre notamment des instruments internationaux pertinents des Nations unies, y compris le statut de Rome instituant la Cour pénale internationale).

Les parties coopèrent par ailleurs dans les domaines de la protection des données à caractère personnel (article 32), des migrations (lutte contre le trafic d'êtres humains, réadmission des personnes en séjour illégal : les parties s'efforcent, s'il y a lieu, de conclure un accord sur ce sujet) (article 33), de la lutte contre les drogues illicites (article 34), contre la criminalité organisée et la corruption (article 35), contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (article 36), contre la cybercriminalité (article 37). Afin de faciliter la collaboration dans ces domaines, une coopération est instituée entre les services de répression (article 38).

TITRE VIII : COOPÉRATION DANS D'AUTRES DOMAINES (ARTICLES 39 À 42)

Le titre VIII évoque l'engagement d'une coopération dans les domaines du tourisme (article 39), de la société civile (article 40), de l'administration publique (article 41) et des statistiques (article 42).

TITRE IX : CADRE INSTITUTIONNEL (ARTICLES 43 À 46)

L'article 43 prévoit l'articulation entre l'accord-cadre et les autres accords : il abroge l'accord-cadre de commerce et de coopération entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et la République de Corée, d'autre part (paragraphe 1), que le nouvel accord actualise et remplace (paragraphe 2), et prévoit la possibilité de compléter ce dernier par des accords spécifiques « dans tout domaine de coopération relevant de son champ d'application » (paragraphe 3). Tel est le cas de l'accord de libre-échange (cf. supra).

Un comité mixte, composé de représentants des deux parties, est créé par l'article 44 ; il se réunit au moins une fois par an, alternativement à Bruxelles et à Séoul. Il est chargé de veiller à la bonne mise en oeuvre de l'accord-cadre, de suivre le développement des relations entre les parties, de faire des suggestions sur les activités futures et les moyens de les réaliser, de définir les priorités, de résoudre les différends éventuels liés à l'application ou à l'interprétation de l'accord.

L'article 45 sur les modalités de mise en oeuvre pose les obligations des parties en vertu de l'accord. Si une partie considère que l'autre n'a pas rempli les obligations qui lui incombent au titre de l'accord, elle peut prendre des « mesures appropriées » conformément au droit international (paragraphe 3) ; « en cas d'urgence spéciale », la mesure est notifiée immédiatement à l'autre partie, sans saisine préalable du comité mixte (paragraphe 4).

Une déclaration interprétative commune concernant l'article 45 précise que les « cas d'urgence spéciale » visés à l'article 45, paragraphe 4, signifient les cas de violation substantielle de l'accord, à savoir : soit une dénonciation de l'accord non sanctionnée par les règles générales du droit international, soit une violation particulièrement grave et substantielle d'un élément essentiel de l'accord.

Les dispositions relatives aux droits de l'Homme (article 1 er , paragraphe 1) et celles relatives à la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs (article 4, paragraphe 2) sont présentées comme des éléments essentiels de l'accord.

Une procédure d'arbitrage est prévue (article 46).

TITRE X : DISPOSITIONS FINALES (ARTICLES 47 À 53)

L'accord-cadre est conclu pour une durée illimitée. Chaque partie peut le dénoncer à tout moment. La dénonciation prend effet six mois après la notification à l'autre partie.

Telles sont les principales observations qu'appelle l'accord-cadre entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la République de Corée, d'autre part qui, comportant des dispositions de nature législative, est soumis à l'approbation du Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution.

PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre des affaires étrangères,

Vu l'article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi autorisant la ratification de l'accord-cadre entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la République de Corée, d'autre part, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'État, sera présenté au Sénat par le ministre des affaires étrangères, qui sera chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.

Article unique

Est autorisée la ratification de l'accord-cadre entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la République de Corée, d'autre part (ensemble deux déclarations), signé à Bruxelles, le 10 mai 2010, et dont le texte est annexé à la présente loi .

Fait à Paris, le 19 juin 2013

Signé : JEAN-MARC AYRAULT

Par le Premier ministre :

Le ministre des affaires étrangères,

Signé : LAURENT FABIUS


* 1 Les partenaires stratégiques de l'Union européenne sont actuellement au nombre de dix : Afrique du Sud, Brésil, Canada, Chine, République de Corée, États-Unis, Inde, Japon, Mexique et Russie.

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