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N° 194

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2013-2014

Enregistré à la Présidence du Sénat le 4 décembre 2013

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

PRÉSENTÉE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 34-1 DE LA CONSTITUTION,

relative à la transition énergétique ,

Par MM. Jean-Claude GAUDIN, Ladislas PONIATOWSKI

et les membres du groupe UMP,

Sénateurs

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La raréfaction des énergies fossiles, l'insécurité dans l'approvisionnement de ces sources d'énergie, la hausse de la facture énergétique, la détérioration de l'environnement dont l'augmentation des émissions de gaz à effet de serre est l'une des principales manifestations, tous ces phénomènes impliquent que la France conduise une politique publique de l'énergie empreinte de vision et de responsabilité.

Comme le souligne l'Agence internationale de l'énergie, la demande globale de combustibles fossiles aura augmenté d'un tiers d'ici à 2035. Les pays producteurs, les pays consommateurs et les zones de transit auront changé, modifiant ainsi les enjeux géopolitiques y afférents. Les projections relatives aux prix de ces matières premières n'en deviendront que plus incertaines.

À ces questions économiques et géopolitiques, s'ajoutent des préoccupations environnementales qui vont croissantes, notamment en ce qui concerne les conséquences des déperditions d'hydrocarbures dans les écosystèmes ou les émanations de gaz à effet de serre.

Face à ces incertitudes, deux objectifs doivent rassembler nos responsables publics : réduire autant que possible notre dépendance aux énergies fossiles, et limiter nos rejets de gaz à effet de serre.

Or, ces deux objectifs se rejoignent par leur cause commune : notre consommation excessive en combustibles fossiles. En effet, en limitant notre consommation en énergies fossiles, nous réduirons notre dépendance à l'égard des puissances exportatrices, nous rétablirons notre balance commerciale, et donc nous réduirons les incertitudes économiques liées à ces importations. Dans le même temps, nous contribuerons à diminuer les rejets de gaz à effet de serre dans l'atmosphère.

La réduction de notre consommation en combustibles fossiles doit ainsi être au coeur de la politique publique énergétique française pour les prochaines décennies. Pour cela, il ne peut y avoir d'autres moyens que de planifier le basculement de notre consommation en énergies fossiles vers une consommation électrique (hors thermique classique).

De cette manière, même si des économies d'énergie sont envisageables, notamment dans la consommation résidentielle et la consommation issue du secteur tertiaire qui représentent à elles deux près de 70 % de notre consommation finale d'électricité, il serait irresponsable de programmer une diminution de nos capacités de production électrique. Au contraire, il faut préparer notre pays à l'hypothèse d'une hausse de notre consommation électrique qui, contrairement aux idées reçues, ne sera pas un aveu d'échec, mais à l'inverse, le signe que la transition énergétique s'opère véritablement et que nous réalisons le basculement tant nécessaire de la part des énergies fossiles dans notre consommation primaire vers l'électricité.

Pour répondre à ce défi, il nous faudra repenser les composants du mix énergétiques, avec les contraintes liées à chaque source de production. Pour ces raisons, la présente proposition de résolution souhaite réaffirmer le rôle central des sources de production électrique qui ne sont pas issues de combustibles fossiles et qui ne sont pas émettrices de CO 2 .

De cette manière, notre proposition de résolution se prononce d'abord en faveur de la prolongation de la durée d'exploitation du parc nucléaire actuel et souhaite la poursuite du programme EPR et du programme sur les réacteurs de quatrième génération. Le nucléaire, filière d'excellence pour notre pays, est en effet le moyen le plus efficace pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre.

La présente proposition de résolution invite également au renouvellement rapide des concessions hydroélectriques, autre filière d'excellence, pour moderniser et valoriser cet outil de production vertueux écologiquement.

Il est aussi question de conduire l'ensemble des filières de production d'énergie issue de sources renouvelables vers l'efficience économique. Le soutien à la recherche doit dans cette optique être ciblé sur les filières compétitives.

Enfin, tous les leviers de l'amélioration de la performance énergétique doivent être mobilisés tout en tenant compte des charges induites pour les collectivités territoriales et les ménages.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Le Sénat,

Vu l'article 34-1 de la Constitution,

Vu les articles 1 er à 6 de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution,

Vu le chapitre VIII bis du Règlement du Sénat,

Considérant que le développement de la filière nucléaire a permis à la France de répondre aux priorités de la politique énergétique que sont la sécurité de l'approvisionnement et l'indépendance énergétique, de bénéficier de l'énergie la moins chère et la moins carbonée d'Europe, de contribuer simultanément à la compétitivité de l'appareil productif, à l'emploi, à la préservation du pouvoir d'achat des consommateurs et à la prévention du changement climatique, et enfin de développer une filière scientifique et industrielle d'excellence ;

Considérant que la production française d'énergie décarbonée s'appuie également sur l'exploitation d'un important potentiel hydroélectrique et sur une incontestable maîtrise technologique en ce domaine ;

Considérant que, dans le cadre de ses engagements internationaux et européens et à la suite du Grenelle de l'environnement, la France s'est fixé, à l'horizon 2020, des objectifs ambitieux en matière d'amélioration de l'efficacité énergétique et de développement de la part des énergies renouvelables dans la production d'énergie, objectifs qui gardent tout leur intérêt ;

Considérant toutefois que l'expérience acquise dans le cadre de l'effort important consenti, entre 2005 et 2011, pour accroître la production d'énergies nouvelles d'origine renouvelable a mis en évidence que cet effort achoppe sur des technologies encore peu matures, aussi bien en ce qui concerne la production de ces énergies que la maîtrise de leur intermittence et leur intégration dans le système électrique ;

Considérant que le renouvellement de notre capacité de production énergétique exigera, quels que soient les choix retenus, un effort important d'investissement, et qu'il importe, tout particulièrement dans le contexte économique et financier actuel, de pouvoir échelonner dans le temps cet effort, pour que son impact sur le prix de l'énergie demeure soutenable et pour permettre à la France d'acquérir dans de nouvelles filières de production d'énergie la même maîtrise technologique que dans les secteurs de l'énergie nucléaire et de l'hydroélectricité ;

Considérant que la recherche de l'efficacité énergétique doit demeurer une priorité, en particulier pour réduire notre dépendance à l'égard des importations d'énergie fossile et pour lutter contre le développement de la précarité énergétique ;

- Se prononce en faveur de la prolongation de la durée d'exploitation du parc nucléaire actuel, sous le contrôle de l'Autorité de sûreté nucléaire, afin, d'une part, d'éviter de consacrer des dépenses à la destruction d'emplois et d'un outil de production rentable et sûr et de bénéficier, d'autre part, des délais nécessaires pour effectuer des choix qui nous engageront pour plusieurs décennies ;

- Souhaite la poursuite du programme de remplacement partiel des générateurs nucléaires de deuxième génération par des EPR ainsi que celle du programme de recherche sur les réacteurs de quatrième génération ;

- Souligne que le maintien de l'excellence industrielle et du niveau de recherche français dans le secteur de l'énergie nucléaire, outre le bénéfice qu'en retirera notre pays en termes d'indépendance énergétique et de production d'une énergie de base durablement compétitive, contribuera aussi, à travers le rayonnement des technologies nationales, à soutenir l'effort international de lutte contre le changement climatique et à promouvoir la recherche du plus haut niveau de sûreté de la production d'énergie nucléaire ;

- Rappelant que l'hydroélectricité est la première source nationale d'énergie renouvelable et qu'elle présente un intérêt tout particulier en termes d'ajustement de l'offre et de stockage de l'énergie, insiste sur la nécessité d'un renouvellement rapide des concessions hydroélectriques, pour permettre de moderniser l'outil de production et d'optimiser la valorisation de la ressource hydraulique, mais aussi pour faire bénéficier les collectivités publiques d'une redevance représentative de la rente des concessions amorties ;

- Estime nécessaire de prendre en compte les interrogations relatives au coût du soutien accordé au développement de nouvelles filières de production d'énergie issue de sources renouvelables et aux modalités de son financement, d'examiner ce coût à l'aune de son impact sur le prix de l'énergie, sur la construction de nouvelles filières industrielles, sur l'emploi, sur l'équilibre de la balance commerciale, et en fonction de l'apport potentiel de ces nouvelles filières à notre indépendance énergétique ;

- Juge souhaitable de cibler l'effort nécessaire sur les filières les plus compétitives et de soutenir par ailleurs la recherche pour développer des technologies nouvelles et favoriser l'émergence de solutions innovantes et compétitives aux problèmes du stockage de l'énergie et du développement de réseaux intelligents ;

- Souhaite également que soit soutenu l'effort de production de chaleur renouvelable et que soit mise à profit l'expertise développée en ce domaine par les collectivités territoriales ;

- Estime en tout état de cause indispensable, pour éviter les pointes de consommation et dans la perspective du développement d'énergies intermittentes, de mettre en place le plus rapidement possible le mécanisme de capacité prévue par la loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation des marchés de l'énergie ;

- Préconise une orientation prioritaire de la politique de maîtrise de la consommation d'énergie vers l'amélioration de l'efficacité énergétique des processus de production, des biens de consommation, des secteurs du bâtiment et des transports, afin que cette politique contribue aussi à la croissance économique, à la compétitivité, au développement des territoires et à l'emploi en s'appuyant sur l'innovation, la mise en place de filières industrielles, la formation professionnelle et l'information des consommateurs ;

- Attire l'attention sur la nécessité de prendre en compte les charges résultant pour les collectivités territoriales et les ménages de l'effort d'équipement nécessaire à l'amélioration de la performance énergétique des bâtiments et des transports.

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