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SÉNAT

SECONDE SESSION ORDINAIRE DE 1978-1979

Annexe au procès-verbal de la séance du 3 avril 1979.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à modifier le Règlement du Sénat afin d'instituer des

conditions démocratiques de contrôlé des décisions que

les représentants gouvernementaux français prennent dans

les organes de la Communauté économique européenne,

PRÉSENTÉE

Par M. Marcel ROSETTE, Mme Hélène LUC, M. Fernand CHATELAIN, Mme Danielle BIDARD, MM. Serge BOUCHENY, Raymond DUMONT, Jacques EBERHARD, Gérard EHLERS, Pierre GAMBOA, Jean GARCIA, Marcel GARGAR, Bernard HUGO, Paul JARGOT, Charles LEDERMAN, Fernand LEFORT, Anicet LE PORS, James MARSON, Louis MINETTI, Jean OOGHE, Mme Rolande PERLICAN, MM. Guy SCHMAUS, Camille VALLIN, Hector VIRON,

Sénateurs.

_________

{Renvoyée à la Commission des Lois constitutionnelles, de Législation, du Suffrage universel, du Règlement et d'Administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une Commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement)

Règlement des assemblées parlementaires. -- Commissions parlementaires Communauté économique européenne - Contrôle parlementaire.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L'action du Parti communiste français tend à réaliser une France démocratique dans une Europe démocratique.

Il agit pour l'Europe des travailleurs, du progrès social et économique luttant contre la domination des sociétés capitalistes multinationales et les inégalités et pour l'extension de toutes les libertés.

La France doit participer à la C.EE. avec la volonté d'agir en vue de la libérer de la domination du grand capital, de démocratiser ses institutions, de soutenir les revendications des travailleurs et d'orienter dans le sens de leurs intérêts les réalisations communautaires.

La France doit préserver au sein du Marché commun sa liberté d'action pour la réalisation de son programme politique, économique et social.

En tout état de cause, elle doit garder le droit d'invoquer les clauses de sauvegarde prévues par le Traité de Rome.

De même, la règle de l'unanimité prévue par le compromis de Luxembourg de 1965, par le droit de veto qu'elle implique, est un moyen décisif de l'indépendance nationale qui empêche que des décisions contraires à ses intérêts soient imposées à la France.

Les communistes estiment indispensable de la conserver. L'abandon comme l'aménagement de la règle de l'unanimité équivaudrait à un abandon extrêmement grave de notre souveraineté nationale. C'est d'autant plus important que les Conseils européens non prévus par le Traité de Rome prennent, au niveau des chefs d'État, des décisions qui entraînent des conséquences importantes pour la vie économique de chaque pays.

La participation aux politiques communes de la C.E.E. ne saurait mettre en cause l'indépendance de notre pays et les compétences de faire la loi et de contrôler l'action de l'exécutif que le Parlement français tient de la Constitution.

Le premier caractère de la démocratie est la liberté pour un peuple et ses représentants de déterminer librement son régime politique, économique et social, ses lois. Il n'y a pas de démocratie là où il y a supranationalité. Les représentants gouvernementaux de chaque peuple, démocratiquement investis et contrôlés par les parlements nationaux, doivent pouvoir s'opposer à une décision qui léserait gravement les intérêts de leur pays.

C'est pourquoi il faut mettre fin à la pratique actuelle qui consiste pour les ministres à participer aux Conseils des Ministres de la C E.E: sans la moindre consultation préalable de leur propre pays. Cette absence de démocratie minimise le rôle de la France dans les institutions européennes. Elle conduit le Gouvernement français à feindre de ne pouvoir s'opposer à des décisions arrêtées à Bruxelles et auxquelles, en refusant d'opposer son veto, il a en réalité donné son accord. Le pouvoir est directement responsable de tels abandons de la souveraineté nationale.

Démocratiser les institutions européennes, c'est d'abord démocratiser la préparation nationale des décisions.

Le Gouvernement doit être responsable devant l'Assemblée Nationale, comme dans tout autre domaine de sa politique, des décisions que les représentants gouvernementaux français prennent dans les organes de la Communauté.

À chaque session ordinaire du Parlement, c'est-à-dire deux fois par an, le Gouvernement devrait faire devant l'Assemblée Nationale et le Sénat une déclaration sur sa politique européenne qui serait suivie d'une discussion et d'un vote.

Il apparaît également nécessaire d'instituer, au plan national, une consultation obligatoire avant toute décision communautaire de quelque importance. Outre la consultation des organisations sociales (en particulier syndicales) qualifiées dans le domaine intéressé, il serait démocratique que les commissions permanentes de l'Assemblée Nationale et du Sénat soient chargées d'examiner les problèmes européens et de contrôler l'activité européenne du Gouvernement.

Cette consultation pourrait intervenir systématiquement. Par exemple, une audition du Ministre de l'Économie, suivie d'une discussion, aurait lieu devant la Commission des Finances avant le Conseil des Ministres des Finances des neuf pays de la C.E.E. Une audition analogue du Ministre de l'Agriculture aurait lieu devant la Commission des Affaires économiques et du Plan avant le Conseil des Ministres européen de l'Agriculture.

Après les décisions prises par le Gouvernement français au sein des organes communautaires, les membres du Gouvernement seront tenus de rendre compte de chaque Conseil des Ministres européen devant l'Assemblée Nationale et le Sénat.

C'est avant tout au niveau des parlements nationaux que des progrès démocratiques peuvent et doivent être réalisés pour assurer la tâche importante de contrôler l'ensemble des orientations communautaires.

Sous le bénéfice de ces observations, nous vous demandons, Mesdames et Messieurs, de bien vouloir adopter la proposition de résolution suivante.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article premier

Il est inséré dans le Règlement du Sénat le nouvel article 22 bis suivant :

« Dans le mois précédant la réunion du Conseil des Ministres prévue par le Traité de Rome, un débat a lieu devant la commission permanente compétente du Sénat sur l'exposé par le Ministre compétent des orientations qu'il entend défendre auprès du Conseil des Ministres.

« Dans le mois qui suit la réunion du Conseil des Ministres européen, le Ministre est entendu à nouveau par la commission.

« À la suite de chacune de ces auditions la commission peut adopter des observations.

Article 2

Il est inséré à l'article 39 du Règlement le nouvel alinéa 2 bis suivant :

« Lors de chaque session ordinaire du Parlement, le Gouvernement fait devant le Sénat une déclaration avec débat sur sa politique européenne. Cette déclaration est suivie d'un vote. »

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