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PROPOSITION
DE LOI

adoptée

le 21 novembre 2012

N° 34
SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2012-2013

PROPOSITION DE LOI

ADOPTÉE PAR LE SÉNAT

relative à l' indépendance de l' expertise en matière de santé et d' environnement et à la protection des lanceurs d' alerte .

Le Sénat a adopté, en première lecture, la proposition de loi dont la teneur suit :

Voir les numéros :

Sénat : 747 (2011-2012), 24 et 32 (2012-2013).

TITRE I ER

LA COMMISSION NATIONALE DE LA DÉONTOLOGIE ET DES ALERTES EN MATIÈRE DE SANTÉ
ET D'ENVIRONNEMENT

Article 1 er

Une Commission nationale de la déontologie et des alertes en matière de santé et d'environnement a pour mission de veiller aux règles déontologiques s'appliquant à l'expertise scientifique et technique et aux procédures d'enregistrement des alertes en matière de santé et d'environnement.

À cette fin, elle :

1° Émet des recommandations générales sur les principes déontologiques propres à l'expertise scientifique et technique dans le domaine de la santé publique et de l'environnement, et procède à leur diffusion ;

2° Est consultée sur les codes de déontologie mis en place dans les établissements et organismes publics relevant des domaines de la santé et de l'environnement dont la liste est définie dans les conditions fixées à l'article 1 er bis . Lorsqu'un comité de déontologie est mis en place dans l'établissement ou l'organisme, elle est rendue destinataire de son rapport annuel ;

3° ( Supprimé )

4° Transmet les alertes qui lui sont adressées aux ministres compétents, qui informent la commission de la suite qu'ils réservent aux alertes transmises, et des éventuelles saisines des agences réalisées en lien avec ces alertes ;

5° et 6° ( Supprimés )

bis (nouveau) Identifie les bonnes pratiques, en France et à l'étranger, et émet des recommandations concernant les dispositifs de dialogue entre les organismes scientifiques et la société civile sur les procédures d'expertise scientifique et les règles de déontologie qui s'y rapportent ;

7° Établit le rapport annuel prévu à l'article 7.

Article 1 er bis (nouveau)

Les établissements et organismes ayant une activité d'expertise et de recherche dans le domaine de la santé ou de l'environnement tiennent un registre des alertes qui leur sont transmises et des suites qui y ont été données.

Un décret en Conseil d'État précise la liste de ces établissements ou organismes.

Ces registres sont accessibles aux corps de contrôle des ministères de la santé, de l'agriculture et de l'environnement ainsi qu'à la Commission nationale de la déontologie et des alertes en matière de santé et d'environnement, dans le cadre de ses compétences.

Article 2

La Commission nationale de la déontologie et des alertes en matière de santé et d'environnement peut se saisir d'office ou être saisie par :

- un membre du Gouvernement, un député ou un sénateur ;

- l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques ;

- les associations de défense des consommateurs agréées en vertu de l'article L. 411-1 du code de la consommation ;

- les associations de protection de l'environnement agréées en vertu de l'article L. 141-1 du code de l'environnement ;

- les associations ayant des activités dans le domaine de la santé agréées en vertu de l'article L. 1114-1 du code de la santé publique ;

- les organisations syndicales visées à l'article L. 2122-1 du code du travail et les organisations interprofessionnelles d'employeurs au niveau national ;

- un établissement public ou un établissement d'enseignement supérieur.

Article 3

La Commission nationale de la déontologie et des alertes en matière de santé et d'environnement comprend des parlementaires, des représentants du Conseil d'État et de la Cour de cassation, des membres du Conseil économique, social et environnemental et des personnalités qualifiées au titre de leurs travaux relatifs à l'évaluation des risques, l'éthique ou la déontologie, ou en matière de droit du travail, de droit de l'environnement ou de droit de la santé publique, ou appartenant à des organismes de recherche et ayant mené des missions d'expertise collective.

Article 4

Un décret en Conseil d'État précise la composition et les modalités de fonctionnement de la Commission nationale de la déontologie et des alertes en matière de santé et d'environnement ainsi que les conditions d'application du présent titre.

Article 5

Les membres de la Commission nationale de la déontologie et des alertes en matière de santé et d'environnement et les personnes qui lui apportent leur concours, ou qui collaborent occasionnellement à ses travaux, sont soumis à des règles de confidentialité, d'impartialité et d'indépendance dans l'exercice de leurs missions.

Ils sont tenus de souscrire, lors de leur entrée en fonctions, une déclaration publique d'intérêts. Celle-ci mentionne les liens d'intérêts de toute nature, directs ou par personne interposée, que le déclarant a, ou qu'il a eus pendant les cinq années précédant sa prise de fonctions, avec des entreprises, des établissements ou des organismes dont les activités, les techniques et les produits entrent dans le champ de la santé ou de l'environnement ainsi qu'avec les sociétés ou organismes de conseil intervenant dans les mêmes secteurs. Elle est rendue publique et fait l'objet d'une actualisation annuelle.

Article 6

(Supprimé)

Article 7

La Commission nationale de la déontologie et des alertes en matière de santé et d'environnement établit chaque année un rapport adressé au Parlement et au Gouvernement qui évalue les suites qui ont été données à ses avis et aux alertes dont elle a été saisie et comporte, en tant que de besoin, des recommandations sur les réformes qu'il conviendrait d'engager pour améliorer le fonctionnement de l'expertise scientifique et technique et la gestion des alertes. Ce rapport est rendu public et accessible en ligne.

TITRE II

EXERCICE DU DROIT D'ALERTE
EN MATIÈRE SANITAIRE ET ENVIRONNEMENTALE

Article 8

Toute personne physique ou morale qui rend publique ou diffuse de bonne foi une information concernant un fait, une donnée ou une action, dès lors que la méconnaissance de ce fait, de cette donnée ou de cette action lui parait dangereuse pour la santé publique ou pour l'environnement, bénéficie des dispositions prévues par la présente loi.

Elle peut saisir le Défenseur des droits dans les conditions prévues par l'article 5 de la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits.

Pour bénéficier de cette protection, elle doit respecter une obligation de confidentialité et s'abstenir de toute imputation diffamatoire ou injurieuse.

Article 9

Le premier alinéa de l'article L. 4131-1 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il alerte immédiatement l'employeur s'il estime de bonne foi que les produits ou procédés de fabrication mis en oeuvre par l'établissement font peser un risque sur la santé publique ou l'environnement. »

Article 10

À l'article L. 4131-2 du code du travail, après le mot : « imminent », sont insérés les mots : « ou un risque pour la santé publique ou l'environnement ».

Article 11

L'article L. 4612-1 du code du travail est complété par un 4° ainsi rédigé :

« 4° D'examiner les alertes sanitaires ou environnementales dont il est saisi par un salarié de l'établissement ou par un de ses membres. »

Article 12

L'article L. 4141-1 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Il organise et dispense également une information sur les risques potentiels que font peser sur la santé publique ou l'environnement les produits et procédés de fabrication utilisés ou mis en oeuvre par l'établissement ainsi que sur les mesures prises pour y remédier. Cette information est dispensée en association avec le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou les délégués du personnel. »

Article 13

L'article L. 4612-8 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Il est également consulté avant tout changement des produits ou des procédés de fabrication utilisés dans l'établissement susceptible de faire peser un risque sur la santé publique ou l'environnement. »

Article 14

L'article L. 4612-5 du code du travail est complété par les mots : « , ainsi que des enquêtes sur les alertes sanitaires ou environnementales qui lui sont signalées en application de l'article L. 4612-1 ».

Article 14 bis (nouveau)

À l'article L. 4614-10 du code du travail, après le mot : « graves », sont insérés les mots : « , en cas d'événement ayant porté atteinte ou ayant pu porter atteinte à la santé publique ou à l'environnement lié à l'activité de l'établissement ».

Article 14 ter (nouveau)

Après le troisième alinéa de l'article L. 4614-12 du code du travail, il est inséré un 3° ainsi rédigé :

« 3° Lorsqu'il est alerté d'un risque sanitaire ou environnemental dans l'établissement. »

Article 15

(Supprimé)

TITRE III

DISPOSITIONS DIVERSES

Article 16 A (nouveau)

L'article L. 225-102-1 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les institutions représentatives du personnel peuvent présenter leur avis sur les démarches de responsabilité sociale, environnementale et sociétale des entreprises en complément des indicateurs présentés. » ;

2° Au début de la première phrase du sixième alinéa, les mots : « L'alinéa précédent s'applique » sont remplacés par les mots : « Les deux alinéas précédents s'appliquent ».

Article 16

À l'article L. 1132-1 du code du travail, après le mot : « mutualistes, », sont insérés les mots : « de sa participation au lancement d'une alerte sanitaire ou environnementale, ».

Article 17

Le livre III de la première partie du code de la santé publique est complété par un titre V ainsi rédigé :

« TITRE V

« PROTECTION DES LANCEURS D'ALERTE

« Art. L. 1350-1. - Aucune personne ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire, être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation professionnelle, ni être sanctionnée ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de traitement, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, soit à son employeur, soit aux autorités judiciaires ou administratives de faits relatifs à un danger pour la santé publique ou l'environnement dont elle aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions.

« Toute disposition ou tout acte contraire est nul de plein droit.

« En cas de litige relatif à l'application des deux premiers alinéas, dès lors que la personne établit des faits qui permettent de présumer qu'elle a relaté ou témoigné de faits relatifs à un danger pour la santé publique ou l'environnement, il incombe à la partie défenderesse, au vu des éléments, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à la déclaration ou au témoignage de l'intéressé. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. »

Article 18

(Supprimé)

Article 19

Toute personne physique ou morale qui lance une alerte de mauvaise foi ou avec l'intention de nuire ou avec la connaissance au moins partielle de l'inexactitude des faits dénoncés est punie des peines prévues par l'article 226-10 du code pénal relatif à la dénonciation calomnieuse.

Article 20

Tout employeur destinataire d'une alerte qui n'a pas respecté les règles prévues par le titre II de la présente loi perd le bénéfice de l'exonération pour risque de développement prévue au 4° de l'article 1386-11 du code civil.

Articles 21 et 22

(Supprimés)

Article 23

Les éventuelles conséquences financières résultant pour l'État de la présente proposition de loi sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Délibéré en séance publique, à Paris, le 21 novembre 2012.

Le Président,

Signé : Jean-Pierre BEL

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