Discours du Président du Sénat, M. Gérard Larcher,
prononcé à l’occasion du colloque
« Les défis de l’Afrique face au changement climatique »
Le 5 novembre 2015, Salle Monnerville




Madame et Monsieur les Ministres,

Je tiens en particulier à saluer Madame la Ministre de l’agriculture de la République de Guinée, et Monsieur le Ministre du pétrole, des mines et de l’énergie de Mauritanie,
Madame et Messieurs les Ambassadeurs,
Monsieur le Président du Groupe interparlementaire d’amitié France-Afrique de l’Ouest, cher Jacques Legendre,
Madame la Directrice générale de l’Agence française de développement, chère Anne Paugam,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Monsieur le Président de la Coordination pour l’Afrique de demain (CADE),
Mesdames et Messieurs,

Je tiens, en premier lieu, à remercier l’AFD, sa directrice Mme Anne Paugam et ses équipes, dont l’aide et la contribution ont été si précieuses pour l’organisation de ce colloque, dans des délais contraints.

Je souhaite également saluer le travail accompli par le sénateur Jacques Legendre, qui est l’instigateur du colloque et l’un des plus fins connaisseurs de l’Afrique au Sénat : il s’est particulièrement mobilisé cette année sur le sujet de la lutte contre les dérèglements climatiques. Il a mené à bien, en mon nom, des missions auprès de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie mais aussi au sein de plusieurs de vos pays, pour déterminer comment, et avec quels moyens, nous pourrions mieux agir ensemble.

La Conférence des Parties / COP 21 n’est plus aujourd’hui une promesse lointaine. Elle est juste devant nous. Et c’est à ce moment naturellement que les difficultés s’amoncellent. Malgré la lueur d’espoir suscitée par l’engagement de la Chine, la somme des contributions nationales ne permettra pas d’atteindre le seuil fixé d’une hausse de la température limitée à 2 degrés Celsius d’ici la fin de ce siècle. Les experts parlent de 2,7 degrés. Or ce sont ces 0,7 degrés qui font toute la différence. Un petit degré suffit en effet à accélérer de façon drastique la fonte de la calotte glacière et la montée des eaux, avec les conséquences à la clef sur les pays particulièrement vulnérables au changement climatique.

Dans ce contexte, à moins d’un mois de la réunion des Chefs d’État et de gouvernement qui ouvrira la Conférence Paris Climat 2015, votre colloque tombe à point nommé.

Il permettra dans le secteur de l’agriculture et de la gestion des forêts de faire le point sur les initiatives en cours – elles sont nombreuses – et sur les financements indispensables. C’est l’objet de votre première table ronde, que vous introduirez, Madame la Ministre de l’agriculture. Car les financements envisagés ne sont pas au rendez-vous. Nos collègues sénateurs Fabienne Keller et Yvon Collin l’ont bien montré dans leur rapport intitulé « Financements climat : n’oublions pas les pays les plus pauvres » : Yvon Collin, j’en suis persuadé, en développera les conclusions.

Le colloque permettra également, lors de la seconde table ronde, d’aborder l’enjeu majeur que constitue l’accès à l’énergie. J’inaugurais ce 3 novembre l’exposition au Théâtre National de Chaillot intitulée Lumières d’Afriques, qui regroupe des œuvres d’artistes contemporains originaires de chacun des 54 pays africains. L’exposition participe de l’initiative prise par Jean Louis Borloo dans le cadre de sa fondation « Énergies pour l’Afrique », qui vise d’ici 10 ans, à ce que 80 % du continent africain puisse bénéficier de l’électricité, produite à partir de technologies propres. Le Sénat a décidé de soutenir cette initiative par le vote d’une résolution le 22 octobre dernier.

Pourquoi l’électricité ? Non parce qu’elle constituerait un but en soi. Parce que l’électricité, c’est la promesse du développement. Parce que sans l’électricité on ne peut étudier la nuit tombée. L’électricité est source d’émancipation. Je suis persuadé que vos travaux permettront d’illustrer cette conviction.

Votre colloque devrait surtout permettre de faire ressortir l’engagement de l’Afrique dans la lutte contre les dérèglements climatiques. Seuls 7 pays africains sur 54 n’ont pas fait connaître leur contribution nationale à ce jour. Cela démontre avec évidence la prise de conscience qu’il n’existe pas de contradiction entre le développement économique et la protection de l’environnement. Que la lutte contre les dérèglements climatiques n’est pas l’affaire des pays favorisés du monde occidental. La conscience des dangers encourus est aussi vive : près d’un tiers du groupe des 20 pays les plus vulnérables au changement climatique sont africains.

Mesdames et Messieurs,

Alors que la Conférence intergouvernementale prendra prochainement le relais des efforts menés tout au long de cette année par les organisations de la société civile, par les pays à titre national, les collectivités territoriales ou les élus, le rôle des Parlements n’en demeure pas moins essentiel. Le 5 décembre à l’Assemblée nationale, le 6 décembre au Sénat, se tiendra le volet parlementaire de la Conférence des Parties / COP 21, sous l’égide de l’Union interparlementaire (UIP). Le Sénat devrait alors adopter une déclaration des parlementaires du monde entier pour manifester l’implication des parlements dans la lutte contre les dérèglements climatiques.

Ce texte n’est pas une déclaration d’intention de plus. Car ce sont les parlements qui devront contrôler la bonne application des engagements pris à titre national et assurer leur suivi, voter les budgets nécessaires, ratifier l’accord international, si accord il y a naturellement, puis décliner en droit interne les engagements internationaux conclus. Le travail à accomplir ne s’arrêtera pas le 11 décembre au soir, après la clôture de la Conférence des parties …

Le Sénat français, vous le savez, est l’Assemblée qui assure la représentation des collectivités territoriales. Or -Jean-Marie Bockel, qui préside la Délégation sénatoriale aux collectivités territoriales le sait mieux que quiconque-, les collectivités territoriales sont souvent à la pointe des mesures d’adaptation ou d’atténuation pour lutter contre les dérèglements climatiques, notamment dans les pays rétifs à adopter des engagements contraignants au niveau national.

Mesdames et Messieurs, chers amis,

Votre colloque sur « Les défis de l’Afrique face au changement climatique » est résolument tourné vers l’avenir et préfigure l’Afrique de demain. Quelle Afrique les Africains veulent-ils léguer aux générations à venir ?

Car l’Afrique est aujourd’hui en pleine mutation. Elle connaît la croissance, même si elle devrait être plus élevée encore pour accélérer le développement. Elle est confrontée, dans son actualité, aux enjeux de la bonne gouvernance, à travers les processus électoraux en cours, qui doivent respecter l’état de droit et la démocratie. Elle se bat avec courage pour affronter les formes d’obscurantisme ou le terrorisme qui la menacent. Elle progresse à grands pas dans la voie de l’intégration régionale. Elle s’engage résolument dans la lutte contre le changement climatique.

C’est cette Afrique diverse, contrastée, à la fois moderne et respectueuse de ses traditions, qui est ici réunie dans le cadre de ce colloque. Vos débats se dérouleront donc sous les meilleurs auspices. Permettez-moi de former des vœux pour le plein succès de votre colloque !