Mercredi 24 novembre, à l’occasion de l’audition de la ministre Barbara Pompili, la commission des affaires économiques a constaté que la flambée des prix des énergies, non anticipée par le Gouvernement, rend totalement obsolètes les mesures prises par ce dernier dans le domaine de l’énergie.

La commission estime que le "bouclier tarifaire" est tardif et limité.

  • L’attribution de 100 euros via le "chèque énergie" ou l’"indemnité inflation" est dérisoire, les prix à la pompe dépassant 1,5 euros par litre. Ces 100 euros, c’est l’équivalent d’un plein, pas une solution pour passer l’hiver !
  • Les tarifs règlementés de vente, sur lesquels se focalisent les blocages ou compensations de prix, ne concernent que 7,5 % de la consommation nationale de gaz et 28 % de celle d’électricité. L’essentiel des consommateurs sont donc soumis aux fluctuations du marché !
  • Face à la hausse de 34 % de l’approvisionnement énergétique du secteur industriel, les entreprises énergo-intensives ne disposent que d’une avance de 150 M€. C’est six fois inférieur à leurs besoins !
  • Les baisses de taxes intérieures sur la consommation d’énergie sont facultatives, activables par décret, et transitoires, limitées à un an. Pire, la baisse de la fiscalité sur le gaz ne concerne que les ménages, au contraire de celle sur l’électricité, qui vise aussi les entreprises…

Dans ce contexte très dégradé, la commission relève plusieurs anomalies.

  • Le Médiateur national de l’énergie (MNE) ne dispose plus des effectifs suffisants pour résoudre les litiges entre consommateurs et fournisseurs dans les délais règlementaires, ses saisines ayant crû de 15 % en six mois...
  • Les fournisseurs de secours ou de dernier recours, prévus depuis deux ans par la loi "Énergie-Climat", n’ont été désignés que très récemment pour l’électricité et sont encore attendus pour le gaz, alors que certains fournisseurs ont déjà stoppé leurs activités, comme E. Leclerc Énergies et ses 140 000 abonnés à l’électricité !
  • Aucune mesure règlementaire, ni aucun crédit budgétaire, n’ont été spécifiquement annoncés pour garantir notre sécurité d’approvisionnement cet hiver, tandis que Réseau de transport d’électricité (RTE) a placé la France en situation de "vigilance particulière" début 2022.

Convaincue de l’intérêt de l’énergie nucléaire, pour garantir aux Français une énergie peu coûteuse et peu émissive, la commission regrette que le plan de relance ne lui consacre que 0,18 % des crédits et le plan d’investissement 3%.C’est pourquoielle appelle le Gouvernement à donner une traduction budgétaire forte aux annonces récentes en direction de l’énergie et de l’hydrogène nucléaires. Les crédits « Énergie » de ces plans doivent constituer le levier du nouveau nucléaire, en promouvant, aux côtés de la conception des SMR, l’amélioration des EPR, le développement des réacteurs de 4e génération et la recherche en faveur de la "fermeture du cycle du combustible".

La commission y veillera, dans le cadre de ses travaux de contrôle sur les perspectives de développement de la filière française de l’énergie et de l’hydrogène nucléaires .

Pour Daniel Gremillet, rapporteur sur les crédits "Énergie" : "Je regrette que le Gouvernement ait attendu le début de l’hiver pour annoncer le “bouclier tarifaire” : s’il est utile, il n’en demeure pas moins tardif et limité. Alors que la France est le premier pays en termes de fiscalité énergétique, avec 47 Mds d’euros, je constate qu’il n’a pas choisi la voie d’une baisse massive de cette fiscalité, contrairement à l’Espagne ou à l’Allemagne".

Pour Sophie Primas, présidente de la commission : "Il est dommage que le Gouvernement ait attendu six mois avant la fin du quinquennat pour envisager un “retour en grâce” de l’énergie nucléaire ; nous souhaitons aujourd’hui qu’il passe des annonces aux décisions. Or, les plans de “relance” et “d’investissement” n’accordent pas à l’énergie nucléaire toute l’attention qu’elle mérite. Cela porte préjudice à la décarbonation de notre économie, mais aussi au pouvoir d’achat de nos concitoyens et à la compétitivité de nos entreprises".

La commission des affaires économiques est présidée par Sophie Primas (Les Républicains - Yvelines).

Daniel Gremillet (Les Républicains - Vosges) est président du groupe d’études "Énergie"et rapporteur pour avis sur les crédits "Énergie" du projet de loi de finances (PLF) pour 2022.

PHILIPPE PÉJO
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