Question de M. SCHWINT Robert (Doubs - SOC) publiée le 14/04/1988

M. Robert Schwint constate que depuis un certain nombre d'années se développe en France une tendance à inventorier les sites souterrains. L'objectif principal est de fournir aux adeptes de la spéléologie sportive et touristique une vaste gamme de sensations et de terrains pour leur discipline. Or, ces inventaires ne prennent nullement en compte les aspects pourtant essentiels de préservation du patrimoine, qu'il soit d'origine géologique, minéralogique, paléontologique, archéologique et faunistique. Des mentions particulières vont même jusqu'à signaler les sites d'intérêt sensible. Des cavités d'une haute valeur scientifique sont ainsi livrées au vandalisme et au pillage, cela venant d'un public non informé ou d'individus tout à fait conscients de la valeur marchande de certains vestiges arrachés clandestinement au milieu... Ces inventaires favorisent enfin le développement d'un tourisme sauvage sans qu'une législation adaptée puisse réellement préserver ces milieux extrêmement fragiles. De plus, ces inventaires bénéficient dans certaines régions d'un appui financier non négligeable de la part des collectivités territoriales... Scientifiques, naturalistes, archéologues, associations de défense de l'environnement et du patrimoine sont totalement démunis devant cette situation. La nature, quant à elle, ne peut plus faire face seule à cette menace quasi permanente dans des lieux où l'intrusion humaine n'était que discrète, voire inexistante. Du point de vue scientifique, plusieurs rapports ont déjà été rédigés en vue du classement rapide des milieux souterrains les plus menacés ; ces rapports sont restés lettre morte, à l'exception de quelques initiatives locales bénévoles vouées le plus souvent à l'échec parce que sans soutien réel, tant sur le plan institutionnel que financier... Il demande à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'équipement, du logement, de l'aménagement du territoire et des transports, chargé de l'environnement, ce qu'il compte mettre en oeuvre pour sauvegarder cet ensemble du patrimoine national et pour soutenir les scientifiques et le mouvement associatif, qui collaborent à la recherche et à la préservation des milieux souterrains. Il lui demande de prendre des mesures d'urgence pour que les milieux souterrains, le patrimoine et l'environnement en général ne deviennent pas uniquement l'apanage des seuls utilisateurs de la nature à des fins sportives et touristiques.

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Réponse du ministère : Environnement publiée le 05/05/1988

125-126 Réponse. -La loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature prévoit la possibilité d'instaurer des mesures de protection des " sites fossilifères, témoins de l'évolution du monde vivant " (art. 3) et d'une manière plus générale la possibilité de créer des réserves naturelles pour " la préservation des biotopes et formations géologiques, géomorphologiques ou spéléologiques remarquables " et " la préservation des sites présentant un intérêt particulier pour l'étude de l'évolution de la vie " (art. 16). A ce jour, seule la possibilité de créer des réserves naturelles pour préserver des sites d'intérêt géologique a été utilisée, aucune autre mesure réglementaire de protection n'ayant été définie. Toutefois, face aux menaces de destruction ou d'exploitation anarchique pesant sur cette partie du patrimoine national, le ministère de l'environnement avait mis en place en 1982 trois groupes de travail chargés d'élaborer des propositions visant à une meilleure protection des grottes, des minéraux et des vestiges paléontologiques. Les conclusions de ces travaux, concernant la minéralogie et la paléontologie, ont essentiellement porté, d'une part, sur l'information du public, d'autre part, sur un dispositif réglementaire s'attachant principalement au contrôle de la commercialisation des minéraux et fossiles. La mise en place, complexe, de cette réglementation nouvelle, si elle constitue un objectif pour le ministère de l'environnement, nécessite la poursuite de la réflexion engagée et ne pourra intervenir qu'à moyen terme. C'est pourquoi l'accent a été mis dans l'immédiat sur la mise en place d'un réseau cohérent de réserves naturelles permettant de protéger des sites paléontologiques sensibles et d'un grand intérêt, ainsi que les stratotypes des différents étages géologiques rencontrés en France. Par ailleurs, ces réserves et leurs gestionnaires jouent un rôle important pour la sensibilisation, l'information et la formation du public. Dans des domaines, il est souhaitable de faire largement appel aux spécialistes scientifiques et aux associations d'amateurs de minéralogie et paléontologie regroupées au sein de la F.F.A.M.P., qui sont conscientes, elles aussi, de la nécessité d'une préservation du patrimoine géologique national et qui ont déjà, dans certains cas, participé à la mise en place de mesures de protection et de gestion de sites géologiques fragiles. Les dispositions de la loi du 27 septembre 1941 validée portant réglementation des fouilles archéologiques ne concernent pas la recherche des minéraux. En revanche, elles s'appliquent aux anciennes mines qui peuvent receler des gîtes minéraux intéressant les amateurs ; c'est pourquoi les associations de minéralogistes sont tenues d'obtenir des autorisations de la part des responsables de circonscriptions archéologiques lorsqu'elles ont l'intention d'y prélever des minéraux. Ces autorisations sont destinées à garantir la préservation de la valeur archéologique de ces mines en ne permettant des prélèvements que dans les parties les moins sensibles. Dans plusieurs cas déjà, un dialogue a pu s'établir entre archéologues et minéralogistes pour aboutir à un accord global sur des règles à respecter en matière en matière de prélèvement de minéraux dans les anciennes mines.

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