Question de M. ROUX Olivier (Français établis hors de France - UC) publiée le 21/09/1989

M. Olivier Roux expose à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, que l'article 113 du code de la nationalité française prévoit des dispositions pénales à l'encontre de " toute personne " qui aura facilité, moyennant rétribution ou avantage, l'obtention de la nationalité française à un étranger en instance de naturalisation ou de réintégration. Il lui demande de bien vouloir lui faire connaître, en fonction de la position de sa Chancellerie : 1° si ces dispositions lui paraissent s'appliquer aux autres moyens d'obtention de la nationalité française tels que la déclaration ; 2° si elles s'appliquent aux avocats et aux conseils juridiques. Il attire, à cet effet, son attention sur l'article 10 du règlement du barreau de Paris qui autorise ses membres à assurer auprès des administrations publiques la défense des intérêts qui leurs sont confiés.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 16/11/1989

Réponse. - L'article 113 du code de la nationalité française interdit et réprime tout acte ou tentative d'entremise par un particulier auprès des administrations ou des pouvoirs publics en vue de faciliter à autrui l'obtention de la nationalité française par naturalisation ou réintégration. Ce texte qui incrimine un comportement doit, conformément aux principes généraux du droit pénal français, être interprété restrictivement. Aussi le délit d'entremise n'est-il constitué que dans les cas de naturalisation ou de réintégration par décret et ne doit pas être étendu aux acquisitions et réintégrations dans la nationalité française par déclaration. Le code de la nationalité française distingue au titre des actes relatifs à l'acquisition et à la perte de la nationalité française (titre V) les déclarations de nationalité et les décisions administratives. L'article 113 est inclus dans le chapitre relatif aux décisions administratives. L'exclusion de l'acquisition et de la réintégration par déclaration des procédures visées par l'article 113 du code de la nationalité française s'explique également par la différence fondamentale existant entre les deux procédures. En effet, l'acquisition de la nationalité française par décret est une faveur demandée au Gouvernement qui peut la refuser pour des raisons d'opportunité. Au contraire, l'acquisition de la nationalité française par déclaration n'est que la mie en oeuvre, par une manifestation expresse de volonté, d'un droit qui est offert à l'intéressé. L'article 113 du code de la nationalité est rédigé en termes généraux et vise " toute personne ". Ce texte ne vise donc pas précisément et directement la profession d'avocat. L'article 6 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques et dont les termes ont été repris par l'article 10 du règlement du barreau de Paris a expressément donné aux avocats la possibilité d'assister et de représenter autrui devant les administrations publiques. Ce droit est cependant assorti de la réserve des dispositions législatives ou réglementaires contraires. L'article 113 du code de la nationalité française figure au nombre de ces dispositions. Il apparaît donc qu'une démarche écrite ou verbale faite à titre onéreux en dehors de tout élément contentieux, par un avocat auprès de l'administration centrale compétente ou d'une préfecture en faveur ou pour le compte d'un étranger en instance de naturalisation ou de réintégration pourrait constituer l'entremise interdite par la loi, puisqu'il ne saurait y avoir, en cette matière, substitution par l'avocat de son client qui reste l'unique interlocuteur de l'administration. Au contraire, l'article 113 du code de la nationalité française ne fait pas obstacle à ce que l'avocat, dans le cadre des règles de sa profession, prête assistance à son client, candidat à la naturalisation, sous forme de conseils et de cons
ultation en vue de la constitution d'un dossier. L'avocat ne remplit à ce stade que son rôle traditionnel de conseil. L'avocat peut également intervenir, après la décision ministérielle de refus, dans le cadre du recours gracieux ou du recours contentieux exercé contre la décision. En effet, l'article 113 du code de la nationalité française ne vise que " l'étranger en instance de naturalisation ".

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Erratum : JO du 07/12/1989 p.2051

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