Question de Mme FRAYSSE-CAZALIS Jacqueline (Hauts-de-Seine - C) publiée le 17/01/1991

Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis constate que l'orientation décidée par la société Montupet de spéculer et d'investir à l'étranger, et, pour cela, de fermer son entreprise de fonderie implantée à Nanterre, a eu de graves conséquences économiques et sociales. Plusieurs centaines d'emplois disparus, la suppression d'une production utile au pays aggravant son déficit commercial, la diminution des recettes fiscales correspondantes, le financement du plan social, l'indemnisation du chômage, l'aide sociale, etc., ont ainsi été portés à la charge de la collectivité publique. De surcroît, cette société, qui depuis a poursuivi ses implantations à l'étranger, demande une indemnisation au prétexte du préjudice que lui aurait causé l'occupation de l'usine par ses salariés. Elle a obtenu, par un nouveau jugement du tribunal administratif rendu le 20 mars 1990, la condamnation de l'Etat et de la ville de Nanterre à payer respectivement les sommes de 30 233 316 F et 7 558 329 F, auxquelles s'ajoutent des intérêts conséquents. Elle s'indigne des prétentions de cette société, dont la stratégie a déjà coûté très cher à la collectivité publique. Elle souligne que le budget municipal ne peut supporter une telle dépense et que la ville de Nanterre a interjeté appel de cette décision. Elle demande à M. le ministre de l'intérieur de bien vouloir lui indiquer si le paiement auquel l'Etat a été condamné a été effectué et si son représentant a interjeté appel.

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Réponse du ministère : Intérieur publiée le 14/03/1991

Réponse. - Le 26 janvier 1984, la société Fonderies Montupet a obtenu des tribunaux judiciaires le prononcé de l'expulsion de tous les salariés grévistes qui occupaient ses locaux à Nanterre. Le préfet des Hauts-de-Seine, requis par l'huissier instrumentaire, a fait plusieurs tentatives d'expulsion des occupants de cette entreprise, sans pour autant exécuter complètement la décision judiciaire en raison de l'opposition des grévistes et des représentants de la commune de Nanterre. De ce fait , le tribunal administratif de Paris a condamné le 20 mars 1990 l'Etat, à raison de son refus partiel de concours de la force publique pour l'exécution d'une décision judiciaire, et la commune, à raison de ses agissements faisant obstacle à cette exécution. La juridiction administrative a fait application de la jurisprudence dégagée par le conseil d'Etat en 1938 dans son arrêt Société La Cartonnerie et Imprimerie Saint-Charles (C.E. Ass. 3 juin 1938, rec., p. 521). Aux termes decet arrêt, " le justiciable nanti d'une sentence judiciaire dûment revêtue de la formule exécutoire est en droit de compter sur l'appui de la force publique pour assurer l'exécution du titre qui lui a été ainsi délivré ; que si l'autorité administrative a le devoir d'apprécier les conditions de cette exécution et le droit de refuser le concours de la force publique tant qu'elle estime qu'il y a danger pour l'ordre et la sécurité, le préjudice qui peut résulter de ce refus ne saurait être regardé comme une charge incombant à l'intéressé que si la situation ne s'est pas prolongée au-delà du délai dont l'administration doit normalement disposer, compte tenu des circonstances de la cause, pour exercer son action ". A cet égard, le principe de la responsabilité de l'Etat n'est pas contestable. Toutefois, il a été fait appel le 23 mai 1990 devant la cour administrative d'appel de Paris du jugement du tribunal administratif afin d'obtenir la réduction de l'indemnité mise à la charge de l'Etat. Simultanément, l'Etat a exécuté le jugement du tribunal administratif de Paris puisque le recours devant la cour administrative d'appel n'a pas d'effet suspensif, en vertu des dispositions de l'article R. 125 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel. Cette exécution permet, en outre, de limiter le montant des intérêts, le cas échéant capitalisés, mis à la charge de l'Etat.

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