Question de M. VASSELLE Alain (Oise - RPR) publiée le 20/05/1993

M. Alain Vasselle attire l'attention de M. le ministre délégué aux affaires européennes sur les périlleuses démarches actuellement entreprises par la commission des communautés européennes visant à accroître les importations de produits de substitution des céréales en provenance des USA. En effet, la commission s'apprête à assouplir de sa propre autorité, sans que le conseil des ministres n'ait à se prononcer, les règles d'importation en Europe du corn gluten feed. Ce résidu subventionné de l'industrie du maïs américaine prend déjà la place de 5 millions de tonnes de céréales communautaires dans l'alimentation du bétail européen, privant les agriculteurs de débouchés à hauteur d'un million d'hectares de céréales. Si la commission devait mener à bien ses manoeuvres, elle causerait automatiquement un grave dommage aux agriculteurs et contribuerait à discréditer encore plus la CEE aux yeux de certains Européens. Aussi, il le remercie de bien vouloir lui communiquer les mesures envisagées à court terme afin de lutter efficacement contre une telle situation dans le but de permettre aux agriculteurs français et européens confrontés, aujourd'hui, à d'énormes difficultés de continuer à vivre.

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Réponse du ministère : Affaires européennes publiée le 26/08/1993

Réponse. - L'honorable sénateur a bien voulu m'interroger sur les règles d'importation en Europe du corn gluten feed et sur les mesures envisagées à court terme pour lutter efficacement contre les intentions de la commission d'accroître les importations de ce produit de substitution aux céréales en provenance des Etats-Unis. Comme le sait l'honorable sénateur, le " compromis de Blair House " convenu entre les négociateurs de la commission et l'administration américaine en novembre 1992 comportait un projet de résolution sur la question du corn gluten feed. Le corn gluten feed est un sous-produit de l'extraction de l'amidon du maïs par voie humide. Il est utilisé pour l'alimentation animale et entre dans la Communauté en franchise de droit à la suite de concessions accordées aux Etats-Unis par la Communauté en 1967. Entre temps, ce produit a vu sa composition évoluer. Les opérateurs américains ont pris l'habitude d'y incorporer divers résidus tendant à faire du produit un véritable aliment composé, ce qui ne justifie plus leur importation dans la Communauté en franchise de droit, mais devrait conduire à le soumettre à prélèvement à l'entrée dans la Communauté. L'accord de novembre 1992 confirmerait une interprétation large du corn gluten feed et mettrait un terme aux méthodes d'analyse et de contrôle employées jusqu'à présent par les douanes. Il représenterait en ce sens une concession de la Communauté aux Etats-Unis. La commission, estimant qu'il s'agissait d'un simple aménagement technique, souhaitait entériner cet accord après avis du comité de nomenclature douanière en élargissant l'étendue de la position tarifaire 2303 sans en référer au conseil des ministres. Le gouvernement français a rapidement saisi les risques d'augmentation des exportations américaines et les menaces sur l'équilibre céréalier que pourrait présenter cet accord : la reconnaissance officielle d'une définition évolutive du produit va ouvrir la voie à l'adjonction de résidus sans limitation ; cette reconnaissance " libérera " certains opérateurs jusqu'alors scrupuleux quant au respect d'une définition stricte ; le développement de la filière de production d'éthanol entraînera un flux grandissant de résidus exportables ; cet élargissement de définition profitera également à d'autres pays exportateurs (Argentine, Brésil) ; l'interdiction de la technique de l'analyse microscopique empêchera tout contrôle efficace de la composition du produit. C'est pourquoi, la France a demandé des éclaircissements à la commission et indiqué qu'en tout état de cause l'accord sur le corn gluten feed doit être précisé et complété sur plusieurs points : certification officielle par l'administration américaine de l'origine et des volumes de produits ; mise en place d'un mécanisme de suivi (monitoring) de la production et des exportations de corn gluten feed ; définition des méthodes d'analyses précises permettant de vérifier le respect des normes établies dans le cadre de l'arrangement ; maintien des prélèvements à l'importation pour les nouveaux constituants. Le gouvernement français estime que la question du corn gluten feed s'inscrit dans la problématique du rééquilibrage du marché européen des céréales et fait partie intégrante, à ce titre, du volet agricole des négociations du cycle d'Uruguay. Il estime, en tout état de cause, que l'accord négocié par la commission devra être soumis au conseil des ministres.

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