Question de M. MASSERET Jean-Pierre (Moselle - SOC) publiée le 14/04/1994

M. Jean-Pierre Masseret attire l'attention de M. le ministre des entreprises et du développement économique, chargé des petites et moyennes entreprises et du commerce et de l'artisanat, sur la situation des commerçants détaillants en jeux et jouets. Cette profession se trouve confrontée à une politique de distribution effectuée dans des conditions pour le moins déloyales de la part des grandes surfaces qui n'hésitent pas, au moment des fêtes de fin d'année, à casser le prix des jouets qu'elles vendent pour attirer les clients. C'est ainsi que certains jouets sont vendus par ces grands distributeurs à un prix 3,5 fois moins élevé que leur prix d'achat au fabricant. Cette pratique paraît totalement inacceptable et met en lumière les effets pervers de notre législation en la matière. En effet, l'article 1er de la loi no 63-628 du 2 juillet 1963, confirmé par l'article 32 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, interdit et réprime la revente à perte. Cette prohibition est d'ailleurs compatible avec le droit communautaire et s'applique aussi bien aux distributeurs français qu'étrangers. En revanche, six exceptions à ce principe de prohibition de la revente à perte sont prévues dans la loi. C'est ainsi que sont autorisées à la revente à perte, des produits périssables démodés, ce que l'on peut comprendre, mais également les produits saisonniers. C'est bien sur ce dernier fondement que se basent les grandes surfaces pour vendre, durant la période de Noël, des jouets à bas prix. Si le législateur a interdit la revente à perte, c'est bien pour protéger la liberté de la concurrence et pour éviter les distorsions que cette pratique était susceptible d'entraîner dans les rapports entre le petit commerce de détail et les grandes surfaces de vente. Il apparaît que l'une des exceptions à ce principe, visant les produits saisonniers, est fortement préjudiciable aux petits détaillants qui réalisent, dans le secteur du jouet, 50 p. 100 de leur chiffre d'affaires au moment de Noël. Par conséquent il lui demande si celui-ci envisage de prendre, dans les meilleurs délais, les mesures nécessaires afin de modifier la législation actuellement en vigueur.

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Réponse du ministère : Entreprises publiée le 12/05/1994

Réponse. - La vente à perte, c'est-à-dire la revente de tout produit en l'état à un prix inférieur à son prix d'achat effectif, est interdite en application de l'article 1er de la loi no 63-628 du 2 juillet 1963, modifié par l'article 32 de l'ordonnance no 86-1243 du 1er décembre 1986. La vente à perte est en effet incompatible avec l'établissement d'une concurrence loyale et sans avantage réel pour le consommateur, la perte supportée sur certains articles étant le plus souvent compensée par le bénéfice réalisé sur d'autres. Lorsque des cas précis sont signalés, une enquête est diligentée par les services de la concurrence et de la consommation, lesquels, le cas échéant, dressent un procès-verbal. Par ailleurs, la pratique illégale de la vente à perte constitue une concurrence illicite. Elle ouvre donc le droit pour les victimes à une action en justice à l'effet d'obtenir la cessation des agissements en cause ainsi que des dommages et intérêts. Cependant, la vente à prix coûtant qui ne serait pas une vente à perte, est une pratique promotionnelle qui n'est pas a priori illicite si elle n'est pas mensongère. Elle peut, en revanche, constituer une pratique déloyale de prix d'appel et justifier de la part des concurrents lésés une action en dommages et intérêts. La question évoquée ne constitue qu'un des aspects d'un problème plus général, celui des difficultés que connaît le commerce traditionnel face à la concurrence des grandes surfaces. Il appartient en effet aux pouvoirs publics de veiller au développement harmonieux de toutes les formes de distribution, dans le respect des principes de liberté du commerce et de l'industrie et de libre concurrence. Aussi, ce problème est-il au coeur des préoccupations du ministre des entreprises et du développement économique, qui attache la plus grande importance au maintien d'un commercce traditionnel. Au demeurant, la concurrence entre les distributeurs ne s'exerce pas exclusivement en termes de prix. Le commerce traditionnel a des atouts propres qu'il lui appartient d'utiliser, en développant une politique axée sur la qualité des produits offerts et des services rendus.

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