Question de M. TÜRK Alex (Nord - NI) publiée le 02/02/1995

M. Alex Türk attire l'attention de M. le ministre du budget sur le faible succès des rachats d'entreprises par les salariés, à un moment où cette formule pourrait apparaître comme une alternative intéresssante pour assurer les transmissions d'activités. Les difficultés des sociétés ainsi créées sont souvent dues à l'obligation d'affecter, pendant les premières années, l'essentiel des bénéfices au remboursement des prêts. Les sommes ainsi utilisées ne sont donc pas disponibles pour développer les fonds propres et satisfaire aux besoins de fonds de roulement ou d'investissement. L'exigence de la détention par les sociétés holdings de 95 p. 100 du capital des sociétés rachetées est à la fois extrêmement dissuasive et très difficile à assumer lorsque la cession est réalisée. Il en résulte une désaffection pour cette procédure qui connaît portant dans d'autres pays des succès remarqués. C'est pourquoi il lui demande que les conditions de l'intégration des bénéfices des sociétés reprises, avec les déficits des sociétés holdings créées pour leur rachat, soient sensiblement assouplies. A cette fin, le taux minimum de détention du capital de la société cible devrait être abaissé de 95 p. 100 à 51 p. 100, en l'assortissant éventuellement, alors, d'un engagement de porter cette participation à 75 p. 100 dans un délai de cinq ans.

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Transmise au ministère : Économie


Réponse du ministère : Économie publiée le 20/07/1995

Réponse. - Parce qu'elle vise à prélever sur les bénéfices de l'entreprise les moyens nécessaires à la couverture des charges financières correspondant aux emprunts contractés pour son propre rachat, la procédure de rachat d'une entreprise par ses salariés (RES) constitue une dérogation au principe énoncé par l'article 217-9 de la loi no 66-537 du 24 juillet 1966 relative aux sociétés commerciales. Ce principe vise à empêcher que les bénéfices d'une société ne soient utilisés dans l'intérêt des actionnaires plutôt que dans celui de l'entreprise. Ce n'est que dans la mesure où elle est nécessaire pour assurer une bonne transmission de l'entreprise et qu'elle profite de manière quasi-exclusive aux salariés qu'une opération de RES est acceptable au regard de l'intérêt général dont le droit des sociétés et le droit fiscal sont les garants. A ce titre, les pouvoirs publics se doivent de ne pas favoriser des opérations dans lesquelles les salariés s'endettaient excessivement au regard de la viabilité ou de la capacité bénéficiaire de l'entreprise rachetée. De même, ils ne doivent pas favoriser des opérations dans lesquelles les anciens actionnaires ou des investisseurs extérieurs conserveraient en fait ou acquerraient le contrôle de l'entreprise en confisquant à leur profit les efforts financiers consentis par les salariés. C'est pourquoi la loi de finances pour 1992 a modifié le dispositif existant en conférant exclusivement l'avantage fiscal aux salariés plutôt qu'à la société elle-même (article 83 ter du code général des impôts). Celle-ci peut néanmoins bénéficier d'une diminution de l'impôt dû au niveau du groupe par l'imputation des charges financières sur les résutats de la holding dans le cadre du mécanisme du régime de groupe. Celui-ci trouve à s'appliquer si le taux de participation de la holding dans la société cible atteint 95 p. 100. Ce taux élevé est notamment rendu nécessaire pour exclure les situations dans lesquelles des actionnaires minoritaires ont un droit sur les résultats de la société cible et se trouveraient privés de ce droit par la consolidation des résultats de celle-ci avec ceux de la holding, ce qui serait une source de contentieux juridiques. L'abaissement de ce seuil n'est donc pas envisagé, d'autant qu'une telle réforme ne pourrait être limitée aux seules opérations de RES qui ne constituent qu'un moyen parmi d'autres d'assurer la transmission d'entreprise. Le droit des sociétés et les considérations budgétaires s'opposent à un tel assouplissement dont il n'est pas établi qu'il aurait un effet globalement favorable sur les opérations de RES puisqu'il ne favoriserait pas l'appel à des capitaux extérieurs et pourrait gêner l'utilisation des bénéfices de la société reprise pour la couverture des frais financiers de la société holding.

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