Question de M. de VILLEPIN Xavier (Français établis hors de France - UC) publiée le 14/03/1996

M. Xavier de Villepin attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur les récents projets de lois américains pour limiter l'immigration. Il serait prévu aux Etats-Unis d'imposer les employeurs de travailleurs étrangers qualifiés. Il semble bien que les mesures prévues affecteraient nos compatriotes travaillant dans des sociétés américaines. Elles pourraient également s'appliquer aux enseignants des établissements à programmes français. L'idée d'une taxe sur l'emploi des travailleurs étrangers qualifiés est donc susceptible de gêner nos échanges et nos investissements. On peut se demander si ces mesures ne sont pas contraires aux conventions franco-américaines déjà signées. Il serait intéressant de connaître les réactions envisagées par notre pays à ces projets de lois sur l'immigration légale.

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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 11/04/1996

Réponse. - Deux projets de loi ont été récemment déposés devant le Sénat des Etats-Unis par le sénateur Simpson (républicain, Wyoming), portant pour le premier sur la lutte contre l'immigration illégale, et pour le second sur des restrictions à l'immigration légale. Certaines dispositions contenues dans le second texte paraissent en effet de nature à porter atteinte aux intérêts de certains de nos ressortissants établis ou souhaitant s'établir aux Etas-Unis. Ces dispositions visent à limiter l'entrée de travailleurs qualifiés aux Etats-Unis. Les entreprises souhaitant faire venir aux Etats-Unis de telles personnes seraient tenues d'acquitter un droit progressif de 5 à 10 p. 100 de la rémunération totale. Ce projet, s'il venait à être adopté, porterait en effet préjudice à nombre de nos compatriotes employés par des sociétés implantées aux Etats-Unis, ainsi qu'aux enseignants des établissements à programme français. Aussi les services compétents des administrations concernées prêtent-ils une attention particulière au sort réservé à ce texte, qui devrait être soumis à une expertise juridique approfondie : du point de vue bilatéral : il conviendrait de vérifier sa conformité avec la convention d'établissement franco-américaine de 1959 ; du point de vue multilatéral : la compatibilité de ce texte avec les règles de l'OMC resterait à démontrer. A ce stade, l'avenir de ce texte paraît cependant à tout le moins incertain, ce qui rendrait toute intervention de notre part prématurée. Le projet du sénateur Simpson a en effet suscité une vive opposition, tant de la part des milieux d'affaires que de membres du Congrès des deux partis, qui considèrent que de telles dispositions entraîneraient de graves effets pervers pour l'économie américaine. Prenant acte de ces réactions, le sénateur Simpson a d'ores et déjà proposé de retirer de son texte les dispositions concernant les restrictions de l'immigration liées à l'emploi, pour ne laisser s ubsister que certaines propositions limitant le regroupement familial. On ne peut exclure que de nouvelles propositions, plus modérées, soient déposées (interdiction à une entreprise venant de licencier un travailleur américain de le remplacer par un étranger ; raccourcissement de la durée de certains visas temporaires de travail) ; les chances de succès de telles proposition resteraient faibles, comme en témoigne l'échec systématique depuis quinze ans de plusieurs projets ayant visé à introduire une taxe à l'embauche de travailleurs étrangers. Il reste que les négociations au sein du Congrès viennent seulement de commencer, et pourraient se prolonger, compte tenu de la complexité de la matière et de la sensibilité des questions relatives à l'immigration et à l'emploi dans le contexte électoral américain. Aussi continuerons-nous de suivre avec vigilance et en liaison avec nos partenaires européens l'évolution des discussions, en nous réservant de faire les démarches appropriées auprès des autorités américaines si ces projets devaient se concrétiser.

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Erratum : JO du 25/04/1996 p.1030

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