Question de M. HAMEL Emmanuel (Rhône - RPR) publiée le 28/03/1996

M. Emmanuel Hamel signale à l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, l'information parue dans Le Figaro du 8 mars 1996 selon laquelle " certains procureurs demandent aujourd'hui l'incarcération systématique des mineurs récidivistes de plus de seize ans ". Il lui demande : 1o quel a été en 1995 le pourcentage de délits répertoriés commis par des mineurs en France et dans le département du Rhône ; 2o quelle est son appréciation sur la suggestion d'une incarcération systématique pour les mineurs récidivistes de plus de seize ans ; 3o s'il envisage dans son futur projet de loi relatif à l'enfance délinquance de prévoir cette incarcération.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 13/06/1996

Réponse. - Le garde des sceaux a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire que la lutte contre la délinquance des mineurs multirécidivistes constitue aujourd'hui un enjeu majeur du maintien de la paix publique. Le service du casier judiciaire national a enregistré en 1993, dernière année connue pour les séries statistiques, 451 857 condamnations pour des délits. Les auteurs mineurs, au nombre de 32 853, interviennent à hauteur de 6 p. 100 dans ce type de délinquance et sont poursuivis, majoritairement, pour des faits de vol (24 525 condamnations). La tranche d'âge de seize à dix-huit ans est représentée d'une manière légèrement supérieure( 53 p. 100) à celle des mineurs de moins de seize ans. Pour leur part, les juridictions répressives du département du Rhône font état de 8 487 condamnations délictuelles en 1993. La situation des mineurs est très proche de celle relevée au niveau national, dans la mesure où les 578 mineurs condamnés représentent 7 p. 100 du total des condamnés et ont été poursuivis principalement pour des faits de vol (459 condamnations soit 80 p. 100 d'entre elles). En revanche, à l'inverse de la tendance nationale, la catégorie des mineurs de seize à dix-huit ans est sur-représentée puisqu'elle regroupe les deux tiers des mineurs condamnés. Loin de faire place à une quelconque forme d'impunité, les politiques pénales mises en oeuvre par les parquets se sont d'ores et déjà traduites par une augmentation sensible de l'activité des juridictions pour mineurs. Il convient aujourd'hui d'aller au-delà des efforts accomplis, en visant notamment le renforcement de la cohésion des politiques publiques de lutte contre la délinquance juvénile, ainsi que l'accélération de la réponse judidicaire et sa diversification. C'est pourquoi, je viens de soumettre à la représentation nationale un projet de loi visant à réformer partiellement l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante. Ce texte a pour objet principal d'accélérer, chaque fois que possible, le cours de la procédure pénale, dans le strict respect des droits de la défense et des principes fondamentaux régissant le droit des mineurs délinquants. Ce projet ne contient aucune disposition prévoyant la mise en détention provisoire systématique des mineurs récidivistes de plus de seize ans. Cette faculté d'incarcération provisoire, édictée par l'article 11 de l'ordonnance du 2 février 1945, n'est envisageable en matière correctionnelle qu'à l'égard des mineurs d'au moins seize ans, et en matière criminelle à l'encontre des mineurs de plus de treize ans. Elle est réservée au juge des enfants ou au magistrat instructeur saisi de la procédure. Celui-ci apprécie au cas par cas, pour chaque affaire, s'il convient ou non d'ordonner la mise en détention provisoire du mineur mis en examen, au regard des critères précisés par l'article 144 du code de procédure pénale. Il ne peut être question, en cette matiè re, d'une quelconque systématisation, tant au niveau des réquisitions du procureur de la République que du prononcé par un magistrat de la jeunesse d'une mesure de sûreté à l'égard d'un mineur délinquant.

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