Question de M. GAILLARD Yann (Aube - RPR) publiée le 06/02/1998

M. Yann Gaillard attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie sur le statut des animateurs de la mission d'insertion de l'éducation nationale. Mise en place en 1986 pour accompagner pendant un an les jeunes en rupture scolaire et/ou sociale, la mission d'insertion doit, comme le précise un Bulletin officiel de mars 1992, leur permettre de faire le point sur leur situation hors du cadre scolaire et de choisir, avec l'aide de l'équipe éducative, la voie la plus appropriée à la concrétisation de leur démarche d'entrée dans la vie active. Les animateurs-formateurs, au nombre de 700 au total - 17 sur l'académie de Reims -, ont été embauchés sous contrats à durée déterminée renouvelables. Or, depuis près de douze ans maintenant, leur statut n'a pas évolué. Précarité, angoisse du non-renouvellement, de la suppression de budget, tel est le lot de ces contractuels spécialistes de l'insertion. En 1993, les animateurs se sont vu appliquer une grille indiciaire, signe encourageant allant dans le sens d'une amélioration de la situation, pensait-on alors, mais, depuis septembre 1997, cette grille a été supprimée. Il lui demande donc de bien vouloir examiner les revendications légitimes de ces personnels : titularisation et mise en place d'une véritable évolution de carrière. Ces mesures semblent d'ailleurs s'inscrire dans les priorités du Gouvernement : lutte contre la précarité, aide à l'émergence de nouveaux métiers et efforts en faveur de l'insertion.

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Réponse du ministère : Éducation publiée le 04/03/1998

Réponse apportée en séance publique le 03/03/1998

M. Yann Gaillard. Monsieur le ministre, voilà quelques semaines, j'ai reçu à ma permanence deux personnes que je ne
connaissais pas qui m'ont appris l'existence d'un organisme que je ne connaissais pas non plus. Elles travaillaient au CIPA,
le cycle d'insertion professionnelle par alternance du collège des Jacobins à Troyes.
Elles m'ont appris qu'elles étaient 4 animatrices-formatrices dans le département de l'Aube ; il y en a 17 dans l'académie
de Reims et 700 en France.
Tout cela compose ce qu'on appelle la mission d'insertion de l'éducation nationale, qui a été mise en place en 1986.
En principe, le rôle des animateurs est d'accompagner les jeunes en rupture scolaire ou sociale pendant un an. Le Bulletin
officiel de mars 1992 - tout le monde sait que le c'est la bible du ministère de l'éducation nationale - précise qu'ils doivent
faire le point sur la situation des jeunes dans le cadre scolaire et choisir, en liaison avec l'équipe éducative, les moyens les
plus appropriés à leur entrée dans la vie active.
Un texte un peu « jargonnesque » prévoit que les animateurs-coordinateurs, du fait de leur situation relationnelle au
carrefour de l'éducation nationale, des milieux sociaux et du monde de l'entreprise, sont prédisposés à établir une liaison
entre ces différents éléments. Ils sont donc conseillers techniques en matière d'insertion.
La réalité, hélas ! est bien moins flatteuse.
Bien que du niveau bac + 3 et même, pour certains, semble-t-il, du niveau bac + 4, voire bac + 5 - puisqu'il y a quatre
catégories dans ce personnel et une hors catégorie - ils vivent sur des contrats à durée déterminée d'un an renouvelables,
et ce depuis douze ans. Leur statut n'a pas connu la moindre évolution. Alors qu'ils bénéficiaient depuis 1993 de la
protection d'une grille indiciaire, celle-ci a été supprimée en 1997. Bref, ils n'intéressent personne.
Ils sont vaguement rattachés au syndicat général de l'éducation nationale, le SGEN, mais aucun syndicat, étant donné leur
petit nombre, n'a jugé très utile de prendre en main leur défense, qui est évidemment tout à fait classique et qui consiste à
demander leur titularisation, ainsi que la mise en place d'une carrière.
Pour tout dire, ce personnel, qui a en charge d'insérer les jeunes, voudrait bien être inséré lui-même !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Les personnels
contractuels intervenant dans la mise en oeuvre de la mission générale d'insertion de l'éducation nationale sont recrutés par
les recteurs, conformément aux dispositions exposées dans la circulaire n° 96-293 du 13 décembre 1996.
Les contrats sont conclus pour une année scolaire et sont renouvelables à la demande des intéressés, après décision
favorable du recteur, en fonction des besoins des académies et dans la limite des crédits attribués.
Les candidats sont classés par les recteurs en fonction des titres universitaires qu'ils détiennent ou de leur qualification
professionnelle antérieure en quatre catégories. L'indice de rémunération du candidat est fonction de la catégorie dans
laquelle celui-ci a été classé. L'arrêté du 29 août 1990 fixe les indices minimum, moyen et maximum par catégorie.
Les recteurs peuvent modifier le classement de catégorie des personnels contractuels justifiant de nouveaux titres
universitaires.
En application des dispositions législatives et réglementaires actuellement en vigueur, la titularisation est envisageable pour
ces agents contractuels par la voie des concours externes de recrutement de personnels enseignants, d'éducation et
d'orientation des lycées et collèges. Mais ils ne remplissent pas les conditions requises pour se présenter aux concours
internes spécifiques.
En effet, ces personnels ne sont pas recrutés en qualité de personnel enseignant ou exerçant des fonctions d'éducation
dans les établissements d'enseignement public relevant du ministre chargé de l'éducation ou en qualité d'agent non titulaire
exerçant des fonctions d'information et d'orientation dans les services d'information et d'orientation ou dans les
établissements publics relevant du ministre chargé de l'éducation.
Par ailleurs, les concours mis en place par le titre premier, notamment l'article 1er de la loi n° 96-1093 du 16 décembre
1996 relative à l'emploi dans la fonction publique et à diverses mesures d'ordre statutaire, organisés au titre du ministère
de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, sont réservés aux maîtres auxiliaires recrutés en application
du décret n° 62-379 du 3 avril 1962 et à certains agents non titulaires remplissant les conditions fixées par cette même loi.
Seuls les personnels recrutés à titre précaire, ce qui n'est pas le cas des personnels contractuels, peuvent bénéficier de ce
dispositif.
L'élargissement du champ des bénéficiaires du dispositif permettant à certains maîtres auxiliaires et agents non titulaires
relevant de l'éducation nationale d'accéder à certains corps de personnels de l'enseignement du second degré ne peut
résulter que de la modification par la voie législative des mesures de résorption de l'emploi précaire mises en place par le
titre premier de la loi du 16 décembre 1996 précitée et qui concernent l'ensemble de la fonction publique de l'Etat.
En conséquence, monsieur le sénateur, il faudrait que vous déposiez une proposition de loi permettant l'intégration de ces
personnels.
Pour ma part, je suis tout à fait conscient de leur situation. Ils sont, hélas ! un certain nombre dans l'éducation nationale à
avoir été recrutés au fil du temps, et je souhaiterais personnellement pouvoir les intégrer.
Il n'est pas impossible - ce n'est toutefois pas un engagement de ma part - qu'intervienne une mesure qui permettrait d'en
intégrer d'un coup un certain nombre. Comme vous le soulignez, cela ne constituerait pas un gros problème budgétaire
compte tenu de leur nombre, mais l'on se heurte à des dispositions législatives.
Comme vous le savez, l'éducation nationale a pour bible une réglementation qui est excessivement stricte dans certains
secteurs et qui, il faut bien le dire, est toujours plus accommodante et plus souple à l'égard de personnels enseignants que
d'autres personnels dont les statuts sont, disons... beaucoup plus exotiques.
M. Yann Gaillard. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard. Monsieur le ministre, j'avoue que, pendant la première partie de votre réponse, vous m'avez inquiété.
En effet, nous avons eu droit à une lecture de textes de références officielles, ce qui ne me paraissait pas correspondre à
votre tempérament bien connu.
Heureusement, à la fin de votre intervention, vous vous êtes un peu humanisé et vous avez bien voulu, je ne dirais pas
m'encourager à déposer une proposition de loi, mais tout au moins à me faire comprendre qu'un tel geste pourrait
rencontrer une certaine sympathie de la part de vos services.
J'ai l'impression qu'effectivement différentes strates se sont superposées. Au fil des années, ont été visés un certain
nombre de corps, de missions qui, finalement s'accumulent et parfois se contredisent. J'avais presque envie de vous
demander si cette mission d'insertion avait encore sa place dans le nouveau dispositif que vous souhaitez mettre en oeuvre
ou si vous alliez la rattacher à autre chose.
En tout état de cause, on ne peut pas laisser des personnels, qui ont surtout le tort d'être peu nombreux, dans l'incertitude
quant à leur avenir.

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