Question de M. COURTOIS Jean-Patrick (Saône-et-Loire - RPR) publiée le 12/03/1998

M. Jean-Patrick Courtois appelle l'attention de Mme le ministre de la culture et de la communication sur les difficultés que rencontrent les architectes des monuments historiques pour s'approvisionner en pierre. En Saône-et-Loire, pour la restauration des monuments historiques, les services de l'architecture puisent actuellement dans les réserves de pierre existantes mais d'ici à deux ans les stocks seront tous épuisés. Or il apparaît que les pierres ayant servi à l'édification de ces bâtiments sont de nature et d'aspect extrêmement variés, très typés, pour lesquelles il est très difficile, voire impossible, de trouver un substitut dans des carrières autres que les anciennes exploitations locales. Or toutes ces carrières sont actuellement inexploitées et leur réouverture est devenue impossible en raison de contraintes réglementaires et financières très lourdes, particulièrement inadaptées aux besoins sporadiques de la restauration. La réglementation mise en place vise certes à préserver l'environnement mais crée aujourd'hui des entraves majeures à la conservation du patrimoine et il semblerait donc opportun d'introduire dans la législation une distinction entre les exploitations intensives et les carrières à faible débit. Compte tenu du fait que ce problème n'est, aujourd'hui, pas uniquement départemental, mais bien d'ampleur nationale, il souhaiterait connaître les intentions du Gouvernement pour y remédier.

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Réponse du ministère : Culture publiée le 20/08/1998

Réponse. - Le service des monuments historiques connaît bien les difficultés rencontrées par les architectes pour obtenir la pierre qui servira aux restaurations de monuments. L'activité du laboratoire de recherche des monuments historiques dans le domaine de la pierre consiste d'ailleurs pour l'essentiel à analyser, à la demande, des matériaux pour en déterminer les caractéristiques, en identifier l'origine ou la provenance, indiquer où on peut se les procurer et, dans le cas où cela n'est plus possible parce qu'il n'y a plus de carrière en exploitation pour ce type de matériau, en proposer un substitut. Il y a des cas cependant où il n'y a aucun substitut. Le problème vient de ce que nombre de carrières d'où proviennent les pierres qui ont servi à construire des monuments historiques sont en sommeil. Il faudrait les rouvrir lorsqu'il y a un chantier de restauration, mais il s'agirait là d'une exploitation ponctuelle, limitée à la durée du chantier et pour de faibles volumes. Or la réouverture de carrières dont l'exploitation a été abandonnée pour en extraire un petit volume de pierre de taille est devenue très difficile. En effet, la loi du 4 janvier 1993, en transférant le régime des carrières du code minier à la législation sur les installations classées, a eu pour conséquence de supprimer le caractère dérogatoire des demandes d'ouverture ou de renouvellement pour les carrières de faible débit. Toutes les carrières d'extraction de pierre de taille, sans exception, sont désormais soumises à autorisation préalable. La législation actuelle ne fait plus de différence entre les carrières de concassé à grand débit et les carrières de taille à petit débit. Dans un souci de protection de la nature et de l'environnement, le régime des carrières a été alourdi de mesures de protection (études d'impact, enquête publique, obligation de constituer des garanties financières destinées à assurer la remise en état du site après exploitation...) dont la lourdeur est dissuasive pour nombre d'entreprises actives en restauration de monuments, qui sont souvent de taille petite ou moyenne ou pour lesquelles cette activité ne représente qu'un volume d'affaires relativement marginal si elles sont de taille importante. Nous sommes donc en présence d'un problème réel qui peut conduire, à terme, au non-renouvellement de toutes les carrières utilisées par les entreprises restaurant des monuments historiques, dont le nombre a déjà beaucoup diminué ces dernières années. La loi actuelle ne tient compte ni des nécessités économiques d'exploitation des carrières à faible débit, ni des nécessités de la restauration, ni même des nécessités scientifiques (l'obsession de remise en état des sites aboutit à ce que les géologues ont toutes les peines du monde à trouver un front de taille ancien sur lequel ils puissent montrer à leurs élèves les différences roches correspondant aux couches géologiques). La solution passerait sans doute par une modification de la loi du 4 janvier 1993 afin d'autoriser certaines dérogations lorsque les matérieux extraits sont utilisés pour la restauration de monuments historiques. Mais les directives européennes interdisant toute référence à l'origine d'un matériau et les réticences à recourir aux marchés négociés ne facilitent pas la prise en compte des mesures spécifiques réclamées par les architectes et les entreprises du secteur de la restauration des monuments historiques.

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