Question de M. RICHERT Philippe (Bas-Rhin - UC) publiée le 28/05/1998

M. Philippe Richert attire l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur le dispositif de prime à l'embauche d'apprentis dans le secteur public prévu dans la loi no 97-940 du 16 octobre 1997 relative au développement d'activités pour l'emploi des jeunes. L'article 13 de cette loi prévoit le bénéfice d'une prime de 6 000 francs pour toute signature de contrat entre une collectivité et un apprenti à compter du 1er octobre 1997. Or, la plupart des établissements scolaires d'apprentissage démarrent leur scolarité dans le courant du mois de septembre et les contrats d'apprentissage se signent également durant ce mois. Nombreuses ont donc été les collectivités locales ne pouvant bénéficier de cette prime à l'embauche d'apprenti du fait de cette question de date juridique. Les dispositions de ce texte, censées favoriser l'embauche d'apprentis, produisent donc des effets contraires à ceux de l'esprit de la loi. Interrogé au cours des débats portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, le ministre de l'économie et des finances a reconnu l'intérêt de la question sans vouloir prendre d'engagements. Aussi, il voudrait connaître sa position sur ce point et savoir ce qu'elle envisage concrètement de mettre en place pour rectifier cette " anomalie " juridique.

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Réponse du ministère : Formation professionnelle publiée le 21/10/1998

Réponse apportée en séance publique le 20/10/1998

M. le président. La parole est à M. Richert, auteur de la question n° 296, adressée à Mme le ministre de l'emploi et de
la solidarité.
M. Philippe Richert. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, par cette question
déposée en mai 1998 - je précise la date car, malheureusement, un délai important s'est écoulé depuis - je souhaite
réitérer une interrogation que j'avais déjà adressée au Gouvernement lors de la discussion du dernier projet de loi
portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, ou DDOEF.
Cette question concerne le dispositif de prime à l'embauche d'apprentis dans le secteur public, prévu par la loi n° 97-940
du 16 octobre 1997 relative au développement d'activités pour l'emploi des jeunes : l'article 13 de cette loi prévoit l'octroi
d'une prime de 6 000 francs pour toute signature de contrat entre une collectivité et un apprenti à compter du 1er
octobre 1997. Or, nous le savons, la scolarité, dans la plupart des établissements scolaires d'apprentissage, démarre
dans le courant du mois de septembre, et il est donc nécessaire que les contrats d'apprentissage soient signés durant
ce même mois.
Nombreuses sont donc les collectivités qui n'ont pas pu ou qui ne peuvent pas bénéficier de cette prime à l'embauche
d'apprentis du fait de cette question juridique de date. Les dispositions de ce texte censé favoriser l'embauche
d'apprentis produisent donc des effets contraires à ceux que prévoyait la loi. En tout cas, certaines communes qui
auraient pu bénéficier de cette aide en ont été privées.
Interrogé au cours de la discussion du DDOEF, M. le ministre de l'économie et des finances a reconnu, à l'époque,
l'intérêt de la question, mais il n'a pas voulu prendre d'engagement en séance.
Aussi, je voudrais savoir si Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité envisage de rectifier cette anomalie juridique.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat à la formation professionnelle. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur la
possibilité d'étendre aux contrats d'apprentissage conclus en septembre 1997 dans le secteur public non industriel et
commercial l'aide forfaitaire à l'embauche introduite, vous l'avez rappelé, par l'article 13 de la loi du 16 octobre 1997
relative au développement d'activités pour l'emploi des jeunes. Cette prime, d'un montant de 6 000 francs, est versée
pour les seuls contrats conclus à compter du 1er octobre 1997.
Il est vrai que les cycles de formation en matière d'apprentissage débutent, en règle générale, en septembre. Dès lors,
la date du 1er octobre 1997 paraît peu pertinente, puisqu'elle écarte du bénéfice de l'aide les collectivités territoriales et
les établissements publics ayant accueilli des apprentis avant cette date.
D'après les informations qui m'ont été communiquées, ces dispositions résultent d'un amendement déposé, au nom de
la commission des affaires sociales du Sénat, par M. Souvet lors de la discussion du projet de loi relatif au
développement d'activités pour l'emploi des jeunes. Le Gouvernement a accepté le dispositif sans y apporter de
modification et il comportait bien la date du 1er octobre pour l'octroi de ces aides, qui sont le pendant des aides
forfaitaires à l'embauche d'apprentis qui prévalent dans le secteur privé.
Dans un second temps, m'a-t-on indiqué - je reste prudente - vous vous étiez rangé à l'avis du rapporteur lors du débat
sur le projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier en retirant votre propre amendement,
dont l'objet était de fixer au 1er octobre 1997 la prise d'effet de la prime à l'embauche des apprentis dans le secteur
public.
A cette occasion, M. Lambert, rapporteur général, avait fait valoir qu'une modification législative n'aurait que peu de
conséquences pratiques sur les contrats déjà signés, point qui avait été réaffirmé par le secrétaire d'Etat au budget.
J'ajoute que, à la fin septembre 1998, soit douze mois après l'entrée en vigueur de cette mesure, 3,4 millions de francs,
correspondant à 567 contrats d'apprentissage, ont été versés sous forme de primes à l'embauche.
Il convient donc de relativiser la portée de cette disposition dont sont exclus les contrats d'apprentissage conclus par
l'Etat, administrations centrales et services déconcentrés, en application du principe selon lequel l'Etat ne peut se
verser à lui-même des subventions.
Au-delà de la question précise que vous posez, je souhaite vous donner quelques brèves informations sur la politique
gouvernementale en matière d'apprentissage.
Le développement des formations en alternance dans le secteur privé constitue l'une des priorités du Gouvernement. A
cet effet, le projet de budget de la formation professionnelle pour 1999 est bâti sur la base de 130 000 contrats de
qualification et de 230 000 contrats d'apprentissage, pour des montants d'intervention respectifs de 2,95 milliards de
francs, d'une part, et de 9,5 milliards de francs, d'autre part.
Cet effort témoigne de l'importance que j'accorde aux formations en alternance, qui constituent un dispositif efficace
d'insertion des jeunes dans l'emploi.
Il n'est, pour s'en convaincre, que de mentionner les résultats d'une étude récente de la Direction de l'animation, de la
recherche, des études et des statistiques, la DARES, qui indique qu'au terme de leur contrat 61 % des jeunes
obtiennent un diplôme ou une certification de leur formation et 66 % occupent un emploi.
Je reviens, en terminant, sur la question bien précise que vous m'avez posée pour vous dire que je me suis reportée,
hier soir, au compte rendu de l'ensemble des deux débats que j'ai évoqués.
En relisant les interventions des uns et des autres dans le Journal officiel, j'avoue très franchement n'avoir pas trouvé
d'explication au retrait de l'amendement qui tendait à maintenir la date du 1er octobre 1997.
Si donc vous pouviez me donner un élément qui m'a échappé, qui n'apparaît ni dans le Journal officiel ni dans la
mémoire de l'administration, que j'ai également interrogée, sans doute serai-je en mesure ultérieurement de vous
apporter une réponse plus précise.
M. Philippe Richert. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Richert.
M. Philippe Richert. Madame le secrétaire d'Etat, ce n'est, bien évidemment, pas moi qui vais vous contredire lorsque
vous affirmez l'importance de la formation par alternance. Vous le savez, je viens d'Alsace, où un système de formation
par alternance fonctionne relativement bien depuis longtemps.
Ce système a d'ailleurs parfois été combattu par l'éducation nationale, qui prétendait que c'était une formation
secondaire qu'il fallait essayer de limiter, voire de diminuer. Aujourd'hui - je m'en félicite - il démontre son efficacité, et je
suis très heureux que le Gouvernement consente des efforts importants pour le faire progresser.
La question que j'ai posée, et sur laquelle j'avais déjà eu l'occasion d'attirer l'attention du Gouvernement, est très
simple.
Le texte présenté par notre collègue était, en fait, la reprise d'une disposition de la loi du 17 juillet 1992 qui avait offert, à
titre expérimental, la possibilité pour le secteur public d'embaucher des apprentis. Cette mesure a été reprise ensuite,
le 27 juillet 1993, dans le cadre du développement de l'apprentissage, où elle a été limitée dans le temps jusqu'au 31
décembre 1995, avant d'être prorogée ultérieurement à deux reprises pour six mois. Elle prenait donc fin le 31
décembre 1996.
Enfin, lors de la discussion de la loi du 16 octobre 1997 sur les emplois-jeunes, nous avons réintroduit cette disposition
afin que les communes, notamment, puissent continuer à en bénéficier.
Vous l'avez dit, madame le secrétaire d'Etat, les sommes en jeu restent, pour l'ensemble du pays, relativement
modestes puisqu'une commune qui embauche un jeune avec un contrat d'apprentissage touche 6 000 francs.
Le choix de la date du 1er octobre était toutefois surprenant puisque, à cette date, les élèves sont déjà en contrat
d'apprentissage, soit dans les écoles pour suivre la formation théorique, soit dans les communes pour acquérir la
formation pratique.
Sans doute n'avons-nous donc pas été assez vigilants, les uns et les autres, lors du vote du texte initial. Les
communes concernées se sont en tout cas demandé si le Gouvernement et le Parlement ne se moquaient pas d'elles
puisque choisir le 1er octobre revenait à rendre la mesure inapplicable.
Saisi de façon très concrète par des maires, je suis donc revenu à la charge, et j'ai déposé un amendement visant à
modifier cette date. M. le rapporteur, vous l'avez rappelé, a fait valoir que se posait un problème de rétroactivité de la loi.
J'ai donc demandé au ministre, lui-même convaincu de la réalité du problème, s'il était possible de remédier à cette
situation.
Sans nouvelles depuis, j'ai décidé de déposer, en mai dernier, cette question, qui, malheureusement, compte tenu des
délais, ne vient en discussion qu'aujourd'hui. Je le regrette vivement.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Philippe Richert. Il en ressort que, les uns et les autres, nous ne pensons pas toujours suffisamment, lorsque
nous votons les lois, aux cas concrets qui se poseront lorsque nous devrons les appliquer.

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