Question de M. CHARASSE Michel (Puy-de-Dôme - SOC) publiée le 07/05/1998

M. Michel Charasse signale à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, que, selon des informations parues dans la presse, aucune information n'aurait été ouverte par le parquet local à l'encontre des délits commis récemment, dans la région de Morlaix, par des groupes de producteurs de légumes, délits concernant notamment la destruction de biens publics et le barrage de voies publiques ouvertes à la circulation. Il lui demande donc de bien vouloir lui faire connaître en vertu de quelle loi le parquet a pu s'abstenir d'engager des poursuites à l'encontre de ceux qui ont commis ces délits, qui sont notoires et attestés par la clameur publique. Dans l'hypothèse où il ne s'agirait que de l'appréciation d'opportunité des poursuites qui relève des procureurs de la République, il lui demande de bien vouloir lui faire connaître quelles instructions de portée générale elle envisage d'adresser aux parquets afin que les actes analogues mais commis par des personnes seules ou par des groupes autres que ceux formés par des agriculteurs soient désormais traités avec la même mansuétude. Car, s'il devait en aller autrement, il serait donc évident qu'on a le droit de tout casser et d'interrompre la circulation quand on est agriculteur et en groupe mais que cette liberté de nuire à la collectivité et à autrui est refusée, malgré le principe républicain d'égalité devant la loi, à ceux qui agissent seuls ou en bandes de non-agriculteurs.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 22/10/1998

Réponse. - Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la nécessité d'apporter une réponse judiciaire rapide et adaptée aux actes de dégradations et de violences générateurs de troubles graves à l'ordre public figure parmi les priorités d'action des procureurs de la République. A cette fin, des instructions générales de politique pénale relatives à la poursuite des actes délictueux dirigés contre les produits agricoles importés ont été adressées les 4 août 1997 et 25 mars 1998 aux procureurs généraux et procureurs de la République. Il appartient à chaque procureur de la République concerné de mettre en uvre au plan local ces orientations de politique pénale définies au plan national. En ce qui concerne les incidents survenus dans la région de Morlaix lors des manifestations de légumiers bretons en avril 1998, chacune des plaintes déposées et chacun des faits signalés à l'autorité judiciaire susceptibles de recevoir une qualification pénale ont été immédiatement confiés pour enquête aux services de police et de gendarmerie, sous l'autorité du procureur de la République de Morlaix. Il convient de souligner que les procédures relatives aux faits les plus graves ont toutes donné lieu à la saisine du service régional de police judiciaire de Rennes. Les investigations étant toujours en cours, il n'est pas possible de révéler le détail des éléments recueillis. Par ailleurs, force est de constater que le tribunal correctionnel de Morlaix a déjà été saisi par le passé de faits similaires, et que cette juridiction a condamné, le 19 juin 1997, 39 légumiers pour des infractions commises à l'occasion d'une manifestation de décembre 1995, et trois producteurs de légumes le 5 février 1998 du chef de dégradations de mobiliers urbains. Par arrêt du 8 juin 1998, la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Rennes a confirmé les condamnations prononcées par le tribunal correctionnel de Morlaix le 19 juin 1997. Il ne saurait donc être soutenu qu'aucune suite judiciaire n'a été réservée aux agissements violents survenus entre le 3 et le 17 avril 1998 dans le ressort du tribunal de grande instance de Morlaix, et que l'autorité judiciaire n'apporte pas de réponse aux agissements répréhensibles commis lors de manifestations violentes d'agriculteurs.

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