Question de M. FOURNIER Bernard (Loire - RPR) publiée le 10/12/1998

M. Bernard Fournier demande à M. le ministre délégué aux affaires européennes de bien vouloir lui préciser quelles sont les conditions d'application du décret nº 98-79 du 11 février 1998 au regard de la directive 92/25/CEE du 31 mars 1992. La directive CEE a proposé un cadre général pour l'activité de distribution en gros des médicaments à usage humain. Le décret ayant transposé ce texte en droit interne semble beaucoup plus restrictif dans la détermination des activités et conduit à de sérieuses difficultés d'importations parallèles de produits pharmaceutiques par un établissement autorisé et indépendant des fabricants. Dès lors que l'identité des spécialités à importer est établie, le bénéfice de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) délivré au fabricant ou à son représentant devrait être accordé à l'importateur : il semble que la pratique soit quelque peu différente et que la Commission européenne puisse être amenée à se prononcer sur les restrictions apportées par la France à l'application de cette directive. Les articles 30 et 36 du traité de Rome instituaient la libre circulation des marchandises entre les Etats membres. S'agissant des médicaments, ces articles s'appliquent. Les écarts de prix au sein de l'Union pour un même produit variant de 20 à 50 %, les importations parallèles permettent de se procurer des médicaments à coût moindre, c'est-à-dire d'influer de manière considérable sur les dépenses de santé. Les économies ainsi réalisées pourraient être substantielles, de l'ordre de 6 % des dépenses de santé. Des entreprises créatrices d'emploi se voient actuellement mises en danger par le blocage des autorités françaises à appliquer un texte européen, tandis que la jurisprudence, tant du Conseil d'Etat que de la Cour de justice des Communautés européennes, est rigoureuse quant à l'applicabilité d'une directive par les Etats membres. Aussi, il le remercie de bien vouloir lui indiquer, d'une part, sur quels arguments le Gouvernement s'est fondé pour interpréter la directive 92/25 et ne pas en réaliser la transposition intégrale et, d'autre part, si la France sera amenée à effectuer une nouvelle lecture de ce texte afin de l'appliquer plus exactement et de permettre ainsi indirectement la baisse des dépenses de santé.

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Réponse du ministère : Droits des femmes publiée le 10/02/1999

Réponse apportée en séance publique le 09/02/1999

M. Bernard Fournier. Ma question est relative aux importations parallèles de médicaments.
La directive européenne n° 92/25 du 31 mars 1992 a défini un cadre général dans lequel doit s'exercer l'activité de
distribution en gros des médicaments à usage humain.
Le décret n° 98-79 du 11 février 1998 effectuant la transposition de ce texte en droit interne semble beaucoup plus
restrictif dans la détermination des activités visées et, par conséquent, conduit à de sérieuses difficultés d'importations
parallèles de produits pharmaceutiques par un établissement autorisé et indépendant des fabricants.
Dès lors que l'identité des spécialités à importer est établie, le bénéfice de l'autorisation de mise sur le marché, l'AMM,
délivrée au fabricant ou à son représentant devrait être accordé à l'importateur ; or il semble que la pratique française
soit quelque peu différente et que la Commission européenne puisse être amenée à se prononcer, dans les mois qui
viennent, sur les restrictions apportées par la France à l'application de cette directive.
Les articles 30 et 36 du traité de Rome instituaient la libre circulation des marchandises entre les Etats membres. Ces
articles trouvent notamment leur application s'agissant du commerce des médicaments.
Les écarts de prix au sein de l'Union, pour un même produit, varient parfois dans une proportion allant de 20 % à 50 %.
Les importations parallèles permettent donc, tout à fait légalement, de se procurer des médicaments à moindre coût,
c'est-à-dire, finalement, d'influer de manière considérable sur les dépenses de santé. Les économies potentielles sont
importantes : de l'ordre de 6 % des dépenses de santé selon certaines sources.
Des entreprises créatrices d'emplois se voient actuellement mises en danger par le blocage qu'opposent les autorités
françaises à l'application d'un texte européen, tandis que la jurisprudence, tant du Conseil d'Etat que de la Cour de
justice des Communautés européennes, est claire et rigoureuse quant à l'applicabilité d'une directive par les Etats
membres.
Je vous remercie donc, madame le secrétaire d'Etat, de bien vouloir m'indiquer quels motifs ont fondé le Gouvernement
à interpréter de la sorte la directive 92/25 et, ainsi, à ne pas en réaliser la transposition intégrale.
Vous m'indiquerez peut-être également si la France sera amenée à effectuer une nouvelle lecture de ce texte afin de
l'appliquer plus exactement et de permettre ainsi indirectement la baisse des dépenses de santé.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle. Monsieur le sénateur, le
décret du 11 février 1998 détermine les modalités selon lequelles les établissements pharmaceutiques peuvent
bénéficier d'une autorisation d'ouverture ainsi que les obligations qui leur incombent. Ce texte transpose plusieurs
directives, notamment la directive du 31 mars 1992 relative à la distribution en gros de médicaments. Ni cette directive
ni le décret du 11 février 1998 n'ont pour objet de fixer les modalités selon lesquelles les médicaments peuvent être
importés en France.
Ces modalités sont déterminées par l'article 17 de la loi du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines
restrictions de circulation, selon lequel l'importation de médicaments est subordonnée à l'obtention d'une autorisation
délivrée par l'Agence du médicament, l'autorisation de mise sur le marché délivrée par cette même agence valant
autorisation d'importation. Ces dispositions sont prises en application de l'article 36 du traité de Rome, qui permet aux
Etats membres d'imposer des restrictions aux échanges intracommunautaires justifiées par des raisons tenant,
notamment, à la protection de la santé.
Concernant l'importation dite « parallèle », c'est-à-dire l'importation dans un Etat membre de médicaments pourvus
d'une autorisation de mise sur le marché dans un autre Etat membre et similaires à des médicaments bénéficiant d'une
autorisation de mise sur le marché dans l'Etat d'importation, je vous rappelle que la jurisprudence de la Cour de justice
des Communautés européennes nous indique que l'importation de ces médicaments doit être accordée lorsque sont
remplies deux conditions.
Tout d'abord, l'importateur doit fournir un dossier permettant d'établir que les spécialités à importer sont bien similaires
aux spécialités ayant obtenu l'autorisation de mise sur le marché dans l'Etat d'importation.
Ensuite, les spécialités à importer et les spécialités ayant obtenu une autorisation de mise sur le marché dans l'Etat
d'importation doivent être fabriquées par des entreprises ayant un lien juridique de nature à garantir qu'elles ont une
origine communautaire.
En ce qui concerne les importations parallèles, un projet de décret est en cours d'élaboration ; il sera soumis à
concertation. C'est sur la base de ce décret que les autorisations d'importations parallèles pourront être délivrées.
M. Bernard Fournier. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Fournier.
M. Bernard Fournier. Madame le secrétaire d'Etat, sans être totalement convaincu par les arguments que vous avez
développés, je vous remercie de la précision de la réponse que vous avez bien voulu m'apporter.

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