Question de M. BEL Jean-Pierre (Ariège - SOC) publiée le 21/01/2000

Question posée en séance publique le 20/01/2000

M. le président. La parole est à M. Bel.
M. Jean-Pierre Bel. Monsieur le Premier ministre, grâce aux mesures courageuses et volontaristes mises en oeuvre
par votre gouvernement (M. Gournac s'exclame.), nombre d'indicateurs économiques sont au vert, et la confiance
semble revenue.
Aujourd'hui, même si rien n'est acquis, les experts les plus sérieux commencent à imaginer le retour au plein emploi
dans les dix ans qui viennent.
Pourtant, un vrai paradoxe nous guette : d'un côté, un solde positif pour l'emploi et, de l'autre, des pans entiers du
territoire, qui, parce qu'ils sont structurés autour d'activités dites traditionnelles, seraient vidés de leur population jusqu'à
rester exsangues. A cet égard, je pense bien sûr à l'industrie textile, qui a perdu en dix ans près de 50 % de ses
effectifs. L'exemple de la fermeture définitive de la Lainière de Roubaix est encore dans les esprits ; mais, tous les
mois, ce sont 3 000 emplois liés au secteur du textile qui disparaissent.
Nous ne pouvons rester passifs face à ce séisme présent et annoncé parce que les conséquences, en particulier
humaines, sont trop énormes, parce qu'il est indéniable que le secteur du textile a fait des efforts d'adaptation et
d'innovation, parce que ce secteur est riche du savoir-faire des femmes et des hommes de ce pays, riche de leur
créativité.
Alors que viennent de se dérouler les discussions sur l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC, à Seattle, les
inquiétudes sont vives de voir ce secteur abandonné, bradé sur l'autel de la libéralisation des échanges.
Je souhaiterais savoir, monsieur le secrétaire d'Etat à l'industrie, quelles sont les directives prises par le Gouvernement
pour que le secteur du textile ne serve pas de monnaie d'échange dans les négociations de l'OMC ou dans d'autres
conférences internationales.
Par ailleurs, les élus et les acteurs des territoires liés au secteur du textile veulent croire qu'il reste des solutions à
promouvoir pour peu que leurs initiatives soient accompagnées par l'Etat et l'Union européenne.
Pourriez-vous nous indiquer, monsieur le secrétaire d'Etat, si le Gouvernement est prêt à réfléchir avec l'ensemble des
partenaires, aux grands axes d'un plan textile européen ? Oui, monsieur le secrétaire d'Etat, notre pays va mieux ; mais
il demeure des sujets d'inquiétude qui exigent que l'on ne laisse personne sur le bord du chemin : il reste encore 500
000 salariés dans le secteur du textile, et les salariés licenciés de plus de cinquante ans ne bénéficient pas, à ce jour,
d'un véritable plan social. Monsieur le secrétaire d'Etat, ils attendent, et nous avec eux, dans vos réponses, de
nouvelles raisons de croire en leur avenir. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. François Gerbaud. Très bonne question !

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Réponse du ministère : Industrie publiée le 21/01/2000

Réponse apportée en séance publique le 20/01/2000

M. le président. Voilà effectivement une très bonne question, à laquelle je m'associe bien évidemment.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le sénateur, il existe en effet un contraste entre, d'une
part, la situation globale du secteur industriel français qui, pour la première fois depuis quinze ans, a créé, en 1998 et
en 1999, 50 000 postes de travail supplémentaires, et, d'autre part, la situation d'un secteur du textile qui, en 1999, a
perdu 7 % de ses effectifs, soit environ 20 000 emplois.
Les facteurs structurels à l'origine de cette difficulté sont bien connus, à savoir la libéralisation mondiale du commerce,
la baisse des prix, la guerre des prix, ainsi que les surcapacités mondiales.
Devant cette situation, nous ne sommes pas passifs, bien au contraire : nous agissons en effet à trois niveaux.
Notre intervention se situe d'abord au niveau international. La conférence de Seattle, si elle n'a pas abouti, a néanmoins
permis de démontrer que nous refusions les concessions unilatérales qui se feraient au détriment de pans entiers de
l'industrie européenne, comme le secteur du textile et de l'habillement. Cette position dure a été saluée par les
professionnels comme un acquis pour eux.
Ensuite, nous entendons appliquer l'ATV, l'accord sur le textile et les vêtements, qui prévoit que ce secteur ne connaîtra
pas d'accélération de son démantèlement, pas de nouveau démantèlement de quotas, qui prévoit également l'ouverture
des marchés émergents et une lutte déterminée, à laquelle la France s'emploie au sein de l'Union européenne, contre
les pics tarifaires.
Par ailleurs, notre intervention se situe au niveau industriel.
Les plans sectoriels ne peuvent pas être mis en oeuvre par un membre de l'Union européenne. En revanche, une action
européenne est possible par l'innovation, avec le programme de recherche-développement au niveau européen, par le
fonds de développement des PMI, en France, et l'investissement, par la formation, avec le fonds social européen, et par
l'aide aux territoires les plus fragiles, avec le zonage du type fonds européen de développement régional, objectif 2.
Enfin, le troisième niveau d'intervention est la baisse des charges sociales sur les industries de main-d'oeuvre, dont le
secteur du textile et de l'habillement doit profiter au premier chef. Le secteur du textile peut, par ailleurs, bénéficier des
dispositions générales qui s'appliquent à l'ensemble de l'économie, du type de celles que le secteur de l'automobile
vient de mettre en oeuvre pour les travaux pénibles et pour les personnes qui ont commencé à travailler très tôt, et d'un
ensemble de dispositions sociales favorables à l'emploi.
Le Gouvernement croit au développement du secteur du textile. Il se bat par une politique coordonnée dans ce domaine
; il se bat avec les pays européens en faveur d'une vraie politique européenne du textile. (Applaudissements sur les
travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du groupe communiste républicain et citoyen.)

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