Question de M. de MONTESQUIOU Aymeri (Gers - RDSE) publiée le 01/11/2000

M. Aymeri de Montesquiou interroge Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur le lien entre l'octroi de bourses étudiantes et le niveau du revenu minimum d'insertion des parents. La loi nº 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au RMI prévoit dans son article 9 que " l'ensemble des ressources des personnes retenues pour la détermination du montant du revenu minimum d'insertion est pris en compte pour le calcul de l'allocation ". En conséquence, les parents RMIstes d'étudiants méritants voient leur allocation amputée d'une partie du montant des bourses. En cette rentrée universitaire, il lui demande si elle entend mettre fin à cette situation injuste envers les familles en situation de précarité. Il lui demande également les moyens qu'elle entend mettre en oeuvre pour remédier à cette injustice.

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Réponse du ministère : Santé publiée le 20/12/2000

Réponse apportée en séance publique le 19/12/2000

M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers
collègues, les raisons du blocage de la société française sont multiples : notons, entre
autres, la reproduction des élites, la cooptation.
En fait, le renouvellement des élites devrait passer par l'accès de nouvelles catégories
sociales aux meilleures formations.
Les classes préparatoires, l'université sont-elles ouvertes à tous ? En théorie peut-être. Mais
il est évident que les étudiants de familles modestes ne disposent souvent pas de l'aide
matérielle suffisante pour étudier dans les meilleures conditions.
Il n'est pas acceptable que les familles en situation de précarité soient écartées de ce droit à
la formation de qualité. Or, dans la loi du 1er décembre 1988 créant le revenu minimum
d'insertion, les bourses d'étudiant sont considérées comme un revenu supplémentaire.
Les caisses d'allocations familiales prélèvent donc sur le RMI des parents le remboursement
partiel de la bourse d'étudiant !
Alors que les bourses de l'enseignement primaire et secondaire ne sont pas comptabilisées
dans le montant du calcul des revenus des parents percevant le RMI, on ne voit pas ce qui
peut justifier que ne soient pas exclues non plus les bourses de l'enseignement supérieur.
Comment accepter que les familles Rmistes subissent une telle injustice, alors que leurs
enfants sont d'autant plus méritants ?
M. Pierre Laffitte. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés. Monsieur le
sénateur, le renouvellement des élites doit effectivement toucher toutes les couches de notre
société et nous devons, bien entendu, permettre aux moins favorisés d'accéder au parcours
d'excellence.
Nous le savons, les plus démunies sont très demandeuses de la promotion sociale qu'offre
l'école ; elle ont foi dans la perspective d'émancipation sociale que donnent les diplômes.
La situation sur laquelle vous attirez mon attention est humainement inacceptable. Il s'agit de
personnes allocataires du RMI dont un enfant étudiant - qui a donc satisfait au parcours
d'excellence que j'évoquais - bénéficie d'une bourse d'enseignement supérieur.
Du fait de cette bourse, la famille voit le montant du RMI qui lui est versé réduit, généralement
de près de 8 000 francs par mois, ce qui, sur un tel revenu, constitue une réduction très
importante.
En effet, selon la réglementation en vigueur les bourses versées aux élèves des collèges et
lycées n'entrent pas dans le calcul des ressources de la famille, autrement dit elles sont
cumulables sans limite avec le RMI, alors que les bourses d'enseignement supérieur ne
bénéficient pas des mêmes dispositions, leur montant étant pris en considération dans les
ressources de la famille.
On peut s'interroger sur la justification d'une telle différence de traitement et vous avez raison
de dire que cette disposition réglementaire va à l'encontre des mesures de justice sociale que
nous préconisons par ailleurs.
L'attribution d'une bourse d'enseignement supérieure à un étudiant réduit les ressources de sa
famille lorsque celle-ci est bénéficiare du RMI alors qu'elle constitue un apport financier net
lorsque sa famille tire ses revenus d'une activité professionnelle.
De plus, nous savons que les enfants d'allocataires du RMI sont statistiquement beaucoup
moins nombreux que les autres à poursuivre des études supérieures. Il convient naturellement
d'encourager et de faciliter leur accès à ces études, non de les pénaliser.
Le Gouvernement ne saurait donc accepter que cette situation perdure. Dans cette
perspective, j'ai demandé à mes services de revoir la réglementation afin que les bourses
d'enseignement supérieur, comme les autres bourses de l'éducation nationale, ne soient plus
prises en compte pour le calcul du RMI. Ainsi, dès le mois prochain, les enfants des familles
les plus modestes qui accèdent à l'université pourront percevoir une bourse sans que le RMI
versé à leur famille soit réduit. Je puis vous assuer que j'y veillerai personnellement.
M. Aymeri de Montesquiou. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Je vous remercie de votre réponse, madame le secrétaire
d'Etat. Nous constats sont absolument identiques. Il faut en effet souligner que, dans le
milieu défavorisé des RMIstes, il est extraordinaire que des enfants accèdent aux études
supérieures. Il est évident que c'est une injustice flagrante.
Me plaçant d'un point de vue strictement comptable, j'ajouterai que les enfants concernés
étant très peu nombreux, l'incidence budgétaire de la mesure sera dérisoire.
En tout cas, s'agissant d'un problème de justice sociale indéniable, je suis très heureux de la
convergence de notre analyse, madame le secrétaire d'Etat, et je vous remercie de la
décision que vous avez prise.

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