Question de Mme LUC Hélène (Val-de-Marne - CRC) publiée le 19/12/2000

Mme Hélène Luc attire l'attention de Mme le secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés sur le remboursement des frais occasionnés par la photothérapie dynamique. La dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA) touche actuellement un million de personnes, sur les dix millions de Français âgés de plus de soixante-cinq ans. Cette pathologie dégénérescente du centre de la rétine - la macula - menace la vision. Toujours invalidante, elle pèse lourdement sur les actes de la vie quotidienne et peut aboutir à la cécité. Dans sa forme dite " humide ", l'évolution de la DMLA est rapide. Une technique très récente - la photothérapie dynamique - mise sur le marché depuis le 1er septembre 2000 et validée par le ministère de la santé permet de stabiliser l'évolution du mal. Cette technique utilise une molécule chimique, la Visudyne, photo-sensibilisant qui se fixe sur les néo-vaisseaux. En irradiant le fond de l' il par une lumière laser, on provoque une réaction chimique qui détruit les néo-vaisseaux sans détruire la rétine. Ce traitement doit être renouvelé au moins deux ou trois fois. Mais la Visudyne coûte cher (9 300 francs l'ampoule) et elle n'est pas encore codifiée et, a fortiori, remboursée (même partiellement) par la sécurité sociale. Chaque intervention sur le patient dépasse 10 000 francs. Un tel coût est insupportable pour les revenus modestes. Elle lui demande donc quelles mesures peuvent être prises pour faire cesser ce qu'elle appellerait une médecine à deux vitesses.

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Réponse du ministère : Droits des femmes publiée le 31/01/2001

Réponse apportée en séance publique le 30/01/2001

Mme Hélène Luc. Madame la secrétaire d'Etat, je regrette que Mme la secrétaire d'Etat à la
santé et aux handicapés ne puisse pas répondre elle-même à ma question, mais je sais
qu'elle a, ce matin, une réunion interministérielle très importante avec M. le Premier ministre.
Depuis plus de quatre mois, un nouveau médicament très efficace contre certaines formes de
cécité a reçu une autorisation de mise en circulation sur le marché français. Il s'agit de la
Visudyne, commercialisée par Novartis. Or, ce médicament, très important pour les
personnes concernées, n'est toujours pas remboursé par la sécurité sociale.
Je veux aujourd'hui attirer votre attention, madame la secrétaire d'Etat, sur ce problème des
personnes menacées de cécité et qui ne peuvent accéder au traitement médical faute de
moyens financiers.
Je signale, au passage, que ce problème a fait l'objet dernièrement d'une très bonne émission
sur France Inter, « Le téléphone sonne », au cours de laquelle de nombreux malades se sont
exprimés pour faire part de leurs exigences.
La Visudyne n'est pas un médicament de confort. C'est, au contraire, un médicament de
première nécessité pour les personnes souffrant de formes particulières de dégénérescence
maculaire liée à l'âge, ou DMLA.
Cette pathologie dégénérescente du centre de la rétine, ou macula, menace la vision. Elle est
très invalidante puisque, petit à petit, le patient ne peut plus lire, reconnaître les visages ou
regarder la télévision. Elle pèse donc lourdement sur les actes de la vie quotidienne. Cette
maladie peut aboutir à la cécité.
Actuellement, en France, 1 300 000 personnes âgées de plus de soixante-cinq ans sont
touchées par cette pathologie, toutes formes confondues. Cinq à six mille malades pourraient
bénéficier du nouveau traitement chaque année.
L'efficacité de ce traitement, qui se fait par voie intraveineuse, qui agit sur les vaisseaux
anormaux par photothérapie, technique très récente, et qui nécessite l'application d'un
faisceau laser pour cicatriser, est d'ores et déjà avérée.
Comme en témoigne le professeur Coscas - que j'ai d'ailleurs eu l'occasion de rencontrer -,
dans le journal de l'association Retina France, Le Rétino du mois de juin 2000 : « Les
résultats de cette technique semblent actuellement positifs, démontrés statistiquement avec
des chiffres extrêmement significatifs, même si, certes, il ne s'agit pas de guérir les patients,
mais d'essayer de stabiliser l'affection et peut-être, dans un certain nombre de cas, d'obtenir
une amélioration. »
Enfin, la Visudyne, ce nouveau médicament qui permet de stopper l'évolution de la maladie,
coûte très cher. Plus de vingt-huit personnes ont en effet travaillé sur cette molécule pendant
quinze ans. Les prix varient de 9 000 francs à plus de 12 000 francs pour une seule ampoule,
et le traitement nécessite deux ou trois ampoules pendant les dix-huit premiers mois. Le
non-remboursement constitue donc un obstacle infranchissable pour de nombreux patients.
Il n'est pas normal que le traitement par la Visudyne soit réservé aux seules personnes qui
ont les moyens de l'acheter, d'autant que le comité économique et social vient de rendre un
avis favorable à son remboursement. Quant au comité de la transparence, qui s'est réuni
dernièrement, il semble mettre une condition d'acuité visuelle - entre un et cinq dixièmes - à
ce remboursement.
Mais peut-on vraiment attendre que la dégénérescence visuelle soit déjà bien avancée pour
commencer le traitement ? Il me paraît, au contraire, très important de commencer ce
traitement le plus tôt possible, dès que les premiers signes de dégénérescence se font
sentir.
La bonne vue des femmes et des hommes de notre pays, quel que soit leur âge, est en effet
une condition de leur bien-être sur laquelle il n'est pas question de marchander.
Le gouvernement de la gauche plurielle doit bannir une médecine à deux vitesses. Nous
militons pour une médecine équitable, accessible à tous, et nous pensons que la rupture
avec la logique comptable héritée du plan Juppé doit être radicale.
C'est pourquoi je vous demande, madame la secrétaire d'Etat, quelles mesures le
Gouvernement compte prendre pour que le remboursement de ce médicament soit
immédiatement pris en compte, comme le demande depuis plusieurs mois l'association
Retina France, dont je salue l'activité.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle.
Madame la sénatrice, de nombreuses pathologies graves entraînant une perte de l'acuité
visuelle et pouvant conduire à la cécité demeurent pour le moment incurables. Ces
pathologies regroupent un certain nombre d'affections, parmi lesquelles il convient
d'individualiser, d'une part, les rétinites pigmentaires, d'autre part - vous l'avez vous-même
rappelé - la dégénérescence maculaire liée à l'âge, dite DMLA. Celle-ci est, dans notre pays,
la première cause de malvoyance : plus d'un million de personnes sont concernées par ce
trouble, qui concerne les populations âgées, et dont l'incidence, par conséquent, augmente
régulièrement.
Vous avez donc raison de souligner qu'il s'agit là d'un véritable enjeu de santé publique.
Nous avons développé, depuis quelques années, un programme hospitalier de recherche
clinique pour inciter les équipes soignantes, notamment hospitalo-universitaires, à s'investir
dans des essais cliniques, en relation et en partenariat avec les structures de l'Institut
national de la santé et de la recherche médicale, l'INSERM, et du Centre national de la
recherche scientifique, le CNRS, sous tutelle du ministère de la recherche. C'est dans ce
cadre que doivent se développer les outils nouveaux de génétique moléculaire, ouvrant la voie
à des modalités originales de thérapie cellulaire et génétique, et se mettre en place les
indispensables collections d'ADN.
Grâce à un travail en partenariat avec d'autres équipes internationales qui se sont également
investies dans cette recherche, des résultats encourageants ont été obtenus, notamment
dans le domaine de la thérapie photodynamique, qui se présente comme une alternative
thérapeutique au classique traitement par photocoagulation au laser, qui ne peut s'appliquer
que dans un nombre limité de cas.
Nous sommes d'ores et déjà en mesure d'anticiper sur une nécessaire intégration de ces
thérapeutiques innovantes et nécessairement très coûteuses dans les budgets des
établissements spécialisés pour la prise en charge de ces affections.
Il s'agit là d'un problème qui dépasse d'ailleurs le seul cas des maladies dégénératives de la
rétine, qui, de façon générale, concerne tous les grands champs de la pathologie. C'est
pourquoi nous avons décidé, depuis 1999, de consacrer des enveloppes budgétaires aux
innovations thérapeutiques validées par la recherche clinique en les affectant aux équipes
performantes dans les domaines considérés. Ce dispositif va s'étendre, dès 2001, à de
nombreux champs disciplinaires, telle la DMLA.
Ainsi, des dotations financières « fléchées » sur la photothérapie dynamique sont prévues
pour les centres hospitaliers publics ayant compétence dans ce domaine.
Parallèlement, nous étudions actuellement les conditions dans lesquelles les structures de
soins privées pourraient participer, dès l'année 2001, à la prise charge des nombreux patients
relevant de cette thérapeutique nouvelle.
Pour ce qui est de la Visudyne, je ne manquerai pas, madame la sénatrice, de transmettre à
Mme Gillot vos questions très précises, qui nécessitent sans doute un complément de
réponse.
Mme Hélène Luc. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Evidemment, madame la secrétaire d'Etat, je suis satisfaite que des
crédits supplémentaires soient attribués aux équipes de recherche, en particulier à celle du
professeur Coscas, puisque c'est à l'hôpital intercommunal de Créteil, dans le Val-de-Marne,
que ce médicament a été mis au point. Mais vos précisions ne répondent pas directement à
la question que j'avais posée : à quel moment et dans quelle proportion ce médicament
sera-t-il remboursé par la sécurité sociale ?
Une seule injection de Visudyne coûte de 9 000 à 12 000 francs. Ce traitement est donc
réservé à des personnes qui ont les moyens de le payer.
Votre réponse, madame la secrétaire d'Etat, ne me satisfait pas et je vais demander à
rencontrer Mme Gillot afin de discuter plus à fond de ce problème. On ne peut pas en rester
là.

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