Question de Mme HEINIS Anne (Manche - RI) publiée le 22/02/2001

Mme Anne Heinis attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur la situation des éleveurs de Basse-Normandie à un moment où la crise bovine s'amplifie et les touche de plein fouet. Les ventes se font à perte en raison du manque de reprise de la consommation en ce début d'année. Les mesures de retrait des animaux de plus de trente mois non testés et l'intervention pour les jeunes bovins sont très insuffisantes en volume et en prix pour équilibrer le marché. Concrètement, le comité de gestion européen, concernant l'intervention, a décidé de réduire à 380 kilogrammes le plafond de poids des animaux éligibles à cette mesure. De plus, le système d'adjudication par soumission (volume et prix) des entreprises d'abattage pénalise considérablement les outils de transformation français et, de fait, exclut inévitablement la majeure partie de la production française de jeunes bovins. L'engorgement des abattoirs engagés dans la mesure de retrait des animaux de plus de trente mois est à son comble par manque de capacité des centres d'équarrissage volontaires. Cette situation se traduit par un déséquilibre de la demande par rapport à une offre de production abondante compte tenu de la forte rétention par mévente exercée par les éleveurs. Cette situation n'est plus supportable pour les éleveurs : manque de nourriture, insuffisance en place pour loger le bétail... Elle demande donc s'il peut être envisagé de déplafonner l'intervention publique en poids avec une part française proportionnelle à sa production et à des prix correspondant au moins aux prix d'orientation fixés ; de réquisitionner des entreprises d'équarrissage pour le retrait ; de congeler les carcasses retirées pour désengorger le marché ; d'instaurer des compensations financières des pertes subies basées sur la différence entre les cotations officielles après et avant la crise en utilisant en priorité la prime à l'abattage.

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Réponse du ministère : Agriculture publiée le 23/08/2001

Depuis le 14 décembre 2000, face à l'ampleur prise par la crise bovine au sein de l'Union européenne, la Commission a décidé l'ouverture de l'intervention publique. Le recours à ce régime est défini de façon générale par le règlement 562/2000 de la Commission, qui stipule notamment que sont admissibles à ce régime les catégories " jeunes bovins " et " boeufs " dont le poids ne dépasse pas 340 kilogrammes ; cette intervention s'effectue par voie d'adjudication ; la Commission, compte tenu des offres reçues, fixe en comité de gestion le prix maximal d'achat par catégorie, en se référant à la qualité R 3, en fonction du prix moyen de marché constaté dans l'Union européenne. A la demande de la France, du fait de la situation très détériorée sur les marchés des jeunes bovins et des broutards, deux dérogations ont été acceptées par la Commission, dès le mois de décembre 2000. La première dérogation concerne le poids maximal des carcasses pour les catégories " jeunes bovins " et " boeufs ", qui a été porté à 380 kilogrammes et même sans aucun plafond de poids, pour certaines adjudications. A ce jour, sur douze adjudications réalisées, une a été faite à 430 kg, six ont été effectuées sans limite de poids, deux ont été faites à 410 kg et une a été faite à 390 kg. Est, par ailleurs, prévue une nouvelle adjudication à 390 kg. A l'issue de cette dernière, onze adjudications sur treize se seront donc déroulées avec un plafond de poids dérogatoire à 380 kg, pour les animaux éligibles à ce régime, qui lui-même était un plafond de poids dérogatoire au système établi par le règlement de base susvisé. En outre, cette dérogation se poursuivra pour le troisième trimestre 2001. La deuxième dérogation, obtenue à nouveau par la France, concerne l'ouverture de l'intervention publique à la catégorie " broutards ", pour des animaux de moins de 12 mois dont le poids carcasse est compris entre 140 et 200 kg. En matière de volumes, pour la quasi-totalité des adjudications, la Commission a accepté la totalité des " broutards " français faisant objet d'offres à l'intervention. Pour la catégorie " jeunes bovins ", en moyenne 73 % des offres françaises ont été retenues, alors que ces dernières ne représentaient que 24 % de l'ensemble des offres européennes. Ainsi, grâce à ce régime, dont la France a défendu le maintien dans la dernière négociation de l'organisation commune des marchés (OCM) dans le secteur de la viande bovine, plus de 150 000 bovins ont pu être retirés du marché, permettant ainsi d'alléger celui-ci. Le dispositif de retrait pour destruction des animaux de plus de 30 mois, non testés, mis en place à partir du 1er janvier 2001, sur la base du règlement 2777/2000 de la Commission du 18 décembre 2000 a, quant à lui, permis de retirer plus de 180 000 animaux du marché grâce à une mise en oeuvre au niveau national dès le 1er janvier 2001. Actuellement, l'ensemble des mesures possibles sont prises pour éviter que l'engorgement des capacités d'équarissage ne limite l'ampleur du programme. Si l'on considère ces deux mesures de soutien exceptionnel des marchés de la viande bovine utilisées par notre pays, c'est au total plus de 330 000 bovins qui ont été retirés des marchés et qui ne pèsent plus sur l'offre. En outre, au-delà de ces soutiens communautaires, le Gouvernement, conscient de l'ampleur de cette crise que traverse la filière bovine et de la gravité de ses conséquences possibles sur les différents maillons de cette filière, a décidé depuis le mois de novembre 2000 plusieurs plans de soutien exceptionnels permettant aux différents opérateurs de ce secteur, des exploitations d'élevage aux entreprises d'aval, de faire face aux difficultés auxquelles ils sont confrontés. Ont ainsi été prévus pour les éleveurs : la mobilisation des crédits du fonds d'allègement des charges (FAC), à hauteur de 100 millions de francs (MF) ; un report pour trois ans d'une partie des cotisations sociales des exploitants, soit 1 240 MF de cotisations ; une accélération du versement du solde de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes (PMTVA) au début de l'année 2001 ; une enveloppe exceptionnelle de 500 MF de prêts bonifiés à 1,5 %. Et pour les entreprises : le report pour une durée d'une année de la moitié des cotisations patronales, soit 1 milliard de francs de cotisations ; une enveloppe de 500 MF de prêts bonifiés à 1,5 % qui pourront bénéficier d'une garantie partielle d'Unigrains ; la prise en charge intégrale de l'allocation de chômage partiel, soit 29 francs/heure. Ce dispositif a été complété à hauteur de 1,4 milliard de francs, en février 2001 par des mesures destinées à aider les exploitations d'élevage bovin, grâce à l'extension du dispositif des prêts bonifiés à 1,5 % pour aider les éleveurs à faire face aux difficultés financières liées aux emprunts qu'ils ont effectués à taux normal, soit une bonification moyenne de 6 points. Une enveloppe supplémentaire de 500 MF de prêts a été rendue possible ; l'allègement des charges financières des récents investisseurs pour lesquels la dotation du fonds d'allègement des charges (FAC) pour 2001, soit 200 MF, sera consacrée à la prise en charge des intérêts des prêts professionnels à moyen et long termes, bonifiés ou non bonifiés. Cette mesure intervient en complément de la mesure de consolidation d'échéances, afin d'alléger au maximum la charge financière des éleveurs les plus touchés ; l'accroissement du complément national de la PMTVA pour le porter, dès 2001, au maximum autorisé par l'organisation commune de marché. Cela représente un effort budgétaire de 130 MF supplémentaires ; l'attribution d'aides directes exceptionnelles aux éleveurs de bovins au titre de la solidarité nationale, pour un montant de 1 milliard de francs. Ces aides sont attribuées de façon ciblée sur les exploitations les plus touchées par la crise ; le soutien à la filière veaux de boucherie, avec une enveloppe de 100 MF. Le maintien de cette filière est important, tant pour les emplois concernés que pour l'équilibre global du marché de la viande bovine. Plus récemment, le Gouvernement a également décidé la mise en place d'un plan d'accompagnement des opérateurs de la mise en marché des bestiaux, qui aura pour objectif de consolider des entreprises justifiant à la fois une viabilité économique et présentant des garanties rigoureuses en matière de traçabilité des mouvements d'animaux, d'hygiène des équipements et de transparence des transactions.

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