Question de M. MOULY Georges (Corrèze - RDSE) publiée le 28/03/2001

M. Georges Mouly appelle l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur l'excellent bilan du service de garde à domicile pour personnes âgées créé en 1992 par l'association intercantonale d'aide à domicile pour personnes âgées des quatre cantons de Tulle, en Corrèze, service dont l'existence est remise en cause par la direction départementale du travail et de l'emploi qui lui refuse la reconnaissance de " chantier d'insertion " et, par conséquent, le renouvellement de son personnel. Compte tenu du service rendu, aussi bien aux personnes âgées qu'aux chômeurs en grandes difficultés, il lui demande de bien vouloir faire en sorte que cette action, inscrite au plan départemental d'insertion adopté chaque année par le conseil général de la Corrèze et l'Etat, soit reconnue chantier d'insertion et puisse être pérennisée.

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Réponse du ministère : Personnes âgées publiée le 25/04/2001

Réponse apportée en séance publique le 24/04/2001

M. Georges Mouly. Madame le secrétaire d'Etat, je profite de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui pour saluer votre arrivée au sein du Gouvernement. Vous êtes en charge d'un secteur important et sensible d'une politique gouvernementale qui se déroule le plus souvent en partenariat avec les collectivités territoriales.
Dans ce contexte, je souhaite aujourd'hui appeler votre attention sur le bilan, excellent à mes yeux - et mon avis est partagé par d'autres - du service de garde à domicile créé au début des années quatre-vingt-dix par l'association intercantonale d'aide à domicile pour les personnes âgées que je préside.
L'association, qui est une émanation des quatre instances de coordination gérontologique des quatre cantons de Tulle - cela représente tout de même vingt et une communes, dont le chef-lieu du département ! - a créé ce service en poursuivant un double objectif.
D'une part, conformément aux statuts de l'association, ce service contribue à soutenir le maintien à domicile des personnes âgées en intervenant seul ou en complément des services d'aide à domicile déjà existants, sans se substituer à eux. Il s'adresse en tout premier lieu à des personnes âgées de condition modeste - j'insiste sur ce point - les interventions étant facturées proportionnellement aux revenus, pour une assistance de jour comme de nuit.
D'autre part, ce service s'inscrit dans le plan départemental d'insertion adopté chaque année par les partenaires - Etat, conseil général - en recrutant le personnel d'intervention parmi les bénéficiaires du RMI et les chômeurs inscrits dans les catégories dites « prioritaires ».
En effet, en recrutant son personnel d'intervention par le biais de contrats « aidés » - contrats emploi-solidarité, ou CES, contrats emplois consolidés, ou CEC - l'association s'est engagée dans une véritable action de réinsertion en offrant une activité professionnelle, une qualification par la formation et en servant de passerelle entre l'insertion et le monde du travail. Le bilan fait état, notamment, de recrutements par les associations départementales d'aide à domicile et de complément d'heures dans le cadre des « emplois familiaux ».
Je citerai quelques chiffres qui illustrent bien ce bilan que j'ai qualifié d'excellent : depuis la création du service, soixante et onze personnes en difficulté ont travaillé dans le service, dont vingt et une ont obtenu le CAFAD, ou certificat d'aptitude aux fonctions d'aide à domicile, ce qui, en matière de formation, n'est pas négligeable : trente-six RMIstes, sept femmes isolées, sept jeunes de moins de 26 ans, trois personnes de plus de 50 ans et dix-huit chômeurs de longue durée. A la fin de leur contrat, vingt-quatre de ces personnes ont trouvé un emploi, dont dix-huit dans l'aide à domicile, deux sont en formation AMP, ou aide à la mobilité des personnes, une est aide-soignante et deux sont ASH, ou agent de services hospitaliers, en maison de retraite. Voilà pour le bilan !
Si je m'adresse à vous aujourd'hui, madame le secrétaire d'Etat, c'est pour signaler la menace qui pèse sur la pérennité du service. En effet, la direction départementale du travail et de l'emploi n'autorise plus de recrutement depuis le 1er janvier 2001, alors que, jusqu'ici, quinze contrats étaient autorisés. Au 31 janvier, onze salariés étaient encore sous contrat, dont deux en arrêt maladie : à leur échéance ces contrats ne seront, hélas ! pas renouvelés.
Ces mesures ont des conséquences importantes en termes d'emploi et de maintien à domicile. Elles entraînent d'abord l'annulation d'un type d'intervention auprès des personnes âgées les moins favorisées, celles qui ont les plus faibles ressources. Elles se traduisent ensuite par la remise en cause de sessions de formation, car la baisse du nombre de candidats suscite une certaine réticence de la part de l'organisme qui les assure, alors même que ces formations sont organisées avec d'autres employeurs du maintien à domicile.
Ces mesures provoquent aussi la baisse du montant de la subvention de fonctionnement accordée dans le cadre du programme départemental d'insertion, le PDI, au prorata bien évidemment du nombre de bénéficiaires du RMI employés.
Elles remettent enfin en cause, alors que nul ne contestera l'importance de l'accompagnement, de postes d'encadrement occupés par des salariés en contrat à durée indéterminée, qui ont été recrutés grâce au passage aux 35 heures et qui ont débuté dans le service par un contrat emploi-solidarité.
Ce service de garde à domicile s'inscrit, à l'évidence, parfaitement dans l'esprit du maintien à domicile des personnes âgées, en évitant l'hospitalisation, en permettant l'organisation des sorties d'hôpital, en soulageant aussi les familles. Il est, en outre, prioritairement destiné aux personnes âgées à faibles ressources - je l'ai dit, mais j'y insiste - et il constitue un élément fondamental de l'action globale menée par l'association en direction des personnes âgées, en assurant le portage de repas, la prévention du vieillissement, l'animation, l'aide aux aidants familiaux, la coordination gérontologique, avec candidature au label CLIC, les centres locaux d'information et de coordination - j'ai d'ailleurs adressé à ce sujet un courrier à votre secrétariat d'Etat - et en expérimentant un service vingt-quatre heures sur vingt-quatre. C'est dans ce contexte que se situe le travail de l'association en question.
J'ajoute que ces actions, qui correspondent bien, me semble-t-il, à l'esprit qui a présidé à la création des CES et des CEC, permettent l'intégration professionnelle de personnes qui ne disposaient pas d'un haut niveau de qualification. En effet, l'association est l'une des rares du secteur à offrir un emploi à un public féminin en difficulté, « public » qui est le moins concerné par la reprise économique.
Madame la secrétaire d'Etat, ne vous est-il vraiment pas possible de donner à ce service, validé en PDI chaque année depuis sa création, les moyens de continuer à fonctionner en lui délivrant toutes les autorisations nécessaires, à savoir, d'une part, le maintien des quinze contrats aidés - c'est la seule formule envisageable - et, d'autre part, la reconnaissance de la qualité de chantier d'insertion ?
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Monsieur le sénateur, vous avez attiré mon attention sur la situation de l'association intercantonale d'aide à domicile pour personne âgées à Tulle, dont vous êtes le président, et pour laquelle le conventionnement en tant que chantier d'insertion a été refusé par la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de Corrèze.
Je vous rappelle que, d'une manière générale, les associations de services aux personnes doivent bénéficier, dans les conditions prévues par l'article L. 129-1 du code du travail et de ses textes d'application, d'un agrément simple, délivré par le préfet de région, qui doit être obligatoirement assorti d'un agrément « qualité » lorsque l'organisme intervient pour la garde d'enfants de moins de trois ans ou l'assistance aux personnes âgées de plus de soixante-dix ans, dépendantes ou handicapées.
En outre, les associations de services aux personnes ne peuvent avoir recours aux contrats emploi-solidarité ou aux contrats emplois consolidés pour intervenir au domicile des particuliers.
Par ailleurs, les organismes mentionnés au paragraphe IV de l'article L. 322-4-16 du code du travail, produisant des biens et services en vue de leur commercialisation et développant des activités présentant un caractère d'utilité sociale, tels les chantiers d'insertion, ont vu leurs conditions de conventionnement définies par le décret du 7 juin 2000 et la circulaire du 20 juin de la même année. Ces structures ont vocation à accueillir en contrat emploi-solidarité et en contrat emploi consolidé des personnes en très grande difficulté sociale et professionnelle qui doivent bénéficier d'un accompagnement et d'un suivi renforcés.
La possibilité pour une association de services aux personnes d'être conventionnée comme chantier d'insertion, donc d'avoir recours aux CES et aux CEC pour l'intervention auprès de personnes âgées, n'est pas prévue par les textes en vigueur.
Mes services, conscients de ce problème et de ses enjeux pour avoir vu le travail qui est réalisé par votre association soucieux également de prévenir toute situation d'illégalité de l'activité de la structure, étudient, à l'échelon local, en liaison avec votre association, la meilleure façon de pérenniser cette structure : un statut adéquat permettrait d'assurer la consolidation et la continuité de ce type d'activité, particulièrement utile et nécessaire, exercée au bénéfice tant des chômeurs que des personnes âgées.
En effet, s'agissant des services aux particuliers, la volonté de promouvoir des prestations de qualité - ce qu'attendent les familles - n'est pas antinomique avec celle de susciter la création de nouveaux emplois et de lutter contre le chômage de longue durée et l'exclusion.
J'ai été très sensible à l'ensemble des actions que vous menez. Je peux vous assurer que tous les services locaux feront le maximum pour trouver une solution avec votre association.
M. Georges Mouly. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Mouly.
M. Georges Mouly. Je sais bien, madame le secrétaire d'Etat, que nombre de textes - code du travail, décrets, etc. - n'autorisent pas les associations de services aux personnes à mettre des personnels à disposition pour intervenir au domicile des particuliers. Cependant, j'avais noté dans la lettre que m'avait adressés le directeur du travail et de l'emploi que le profil des personnels que nous recrutions et le travail que nous leur demandions d'effectuer correspondaient bien à la possibilité qui était donnée d'avoir recours à des CES ou à des CEC. La révision de la loi de 1975 pourrait apporter une solution à ce type de problème.
Plus concrètement, je souhaite vous remercier, madame la secrétaire d'Etat, de l'espoir que vous nous donnez que cette association puisse continuer de travailler dans de bonnes conditions.

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