Question de M. GINÉSY Charles (Alpes-Maritimes - RPR) publiée le 29/03/2001

M. Charles Ginésy attire l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le problème de la traite des êtres humains dans l'Union européenne. Plusieurs milliers de ressortissantes des pays d'Europe centrale et orientale sont ainsi victimes de la prostitution forcée dans l'Union européenne. En France, elles sont présentes dans la plupart des grandes villes : Paris, Marseille, Lyon, Strasbourg, Nice, Toulouse. Contre ce fléau, il existe une volonté commune des Quinze d'agir. En février 1997, les Etats membres ont ainsi adopté un plan d'action contre la traite des femmes destiné à renforcer la coopération policière et judiciaire, et à harmoniser les législations pénales. Malgré cette volonté, force est de constater que l'harmonisation des législations pénales et la coopération policière entre les Quinze semblent progresser avec difficulté. C'est seulement en 1997 que le champ de compétence d'Europol a été étendu à la traite des êtres humains, et ce n'est que depuis octobre 1998 que la police criminelle d'Europol dispose de moyens opérationnels en la matière. Aussi, soucieux d'une mobilisation plus forte et plus efficace des Etats membres contre ce fléau, il lui demande de lui indiquer l'état d'avancement des travaux des Quinze dans ce domaine, ainsi que les initiatives que la France entend proposer à ses partenaires pour lutter contre cette nouvelle forme d'esclavage.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 19/07/2001

La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que sa question a retenu toute son attention. La lutte contre la traite des êtres humains est, depuis de nombreuses années, au centre les préoccupations de plusieurs enceintes et organisations internationales, ce qui témoigne de l'actualité de cette forme particulièrement grave de délinquance. A cet égard, il convient de souligner l'importance que revêt l'adoption par l'assemblée générale des Nations unies, le 15 novembre 2000, de la convention contre la criminalité transnationale organisée et de son protocole additionnel " visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants ", qui constituent une avancée majeure dans la lutte contre les formes les plus graves de criminalité organisée. La France, qui a très activement soutenu l'élaboration de ces instruments, les a signés à la conférence de Palerme, le 12 décembre 2000, et le nombre particulièrement élevé de signatures recueillies atteste de l'engagement de la communauté internationale. Le Gouvernement souhaite qu'ils puissent être ratifiés le plus rapidement possible et des consultations intrerministérielles ont déjà été engagées afin d'élaborer un projet de loi qui pourrait être déposé prochainement devant le Parlement. La mise en oeuvre de ces instruments et leur transposition et dans le droit positif des Etats parties assureront un rapprochement des incriminations et permettront de disposer, au plan universel, d'un cadre approprié et efficace de coopération judiciaire en matière pénale. En ce qui concerne l'Union européenne, au plan normatif, la Commission a présenté le 21 décembre 2000 une communication au Conseil et au Parlement européen relative à la lutte contre la traite des êtres humains et à la lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants et la pédo-pornographie. Cette communication comporte, en annexe, deux propositions de décisions cadres du Conseil dont l'une relative à la lutte contre la traite des êtres humains, établie sur la base du protocole additionnel à la convention des Nations unies précité. Cette proposition est actuellement en cours de discussion au sein des instances de l'Union. L'objectif poursuivi est de prolonger les dispositions des instruments des Nations unies en opérant de nouvelles avancées dans les domaines de l'harmonisation des sanctions et de la protection des victimes de la traite des personnes. La France met tout en oeuvre pour aboutir à une adoption rapide de l'instrument, pour lequel un accord politique sur la quasi-totalité des dispositions a été enregistré lors du dernier Conseil des ministres de la justice et des affaires intérieures, tenu à Bruxelles les 28 et 29 mai 2001. Sur le plan opérationnel, le développement des compétences d'Europol et la mise en place récente de l'Unité provisoire de coopération judiciaire (Pro-Eurojust), dont le champ de compétence inclut la traite des personnes et qui préfigure l'unité définitive Eurojust, devraient permettre de renforcer l'action commune des Etats membres. En favorisant la coordination des enquêtes et en améliorant la coopération judiciaire dans le domaine de la lutte contre la traite des personnes, l'Unité provisoire de coopération judiciaire devrait ainsi contribuer au renforcement de l'efficacité des dispositifs de lutte contre cette forme de criminalité au sein de l'Union européenne. Ces instruments et projets d'instruments, dont la France soutient l'élaboration et l'adoption et qui entreront progressivement en vigueur, contribueront incontestablement à l'amélioration sensible de la lutte contre cette forme de criminalité organisée, grave et inquiétante, que constitue la traite des êtres humains.

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Erratum : JO du 09/08/2001 p.2643

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