Question de M. MOULY Georges (Corrèze - RDSE) publiée le 07/06/2001

M. Georges Mouly attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur l'important problème de l'organisation d'un service minimum dans les services publics en cas de grève. Tout en respectant l'usage de ce dernier, inscrit dans la Constitution, il lui demande s'il ne serait pas enfin opportun de mettre en place un service minimum dans tous les services publics, en cas de grève et non seulement dans certains (comme la télévision ou le secteur hospitalier par exemple) et ce, pour d'une part, ne pas totalement paralyser certains secteurs (les transports en particulier) mais d'autre part, pour se mettre en accord avec nos partenaires européens qui, pour certains (l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne et le Portugal entre autres) pratiquent ce service minimum.

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Transmise au ministère : Fonction publique


Réponse du ministère : Fonction publique publiée le 02/08/2001

Le droit de grève reconnu aux agents du secteur public trouve sa source dans le septième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, confirmé par celui de la Constitution du 4 octobre 1958, qui prévoit qu'il s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent. Il appartient donc aux pouvoirs publics de concilier la défense des intérêts professionnels, dont la grève est un moyen, avec la sauvegarde de l'intérêt général. La loi du 31 juillet 1963, codifiée dans les articles L. 521-2 à L. 521-6 du code du travail et qui s'applique à l'ensemble des personnels de l'Etat, des régions, des départements et des communes comptant plus de 10 000 habitants ainsi qu'aux agents des entreprises, organismes et établissements publics ou privés chargés de la gestion d'un service public, a de ce fait encadré la pratique de la grève dans le secteur public. Toute cessation concertée du travail doit ainsi être précédée d'un préavis qui doit parvenir à l'autorité concernée au moins cinq jours francs avant le début de la grève et en préciser le lieu, la date et l'heure de début ainsi que la durée. Cette période doit être consacrée à la négociation dans le but de parvenir à dénouer le conflit en amont. Les grèves tournantes sont interdites. L'inobservance de ces dispositions entraîne des sanctions, prévues par les réglementations applicables aux personnels concernés. En plus de cette réglementation générale du droit de grève dans le secteur public, plusieurs lois plus spécifiques sont venues en interdire l'exercice à certains agents publics, en particulier les magistrats, les militaires ainsi que les personnels de police, du service des transmissions du ministère de l'intérieur et de l'administration pénitentiaire. Par ailleurs, certains agents peuvent être astreints par la loi à un service minimum. Il en est ainsi par exemple des personnels de la navigation aérienne. Les limitations apportées par le législateur à l'exercice du droit de grève doivent naturellement s'inscrire dans le souci de préserver le fonctionnement des éléments du service dont l'interruption porterait atteinte aux besoins essentiels du pays - pour concilier le droit de grève avec le principe constitutionnel de continuité des services publics - ou à la protection de la santé et de la sécurité des personnes (DC 27 juillet 1979 et 29 juillet 1987, DC 22 juillet 1980). Enfin, en l'absence de textes législatifs, les ministres ou les chefs de service tirent de la jurisprudence du Conseil d'Etat Dehaene (7 juillet 1950) le pouvoir de réglementer l'exercice du droit de grève dans leurs services, en prévoyant notamment l'instauration d'un service minimum. Ainsi, les organes dirigeants des personnes morales chargées d'une mission de service public peuvent édicter des règles en matière d'exercice du droit de grève au sein de ces organismes. Toutefois, les limitations instaurées au droit de grève par le pouvoir réglementaire ne sauraient dépasser celles rendues strictement nécessaires par la conservation des installations et du matériel, la sécurité physique des personnes ou le fonctionnement des services indispensables à l'action gouvernementale. Les limitations imposées aux agents publics par le pouvoir réglementaire font l'objet d'un contrôle du juge, qui se montre défavorable aux interdictions à caractère général et absolu. Le droit de grève fait donc l'objet dans le secteur public d'une réglementation qui tient à la fois compte de son caractère constitutionnel et de la nécessaire continuité du service public. Ainsi, l'instauration d'un service minimum généralisé ne saurait constituer une réforme adaptée tant aux besoins des usagers qu'à la résolution des conflits dans le secteur public. En s'appuyant sur la réglementation actuelle, il y a lieu plutôt de développer des dispositifs de prévention et de régulation des conflits sociaux. De tels dispositifs, respectueux du droit de grève garanti par la Constitution, peuvent être négociés au niveau de chaque service public.

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