Question de M. CHARASSE Michel (Puy-de-Dôme - SOC) publiée le 28/06/2001

M. Michel Charasse rappelle à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, qu'en vertu de la loi sur les archives publiques de 1979 les dossiers individuels concernant des personnes ne peuvent être ni rendus publics ni consultés avant l'expiration d'un délai de cent vingt ans. Or, à la suite des polémiques relatives à la torture en Algérie et au rôle du garde des sceaux de l'époque (1956-1957), un ancien officier général l'ayant mis en cause dans ses mémoires, la presse, et spécialement Le Monde, ont été conduits à faire état du comportement d'un juge d'instruction affecté à Alger, le juge B., aujourd'hui décédé. La question s'étant posée de savoir quels avaient été exactement les liens entre ce magistrat et le garde des sceaux de l'époque, Le Monde a enquêté sur cet ancien magistrat décédé et a donné de multiples informations qui ne peuvent qu'être sorties du dossier individuel de l'intéressé, soigneusement conservé aux archives du ministère de la justice. Une petite enquête de la part de certains de ceux qui défendent la mémoire de cet ancien garde des sceaux mis en cause injustement a démontré qu'un journaliste du Monde avait eu accès au dossier de ce magistrat décédé, l'avait consulté et en avait extrait de nombreux renseignements. Il lui demande donc de bien vouloir lui faire connaître en vertu de quelle disposition législative la règle de non-communication de cent vingt ans prévue par la loi précitée de 1979 a été abrogée en faveur du journal Le Monde et s'il suffit dès lors de passer par l'intermédiaire de ce journal pour s'affranchir en toute impunité de l'obligation de respect des personnes qui découle de la loi sur les archives. Il lui demande également de bien vouloir lui faire connaître dans quelles conditions un journaliste a pu prendre connaissance de ce dossier et en vertu de quelle autorisation illégale donnée par qui. Il lui demande aussi de lui indiquer si elle a diligenté une enquête à ce sujet et si des poursuites ont été engagées contre les auteurs de cette violation du droit des personnes et contre leur complice Le Monde. Dans le cas où rien ne serait fait pour punir cette violation grave de la loi, il lui demande de bien vouloir lui confirmer que son ministère a décidé une fois pour toute que la loi est faite pour les autres mais pas pour lui.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 31/01/2002

La garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire que le régime juridique actuellement en vigueur en matière de consultation d'archives tend à assurer l'équilibre nécessaire entre le respect de la confidentialité et le droit à l'information. En effet, le régime d'accès des archives publiques est fixé par la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 et la consultation des dossiers individuels des magistrats est régi par l'article 7 de la loi précitée. Cet article dispose qu'il existe des exceptions au délai commun de communicabilité qui, hormis pour les documents administratifs non nominatifs dont la communication est libre, est de trente ans. Ces exceptions s'appliquent notamment aux dossiers individuels de carrière, dont les dossiers individuels des magistrats font partie, dont la communication peut être obtenue passé un délai de cent-vingt ans à compter de la naissance de l'intéressé. Toutefois, l'article 8 de la loi sus-mentionnée dispose que l'administration des archives peut accorder des dérogations individuelles pour permettre la communication de documents avant l'expiration des délais légaux de communicabilité. La procédure est prévue par l'article 2 du décret n° 79-1038 du 3 décembre 1979 pris pour l'application de la loi ci-dessus mentionnée qui prévoit que la demande de dérogation est accordée par la direction des archives de France, dépendant du ministère de la culture, après accord de l'autorité qui a effectué le versement des documents dont il est sollicité la communication. Dans le cas d'espèce auquel fait référence l'honorable parlementaire, la demande de dérogation déposée par le journaliste du Monde a reçu un avis favorable de la direction des services judiciaires du ministère de la justice et a finalement été accordée par madame la directrice des Archives de France.

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