Question de M. GÉLARD Patrice (Seine-Maritime - UMP) publiée le 21/03/2003

Question posée en séance publique le 20/03/2003

M. Patrice Gélard. Ma question s'adresse à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

Monsieur le ministre, depuis leur création en 1989, les Instituts universitaires de formation des maîtres, régulièrement critiqués dans leur mode de fonctionnement, ont fait l'objet de plusieurs projets de réforme présentés par certains de vos prédécesseurs.

Or chacun sait que l'enseignement devient un métier de plus en plus difficile à exercer, surtout au niveau de l'enseignement primaire.

Nous sommes en effet arrivés à un stade où l'on exige des enseignants d'être de plus en plus polyvalents, d'être capables tout à la fois de savoir gérer les problèmes de violence, d'enseigner la citoyenneté, de travailler en liaison avec d'autres enseignants, avec des associations ou différents réseaux.

Mme Danièle Pourtaud. C'est normal !

M. Patrice Gélard. Dans le même temps, les vocations sont loin d'être encouragées, ce qui est fort regrettable.

Ainsi, force est de constater que les futurs professeurs reçoivent dans les IUFM une formation qui ne les prépare pas correctement à leurs futures fonctions.

M. Didier Boulaud. Ah ! Ils le reconnaissent !

M. Patrice Gélard. En effet, ces instituts dispensent un enseignement beaucoup trop théorique, qui laisse de côté toute formation pratique,...

M. Jacques Mahéas. Et les stages dans les écoles d'application ?

M. Patrice Gélard. ... pourtant de plus en plus nécessaire, pour permettre aux futurs enseignants d'affronter le travail sur le terrain avec de bonnes bases.

M. Didier Boulaud. Bonne remarque !

M. Patrice Gélard. C'est ainsi que les jeunes professeurs qualifient eux-mêmes les cours des IUFM d'« infantilisants ». Cela est d'autant plus affligeant que beaucoup de jeunes professeurs commencent le plus souvent leur carrière dans des zones difficiles, telles que les zones d'éducation prioritaires, les ZEP, sans y avoir été préparés d'une quelconque manière.

L'inspection générale de l'éducation nationale vient de vous remettre, monsieur le ministre, un rapport qui dénonce toutes les failles du système des IUFM.

Pourriez-vous nous dire quelles sont les principales mesures que vous comptez prendre dans les mois à venir, afin de remédier à cette situation en améliorant la formation des professeurs des écoles ?

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Réponse du Ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche publiée le 21/03/2003

Réponse apportée en séance publique le 20/03/2003

M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Je partage en grande partie, sinon totalement, le diagnostic que vous venez de faire.

Il faut en effet mettre en place une réforme assez vigoureuse des IUFM, donc de la formation des maîtres en commençant par réfléchir sur la question de savoir ce que nous attendons de nos enseignants et sur la formation que l'on doit leur dispenser.

Tout d'abord, j'en attends une meilleure formation disciplinaire, c'est-à-dire une meilleure maîtrise des savoirs ; une meilleure maîtrise des programmes, car on peut être agrégé dans une discipline et ne maîtriser que 20 % du programme du collège. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.).

M. Didier Boulaud. Quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage !

M. Luc Ferry, ministre. Ensuite, j'en attends une meilleure maîtrise de ce qu'on appelle dans le jargon la « didactique ». Imaginez que vous deviez parler de la Révolution française, que vous connaissez bien, à des élèves de CM 1 ou de CM 2 de neuf et dix ans. Toute la difficulté est de savoir comment vous allez aborder la question.

Quelle date, quel événement allez-vous retenir ?

M. Jacques Mahéas. Les enseignants connaissent leur travail !

M. Luc Ferry, ministre. Voilà ce qui devrait faire partie au premier chef de la formation dans les IUFM.

Enfin, il faut apprendre à maîtriser les classes. C'est une question de pédagogie. On se plaint beaucoup que les IUFM ne donnent pas à nos jeunes enseignants une idée du public qu'ils vont avoir à former, pour ne pas dire « à affronter »...

M. Didier Boulaud. Ce n'est pourtant pas la guerre !

M. Luc Ferry, ministre. ... en fait de la réalité scolaire à laquelle ils devront faire face.

Nous allons donc avec Xavier Darcos proposer une réforme articulée autour de deux axes.

Tout d'abord, une réforme des concours permettra d'accéder à cette meilleure maîtrise des programmes, car il est important de retenir comme critère des savoirs disciplinaires les programmes qu'on aura à enseigner, notamment à l'école primaire.

Ensuite, nous allons professionnaliser la formation dans les IUFM, avec un accompagnement pendant trois ans dans le métier et en développant beaucoup plus qu'aujourd'hui les stages en alternance dans les établissements.

M. Didier Boulaud. Ce n'est pas nouveau ! Cela fait trente ans que cela existe ! Vous n'arrêtez pas d'inventer ! (Mme Nicole Borvo fait un signe d'approbation.)

M. Luc Ferry, ministre. Enfin, je souhaite que tous les professeurs de l'enseignement général passent au moins quinze jours dans les lycées professionnels, car ils auront à participer à l'orientation des jeunes vers des filières qu'ils ne connaissent pas.

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