Question de M. ÉMORINE Jean-Paul (Saône-et-Loire - UMP) publiée le 09/04/2003

M. Jean-Paul Emorine attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales sur la mise en place des réseaux de surveillance des risques zoosanitaires. En effet, dans le cadre de la loi n° 2001-6 du 4 janvier 2001 " portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire en matière de santé des animaux et de qualité sanitaire des denrées d'origine animale et modifiant le code rural ", l'article 214-1 du code rural a été complété. Ainsi, le ministre est habilité à instituer des réseaux sanitaires bovins financés par les éleveurs. Ces réseaux, auxquels les propriétaires et détenteurs d'animaux seront obligés d'adhérer, mettront en oeuvre des mesures visant à garantir la qualité sanitaire de leurs exploitations. Les organismes à vocation sanitaire du réseau bovin devraient être constitués par les groupements de défense sanitaire. Cependant, il s'avère qu'à ce jour ce dispositif n'est toujours pas opérationnel. Il le prie donc de bien vouloir lui indiquer les délais requis pour la mise en place de ces réseaux.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales publiée le 07/05/2003

Réponse apportée en séance publique le 06/05/2003

M. Jean-Paul Emorine. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 5 octobre 2000, je fus rapporteur, au nom de la commission des affaires économiques et du Plan du Sénat, du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire en matière de santé des animaux et de qualité sanitaire des denrées d'origine animale et modifiant le code rural. Ce projet de loi est devenu la loi du 4 janvier 2001.

L'article 4 de cette loi, qui complète le dernier alinéa de l'article 214-1-A du code rural, autorise le ministre de l'agriculture à constituer des réseaux de surveillance des risques zoosanitaires. Il assure la transposition en droit français de l'article 14 de la directive du 26 juin 1964.

Ainsi, monsieur le ministre, vous êtes habilité à instituer des réseaux sanitaires bovins. Ces réseaux, auxquels les propriétaires et les détenteurs d'animaux seront contraints d'adhérer, mettront en oeuvre des mesures visant à garantir la qualité sanitaire de leur exploitation. Les organismes à vocation sanitaire du réseau bovin devraient être constitués par les groupements de défense sanitaire.

Dans le cadre de ces réseaux, des missions de surveillance peuvent être déléguées par le ministre à deux catégories de partenaires : des organismes à vocation sanitaire ou des organisations vétérinaires à vocation technique, agréés par l'autorité administrative ; des vétérinaires investis d'un mandat sanitaire mentionné à l'article 215-8 du code rural.

La catégorie des organismes à vocation sanitaire vise pour partie des structures qui existent déjà. Les organismes à vocation sanitaire du réseau bovin devraient ainsi être constitués par les groupements de défense sanitaire, les GDS, qui réunissent dans chaque département la plupart des éleveurs bovins et leurs partenaires. Mis en place dans les années cinquante et agréés par le ministre chargé de l'agriculture, les GDS avaient traditionnellement pour mission de relayer l'action des services vétérinaires départementaux en matière de prophylaxie contre les grandes maladies contagieuses, telles que la tuberculose et la brucellose, en informant et en assistant techniquement les éleveurs. Visés implicitement à l'article 214-1 B du code rural, qui fait également référence à des organismes à vocation sanitaire, les GDS voient ainsi consacrée leur collaboration efficace au dispositif public de protection de la santé animale.

Dans le cas du réseau bovin, les GDS devraient agir en étroite collaboration avec les groupements techniques vétérinaires, les GTV, structures départementales de formation des vétérinaires, qui sont visés par cet article 4 sous les termes d'« organisations vétérinaires à vocation technique ».

Regroupant 60 % à 70 % des éleveurs des filières ovine et caprine, les GDS pourraient également jouer le rôle de structures gestionnaires des réseaux de surveillance ovin et caprin.

L'instauration de ce dispositif de surveillance des risques zoosanitaires est novateur à deux titres.

D'une part, il met l'accent sur la surveillance et la prévention, alors que s'opère parallèlement un allégement du système de dépistage automatique de certaines maladies contagieuses qui, telles la brucellose et la tuberculose, ont quasi disparu du territoire national. Ainsi, dans les départements indemnes de ces maladies, les structures gestionnaires des réseaux devraient notamment être chargées de collecter des informations sur la situation zoosanitaire générale au profit des services vétérinaires départementaux, et de sensibiliser les éleveurs à la maîtrise des risques sur leurs élevages.

D'autre part, le champ d'action de ce dispositif de surveillance est défini de manière large. L'expression : « risques zoosanitaires » renverrait non seulement aux traditionnelles maladies réglementées, mais également à de « nouveaux risques ».

Par ailleurs, la loi du 4 janvier 2001 précise que le ministre de l'agriculture peut octroyer des subventions en vue du financement de ces réseaux de surveillance. Elle renforce les pouvoirs de l'autorité administrative en matière sanitaire, en lui permettant d'imposer des mesures particulières de contrôle lorsque des risques sanitaires ont été identifiés par ces réseaux, selon des modalités déterminées par décret en Conseil d'Etat.

La loi précise enfin que, si la gestion des réseaux de surveillance constitués peut être déléguée à des partenaires privés, elle reste, bien entendu, sous l'autorité du ministre de l'agriculture.

J'ai approuvé la mise en place de ces réseaux de surveillance des maladies animales, qui est en parfaite cohérence avec le changement de politique zoosanitaire. Ces dispositions vont, en effet, dans le sens d'une responsabilisation accrue des éleveurs, ce qui est un gage de confiance et une reconnaissance de leur implication dans le dispositif public de santé animale.

Cependant - et c'est l'objet de cette question, monsieur le ministre -, il s'avère que ce dispositif n'est toujours pas opérationnel à ce jour, ce qui est particulièrement regrettable.

En conséquence, monsieur le ministre, je souhaiterais que vous puissiez m'en préciser les raisons et m'indiquer quels sont les délais requis pour la mise en place de ces réseaux.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Monsieur le sénateur, je vous remercie de cette question, qui témoigne de votre intérêt constant pour tout ce qui a trait à la situation de l'élevage dans notre pays, et je saisis cette occasion pour saluer à nouveau la qualité du travail que vous avez conduit, avec votre collègue Gérard Bailly, dans le cadre du rapport que la commission des affaires économiques et du Plan du Sénat a consacré à l'avenir de l'élevage.

Vous avez rappelé dans le détail la situation actuelle des réseaux de surveillance des risques zoosanitaires.

L'évolution épidémiologique des principales maladies infectieuses des bovins que sont la tuberculose, la brucellose et la leucose permet aujourd'hui la mise en oeuvre d'un système alternatif par rapport aux prophylaxies collectives classiques. Le projet de réseau sanitaire bovin, dont les fondements ont été posés à l'article L. 222-1 du code rural par la loi du 4 janvier 2001, dont vous avez rappelé les termes, introduit cette nouvelle approche où la surveillance globale des cheptels prend le pas sur l'acte de dépistage réalisé sur chaque bovin.

Le projet de réseau sanitaire bovin institue deux régimes de lutte contre les maladies animales. Le premier dispositif, dit d'« éradication », correspond aux mesures classiques de prophylaxie ; le second, dit de « prévention », fondé à la fois sur des critères épidémiologiques et sur la structuration des organismes départementaux - groupements de défense sanitaire et groupements techniques vétérinaires -, permet de soumettre les cheptels à des mesures particulières de surveillance et d'alléger les dépistages systématiques.

Il n'en demeure pas moins que, en matière de risques zoosanitaires, l'Etat doit s'assurer du maintien d'un système de surveillance acceptable du cheptel français ainsi - et ce n'est pas toujours facile - que d'un maillage vétérinaire suffisant pour faire face à d'éventuelles épizooties.

Les divergences d'approche des différents acteurs professionnels - éleveurs et vétérinaires - sur les modalités concrètes de cette surveillance sanitaire et, plus particulièrement, l'opposition des représentants des éleveurs à l'instauration de visites d'évaluation sanitaires selon un rythme quadriennal, ont conduit mon prédécesseur, en mars 2002, à ajourner ce projet.

Lorsque j'ai pris mes fonctions, il y a maintenant un an, j'ai immédiatement souhaité que les échanges entre professionnels et administration reprennent afin de pouvoir mettre en place ces réseaux de surveillance.

Comme vous le savez, à l'issue des concertations qui ont commencé à l'automne 2002 et se sont déroulées pendant l'hiver, mon objectif est que nous puissions aboutir, dans les toutes prochaines semaines, à un accord sur le dispositif afin de permettre la mise en place de l'architecture réglementaire nécessaire pour la prochaine campagne de prophylaxie qui débutera au mois d'octobre 2003. Je puis vous annoncer aujourd'hui, monsieur le sénateur, que la signature du décret instituant le réseau national sanitaire bovin, approuvé en juillet dernier par le Conseil d'Etat, en constituera la première étape.

Monsieur le sénateur, sur ce sujet évidemment majeur, que votre question a parfaitement mis en lumière, un certain nombre d'incompréhensions sont survenues immédiatement après l'adoption de la loi du 4 janvier 2001. Aujourd'hui, ces réticences ou incompréhensions sont, pour l'essentiel, levées. Pour ma part, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour que le dispositif se mette en place le plus rapidement possible, en tout état de cause, avant l'automne prochain.

Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments d'information que je voulais vous apporter sur ce très important dossier.

M. Jean-Paul Emorine. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.

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