Question de M. ETIENNE Jean-Claude (Marne - UMP) publiée le 19/06/2003

M. Jean-Claude Étienne attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les incertitudes liées à l'application de la loi n° 276-2002 relative à la démocratie de proximité. L'article L. 3121-24-1 CGCT dispose que, " lorsque la région diffuse, sous quelque forme que ce soit, un bulletin d'information générale sur les réalisations et la gestion du conseil régional, un espace est réservé à l'expression des groupes d'élus. Or, l'article L. 52-8 du code électoral précise que " les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués ", et l'article L. 52-1 stipule qu'" à compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales aucune campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d'une collectivité ne peut être organisée sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin ". Dès lors, plusieurs interrogations apparaissent quant à l'application des dispositions susmentionnées. Tout d'abord, le fait pour la collectivité concernée de laisser un espace d'expression au groupe d'élus un an avant une élection globale peut-il être considéré comme un don prohibé d'une personne morale de droit public avec les conséquences que l'on sait sur l'éligibilité du ou des candidats membres de ce groupe ? Est-ce seulement le cas si le ou les candidats membres du groupe sont mis en valeur directement ou indirectement ? Est-ce le cas si le candidat ou les candidats membres du groupe apparaissent en photographie ou signent un article ? De plus, l'utilisation par le ou les candidats membres d'un groupe d'élus de l'espace d'expression à compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales tombe-t-elle sous le coup de l'article L. 52-1 du code électoral ? Ainsi, il le remercie de bien vouloir lui préciser quelles sont les réelles intentions des dispositions susmentionnées.

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Réponse du Ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales publiée le 07/08/2003

En vertu des articles L. 3121-24-1 et L. 4132-23-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT), applicables respectivement aux départements et aux régions, un espace doit être réservé à l'expression des groupes d'élus dans les bulletins d'information générale diffusés par ces collectivités territoriales sur les réalisations et la gestion du conseil général ou du conseil régional. Ce droit d'expression doit se combiner avec les dispositions de l'article L. 52-1 du code électoral qui interdisent, dans les six mois précédant une élection générale, toute campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d'une collectivité sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin. A cet égard, la jurisprudence intervenue en matière électorale a précisé que ne sont pas concernées par cette prohibition les publications régulières, initiées par les collectivités territoriales à des dates sans rapport avec le scrutin en cause et dont le contenu demeure informatif, général et dénué de caractère polémique ou partisan (CE, 9 octobre 1996, Elections municipales de Cherbourg). Les dispositions de l'article L. 52-1 visent au premier chef les candidats à une élection qui, appartenant à la majorité responsable de l'administration d'une collectivité, pourraient s'en prévaloir dans le cadre d'une campagne électorale, au travers d'une action de promotion publicitaire sur les réalisations ou la gestion de leur collectivité. Dans le respect du principe d'égalité des candidats à une élection, les réserves fixées par le code électoral doivent néanmoins être appliquées de façon générale à l'ensemble des élus quelle que soit leur appartenance politique. Ainsi, si les campagnes de promotion sont proscrites de façon expresse, on ne pourrait pour autant prétendre, sous réserve de l'appréciation souveraine du juge du fond, que seraient autorisées au même moment des campagnes partisanes à l'encontre d'adversaires politiques à l'occasion de prise de position par des élus ou des groupes d'élus dans les bulletins d'information diffusés par une collectivité. De telles manoeuvres pourraient être jugées non conformes sinon à la lettre du moins à l'esprit de la loi électorale ainsi qu'à la jurisprudence applicable en la matière. Le juge des élections, en fonction des circonstances propres à chaque espèce, veille en effet au principe d'égalité entre les candidats. Quant à l'interdiction du financement des campagnes électorales par les personnes morales posée par l'article L. 52-8 du code électoral, elle n'a pas en principe de conséquence sur l'exercice du droit d'expression des élus dans les bulletins d'information des collectivités territoriales. L'exercice de ce droit d'expression doit toutefois s'articuler avec les dispositions de cet article. Ainsi, pour éviter toute contestation, il est souhaitable que les élus concernés et le groupe auxquels ils appartiennent, veillent, en période électorale, à une certaine neutralité dans le choix des sujets abordés et s'abstiennent, dans le cadre des principes fixés par la jurisprudence, de prises de positions électoralistes, partisanes et polémiques. A défaut, le juge de l'élection ne manquerait de caractériser voire de sanctionner une méconnaissance de ces dispositions. Dans la mesure où les articles L. 3121-24-1 et L. 4132-23-1 du CGCT renvoient au règlement intérieur le soin de définir les modalités de l'exercice du droit d'expression des groupes d'élus, ce règlement peut fixer utilement, pour cette période, les règles applicables à l'expression des groupes d'élus, qu'ils appartiennent ou non à la majorité afin de soustraire des bulletins d'information générale tout ce qui pourrait nourrir la mise en valeur de candidats à une élection ou assurer une propagande en faveur de certaines candidatures ; il pourrait, le cas échéant, prévoir la suspension de toute diffusion de ces bulletins.

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