Question de M. ESTIER Claude (Paris - SOC) publiée le 14/11/2003

Question posée en séance publique le 13/11/2003

M. Claude Estier. Ma question s'adresse également à M. le ministre des affaires étrangères, mais elle porte sur un tout autre sujet.

Monsieur le ministre, vous êtes venu hier devant la commission des affaires étrangères et la délégation pour l'Union européenne. Nous avons apprécié les indications que vous nous avez données sur les travaux de la conférence intergouvernementale, qui restent très obscurs pour l'opinion publique. Nous sentons bien que les choses ne sont pas faciles, et vous-même avez déclaré, il y a quelques jours, que mieux vaudrait un échec que l'affadissement des positions élaborées par la Convention.

Cette situation mériterait pour le moins un ample débat au sein du Parlement, débat que nous réclamons d'ailleurs depuis plusieurs mois et qui serait conforme à la volonté exprimée par la Convention d'accroître le rôle des parlements nationaux.

Vous avez souhaité avec raison qu'un débat européen puisse avoir lieu avant la ratification de la future constitution. Mais ce ne serait qu'un débat sur les résultats de la conférence intergouvernementale, auxquels le Parlement et, à travers lui, les citoyens n'auraient nullement été associés, ce qui risque d'accroître encore leur désintérêt, pour ne pas dire plus, à l'égard de la construction européenne.

Je dirai la même chose au sujet de l'élargissement, dont on doit d'ailleurs déplorer qu'il ait lieu avant que l'on soit vraiment fixé sur ce que seront les futures institutions européennes, ce qui est une façon de mettre la charrue devant les boeufs.

Le commissaire européen Günter Verheugen, que nous avons entendu hier juste après vous, nous rappelait que cet élargissement sans précédent par le nombre des nouveaux adhérents est un événement de portée historique dans la mesure où il consacre l'unification de l'Europe. Je dis tout de suite que nous y sommes tout à fait favorables. Mais, avant qu'il devienne officiel le 1er mai 2004, cet élargissement de quinze à vingt-cinq, en attendant de passer un peu plus tard à vingt-sept et peut-être davantage, pose un certain nombre de problèmes dont certains sont lourds de conséquences et dont il serait normal de débattre sérieusement.

Or on veut contraindre le Parlement à une sorte de ratification en catimini. Ici, au Sénat, seulement deux heures de débat sont prévues, le 10 décembre, dans le cadre de l'examen d'une série de conventions internationales. Cela est sans rapport avec l'enjeu de l'événement, et, je le répète, cette frilosité n'est pas de nature à mobiliser les Français en faveur de cette grande idée qu'est l'Europe et à laquelle est lié l'avenir de la France.

J'insiste donc, monsieur le ministre, pour qu'un vrai débat européen ait lieu au Parlement dans les meilleurs délais.

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Réponse du Ministère des affaires étrangères publiée le 14/11/2003

Réponse apportée en séance publique le 13/11/2003

M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères. Monsieur le sénateur, vous avez raison, l'Europe mérite un grand débat, et il n'est pas question, pour les Français, de rester frileux quand il s'agit de l'Europe.

La réforme des institutions et l'élargissement sont des échéances capitales. Ces rendez-vous appellent à un rassemblement de tous les Français, en particulier de tous les responsables politiques, car il s'agit de définir ensemble l'Union européenne dans laquelle nous voulons vivre.

Dans cet esprit, la Convention, sous la conduite du président Giscard d'Estaing, a élaboré un projet de Constitution. Les parlements nationaux ont été associés à ses travaux, ce qui constitue une grande innovation par rapport à la pratique antérieure. Deux des éminents représentants de votre assemblée, MM. Hubert Haenel et Robert Badinter, ont été particulièrement actifs dans ces débats.

La volonté du Gouvernement d'associer étroitement le Parlement à ce processus constitutionnel ne s'arrête pas là. Le Président de la République vient de consulter tout les dirigeants des formations politiques représentées au Parlement. Le Premier ministre, je vous le confirme, monsieur le sénateur, vous recevra le 26 novembre avec les présidents des groupes politiques des assemblées.

Pour ma part, j'ai toujours été à la disposition de la représentation nationale, tout comme Noëlle Lenoir, pour vous informer de manière régulière sur l'évolution des travaux de la conférence intergouvernementale. Hier après-midi, vous l'avez rappelé, j'ai répondu aux questions des membres de la commission des affaires étrangères et de la délégation pour l'Union européenne.

Quant à l'élargissement, le projet de loi autorisant la ratification du traité d'adhésion sera soumis le 25 novembre à l'Assemblée nationale et le 10 décembre au Sénat, selon des modalités qui ont été fixées par la conférence des présidents, à laquelle vous participez vous-même, monsieur Estier.

Je vous indique que le Premier ministre ouvrira la discussion personnellement. Conformément à vos voeux, ce sera l'occasion d'un véritable débat où chacun pourra exprimer ses convictions sur l'Europe.

Sachez par ailleurs que tous les membres du Gouvernement seront toujours disponibles pour poursuivre le dialogue à propos de l'Europe, qui demeure, vous le savez, le grand défi de notre continent.

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