Question de M. MADRELLE Philippe (Gironde - SOC) publiée le 04/02/2004

M. Philippe Madrelle appelle l'attention de Mme la ministre déléguée à l'industrie sur les menaces qui pèsent sur de nombreux bureaux de poste en Gironde. Il souligne le caractère paradoxal d'une telle situation au moment où le Gouvernement prône le rôle du service public de proximité. La direction de La Poste affirme que " ses 100 000 facteurs et ses 17 000 points de contact contribuent chaque jour au maintien du lien social, à l'aménagement du territoire. " Toujours selon La Poste, " l'engagement sociétal est une valeur centrale du groupe La Poste qui s'engage à maintenir un lien social fort en milieu rural ". Compte tenu de l'importance du rôle de proximité joué par les bureaux de poste en zone rurale en faveur des personnes âgées et au moment où les collectivités locales et plus précisément les communes et les conseils généraux contribuent fortement à préserver ces services publics, il lui demande de bien vouloir mettre tout en oeuvre pour assurer le maintien de ces bureaux de poste.

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Réponse du Secrétariat d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation publiée le 03/03/2004

Réponse apportée en séance publique le 02/03/2004

M. Philippe Madrelle. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous avons tous été destinataires, à la fin du mois de janvier dernier, d'un courrier signé de M. Jean-Paul Bailly, président du groupe La Poste, qui débutait par cette phrase : « La poste est le service public le plus connu et le plus proche des Français ; il contribue au maintien du lien social, à l'aménagement du territoire et à la lutte contre l'exclusion bancaire dans notre pays. »

Face à cette définition quelque peu idéalisée, vous me permettrez, monsieur le secrétaire d'Etat, de me faire ce matin, à cette tribune, le porte-parole de très nombreux maires du département de la Gironde inquiets quant à l'avenir du bureau de poste de leur commune.

De nombreux écrits et rapports parlementaires ont contribué à sensibiliser l'opinion publique sur l'avenir de La Poste. Le récent contrat de plan 2003-2007 signé entre l'Etat et La Poste suscite beaucoup d'interrogations.

Si les 27 et 28 janvier dernier, lors de l'examen par la Haute Assemblée du projet de loi d'orientation postale, un consensus s'est dégagé sur la nécessité de moderniser et d'adapter La Poste aux évolutions des modes de vie, nous ne devons pas oublier que La Poste, qui représente un réseau de proximité sans équivalent en Europe, ne doit pas être soumise aux maîtres mots de rentabilité et de mise en concurrence. La Poste doit rester un service public de proximité, jouant un rôle essentiel dans l'aménagement du territoire de notre pays.

Il ne se passe pas un jour, monsieur le secrétaire d'Etat, sans que je recoive un courrier d'un maire me faisant part de son inquiétude face aux menaces de disparition du bureau de poste de sa commune. Le quotidien régional Sud-Ouest se fait d'ailleurs régulièrement l'écho de ces menaces de fermeture. Une telle entreprise de démantèlement systématique du service public apparaît pour le moins paradoxale au moment où le Gouvernement multiplie les effets d'annonce sur l'importance du service public et où les collectivités locales, en particulier les conseils généraux, s'efforcent de maintenir les services publics en zone rurale.

En Gironde, la commune de Lagorce vient d'être amputée de son bureau de poste. Des « modifications » - c'est un bel euphémisme - sont prévues à Marcenais, Aubie-et-Espessas, Vérac, Périssac, Lapouyade, Les Peintures, Abzac, Nérigean, Saint-Quentin-de-Baron, Gornac, Saint-Pierre-d'Aurillac, Barie, Morizes, Hure, Saint-Vincent-de-Paul, Carignan, Saint-Seurin-de-Cadourne, Vertheuil - et la liste n'est pas exhaustive. Ces transformations de bureaux de poste en « point poste », en « guichet de proximité » ou bien en « agence postale communale » ont de quoi laisser perplexe. Ne peut-on craindre que, sous couvert de nécessaire adaptabilité et de modernité, ces nouveaux concepts ne dissimulent et n'annoncent en fait la disparition pure et simple de ce service public de La Poste, auquel chaque citoyen, chaque habitant de la cité est naturellement attaché ?

Devra-t-on se résoudre, dans quelques années, à n'avoir qu'une seule boîte aux lettres par commune en zone rurale ?

Voilà autant de questions qui soulèvent la légitime colère de nombreux élus de la Gironde : ceux-ci n'admettent pas de voir leurs administrés privés d'un service public de premier plan. Une fois de plus, nous ne pouvons que constater que rentabilité et compétitivité ne riment pas avec solidarité et justice sociale.

Monsieur le secrétaire d'Etat, comme vous, nous sommes attachés à l'avenir de La Poste. Vous conviendrez, je pense, du bien-fondé de nos inquiétudes actuelles. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le sénateur, Mme Fontaine m'a prié de répondre à votre question sur la situation des bureaux de poste en Gironde.

Ce département, avec 394 points de contact, dont 86 agences postales, est le deuxième département français en nombre de points de contact postaux. Je note aussi que 10 nouveaux bureaux de poste ont été créés depuis 1996.

Au total, 308 points de contact sont situés en zone rurale et 14 en zone urbaine sensible.

Le Gouvernement n'a pas pour politique la fermeture des petits bureaux de poste pour des raisons économiques. Tout au contraire, nous avons cherché, au travers du contrat de plan, à trouver des mécanismes permettant, à la fois, de concilier l'ouverture à la concurrence avec l'aménagement du territoire et de renforcer la qualité de ce service public.

Le réseau postal doit évoluer et cette évolution doit concerner non pas seulement les zones rurales mais aussi les zones urbaines, notamment les banlieues.

Le Gouvernement est favorable à une présence postale sur l'ensemble du territoire. Etre en contact avec La Poste ne veut pas dire obligatoirement pouvoir aller dans un bureau de poste, lequel est souvent déjà implanté dans la commune ; cela signifie aussi pouvoir se rendre chez un commerçant qui offre presque tous les services d'un bureau de poste et qui est souvent plus pratique d'accès pour les citoyens.

Depuis le lancement de cette politique, le réseau de La Poste n'a pas été réduit ; il a au contraire un peu augmenté : 150 « points poste » nouveaux ont été ouverts chez des commerçants, essentiellement en zones rurales. Dans un tiers des cas, il s'agit de buralistes, car, vous le savez, nous faisons un effort pour que ce réseau de contact extrêmement diffusé sur notre territoire puisse s'ouvrir à de nouvelles activités. A ce jour, il n'existe aucun « point poste » en Gironde, mais les premiers devraient s'ouvrir à la fin du premier semestre de l'année 2004. Des réflexions sont menées pour faire évoluer 6 points de contact en « points poste », implantés dans des commerces de proximité.

Monsieur le sénateur, il est bien clair que le Gouvernement n'a pas pour objectif de réduire la présence postale. Il souhaite au contraire l'améliorer et la moderniser pour tenir compte des nouveaux besoins de nos concitoyens.

M. le président. La parole est à M. Philippe Madrelle.

M. Philippe Madrelle. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d'Etat, mais je vais vous faire une confidence.

A la Libération, élu maire dans un village rural, mon père créa une agence postale dans une épicerie. J'étais tout gosse, mais je revois la cabine téléphonique dans cette épicerie. J'ai la chance d'avoir encore mon père et j'ai évoqué cette époque avec lui hier au téléphone. Il m'a dit qu'en fait nous n'avancions pas sur la voie du progrès, mais qu'au contraire nous revenions soixante ans en arrière !

M. Raymond Courrière. Il ne faut pas tuer les buralistes pour autant !

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