Question de M. FOUCAUD Thierry (Seine-Maritime - CRC) publiée le 05/03/2004

M. Thierry Foucaud souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les préoccupations des communes à la suite des transferts de compétences concernant le recensement de la population et l'établissement des procurations. Les nouvelles modalités en oeuvre en matière de recensement génèrent une dépense sans rapport avec la compensation allouée par l'Etat. Quant à l'établissement des procurations, les instructions que les communes ont reçues pour la mise en oeuvre du décret d'application de l'ordonnance portant simplification en matière électorale ne font état d'aucune compensation, alors que ce sont des agents municipaux habilités par le juge d'instruction qui seraient chargés d'établir les volets de procuration. Aussi, il lui demande quelles mesures il envisage de prendre pour que ce type de transfert fasse l'objet d'une compensation intégrale.

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Réponse du Ministère délégué à l'intérieur publiée le 05/05/2004

Réponse apportée en séance publique le 04/05/2004

M. Thierry Foucaud. Je voudrais attirer l'attention sur les préoccupations des communes concernant le recensement de la population et l'établissement des procurations.

Si les nouvelles modalités du recensement mises en oeuvre par la loi relative à la démocratie de proximité vont dans le bon sens, on ne peut en dire autant de la manière dont est fixée la compensation financière allouée par l'État, telle qu'elle est prévue par un décret signé par l'ancien ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, M. Francis Mer. Cette compensation est en effet sans commune mesure avec la dépense supportée par les communes.

Ainsi, dans la commune dont je suis maire, la dépense occasionnée pour la réalisation du recensement s'élève à 2 800 euros : 2 400 euros au titre de la rémunération des agents recenseurs et des agents communaux mobilisés sur cette opération, 400 euros de dépenses annexes telles que mise à disposition d'un véhicule et d'un local, frais de communication, etc. Cette somme est à rapprocher de la dotation de l'État qui s'élève à 1 738 euros.

Il en va de même dans les autres communes qui ont établi le bilan et que j'ai interrogées : la dotation ne couvre pas plus de 60% du coût de l'opération.

L'économie ainsi réalisée chaque année par l'État au détriment de l'ensemble des communes est donc substantielle.

L'ensemble des maires demandent que soient compensées ces dépenses.

Concernant les procurations établies lors des élections, un décret d'application de l'ordonnance portant simplification en matière électorale prévoit qu'elles seront établies par des agents municipaux habilités par le juge d'instance.

Le Gouvernement souhaitait initialement appliquer cette mesure lors des dernières élections ; fort heureusement, il en a différé l'entrée en vigueur. Son projet souffrait d'une rare impréparation. Aujourd'hui, on nous dit que l'application de cette mesure est ajournée.

Voilà qui laisse un peu de temps pour mettre en place des compensations financières : il serait dommageable, voire scandaleux que les communes prennent, une fois de plus, en charge une mission de l'État sans disposer de moyens supplémentaires pour ce faire.

Ce gouvernement ne cesse de proclamer haut et fort que les transferts de compétences qu'il nous propose dans le cadre de la loi sur les responsabilités locales feront l'objet d'une compensation à l'euro près. Mais, quand on sait comment sont réalisées les évaluations, il est permis de dire que c'est un peu une mascarade ! Travaillant actuellement avec des conseillers généraux de mon département sur le dossier des routes, je sais de quoi il retourne !

Je m'appuierai néanmoins sur ce principe d'une compensation à l'euro près pour demander que ces transferts de charge, qu'on peut qualifier de rampants, vers les communes soient intégralement compensés.

Monsieur le ministre, ma question est simple : quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour que les transferts de ce type fassent l'objet d'une compensation intégrale ?

M. le président. La parole est à M. Jean-François Copé, ministre délégué.

M. Jean-François Copé, ministre délégué à l'intérieur. Monsieur le sénateur, vous avez appelé mon attention sur les conséquences du transfert de compétences en matière de recensement de la population.

Je voudrais vous apporter quelques précisions qui seront peut-être de nature à apaiser votre inquiétude, voire celle de maires que vous avez contactés à ce sujet.

Je rappelle que l'élaboration de cette nouvelle procédure a fait l'objet d'une très large concertation en amont, notamment via le Conseil national de l'information statistique.

Le recensement a toujours été effectué à frais partagés entre l'État et les communes. La loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, à laquelle vous avez fait allusion, a redéfini les responsabilités respectives des deux partenaires, mais je ne me souviens pas qu'elle ait tellement bouleversé le partage des tâches. Seul l'encadrement des agents recenseurs est désormais dévolu à la commune, l'État continuant, quant à lui, à financer l'ensemble des moyens de conception du recensement, l'impression des documents et l'exploitation des questionnaires.

Par ailleurs, le montant de la dotation forfaitaire de 17,5 millions d'euros versés aux communes pour l'enquête de 2004 sera supérieur à celui des remboursements effectués en 1999.

De plus, l'État consent des efforts importants pour la réussite de l'opération puisque l'INSEE a redéployé à cette fin une partie de ses effectifs : les coûts internes correspondants ont été évalués à environ 12 millions d'euros par an.

Ces nouvelles modalités du recensement vont porter au meilleur niveau notre information statistique, pour le bénéfice de l'ensemble des utilisateurs de données localisées, au premier rang desquelles figurent les collectivités locales.

Concernant le second point de votre question, monsieur le sénateur, à savoir l'établissement des procurations de vote, le problème ne se pose plus actuellement puisqu'il n'a pas été donné suite au projet de décret qui prévoyait de faire établir par les agents municipaux les procurations de vote. Le Conseil d'État avait en effet émis un certain nombre de réserves, qui portaient notamment sur le caractère opérationnel de cette réforme dans un délai très court.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a décidé de réétudier ce volet de la réforme de simplification des procurations.

Lors des élections de mars 2004, les électeurs ont continué de se rendre dans les tribunaux d'instance, les commissariats ou les brigades de gendarmerie pour se faire établir une procuration. La simplification de l'établissement des procurations que permet la suppression de la présentation des pièces justificatives, remplacées par une attestation sur l'honneur, est évidemment toujours effective.

Un certain nombre de problèmes ont été soulevés. Il faut donc y apporter des réponses concrètes et opérationnelles. Le Gouvernement y travaille.

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud.

M. Thierry Foucaud. Puisque M. le ministre a parlé de concertation, il serait bon qu'elle inclue les maires.

Il est faux de dire que, auparavant, les collectivités prenaient à leur charge une part importante des dépenses de recensement. Cette part n'excédait pas 10 %, contre 40 % environ aujourd'hui, comme je l'ai expliqué tout à l'heure.

Il serait bon de consulter les maires, quelle que soit leur tendance politique. Pour avoir interrogé un certain nombre d'entre eux dans mon département, je peux dire que tous reconnaissent que le recensement coûte plus cher qu'avant. C'est pourquoi je demande que la loi prévoie la compensation à l'euro près des dépenses de recensement.

Il va sans dire que la dérive des transferts de charges vers les collectivités se poursuit, et je répète que le Gouvernement doit consulter les maires sur ces questions du recensement et des procurations.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Je ne peux pas accepter ce procès d'intention. Le Gouvernement a toujours, dans le processus de décentralisation, privilégiée une absolue transparence quant aux charges transférées et à leur compensation financière.

Monsieur le sénateur, les temps ont changé ! La période est révolue qui voyait transférer certaines compétences sans que l'on se soucie de la manière dont les collectivités les financeraient : je pense en particulier à l'allocation personnalisée d'autonomie.

S'il y a lieu de veiller à ce que ces transferts soient compensés à l'euro près, cela sera fait, et en toute transparence.

J'ai évoqué tout à l'heure les redéploiements internes pris en charge par l'État, en particulier par les services en charge du recensement : ils doivent également faire l'objet d'un calcul précis. Nous pourrons suivre cela ensemble.

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