Question de M. GOULET Daniel (Orne - UMP) publiée le 09/02/2005

M. Daniel Goulet interroge M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche quant à la multiplication des entreprises privées qui dispensent des cours de soutien ou de rattrapage. Il ne s'agit pas des établissements qui traditionnellement préparent aux concours d'entrée des grandes écoles, mais d'entreprises qui s'adressent aux élèves du primaire et du secondaire. Il s'interroge sur le bien fondé des mesures d'accompagnement fiscales qui encouragent les parents à utiliser les services de ces entreprises, marquant ainsi une certaine défiance à l'égard du ministère de l'éducation et de ses enseignants et créant une inégalité entre les élèves.

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Réponse du Secrétariat d'Etat aux transports et à la mer publiée le 09/03/2005

Réponse apportée en séance publique le 08/03/2005

M. Daniel Goulet. A l'heure où s'engage la réforme de l'éducation nationale et alors qu'un grand journal du soir a publié de multiples articles et titré l'un d'eux L'échec scolaire, le défi de l'éducation, je tiens à vous dire ma perplexité devant le foisonnement des entreprises privées qui dispensent des cours de soutien ou de rattrapage.

Je parle ici non pas des établissements qui, traditionnellement, préparent aux concours d'entrée des grandes écoles, mais d'entreprises qui s'adressent aux élèves du primaire et du secondaire.

La société Acadomia compte 65 agences et 78 000 élèves, les cours Legendre 18 000, et je pourrais également citer les entreprises KeepSchool ou Top Profs. Le réseau compte plus de 22 000 professeurs.

Le coût d'inscription est de 70 euros environ, alors que l'heure de cours est facturée entre 22 euros et 42 euros.

Si je n'ai pas de remarques à faire sur le développement des entreprises privées, l'ancien directeur d'école que je suis s'interroge surtout sur le bien-fondé des mesures d'accompagnement fiscales qui encouragent les parents à utiliser les services de ces entreprises.

M. Gérard Delfau. Très bien !

M. Daniel Goulet. En effet, les parents peuvent déduire de leurs impôts sur le revenu 50 % des sommes engagées, soit 6 000 euros, auxquels s'ajoutent 750 euros par enfant à charge, dans la limite de 7 500 euros.

De telles dispositions ne sont-elles pas de nature à encourager les parents à user des services parascolaires et à marquer une certaine défiance à l'égard du ministère chargé de l'éducation nationale et de ses enseignants ?

Par ailleurs, alors que l'école constitue le creuset de l'égalité républicaine et de l'intégration - le récent débat sur la laïcité a été l'occasion de le rappeler avec force -, ne pensez-vous pas que de telles dispositions sont de nature à rompre les valeurs de gratuité auxquelles nous tenons et d'égalité d'enseignement entre les élèves ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Gérard Delfau. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. François Goulard, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Monsieur le sénateur, tout d'abord, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de François Fillon, qui est retenu. Il m'a demandé de vous communiquer les éléments de sa réponse.

Les prestations marchandes de soutien scolaire bénéficient du principe de la liberté du commerce, fondé sur les lois, fort anciennes, des 2 et 17 mars 1791.

Lorsqu'elles sont effectuées à domicile, ces prestations bénéficient effectivement, sans discrimination aucune, comme toute activité de service aux personnes exercée au domicile des particuliers, du chèque-emploi service. C'est la loi ! Il est à noter que ce dispositif, qui relève du ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, n'est pas nouveau : il existe depuis 1991 s'agissant des services émanant d'un particulier ou d'une association, et depuis 1996 pour ce qui est des services émanant d'une société.

Loin de se défausser sur les entreprises privées, l'institution scolaire n'est pas restée inactive en matière de soutien scolaire. Plusieurs dispositifs ont été mis en place au sein de l'école, afin d'aider tous les élèves qui rencontrent des difficultés et de les préparer à poursuivre leur scolarité dans les meilleures conditions possibles.

Ces mesures seront renforcées grâce à l'instauration d'un programme personnalisé de réussite scolaire ; c'est l'un des chapitres essentiels du projet de loi d'orientation pour l'avenir de l'école que le Sénat s'apprête à examiner. Le dispositif proposé permettra aux élèves des écoles et des collèges ayant des difficultés à maîtriser ce que l'on appelle le socle des connaissances indispensables d'obtenir un accompagnement de trois heures de soutien par semaine.

Monsieur le sénateur, que l'initiative privée propose une offre de soutien ou de rattrapage aux élèves en difficulté, c'est un fait et c'est une liberté. Mais parce qu'il revient à l'Etat républicain d'affirmer haut et fort le principe d'égalité des chances, l'école a le devoir de garantir à ces mêmes élèves les mesures d'accompagnement adéquates. C'est aujourd'hui une réalité, mais ce sera encore plus le cas demain !

M. Dominique Mortemousque. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Daniel Goulet.

M. Daniel Goulet. Monsieur le secrétaire d'Etat, votre réponse ne saurait me satisfaire. Comme je l'ai précisé, je ne suis pas contre les textes de loi qui autorisent certaines entreprises à concevoir des formules d'enseignement de rattrapage ou de soutien. Ma question visait à attirer l'attention du Gouvernement sur le fait que ces sociétés bénéficient de mesures fiscales, car je ne peux pas comprendre cet état de fait.

Comme vous pouvez l'imaginer, monsieur le secrétaire d'Etat, je donnerai une suite à cette question.

M. Gérard Delfau. Très bien !

M. Daniel Goulet. En outre, si le Gouvernement doit maintenir sa volonté de consentir des déductions fiscales, je compléterai mon intervention en vous indiquant ce qu'ont imaginé nos amis canadiens en la matière : ils ont octroyé des déductions fiscales pour encourager les séjours linguistiques. C'est une voie qui mérite d'être explorée.

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