Question de M. FISCHER Guy (Rhône - CRC) publiée le 21/04/2005

M. Guy Fischer appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les obstacles qui engendrent encore des injustices lors des demandes de révision d'une prestation compensatoire. Malgré les lois du 30 juin 2000 et du 26 mai 2004, la transmissibilité aux héritiers est maintenue, même si elle est limitée à la valeur de l'actif successoral. De même, le remariage, concubinage notoire ou PACS du créancier ne sont pas suffisamment pris en compte dans les demandes de révision, selon les juridictions. Il considère pourtant, eu égard à l'objet même de la prestation compensatoire, que l'engagement dans de nouveaux liens matrimoniaux ou affectifs est la manifestation explicite d'une volonté de rupture des liens avec le précédent mariage. C'est donc au nouveau ménage que doit revenir la charge du concubin ou du conjoint. Toute autre interprétation aboutirait à changer le sens même de la prestation compensatoire et à l'assimiler à un devoir de secours, ce que la loi du 26 mai 2004 tend pourtant expressément à supprimer. S'agissant de la transmissibilité aux héritiers, elle constitue une exception française. Elle aboutit à faire subsister le devoir de secours entre époux au-delà du mariage et même par-delà la mort à travers les héritiers. En cela, elle est tout à fait contradictoire avec les objectifs mêmes de la loi du 26 mai 2004, qui privilégie le règlement rapide des effets du divorce. Pour éviter certains conflits familiaux qui perdurent du fait de la prestation compensatoire, il devrait être possible de racheter celle-ci en prenant en compte les sommes déjà versées et en les ôtant de cette soulte. Un barème de calcul pourrait être proposé qui permette de connaître précisément ce montant de sorte que les débiteurs puissent se présenter devant un juge pour simplement entériner cette solution. Il lui demande les réponses qu'il entend réserver à ces propositions.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 31/05/2005

Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce, entrée en vigueur ce 1er janvier, améliore la situation des débiteurs de prestation compensatoire. En effet, sans remettre en cause les principes issus de la loi du 30 juin 2000, elle facilite la révision des rentes et met un terme à la transmissibilité de la prestation aux héritiers. Ainsi, le débiteur peut demander la révision, la suspension ou la suppression de la rente viagère ou temporaire en cas de changement important dans les ressources ou les besoins de l'une ou l'autre des parties. En outre, un nouveau cas de révision est spécifiquement ouvert aux débiteurs de rentes allouées sous l'empire de la loi du 11 juillet 1975, lorsque leur maintien en l'état procurerait au créancier un avantage manifestement excessif au regard des critères posés a l'article 276 du code civil, lesquels n'autorisent l'attribution d'une telle rente que lorsque l'âge ou l'état de santé du créancier ne lui permettent pas de subvenir seul à ses besoins. Par ailleurs, au décès du débiteur, la prestation compensatoire sera automatiquement convertie en capital et les héritiers ne seront tenus que dans les limites des forces de la succession, sauf si ces derniers décident d'un commun accord de maintenir les modalités de paiement qui incombaient à l'époux débiteur lors de son décès. Lorsque la prestation prenait la forme d'une rente, le montant du capital à substituer se fera selon les modalités fixées par le décret n° 2004-1157 du 29 octobre 2004, après déduction des pensions de réversion. Toutefois, la référence aux sommes déjà versées n'a pas été retenue, la substitution d'un capital à la rente ne pouvant, techniquement, que s'opérer à la date de l'événement y ouvrant droit, en fonction de l'espérance de vie du créancier. Cette opération étant tournée uniquement vers l'avenir, il n'y a donc pas lieu de prendre en compte les sommes déjà versées. En revanche, le législateur n'a pas souhaité qu'il soit automatiquement mis un terme à la rente en cas de remariage du créancier. En effet, le remariage, comme le concubinage notoire du créancier, n'est pas toujours synonyme d'amélioration de la situation personnelle du créancier. Cet élément nouveau doit dès lors être apprécié au vu des circonstances propres à chaque espèce, dans le cadre d'une demande en révision. Ce nouveau dispositif paraît de nature à concilier les attentes des débiteurs de prestation compensatoire avec la protection des intérêts des créanciers, et ne doit donc pas être remis en cause.

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