Question de M. MOULY Georges (Corrèze - RDSE) publiée le 16/02/2006

M. Georges Mouly appelle l'attention de M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille sur la nécessité de faire appel au savoir-faire des lycées professionnels - techniques et agricoles - pour permettre aux adolescents handicapés de seize ans de s'engager dans une nécessaire professionnalisation. Pour solliciter ces établissements, il convient de mettre en oeuvre une coordination servant de relais avec tous les milieux (ordinaire, adapté, protégé) pour préparer une orientation professionnelle fondée. Il s'agit de mettre en place un accompagnement médico-social dans l'optique d'une nécessaire intégration professionnelle et sociale, accompagnement légitime dans la continuité des prises en charge des ESSAD et des SESSAD (établissements et services d'éducation spéciale et de soins à domicile). Un dispositif d'accompagnement des jeunes après seize ans jusqu'au relais des dispositifs prévus pour les jeunes adultes est aujourd'hui une urgence alors que des jeunes de plus en plus nombreux intègrent les UPI (unités pédagogiques d'intégration).

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Réponse du Ministère délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille publiée le 08/03/2006

Réponse apportée en séance publique le 07/03/2006

M. le président. La parole est à M. Georges Mouly, auteur de la question n° 944, adressée à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Georges Mouly. Le développement des unités pédagogiques d'intégration, les UPI, s'inscrit dans une évolution logique générée par le droit à la scolarisation accordé aux enfants handicapés.

Dans mon département, comme ailleurs sans doute, après l'école primaire, conformément à l'objectif du projet personnalisé, l'adolescent poursuit sa scolarité au collège en bénéficiant, dans la plupart des situations, d'un accompagnement médico-social de type SESAD - service d'éducation spéciale ou de soins à domicile.

Jusqu'à l'âge de seize ans, l'adolescent peut donc poursuivre une scolarité en milieu ordinaire, tout en bénéficiant d'un accompagnement. Au-delà, la prise en charge au titre du SESAD pose problème, voire disparaît. Alors que les compétences des lycées professionnels et agricoles pourraient utilement être mises à contribution pour la préparation ou la consolidation d'un véritable projet professionnel, le relais n'est pas pris, faute de moyens, et la scolarisation redevient l'exception !

En Corrèze, un projet d'accompagnement spécifique des jeunes âgés de seize à vingt ans est prêt à être mis en oeuvre. Il s'agit d'un dispositif relais, qui a recueilli l'avis favorable unanime des partenaires institutionnels et associatifs corréziens du secteur du handicap, réunis, sur mon initiative, pour évoquer la problématique de la scolarisation après seize ans.

J'ai transmis un exemplaire de ce projet à vos collaborateurs, monsieur le ministre.

Ce service s'adresse aux jeunes âgés de seize à vingt ans, issus d'unités pédagogiques d'insertion, d'établissements régionaux d'enseignement adapté, les EREA, de sections d'enseignement général et professionnel adapté, les SEGPA, d'instituts médico-éducatifs, les IME, ou de SESAD, dont l'orientation professionnelle n'est pas déterminée et reste à vérifier ou à consolider dans le cadre scolaire du lycée professionnel.

Le projet peut être également l'apprentissage en alternance, mais le handicap nécessite un soutien et un accompagnement. Le projet de vie peut également prévoir une étape d'expérimentation en milieu professionnel, ordinaire, adapté ou protégé. Telles sont les possibilités.

Le potentiel de jeunes concernés est déjà important. Il est urgent, me semble-t-il, de proposer de véritables choix d'orientation aux adolescents de cette tranche d'âge et de prendre en compte leur nécessaire professionnalisation. Il convient pour cela de s'appuyer, entre autres, sur le savoir-faire des lycées professionnels et agricoles, par le biais d'un dispositif de coordination, prévoyant, d'une part, un accompagnement médico-social - il est toujours nécessaire -, et, d'autre part, une recherche vers le milieu professionnel, en utilisant toute la palette des solutions permettant une orientation professionnelle adaptée le plus possible aux capacités et aux souhaits du jeune qui prépare sa vie d'adulte.

Monsieur le ministre, dans son rapport intitulé « Favoriser l'insertion professionnelle des jeunes handicapés », le député Yvan Lachaud souligne la nécessité d'une orientation validée par une mise en situation professionnelle et privilégie l'alternance entre l'unité pédagogique d'intégration et le milieu professionnel.

Dans ce contexte, le projet relatif à l'accompagnement spécifique des jeunes de seize à vingt ans, qui a été présenté aux partenaires corréziens que j'ai précédemment mentionnés et qui a été transmis à vos services, me semble pertinent et conforme à l'esprit de la politique menée en faveur des handicapés, l'un des chantiers prioritaires du Président de la République. Il s'agit de scolariser l'enfant handicapé en vue de son insertion sociale et professionnelle, dans l'accompagnement et le respect de sa différence et de mettre en place des partenariats souples et évolutifs compatibles avec la multiplicité des situations et des projets.

J'en viens à ma question, monsieur le ministre : pourriez-vous contribuer activement à la mise en oeuvre d'un tel projet à bref délai ? A défaut, l'absence de financement contraindrait ce projet à rester sur le papier.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le sénateur, je reconnais l'expérience qui est la vôtre dans le domaine de la prise en charge des jeunes et des adultes handicapés et l'engagement du département de la Corrèze, dont la vocation médico-sociale, notamment en faveur des personnes handicapées, mérite d'être une fois de plus soulignée.

Le projet que vous avez élaboré et présenté à mes services a retenu toute mon attention. Après l'achèvement de la scolarité obligatoire, c'est-à-dire à partir de l'âge de seize ans, le jeune, qui a lâché la rampe de l'éducation nationale, qu'elle soit spéciale ou en milieu ordinaire, n'a pas encore pris celle de l'insertion professionnelle. Il est dans un entre-deux. Il nous faut donc régler cette difficulté particulière.

Vous avez rappelé l'importance des progrès que la grande loi du 11 février 2005, voulue par le Président de la République, a permis d'accomplir. Nous avons ainsi modifié notre approche de la prise en compte des besoins des personnes handicapées en reconnaissant le droit à la compensation du handicap.

Le droit à la compensation du handicap s'exerce à partir du projet de vie de chaque personne handicapée, lequel doit faire l'objet d'un examen avec une équipe pluridisciplinaire, dont les compétences sont mobilisées par les maisons départementales des personnes handicapées.

Monsieur le sénateur, lors de l'élaboration du projet de vie d'une personne handicapée, quel que soit son âge, la question de la scolarisation est au centre des préoccupations, en particulier quand il s'agit d'un adolescent. C'est l'un des volets du plan de compensation, qui doit obligatoirement être élaboré pour chaque personne handicapée, dans le cadre de l'exercice du droit à la compensation.

Le projet de scolarisation est également élaboré en lien avec les établissements d'enseignement. Les lycées professionnels, techniques et agricoles, font partie des possibilités d'orientation.

Dans l'hypothèse où l'accompagnement de l'élève handicapé est nécessaire, il peut être réalisé par un service d'éducation spéciale ou de soins à domicile. C'est là que l'on se heurte alors à la difficulté que vous avez décrite, monsieur le sénateur. Quand le jeune dépasse l'âge de seize ans, il ne relève plus, en principe, de ce type de service.

Je suis aujourd'hui tout à fait déterminé à apporter les souplesses nécessaires pour que les jeunes handicapés puissent continuer, s'ils poursuivent leur scolarité, à bénéficier des services d'éducation spéciale ou de soins à domicile de seize ans à vingt ans. Mais cela ne suffit pas.

Il faut aussi mieux réfléchir au passage de l'école vers le milieu professionnel. Un certain nombre de dispositifs d'accompagnement existent déjà, mais ils doivent être développés. Dans le secteur médico-social par exemple, les sections professionnelles des instituts médico-éducatifs ont pour mission d'assurer ce type d'accompagnement. Il existe aussi des centres d'apprentissage adapté, qui sont destinés aux élèves handicapés et doivent assurer une fonction de relais.

Enfin, s'agissant des jeunes adultes, âgés de plus de vingt ans, l'Association pour la gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés, l'AGEFIPH, propose des services gratuits de mise en relation avec les entreprises ayant passé une convention avec cet organisme.

Le député Yvan Lachaud, au terme d'une mission que je lui avais confiée, m'a remis son rapport voilà maintenant trois semaines. Ses propositions, qui font l'objet d'un examen très attentif, portent sur cet interstice entre l'école et le travail, pour lequel nous n'avons jusqu'à présent pas su mobiliser des moyens suffisants.

Sachez que je suis déterminé, sur la base de ces propositions, à apporter des réponses concrètes à ce problème et, pour commencer, à permettre à des projets tels que celui que vous avez mis au point avec le monde associatif et les institutions spécialisées de Corrèze de voir le jour. Je suis tout à fait disposé à en reparler avec vous.

M. le président. La parole est à M. Georges Mouly.

M. Georges Mouly. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, que je prendrai le temps d'étudier, car elle est détaillée, circonstanciée et suscite beaucoup d'espoir. Je n'ai jamais douté de votre volonté ni de celle du Gouvernement en la matière.

M. René-Pierre Signé. La Corrèze est toujours bien traitée !

M. le président. La Nièvre aussi, monsieur le sénateur-maire de Château-Chinon. En tout cas, vous l'avez été longtemps ! (Sourires.)

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