Question de M. DASSAULT Serge (Essonne - UMP) publiée le 30/03/2006

M. Serge Dassault attire l'attention de M. le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, sur les difficultés auxquelles sont confrontées les collectivités territoriales en matière de stationnement des gens du voyage. La loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 a imposé aux communes de plus de 5 000 habitants l'implantation sur leur territoire d'un terrain d'accueil pour les gens du voyage. Or, les maires des communes disposant d'aires d'accueil sont confrontés à des problèmes majeurs. Tout d'abord, du point de vue financier, il est difficile de répondre aux investissements financiers et matériels liés à l'implantation et à l'entretien d'une aire d'accueil des gens du voyage. Ainsi, la plupart des maires ne sont pas toujours en mesure d'assumer ni la mise en conformité des installations sanitaires, ni le coût lié aux procédures en cas d'infraction ou de stationnement sur des terrains privés. Sur le plan de l'application de la loi, on constate que les autorités représentatives de l'Etat ne parviennent pas le plus souvent à faire respecter les mesures de procédures d'expulsion en vigueur qui sont très lourdes. Enfin, il souhaite lui demander s'il ne serait pas souhaitable, eu égard à cet état des lieux, d'envisager le paiement d'une taxe journalière en cas de stationnement sur les aires d'accueil et la mise en place de mesures d'urgence d'expulsion en cas de non-respect du paiement de cette taxe et de toute dégradation.

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Réponse du Ministère délégué à l'aménagement du territoire publiée le 12/04/2006

Réponse apportée en séance publique le 11/04/2006

M. le président. La parole est à M. Serge Dassault, auteur de la question n° 1003, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

M. Serge Dassault. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur les difficultés auxquelles sont confrontées les collectivités territoriales en matière de stationnement des gens du voyage et sur les nuisances que ce stationnement provoque.

La loi du 5 juillet 2000, relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, impose aux communes de plus de 5 000 habitants l'implantation sur leur territoire d'un terrain d'accueil pour les gens du voyage.

Or, les maires des communes disposant d'aires d'accueil sont confrontés à des problèmes majeurs.

Tout d'abord, il leur est difficile de réaliser les investissements financiers et matériels, liés à l'implantation et à l'entretien d'une aire d'accueil pour les gens du voyage, qui d'ailleurs fait souvent l'objet d'actes de vandalisme. Ainsi, la plupart des maires, ne recevant que peu de subventions, ne sont pas toujours en mesure d'assumer la mise en conformité des installations sanitaires, ni leur entretien.

De plus, le stationnement illégal sur des terrains privés ou appartenant à la commune devrait être réglementé et les branchements sauvages sur les réseaux d'électricité et d'adduction d'eau, qui sont couramment pratiqués, devraient être formellement interdits. Quand le stationnement sauvage crée des nuisances reconnues, l'expulsion à la demande du maire devrait être immédiate, et ne pas nécessiter un référé toujours long à obtenir, avec l'obligation de régler les dégâts occasionnés.

De plus, compte tenu du luxe de certaines caravanes, l'administration fiscale devrait procéder à des vérifications approfondies. Des contrôles d'identité devraient être réalisés.

Je voudrais aussi vous proposer, monsieur le ministre, d'instituer le paiement d'une taxe journalière obligatoire sur les aires d'accueil. Il serait en effet normal que les gens du voyage participent aux frais de réalisation et d'entretien des installations qui leur sont destinées. Il n'y a aucune raison que les contribuables en supportent seuls les frais. Or, il n'existe aucune réglementation à ce sujet.

Je tiens également à vous faire part du problème lié aux aires de grand passage. Il s'agit d'aires plus grandes capables d'accueillir jusqu'à deux cents caravanes. Elles apportent aux riverains des nuisances considérables, parfois pendant des semaines. Une de ces aires, prévue dans l'Essonne près de la commune de Lisses, provoque la colère des agriculteurs.

Il s'agit d'un terrain de deux hectares à vocation agricole entouré de villages tranquilles. Si une telle aire de grand passage est prévue par la loi, je souhaite savoir si elle ne pourrait pas être installée sur un terrain non utilisé appartenant à l'État, par exemple sur l'emprise de l'aérodrome de Brétigny-sur-Orge.

Cette mesure satisferait les riverains qui ont déjà manifesté, à plusieurs reprises et assez violemment, contre ce projet en s'adressant à M. le préfet.

Tels sont les quelques sujets que je voulais vous soumettre, monsieur le ministre, à la demande de nombreux maires de mon département très inquiets de la présence des gens du voyage sur leur territoire et de leur comportement. Ils sont prêts, je le rappelle, à financer le stationnement de ces personnes, à leur faire payer les dégâts provoqués et les branchements sauvages, à procéder à un contrôle fiscal sur leur moyen de transport, à relever leur identité et à réglementer les aires de grand passage, pour éviter les nuisances que subissent les riverains.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage a modifié le dispositif départemental d'accueil de ces personnes, notamment en renforçant les obligations des communes en la matière.

À ce jour, les schémas départementaux ont été signés et publiés, mais les objectifs de création des aires sont loin d'être atteints, du fait des difficultés liées notamment à la mobilisation des terrains ou à la recherche de financements. C'est la raison pour laquelle la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a prorogé de deux ans le délai prévu pour la réalisation des aires.

En outre, je vous rappelle que les seules prescriptions techniques qui s'imposent pour la réalisation de ces aires sont celles qui figurent dans le décret du 29 juin 2001. Elles doivent permettre un « calibrage » des projets qui, tout en assurant le respect des normes d'hygiène et de confort, laisse aux collectivités la possibilité d'en maîtriser le coût.

Par ailleurs, l'article 1595 quater du code général des impôts précise qu'à compter du 1er janvier 2007 une taxe annuelle d'habitation, dont le tarif est fixé à vingt-cinq euros par mètre carré, sera due par les personnes dont l'habitat principal est constitué d'une résidence mobile terrestre. Par conséquent, monsieur le sénateur, votre demande tendant à ce que les services fiscaux se préoccupent de la question des gens du voyage est d'ores et déjà satisfaite.

Le produit de la taxe susvisée sera affecté à un fonds départemental d'aménagement, de maintenance et de gestion des aires d'accueil des gens du voyage, dont les recettes seront réparties chaque année par le préfet entre les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale, au prorata des dépenses qu'ils auront engagées à ce titre.

Enfin, je souhaite rappeler que l'institution d'une redevance journalière pour stationnement sur une aire d'accueil est d'ores et déjà non seulement possible mais très recommandée, cette disposition étant un élément de bonne gestion d'une aire aménagée. C'est au maire d'imposer cette taxe journalière dont les recettes lui permettront d'assurer l'entretien de l'aire d'accueil qu'il a décidé d'aménager sur le territoire de sa commune, voire de financer une partie des investissements adéquats.

S'agissant des procédures qui doivent être mises en oeuvre pour obtenir l'évacuation forcée des résidences mobiles installées sur un terrain privé de manière illicite, elles bénéficient des améliorations apportées par la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, dont j'étais rapporteur à l'Assemblée nationale. L'une des dispositions de ce texte concerne l'enlèvement du véhicule incriminé. Je puis vous assurer, monsieur le sénateur, que la crainte de voir sa voiture stationnée sans autorisation sur un terrain - voiture qui est souvent d'un certain prix - enlevée et placée en fourrière a un effet dissuasif sur son propriétaire.

Là où des plans départementaux ont été mis en place et où les maires s'y sont conformés, les forces de l'ordre ont pu intervenir dans un cadre administratif et de nombreux problèmes ont pu être réglés.

Outre l'incrimination, désormais prévue par l'article 322-4-1 du code pénal, les mesures susvisées autorisent le maire à mettre en oeuvre la procédure civile d'expulsion en saisissant directement le juge des référés, sans acquitter de frais de justice et sans recourir obligatoirement à un huissier pour constater une occupation illicite.

Elles ne peuvent cependant s'appliquer ni au profit des communes qui n'ont pas encore réalisé leurs aires d'accueil ni aux fins d'expulsion des personnes stationnant sur les aires aménagées.

Les conflits qui peuvent résulter du défaut de paiement des droits de stationnement ou des dégradations consécutives à l'occupation des aires relèvent d'une procédure de droit commun. Il convient, lorsque de tels faits sont constatés, de porter plainte devant le juge judiciaire pour faire prévaloir l'intérêt de la commune.

Pour faire face aux difficultés rencontrées par les communes, dont le Gouvernement est tout à fait conscient, le ministre d'État a engagé une réflexion sur la manière d'accélérer sensiblement la procédure d'évacuation forcée des résidences mobiles pour stationnement illicite, tout en respectant les garanties fondamentales. De façon à atteindre l'objectif fixé par le législateur d'équiper le territoire en aires d'accueil, il est prévu que les communes de plus de 5 000 habitants qui ne rempliraient toujours pas leurs obligations légales seraient exclues de ces facilités procédurales.

Une procédure accélérée pourrait de même être mise en place pour les séjours abusifs sur une aire d'accueil.

M. le président. La parole est à M. Serge Dassault.

M. Serge Dassault. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions. Je ne connaissais pas toutes les mesures que vous venez de décrire, en particulier la taxe annuelle d'habitation qui sera applicable après le 1er janvier 2007. Le recouvrement de cette redevance nécessitera peut-être l'aide de la police car il ne sera pas facile de le mener à bien.

Pour ce qui concerne l'aire de grand passage installée sur le terrain de Brétigny, pourriez-vous insister auprès de Mme la ministre de la défense pour qu'elle nous accorde une petite parcelle du vaste terrain peu utilisé dont dispose son ministère, ce qui satisferait les habitants de la commune de Lisses et des environs, très inquiets de voir s'installer deux cents caravanes pour une durée indéterminée ?

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