Question de M. RICHERT Philippe (Bas-Rhin - UMP) publiée le 15/11/2007

M. Philippe Richert attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur la possibilité offerte depuis la loi Perben n° 2006-728 portant réforme des successions et des libéralités, de signer des "pactes familiaux" pour les donations faites aux musées. Désormais, la valeur des oeuvres qui sera prise en considération sera celle du moment de la donation et non plus la valeur au moment du décès du donateur.
Cette disposition est essentielle pour les musées car la valeur des oeuvres d'art augmente presque toujours, ce qui l'entraîne à dépasser, parfois de façon considérable, le montant de la "quotité disponible" lors du décès du donateur.
Bien que cette mesure permette de réduire de manière significative le nombre des litiges avec les familles, elle ne les annule pas complètement en cas de divergences familiales lors de la donation.
Aussi il lui demande si le Gouvernement envisage de prendre des mesures pour autoriser les conservateurs territoriaux à émettre un avis négatif lors des dons en cas d'absence de consensus familial et éviter ainsi à certains musées de voir leur collection remise en cause lors du décès du donateur.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé de la fonction publique publiée le 16/01/2008

Réponse apportée en séance publique le 15/01/2008

M. le président. La parole est à M. Philippe Richert, auteur de la question n° 104, adressée à Mme la ministre de la culture et de la communication.

M. Philippe Richert. La loi Perben du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités a ouvert la possibilité de signer des « pactes familiaux » pour les donations faites aux musées.

Ces donations ont parfois fait exploser la valeur des collections, ce qui peut poser des problèmes au moment du décès du donateur. Désormais, sera prise en considération la valeur des oeuvres au moment de la donation et non plus à celui du décès du donateur.

Cette disposition est essentielle pour les musées, car la valeur des oeuvres d'art augmente presque toujours, dépassant, éventuellement dans des proportions considérables, le montant de la « quotité disponible » lors du décès du donateur, ce qui a pu entraîner des difficultés dans les relations entre les familles des donateurs et les musées, lesquels ont parfois dû rendre des oeuvres qui leur avaient été transmises.

Bien que cette mesure permette de réduire de manière significative le nombre des litiges avec les familles, elle ne les annule pas complètement en cas de divergences familiales lors de la donation.

Le Gouvernement envisage-t-il de prendre des mesures pour autoriser les conservateurs territoriaux à émettre un avis négatif en cas d'absence de consensus familial et épargner ainsi à certains musées de voir leur collection remise en cause lors du décès du donateur ? Il est toujours très difficile, pour un musée, de devoir se battre en justice lorsque certains enfants du donateur, par exemple, ne sont pas d'accord avec la donation qui avait été faite.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser Mme Christine Albanel, actuellement en voyage officiel avec le Président de la République.

Vous mettez à juste titre en valeur l'apport de la loi Perben du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités.

Pour les donations faites aux musées, cette loi ouvre la possibilité de « pactes successoraux ». Ceux-ci permettent aux héritiers réservataires présomptifs du donateur de renoncer par anticipation à exercer une action en réduction de la donation.

La donation demeurant évaluée au jour du décès du donateur, ce dispositif constitue un progrès juridique important. En effet, il offre une garantie aux musées, en permettant de prévenir des contentieux liés au fait que la valeur de la libéralité dépasse la quotité disponible en raison de l'augmentation de la valeur d'une oeuvre donnée.

À titre d'exemple, c'est à une difficulté de cette nature que le musée Mathurin Méheut, situé à Saint-Brieuc, a été confronté dans les années récentes.

Vous avez raison de le souligner, le conservateur doit aujourd'hui, même dans le contexte nouveau créé par la loi de 2006, s'assurer de l'accord des héritiers réservataires présomptifs sur le projet de don d'oeuvre qui lui serait généreusement proposé. Le conservateur a d'ores et déjà non seulement la faculté, mais le devoir d'émettre, auprès de la collectivité dont relève le musée de France qu'il gère, un avis motivé sur l'opportunité et la sécurité juridique du projet de donation.

Cet avis est bien évidemment majeur dans la procédure d'examen des dons, qui peut être assimilée à celle d'un projet d'acquisition. Tous les projets d'acquisition, à titre onéreux ou gratuit, des musées de France doivent faire l'objet d'un avis de la commission régionale ou interrégionale d'acquisition territorialement compétente, animée par le directeur régional des affaires culturelles au nom du ministère de la culture. Ces commissions d'acquisition ont été créées sur le fondement de la loi relative aux musées de France de 2002, codifiée au code du patrimoine et dont vous avez été, monsieur Richert, le rapporteur devant le Sénat.

Pour faire suite à votre demande, la direction des musées de France émettra la recommandation selon laquelle, lors de l'examen d'un projet de donation par le conservateur, puis par la commission régionale d'acquisition, la position des héritiers réservataires présomptifs sera systématiquement examinée. Il va de soi que l'avis du conservateur, puis de la commission, puisse être réservé, voire négatif si la position des héritiers n'est pas consensuelle.

M. le président. La parole est à M. Philippe Richert.

M. Philippe Richert. Je souhaite tout d'abord remercier M. le secrétaire d'État de sa réponse, qui démontre l'attention que le Gouvernement porte à ces situations parfois pénibles. Les relations entre les familles des donateurs et les musées ne sont jamais faciles, et il est toujours regrettable que les différends soient réglés par voie judiciaire.

C'est la raison pour laquelle, monsieur le secrétaire d'État, nous pourrions aller plus loin et préciser, à l'occasion d'un décret complémentaire pris en application de la loi de juin 2006, que le refus pourra être exprimé soit par la collectivité, soit par la commission, soit par le conservateur concerné. Cela éviterait, en cas de litige notoire, de devoir constater des années après que l'affaire doit être portée devant la justice.

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